Conseil d'État, 6ème / 1ère SSR, 19 juin 2015, 386291, Publié au recueil Lebon

  • Contrôle entier de l'erreur de droit·
  • 122-12 du code de l'environnement·
  • 122-5 du code de l'environnement)·
  • Contrôle du juge de cassation·
  • Référé de l'article l·
  • Voies de recours·
  • Erreur de droit·
  • Office du juge·
  • Dénaturation·
  • Bien-fondé

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le juge des référés, saisi de conclusions sur le fondement des dispositions de l’article L. 122-12 du code de l’environnement, doit en principe faire droit aux demandes de suspension des décisions d’approbation des plans, schémas, programmes ou autres documents de planification visés aux I et II de l’article L. 122-4 dès lors qu’il constate l’absence de l’évaluation environnementale, lorsqu’elle est requise. Il en va ainsi non seulement lorsque l’étude d’impact est systématiquement exigée par la réglementation en vigueur, mais également lorsqu’il a été décidé, à la suite d’un examen au cas par cas, de ne pas procéder à cette évaluation en raison du caractère mineur des modifications opérées. Il appartient au juge des référés d’apprécier si, en l’état de l’instruction et eu égard à la portée des modifications opérées, une évaluation environnementale était nécessaire.

Le juge de cassation contrôle entièrement l’application du droit par le juge du référé-évaluation environnementale institué par l’article L. 122-12 du code de l’environnement.

L’appréciation par laquelle le juge des référés de l’article L. 122-12 du code de l’environnement (référé évaluation environnementale) estime qu’une évaluation environnementale n’est pas nécessaire, en application de l’article L. 122-5 du code de l’environnement, préalablement à la modification mineure d’un document de planification est souveraine, sous réserve de dénaturation.

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La commune de Saint-Leu et M. B… A… ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis de suspendre l’exécution de l’arrêté du préfet de La Réunion du 26 août 2014 portant approbation de la mise à jour du schéma départemental des carrières de La Réunion. Par une ordonnance n° 1400912 du 21 novembre 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté leur demande.

Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 et 24 décembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune de Saint-Leu, représentée par son maire, et M. B… A…, demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement d’une somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code de l’environnement ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Stéphane Decubber, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la commune de Saint-Leu et autre et à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de la région de La Réunion ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 3 juin 2015, présentée par la région de La Réunion ;

1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 122-12 du code de l’environnement : « Si une requête déposée devant la juridiction administrative contre une décision d’approbation d’un plan, schéma, programme ou autre document de planification visé aux I et II de l’article L. 122-4 est fondée sur l’absence d’évaluation environnementale, le juge des référés, saisi d’une demande de suspension de la décision attaquée, y fait droit dès que cette absence est constatée. » ;

2. Considérant qu’il résulte des dispositions des articles L. 122-4, R. 122-17, L. 515-3 et R. 515-7 du code de l’environnement que les décisions d’approbation et de révision des schémas départementaux des carrières doivent être systématiquement précédées d’une évaluation environnementale ; qu’en vertu des dispositions de l’article L. 122-5 et du V de l’article R. 122-17 du même code, les décisions de modification de ces schémas qui présentent un caractère mineur peuvent être dispensées d’une nouvelle évaluation environnementale ou de son actualisation, après un examen au cas par cas de l’autorité administrative compétente ;

3. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis que la région de La Réunion a engagé en 2010 un projet de construction d’une liaison routière côtière de 12,5 km dite « Nouvelle route du littoral » ; que, pour la réalisation de ce chantier, la région a demandé au préfet de La Réunion une modification du schéma départemental des carrières, afin de pouvoir exploiter quatre nouveaux sites, dont celui de la « Ravine du trou » situé sur le territoire de la commune de Saint-Leu ; que, par un arrêté du 18 avril 2014, le préfet de La Réunion a décidé, après un examen au cas par cas en application des articles L. 122-5 et R. 122-17 du code de l’environnement, de ne pas soumettre à évaluation environnementale ce projet de modification ; que par un autre arrêté du 26 août 2014, il a approuvé cette modification ; que, par une ordonnance du 21 novembre 2014, contre laquelle la commune de Saint-Leu et M. A… se pourvoient en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Saint-Denis a rejeté leur demande tendant à ce que soit ordonnée, sur le fondement de l’article L. 122-12 du code de l’environnement, la suspension de l’arrêté du 26 août 2014 ;

Sur l’intervention de la région de La Réunion devant le Conseil d’Etat :

4. Considérant qu’est recevable à former une intervention, devant le juge du fond comme devant le juge de cassation, toute personne qui justifie d’un intérêt suffisant eu égard à la nature et à l’objet du litige ; qu’en l’espèce, la région de La Réunion, qui était à l’origine de la demande de modification du schéma départemental des carrières et a intérêt au maintien de l’ordonnance attaquée par laquelle le juge des référés a rejeté la demande de suspension formée par les requérants, justifie d’un intérêt de nature à la rendre recevable à intervenir en défense devant le Conseil d’Etat ;

Sur la recevabilité de l’intervention de la région de La Réunion devant le juge des référés :

5. Considérant qu’il résulte de ce qui vient d’être dit que la région de La Réunion justifiait d’un intérêt suffisant à intervenir en défense devant le juge des référés ; que, dès lors, c’est sans erreur de droit que l’ordonnance attaquée a admis son intervention ;

Sur les moyens relatifs à l’application de l’article L. 122-12 du code de l’environnement :

6. Considérant que le juge des référés, saisi de conclusions sur le fondement des dispositions de l’article L. 122-12 du code de l’environnement, doit en principe faire droit aux demandes de suspension des actes mentionnés au point 2, dès lors qu’il constate l’absence de l’évaluation environnementale, lorsqu’elle est requise ; qu’il en va ainsi non seulement lorsque l’étude d’impact est systématiquement exigée par la réglementation en vigueur, mais également lorsqu’il a été décidé, à la suite d’un examen au cas par cas, de ne pas procéder à cette évaluation en raison du caractère mineur des modifications opérées ; qu’il appartient au juge des référés, afin de déterminer si la demande qui lui est présentée sur ce fondement entre dans les prévisions de l’article L. 122-12 du code de l’environnement, d’apprécier si, en l’état de l’instruction et eu égard à la portée des modifications opérées, une évaluation environnementale était nécessaire ;

7. Considérant que, pour estimer qu’aucune évaluation environnementale n’était en l’espèce nécessaire et rejeter en conséquence les conclusions présentées au titre de l’article L. 122-12 du code de l’environnement, le juge des référés s’est fondé sur le caractère mineur des modifications opérées, compte tenu notamment de la superficie limitée des quatre nouveaux sites susceptibles d’être exploités par rapport à la superficie totale des sites exploitables, du fait que le volume global de matériaux extraits restera inchangé et de l’absence de remise en cause de l’économie générale du schéma départemental des carrières ; qu’en statuant ainsi, le juge des référés a, sans commettre d’erreur de droit, porté sur les faits qui lui étaient soumis une appréciation souveraine qui n’est pas entachée de dénaturation ;

Sur les moyens relatifs à l’application de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu’il ressort des pièces de la procédure que les requérants n’ont pas présenté de conclusions sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-1 du code de justice administrative ; qu’il résulte des énonciations mêmes de l’ordonnance attaquée que les motifs par lesquels le juge des référés a estimé que les conditions prévues par cet article n’étaient pas remplies présentent un caractère surabondant ; que, dès lors, les moyens du pourvoi dirigés contre ces motifs sont inopérants ;

9. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Leu et M. A… ne sont pas fondés à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant, d’une part, que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; que, dès lors, les conclusions présentées au titre de cet article par les requérants doivent être rejetées ;

11. Considérant, d’autre part, que la région de La Réunion, intervenante en défense, n’a pas la qualité de partie ; que, dès lors, les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions qu’elle présente au titre de cet article ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L’intervention de la région de La Réunion est admise.

Article 2 : Le pourvoi de la commune de Saint-Leu et de M. A… est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par la région de La Réunion au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Saint-Leu, à M. B… A…, à la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie et à la région de La Réunion.

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