Conseil d'État, 6ème - 1ère chambres réunies, 8 décembre 2017, 404391

  • Principe de non-régression (ii de l'art·
  • 110-1 du code de l'environnement)·
  • Nature et environnement·
  • 122-1 du même code·
  • Méconnaissance·
  • 3) espèce·
  • Évaluation environnementale·
  • Rubrique·
  • Tableau·
  • Équipement sportif

Résumé de la juridiction

) Une réglementation soumettant certains types de projets à l’obligation de réaliser une évaluation environnementale après un examen au cas par cas effectué par l’autorité environnementale alors qu’elles étaient auparavant au nombre de celles devant faire l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique ne méconnaît pas, par là-même, le principe de non-régression de la protection de l’environnement énoncé au II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement dès lors que, dans les deux cas, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement doivent faire l’objet, en application de l’article L. 122-1 du même code, d’une évaluation environnementale…. ,,2) En revanche, une réglementation exemptant de toute évaluation environnementale un type de projets antérieurement soumis à l’obligation d’évaluation environnementale après un examen au cas par cas n’est conforme au principe de non-régression de la protection de l’environnement que si ce type de projets, eu égard à sa nature, à ses dimensions et à sa localisation et compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, n’est pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine.,,,3) En vertu des seuils fixés aux a) et d) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs, ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau, susceptibles d’accueillir plus de 5 000 personnes sont soumis à évaluation environnementale après examen au cas par cas. Par suite, absence de méconnaissance du principe de non-régression, alors même qu’en l’état antérieur de la réglementation, ces catégories de projet faisaient l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique.,,,En vertu des seuils fixés aux a) et d) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise inférieure à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau et susceptibles d’accueillir un nombre de personnes égal ou inférieur à 5 000 sont exemptés systématiquement d’évaluation environnementale, alors que, sous l’empire de la réglementation en vigueur antérieurement au décret attaqué, ces projets étaient soumis à une évaluation environnementale au cas par cas pour ce qui concerne les l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise inférieure à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau et susceptibles d’accueillir plus de 1 000 personnes. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que des projets de ce type sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment, lorsqu’ils sont localisés dans ou à proximité de lieux où les sols, la faune ou la flore sont particulièrement vulnérables. Par suite, méconnaissance du principe de non-régression.

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 11 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la Fédération Allier Nature demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler pour excès de pouvoir les a) et d) de la rubrique 44 annexée à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 relatif à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – la directive n° 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011, modifiée par la directive n° 2014/52/UE du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 ;

 – le code de l’environnement ;

 – la loi n° 2015-990 du 6 août 2015;

 – l’ordonnance n° 2016-1058 du 3 août 2016 ;

 – le décret n° 2016-1110 du 11 août 2016 ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de Mme Laure Durand-Viel, auditeur,

— les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 15 novembre 2017, présentée par le ministre d’Etat, ministre de la transition écologique et solidaire ;

1. Considérant qu’en vertu de l’article L. 110-1 du code de l’environnement : « I. Les espaces, ressources et milieux naturels terrestres et marins, les sites, les paysages diurnes et nocturnes, la qualité de l’air, les êtres vivants et la biodiversité font partie du patrimoine commun de la nation. (…) / II. – Leur connaissance, leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état, leur gestion, la préservation de leur capacité à évoluer et la sauvegarde des services qu’ils fournissent sont d’intérêt général et concourent à l’objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s’inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : / (…) 9° Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment. (…) » ;

2. Considérant qu’aux termes du II de l’article L. 122-1 du code de l’environnement, issu de l’ordonnance du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l’évaluation environnementale des projets, plans et programmes : «  Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine font l’objet d’une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d’entre eux, après un examen au cas par cas effectué par l’autorité environnementale. / Pour la fixation de ces critères et seuils et pour la détermination des projets relevant d’un examen au cas par cas, il est tenu compte des données mentionnées à l’annexe III de la directive 2011/92/ UE modifiée du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement » ; qu’aux termes de l’article L. 122-3 du même code, issu de la même ordonnance : " I.-Un décret en Conseil d’Etat précise les modalités d’application de la présente section. / II.-Il fixe notamment : / 1° Les catégories de projets qui, en fonction des critères et des seuils déterminés en application de l’article L. 122-1 et, le cas échéant après un examen au cas par cas, font l’objet d’une évaluation environnementale ; (…) » ; que l’article R. 122-2 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 11 août 2016, dispose que : « I. – Les projets relevant d’une ou plusieurs rubriques énumérées dans le tableau annexé au présent article font l’objet d’une évaluation environnementale, de façon systématique ou après un examen au cas par cas, en application du II de l’article L. 122-1, en fonction des critères et des seuils précisés dans ce tableau. (…) » ; que la Fédération Allier Nature demande l’annulation pour excès de pouvoir des dispositions des a) et d) de la rubrique 44 du tableau annexé à cet article, issues du même décret, relatives respectivement aux « pistes permanentes de courses d’essai et de loisirs pour véhicules motorisés d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares » et aux « autres équipements sportifs ou de loisirs et aménagements associés susceptibles d’accueillir plus de 5 000 personnes » ;

3. Considérant qu’une réglementation soumettant certains types de projets à l’obligation de réaliser une évaluation environnementale après un examen au cas par cas effectué par l’autorité environnementale alors qu’ils étaient auparavant au nombre de ceux devant faire l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique ne méconnaît pas, par là-même, le principe de non-régression de la protection de l’environnement énoncé au II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement dès lors que, dans les deux cas, les projets susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement doivent faire l’objet, en application de l’article L. 122-1 du code de l’environnement, d’une évaluation environnementale ; qu’en revanche, une réglementation exemptant de toute évaluation environnementale un type de projets antérieurement soumis à l’obligation d’évaluation environnementale après un examen au cas par cas n’est conforme au principe de non-régression de la protection de l’environnement que si ce type de projets, eu égard à sa nature, à ses dimensions et à sa localisation et compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, n’est pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine ;

4. Considérant qu’en vertu des seuils fixés aux a) et d) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, dans leur rédaction issue du décret attaqué, l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs, ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau, susceptibles d’accueillir plus de 5 000 personnes sont soumis à évaluation environnementale après examen au cas par cas ; qu’il résulte du point précédent que ces dispositions ne méconnaissent pas le principe de non-régression de la protection de l’environnement énoncé au II de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, alors même qu’en l’état antérieur de la réglementation, ces catégories de projet faisaient l’objet d’une évaluation environnementale de façon systématique ; que ces dispositions ne méconnaissent pas non plus l’article L. 122-1 du code de l’environnement, qui permet au pouvoir règlementaire de choisir entre ces deux modalités de soumission à l’obligation d’effectuer une évaluation environnementale, ni, s’agissant de l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés, les objectifs fixés par la directive du 13 décembre 2011 précitée ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article 106 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dès lors que ces dispositions se bornent à habiliter le Gouvernement à prendre diverses mesures par ordonnances, en vertu desquelles il a édicté l’ordonnance dont est issu le II de l’article L. 122-1 du code de l’environnement ;

5. Considérant, en revanche, qu’en vertu des seuils fixés aux a) et d) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, dans leur rédaction issue du décret attaqué, l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise inférieure à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau et susceptibles d’accueillir un nombre de personnes égal ou inférieur à 5 000 sont exemptés systématiquement d’évaluation environnementale, alors que, sous l’empire de la réglementation en vigueur antérieurement au décret attaqué, ces projets étaient soumis à une évaluation environnementale au cas par cas pour ce qui concerne les l’aménagement de pistes permanentes de courses et d’essais pour véhicules motorisés d’une emprise inférieure à 4 hectares et la construction d’équipements sportifs et de loisirs ne figurant dans aucune autre rubrique du tableau et susceptibles d’accueillir plus de 1 000 personnes ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que des projets de ce type sont susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement, notamment, ainsi que le fait valoir la requérante, lorsqu’ils sont localisés dans ou à proximité de lieux où les sols, la faune ou la flore sont particulièrement vulnérables ; que la fédération requérante est, par suite, fondée à soutenir que ces dispositions méconnaissent le principe de non-régression de la protection de l’environnement, dans la mesure où elles exemptent systématiquement d’évaluation environnementale les projets susmentionnés ;

6. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la Fédération Allier Nature est fondée, sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête relatifs à ces dispositions, à demander l’annulation, au a) et au d) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, respectivement des mots « d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares » et « susceptibles d’accueillir plus de 5 000 personnes », qui sont divisibles des autres dispositions ;

7. Considérant qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la Fédération Allier Nature au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : Au a) de la rubrique 44 du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement, sont annulés les mots : « d’une emprise supérieure ou égale à 4 hectares » et au d) de la même rubrique, les mots : « susceptibles d’accueillir plus de 5 000 personnes ».

Article 2 : Le surplus des conclusions de la Fédération Allier Nature est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Fédération Allier Nature, au Premier ministre, au ministre d’Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur et à la ministre des armées.

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