Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 22 novembre 2019, 418645

  • B) après l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008·
  • Point de départ du délai de prescription en l'espèce·
  • Point de départ du délai de prescription·
  • Marchés et contrats administratifs·
  • Formation des contrats et marchés·
  • Pratiques anticoncurrentielles·
  • Prescription quinquennale (art·
  • 2) application en l'espèce·
  • 482-1 du code de commerce)·
  • Autorité de la concurrence

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de l’article 2224 du code civil, du II de l’article 26 de loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, de l’article 2270-1 du code civil, en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, des articles L. 481-1 et L. 482-1 du code de commerce et de l’article 12 de l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 que, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, les actions fondées sur la responsabilité quasi-délictuelle des auteurs de pratiques anticoncurrentielles se prescrivaient par dix ans à compter de la manifestation du dommage…. ,,SNCF ayant conclu en 1993 deux marchés portant sur des travaux de génie civil nécessaires à la réalisation de gares avec un groupement comprenant la société A.,,,Ouverture le 30 juin 1995 d’une information judiciaire à la suite de la découverte de l’existence d’un logiciel visant à favoriser des ententes entre entreprises sur les prix lors de la mise en concurrence de marchés de travaux publics en Ile-de-France.,,,Constitution de partie civile de la SNCF le 4 juillet 1997 dans le cadre de cette procédure…. ,,Décision du 21 mars 2006 du Conseil de la concurrence infligeant des amendes à plusieurs sociétés, dont la société A, au motif qu’elles avaient méconnu l’article L. 420-1 du code de commerce prohibant les ententes ayant pour objet de fausser le jeu de la concurrence.,,,Demande de la SNCF tendant à la condamnation de certaines de ces sociétés à réparer le préjudice subi du fait de ces pratiques anticoncurrentielles et du dol en résultant.,,,Pour juger que les conclusions présentées par la SNCF au titre de la responsabilité quasi-délictuelle étaient prescrites depuis 2007 par application du délai de prescription décennale résultant alors de l’article 2270-1 du code civil, la cour administrative d’appel a relevé qu’une information judiciaire avait été ouverte le 30 juin 1995, que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait, dans le cadre de l’instruction pénale, établi un rapport mettant en évidence des indices de pratiques anticoncurrentielles et que la presse s’était fait l’écho de ces pratiques dès 1995 et a retenu que le délai de la prescription avait commencé à courir au plus tard le 4 juillet 1997, date à laquelle la SNCF s’était constituée partie civile…. ,,Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les termes de la constitution de partie civile de la SNCF sur laquelle s’est fondée la cour administrative d’appel ne traduisaient que de simples soupçons et n’étaient pas de nature à établir que la SNCF aurait eu, à cette date, connaissance de manière suffisamment certaine de l’étendue des pratiques anticoncurrentielles dont elle a été victime de la part des titulaires des marchés. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au cas présent la SNCF n’a été en mesure de connaître de façon suffisamment certaine l’étendue de ces pratiques qu’au vu de la décision du 21 mars 2006 du Conseil de la concurrence.,,,Il résulte de ce qui précède qu’en se fondant sur les éléments qu’elle a pris en considération pour juger que la SNCF avait une connaissance suffisante de son dommage dès le 4 juillet 1997 et retenir en conséquence cette date comme point de départ de la prescription, initialement de dix ans, applicable à la demande en responsabilité quasi-délictuelle de la SNCF comme de la prescription de cinq ans, applicable à son autre demande, la cour administrative d’appel a dénaturé les pièces du dossier. ) a) Il résulte de l’article 2224 du code civil, du II de l’article 26 de loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, de l’article 2270-1 du code civil, en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, des articles L. 481-1 et L. 482-1 du code de commerce et de l’article 12 de l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 que, jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, les actions fondées sur la responsabilité quasi-délictuelle des auteurs de pratiques anticoncurrentielles se prescrivaient par dix ans à compter de la manifestation du dommage…. ,,b) Après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, la prescription de ces conclusions est régie par l’article 2224 du code civil…. ,,c) S’appliquent, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 9 mars 2017, l’article L. 482-1 du code de commerce.,,,2) SNCF ayant conclu en 1993 deux marchés portant sur des travaux de génie civil nécessaires à la réalisation de gares avec un groupement comprenant la société A.,,,Ouverture le 30 juin 1995 d’une information judiciaire à la suite de la découverte de l’existence d’un logiciel visant à favoriser des ententes entre entreprises sur les prix lors de la mise en concurrence de marchés de travaux publics en Ile-de-France…. ,,Constitution de partie civile de la SNCF le 4 juillet 1997 dans le cadre de cette procédure…. ,,Décision du 21 mars 2006 du Conseil de la concurrence infligeant des amendes à plusieurs sociétés, dont la société A, au motif qu’elles avaient méconnu l’article L. 420-1 du code de commerce prohibant les ententes ayant pour objet de fausser le jeu de la concurrence.,,,Demande de la SNCF tendant à la condamnation de certaines de ces sociétés à réparer le préjudice subi du fait de ces pratiques anticoncurrentielles et du dol en résultant.,,,Pour juger que les conclusions présentées par la SNCF au titre de la responsabilité quasi-délictuelle étaient prescrites depuis 2007 par application du délai de prescription décennale résultant alors de l’article 2270-1 du code civil, la cour administrative d’appel a relevé qu’une information judiciaire avait été ouverte le 30 juin 1995, que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait, dans le cadre de l’instruction pénale, établi un rapport mettant en évidence des indices de pratiques anticoncurrentielles et que la presse s’était fait l’écho de ces pratiques dès 1995 et a retenu que le délai de la prescription avait commencé à courir au plus tard le 4 juillet 1997, date à laquelle la SNCF s’était constituée partie civile…. ,,Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les termes de la constitution de partie civile de la SNCF sur laquelle s’est fondée la cour administrative d’appel ne traduisaient que de simples soupçons et n’étaient pas de nature à établir que la SNCF aurait eu, à cette date, connaissance de manière suffisamment certaine de l’étendue des pratiques anticoncurrentielles dont elle a été victime de la part des titulaires des marchés. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au cas présent la SNCF n’a été en mesure de connaître de façon suffisamment certaine l’étendue de ces pratiques qu’au vu de la décision du 21 mars 2006 du Conseil de la concurrence.,,,Il résulte de ce qui précède qu’en se fondant sur les éléments qu’elle a pris en considération pour juger que la SNCF avait une connaissance suffisante de son dommage dès le 4 juillet 1997 et retenir en conséquence cette date comme point de départ de la prescription, initialement de dix ans, applicable à la demande en responsabilité quasi-délictuelle de la SNCF comme de la prescription de cinq ans, applicable à son autre demande, la cour administrative d’appel a dénaturé les pièces du dossier.

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Sur la décision

Référence :
CE, 7-2 chr, 22 nov. 2019, n° 418645, Lebon T.
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 418645
Importance : Mentionné aux tables du recueil Lebon
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Paris, 28 décembre 2017, N° 16PA02417, 16PA02473, 16PA02476
Dispositif : Renvoi après cassation
Identifiant Légifrance : CETATEXT000039417337
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHR:2019:418645.20191122

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La SNCF, aux droits de laquelle est venu SNCF Mobilités, a, notamment, demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler ou de déclarer nul le marché correspondant au lot n° 37 B passé le 17 décembre 1993 pour la réalisation de travaux de génie civil de la gare Saint-Lazare Condorcet, avec un groupement dont les membres ont constitué une société en participation intégrant la société Bouygues, et de condamner les sociétés Bouygues et Bouygues Travaux Publics, au titre de la « répétition de l’indu », à lui verser la somme de 281 422 996,35 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation. SNCF Mobilités a également demandé au tribunal, à titre subsidiaire, de condamner les sociétés Bouygues et Bouygues Travaux Publics, au titre de leur responsabilité quasi-délictuelle, à lui verser la somme de 37 236 391 euros correspondant aux surcoûts de ce marché, liés à des manoeuvres anticoncurrentielles, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, ainsi que la somme de 33 952 271 euros, correspondant aux surcoûts, également liés à des manoeuvres anticoncurrentielles, sur le marché passé le 9 juillet 1993 pour le lot n° 34 B pour la réalisation de travaux de génie civil de la gare souterraine Nord-est dite « gare Magenta », assorties des intérêts au taux légal et de leur capitalisation. Par un jugement n° 1104965 du 31 mai 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté ces conclusions.

Par un arrêt n°s 16PA02417, 16PA02473, 16PA02476 du 29 décembre 2017, la cour administrative d’appel de Paris a, notamment, rejeté l’appel formé par SNCF Mobilités contre ce jugement.

Par un pourvoi, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 28 février et 5 novembre 2018 et le 19 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, SNCF Mobilités demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt en tant qu’il a rejeté son appel ;

2°) réglant dans cette mesure l’affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge des sociétés Bouygues, Bouygues Travaux Publics et Bouygues construction la somme de 8 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu :

 – le code civil ;

 – le code de commerce ;

 – le code des marchés publics ;

 – la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;

 – l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,

— les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au cabinet Briard, avocat de la SNCF Mobilités, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la société Bouygues, de la société Bouygues Travaux Publics et de la société Bouygues Construction, à la SCP Didier, Pinet, avocat de la société Vinci Construction, de la société Vinci Construction France, de la société Chantiers modernes Construction, venant aux droits de la société Sogea Travaux Publics Ile-de-France « TPI », et de la société Vinci, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société SPIE Opérations, de la société SPIE Opérations et de la société SPIE Batignolles TPCI, à Me Haas, avocat de la société Eiffage, de la société Eiffage Infrastructures, de la société Eiffage Construction, de la société Fougerolle et de la société Eiffage Genie Civil,

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SNCF a conclu en 1993 deux marchés portant sur des travaux de génie civil nécessaires à la réalisation de la gare de Magenta (lot n° 34 B du projet EOLE) et de la gare souterraine Saint-Lazare Condorcet à Paris (lot n° 37 B du projet EOLE). Le lot n° 37 B a été attribué à un groupement dont les membres ont constitué une société en participation comprenant la société Bouygues. Le 30 juin 1995, une information judiciaire a été ouverte à la suite de la découverte de l’existence d’un logiciel, conçu par un ancien cadre de la société Bouygues, visant à favoriser des ententes entre entreprises sur les prix lors de la mise en concurrence de marchés de travaux publics en Ile-de-France. Le 4 juillet 1997, la SNCF s’est constituée partie civile dans le cadre de cette procédure. Par une décision du 21 mars 2006, le Conseil de la concurrence a infligé des amendes à plusieurs sociétés, dont la société Bouygues, au motif qu’elles avaient méconnu les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce prohibant les ententes ayant pour objet de fausser le jeu de la concurrence.

2. Le 14 mars 2011, la SNCF, aux droits de laquelle est venu SNCF Mobilités, a saisi le tribunal administratif de Paris de conclusions tendant notamment à la condamnation de certaines de ces sociétés à réparer le préjudice subi du fait de ces pratiques anticoncurrentielles et du dol en résultant concernant les lots n°s 34 B et 37 B. Le 1er juillet 2014, elle a en outre demandé au tribunal d’annuler le marché correspondant au lot n° 37 B. Par un jugement du 31 mai 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande en tant qu’elle était dirigée contre les sociétés Bouygues et Bouygues Travaux Publics. SNCF Mobilités se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 29 décembre 2017 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté son appel tendant, à titre principal, à l’annulation du marché correspondant au lot n° 37 B ainsi qu’à la condamnation par voie de conséquence des sociétés Bouygues et Bouygues Travaux Publics à lui verser une indemnité de 281 422 996,35 euros et, à titre subsidiaire, à la condamnation de ces mêmes sociétés, sur le fondement de la responsabilité quasi-délictuelle, à lui verser les sommes de 33 952 271 euros et 37 236 391 euros correspondant aux surcoûts consécutifs à la constitution de ces ententes pour les lots n°s 34 B et 37 B.

3. Aux termes de l’article 2224 du même code, résultant de la loi du 17 juin 2008 : « Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer ». Aux termes du II de l’article 26 de cette loi : « Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compter du jour de l’entrée en vigueur de la présente loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »

4. Aux termes de l’article 2270-1 du code civil, en vigueur jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile : « Les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation ».

5. Par ailleurs, aux termes de l’article L. 481-1 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles : « Toute personne physique ou morale formant une entreprise (…) est responsable du dommage qu’elle a causé du fait de la commission d’une pratique anticoncurrentielle (…) ». Aux termes de l’article L. 482-1 du même code : " L’action en dommages et intérêts fondée sur l’article L. 481-1 se prescrit à l’expiration d’un délai de cinq ans. Ce délai commence à courir du jour où le demandeur a connu ou aurait dû connaître de façon cumulative :/ 1° Les actes ou faits imputés à l’une des personnes physiques ou morales mentionnées à l’article L. 481-1 et le fait qu’ils constituent une pratique anticoncurrentielle ;/ 2° Le fait que cette pratique lui cause un dommage ;/ 3° L’identité de l’un des auteurs de cette pratique (…) « . Aux termes de l’article 12 de cette ordonnance : » I. Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le lendemain de sa publication (…). II. Les dispositions de la présente ordonnance qui allongent la durée d’une prescription s’appliquent lorsque le délai de prescription n’était pas expiré à la date de son entrée en vigueur. Il est alors tenu compte du délai déjà écoulé ".

6. Il résulte de ces dispositions que jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, les actions fondées sur la responsabilité quasi-délictuelle des auteurs de pratiques anticoncurrentielles se prescrivaient par dix ans à compter de la manifestation du dommage. Après l’entrée en vigueur de cette loi, la prescription de ces conclusions est régie par les dispositions de l’article 2224 du code civil. S’appliquent, depuis l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 9 mars 2017, les dispositions de l’article L. 482-1 du code de commerce.

7. Pour juger que les conclusions, présentées par la SNCF au tribunal administratif de Paris le 14 mars 2011 au titre de la responsabilité quasi-délictuelle, étaient prescrites depuis 2007 par application du délai de prescription décennale résultant alors de l’article 2270-1 du code civil, la cour administrative d’appel de Paris a relevé qu’une information judiciaire avait été ouverte le 30 juin 1995, que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes avait, dans le cadre de l’instruction pénale, établi un rapport mettant en évidence des indices de pratiques anticoncurrentielles notamment sur les lots n°s 34 B et 37 B du projet EOLE et que la presse s’était fait l’écho de ces pratiques dès 1995 et a retenu que le délai de la prescription avait commencé à courir au plus tard le 4 juillet 1997, date à laquelle la SNCF s’était constituée partie civile. De même, pour rejeter comme prescrite la demande de la SNCF, présentée au tribunal administratif le 1er juillet 2014, relative à l’annulation du marché correspondant au lot n° 37 B et à la condamnation des sociétés Bouygues et Bouygues Travaux Publics à lui verser une indemnité en conséquence, la cour administrative d’appel de Paris a retenu que la SNCF avait nécessairement eu connaissance des pratiques anticoncurrentielles provoquant le dol dont elle s’estime victime au plus tard le 4 juillet 1997, date à laquelle elle s’était constituée partie civile à l’occasion de la procédure pénale visant ces pratiques, ce dont elle a déduit que la prescription était en tout état de cause acquise depuis le 4 juillet 2002.

8. Toutefois, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les termes de la constitution de partie civile de la SNCF sur laquelle s’est fondée la cour administrative d’appel de Paris ne traduisaient que de simples soupçons et n’étaient pas de nature à établir que la SNCF aurait eu, à cette date, connaissance de manière suffisamment certaine de l’étendue des pratiques anticoncurrentielles dont elle a été victime de la part des titulaires des marchés. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au cas présent la SNCF n’a été en mesure de connaître de façon suffisamment certaine l’étendue de ces pratiques qu’au vu de la décision du 21 mars 2006 du Conseil de la concurrence.

9. Il résulte de ce qui précède qu’en se fondant sur les éléments qu’elle a pris en considération pour juger que la SNCF avait une connaissance suffisante de son dommage dès le 4 juillet 1997 et retenir en conséquence cette date comme point de départ de la prescription, initialement de dix ans, applicable à la demande en responsabilité quasi-délictuelle de la SNCF comme de la prescription de cinq ans, applicable à son autre demande, la cour administrative d’appel a dénaturé les pièces du dossier.

10. Il s’ensuit, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que SNCF Mobilités est fondée à demander l’annulation de l’arrêt qu’elle attaque en tant qu’il a rejeté ses conclusions d’appel.

11. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de SNCF Mobilités, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement des sommes que demandent, à ce titre, les sociétés Bouygues, Bouygues Travaux Publics et Bouygues Construction. SNCF Mobilités n’ayant pas contesté en appel le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu’il mettait hors de cause la société Bouygues Construction, ses conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 à l’encontre de cette société, qui n’était pas partie en appel, doivent être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société Bouygues et de la société Bouygues Travaux Publics, le versement d’une somme de 2 000 euros chacune à SNCF Mobilités au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L’arrêt du 29 décembre 2017 de la cour administrative d’appel de Paris est annulé en tant qu’il rejette l’appel de SNCF Mobilités.

Article 2 : L’affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d’appel de Paris.

Article 3 : La société Bouygues et la société Bouygues Travaux Publics verseront à SNCF Mobilités la somme de 2 000 euros chacune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions présentées au même titre à l’encontre de la société Bouygues Construction et de SNCF Mobilités sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à SNCF Mobilités, ainsi qu’à la société Bouygues, à la société Eiffage, à la société Chantiers Modernes Construction, à la société SPIE Opérations, représentants uniques, pour l’ensemble des requérants.

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