Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 20 septembre 2019, 421317, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

La société BGC a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler le marché de construction d’un hall sportif attribué par la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes à la société Groupe 1000 Lorraine et de condamner la commune à lui payer la somme de 109 443 euros au titre du préjudice subi du fait de son éviction irrégulière de ce marché. Par un jugement n° 1402950 du 9 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes à verser à la société BGC la somme de 87 020 euros.

Par un arrêt n° 17NC00030 du 10 avril 2018, la cour administrative d’appel de Nancy a, sur appel de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes, annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par la société BGC devant le tribunal administratif de Strasbourg ainsi que ses conclusions d’appel incident.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 juin et 4 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la société BGC demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d’appel incident ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code des marchés publics ;

 – le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Yohann Bouquerel, maître des requêtes en service extraordinaire,

— les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la société BGC et à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes a lancé en 2013 une consultation en vue de la passation d’un marché en procédure adaptée portant sur la construction d’un hall sportif. Ce marché a été attribué à la société Groupe 1 000 Lorraine. La société BGC, dont l’offre a été classée en deuxième position, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d’une part, de prononcer l’annulation de ce marché, d’autre part, de condamner la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes à lui verser la somme de 109 443 euros, en réparation du préjudice résultant, selon elle, de son éviction irrégulière. Par un jugement du 9 novembre 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions à fin d’annulation comme irrecevables en raison de leur tardiveté, mais a condamné la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes à verser à la société BGC la somme de 87 020 euros. Par un arrêt du 10 avril 2018, la cour administrative d’appel de Nancy a, sur appel de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes, annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par la société BGC devant le tribunal administratif de Strasbourg.

2. Pour rejeter les conclusions indemnitaires de la société BGC, la cour administrative d’appel de Nancy s’est fondée sur la circonstance que celle-ci n’avait pas présenté d’offre de base, mais seulement des variantes, en méconnaissance des exigences résultant des documents de la consultation. Elle en a déduit qu’en raison de cette irrégularité, la commune était tenue d’éliminer son offre et que, par suite, alors même que cette offre avait été notée et classée, la société était dépourvue de toute chance d’être attributaire du marché et ne pouvait, dès lors, prétendre à aucune indemnisation.

3. En premier lieu, aux termes de l’article 50 du code des marchés publics, applicable au litige : « (…) II. Pour les marchés passés selon une procédure adaptée, lorsque le pouvoir adjudicateur se fonde sur plusieurs critères pour attribuer le marché, les candidats peuvent proposer des variantes sauf si le pouvoir adjudicateur a mentionné dans les documents de la consultation qu’il s’oppose à l’exercice de cette faculté. Le pouvoir adjudicateur peut mentionner dans les documents de la consultation les exigences minimales ainsi que les modalités de leur présentation. Dans ce cas, seules les variantes répondant à ces exigences minimales sont prises en considération. Toutefois, la mention des exigences minimales et des modalités de leur présentation peut être succincte. (…) ». Si le code des marchés publics ne subordonnait pas la présentation d’une variante à celle d’une offre de base dans le cadre d’un marché passé selon une procédure adaptée, il était toutefois loisible au pouvoir adjudicateur de prévoir une telle obligation.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le point 2.1 du règlement de la consultation du marché litigieux prévoit que le cahier des clauses techniques particulières « détaille les prestations envisagées et (que) les variantes techniques sont autorisées ». Aux termes du point 5.1 du même règlement, la notation du critère du prix doit s’effectuer " sur l’offre de base, puis sur l’offre de base + options, puis sur l’offre variantée (…) permettant ainsi d’établir trois classements d’offres « . Le même article indique que la commune se réserve le droit de » choisir soit l’offre de base, soit l’offre avec une ou plusieurs options, soit l’offre variantée intégrant la ou les options sans aucune contestation des entreprises ". En interprétant ces stipulations comme subordonnant la présentation de variantes à celle d’une offre de base, la cour administrative d’appel de Nancy n’a pas dénaturé les termes du règlement de consultation du marché.

5. En deuxième lieu, il ressort des énonciations de l’arrêt attaqué que, pour juger que la société BGC n’avait pas présenté d’offre de base, la cour administrative d’appel de Nancy s’est fondée sur le mémoire technique établi par la société elle-même ainsi que sur le rapport d’analyse des offres. En se fondant sur ces documents, dont elle a rappelé le contenu dans son arrêt, la cour n’a entaché celui-ci ni d’insuffisance de motivation, ni d’erreur de droit.

6. En troisième lieu, la cour administrative d’appel de Nancy n’a pas dénaturé les pièces du dossier en relevant que le mémoire technique proposé par la société BGC à la commune comportait, sous la rubrique « proposition architecturale des façades », trois solutions portant sur différents matériaux et coloris du bardage du hall sportif et se présentant elles-mêmes comme des variantes, sans mention de l’offre de base. En estimant, au vu de l’ensemble des éléments dont elle disposait, que la société n’avait ainsi présenté que des solutions modifiant les spécifications prévues dans la solution de base décrite dans les documents de la consultation, la cour n’a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la société BGC n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué.

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes, qui n’est pas la partie perdante, le versement d’une somme au titre des frais exposés par la société BGC et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société BGC une somme de 3 000 euros à verser à la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société BGC est rejeté.

Article 2 : La société BGC versera à la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société BGC et à la commune de Sainte-Marie-aux-Chênes.

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