Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 29 juin 2020, 433827

  • Preuve de la distribution de revenus aux associés·
  • Qualité de maître de l'affaire du contribuable·
  • Revenus des capitaux mobiliers et assimilables·
  • Imposition personnelle du beneficiaire·
  • Impôts sur les revenus et bénéfices·
  • Revenus et bénéfices imposables·
  • Notion de revenus distribués·
  • Circonstance inopérante·
  • Contributions et taxes·
  • Règles particulières

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

S’il n’a pas donné lieu, en l’absence de solde bénéficiaire, à l’établissement d’une cotisation d’impôt sur les sociétés, le rehaussement des résultats d’une société ne saurait par lui-même révéler l’existence de bénéfices ou produits non mis en réserve ou incorporés au capital, taxables entre les mains de leur bénéficiaire comme revenus distribués. Pour soumettre ces sommes à l’impôt sur le revenu sur le fondement du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts (CGI), il incombe à l’administration d’établir qu’elles ont été mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. La circonstance que le contribuable soit le maître de l’affaire est à cet égard sans incidence.

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

M. A… B… a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, ainsi que des pénalités correspondantes. Par une ordonnance n° 1408334 du 13 janvier 2015, le président de la 6e chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15MA01125 du 28 janvier 2016, la cour administrative d’appel de Marseille, sur appel de M. B…, a annulé cette ordonnance et renvoyé l’affaire devant le tribunal administratif de Marseille.

Par un jugement n° 1408334 du 6 octobre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B….

Par un arrêt n° 17MA04271 du 27 juin 2019, la cour administrative d’appel de Marseille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d’une somme de 9 199 euros, a rejeté l’appel formé par M. B… contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 août et 22 novembre 2019 ainsi que le 9 mars 2020, M. B… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’article 2 de cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Jean-Marc Vié, maître des requêtes,

— les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de M. B… ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’au terme d’une vérification de comptabilité, l’administration a réintégré dans les résultats de la société Le Coussinet Moderne, dont M. B… est associé, un passif injustifié de taxe sur la valeur ajoutée et un profit sur le Trésor résultant d’une fraude à cette même taxe. Ces rectifications n’ont cependant pas donné lieu à l’établissement d’une cotisation d’impôt sur les sociétés, le résultat rectifié de la société s’étant révélé nul au titre de l’exercice clos en 2009 et déficitaire au titre de l’exercice clos en 2010. En conséquence de ce contrôle, l’administration a assujetti M. B… à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010 procédant de l’imposition entre ses mains, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes réintégrées dans les résultats de la société Le Coussinet moderne. M. B… se pourvoit en cassation contre l’arrêt du 27 juin 2019 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d’un dégrèvement partiel des contributions sociales en litige intervenu en cours d’instance, a rejeté l’appel qu’il avait formé contre le jugement du 6 octobre 2017 du tribunal administratif de Marseille rejetant sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.

2. Aux termes de l’article 109 du code général des impôts : « 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (…) ».

3. S’il n’a pas donné lieu, en l’absence de solde bénéficiaire, à l’établissement d’une cotisation d’impôt sur les sociétés, le rehaussement des résultats d’une société ne saurait par lui-même révéler l’existence de bénéfices ou produits non mis en réserve ou incorporés au capital, taxables entre les mains de leur bénéficiaire comme revenus distribués. Pour soumettre à l’impôt sur le revenu de tels revenus sur le fondement du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts, il incombe à l’administration d’établir qu’ils ont été mis à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. La circonstance que le contribuable que l’administration entend imposer soit le maître de l’affaire est à cet égard sans incidence.

4. Pour juger que l’administration fiscale établissait l’existence de sommes mises à la disposition de M. B… par la société Le Coussinet moderne, taxables entre ses mains sur le fondement des dispositions précitées du 2° du 1 de l’article 109 du code général des impôts, la cour administrative d’appel de Marseille, après avoir relevé que le résultat de la société était demeuré déficitaire après redressement, s’est fondée, d’une part, sur ce que l’intéressé ne contestait pas les rehaussements apportés aux résultats de la société et, d’autre part, sur ce que, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, il devait être regardé comme le seul maître de l’affaire et, à ce titre, comme présumé avoir appréhendé les sommes correspondant à ces rehaussements. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 ci-dessus qu’en statuant ainsi, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit.

5. Il en résulte que M. B… est fondé, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, à demander l’annulation de l’article 2 de l’arrêt qu’il attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B… au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :

--------------

Article 1er : L’article 2 de l’arrêt du 27 juin 2019 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé.

Article 2 : L’affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d’appel de Marseille.

Article 3 : L’Etat versera à M. B… la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A… B… et au ministre de l’action et des comptes publics.

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