Conseil d'État, 7ème chambre, 17 mai 2021, 447064, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CE, 7e chs, 17 mai 2021, n° 447064
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 447064
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Guyane, 28 septembre 2020, N° 2000276
Dispositif : Rejet
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043508457
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2021:447064.20210517

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

M. F… A… a demandé au tribunal administratif de la Guyane l’annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 15 mars 2020 en vue de l’élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Maripasoula (Guyane).

Par un jugement n° 2000276 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa protestation.

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. A… demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler ce jugement ;

2°) d’annuler ces opérations électorales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

 – le code électoral ;

 – le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

— les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. A l’issue des opérations électorales organisées le 15 mars 2020 dans la commune de Maripasula (Guyane) en vue de la désignation des conseillers municipaux et communautaires, la liste « Ensemble continuons le développement » menée par M. C…, maire sortant, a obtenu 828 voix, soit 54,04 % des suffrages exprimés, tandis que la liste menée par M. A… a obtenu 483 voix, soit 31,52 % des suffrages exprimés, et celle conduite par M. E… D… a obtenu 221 voix, soit 14,42 % des suffrages exprimés. M. A… relève appel du jugement du 29 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa protestation tendant à l’annulation des élections municipales et communautaires.

Sur les griefs relatifs aux inscriptions sur la liste électorale :

2. Il n’appartient pas au juge de l’élection de statuer sur la régularité des inscriptions et des radiations sur les listes électorales mais seulement de rechercher si des manoeuvres ou des irrégularités dans l’établissement des listes électorales ont altéré la sincérité du scrutin.

3. D’une part, il résulte de l’instruction que la commission de contrôle prévue à l’article L. 19 du code électoral s’est réunie le 20 février 2020 et a constaté 502 inscriptions et 17 radiations sur la liste électorale depuis le 1er janvier 2019. Si M. A… soutient que 37 électeurs auraient été radiés de manière irrégulière, que 86 autres n’auraient pas pu s’inscrire malgré le dépôt d’une demande, que 122 recours administratifs contre des refus d’inscription n’auraient pas été examinés par la commission de contrôle, et que 128 électeurs inscrits ne résideraient pas sur le territoire de la commune, il n’apporte à l’appui de ces allégations aucun élément permettant d’établir des manoeuvres ou des irrégularités dans l’établissement des listes électorales.

4. D’autre part, il résulte de l’instruction que, compte tenu de nombre d’électeurs par rapport au nombre d’habitants et des caractéristiques démographiques de la commune de Maripasoula, l’augmentation du nombre d’électeurs inscrits sur la liste électorale l’année précédant le scrutin ne peut être regardée comme de nature à caractériser une manoeuvre frauduleuse.

Sur le grief tiré de l’inéligibilité de six colistiers de M. C… :

5. Si M. A… soutient que six colistiers de M. C… auraient été inscrits frauduleusement sur la liste électorale et seraient dès lors inéligibles, il n’apporte aucun élément à l’appui de cette allégation.

Sur les griefs relatifs à la campagne électorale :

6. En premier lieu, il ne résulte pas de l’instruction que les recrutements de nouveaux agents en contrat à durée déterminée ou en parcours emploi compétences auxquels la commune de Maripasoula a procédé entre novembre 2019 et janvier 2020 ne répondaient pas à ses besoins et auraient eu pour objectif d’influencer le scrutin.

7. En deuxième lieu, si M. A… soutient que M. C… aurait organisé des réunions et des tractations ainsi qu’une livraison de carburant et de boissons alcoolisées dans des villages amérindiens la veille du scrutin et que des agents municipaux auraient contribué à sa campagne électorale durant leurs heures de service, il n’apporte aucun élément à l’appui de ces allégations. Ces griefs ne peuvent, par suite, qu’être écartés.

8. En dernier lieu, M. A… se prévaut devant le Conseil d’Etat de la concomitance et de la similitude tant sur la forme que sur le fond des actions de communication institutionnelle lancées par la commune et des actions de propagande électorale mises en oeuvre par M. C… en méconnaissance de l’article L. 52-8 du code électoral. Ce grief qui est nouveau en appel et ne revêt pas un caractère d’ordre public, n’est pas recevable.

Sur les griefs relatifs aux opérations de vote :

9. En premier lieu, l’organisation de transports au profit d’électeurs se rendant dans les bureaux de vote n’est pas de nature, en l’absence de toute preuve que des pressions auraient été exercées sur eux, à fausser la sincérité du scrutin. Il s’ensuit que la seule circonstance, à la supposer établie, que des électeurs aient bénéficié d’un tel service grâce à des moyens de transport organisés par les membres de la liste de M. C… ne démontre pas que des pressions auraient été exercées sur ces électeurs.

10. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 62 du code électoral : " À son entrée dans la salle du scrutin, l’électeur, après avoir fait constater son identité suivant les règles et usages établis ou après avoir fait la preuve de son droit de voter par la production d’une décision du juge du tribunal judiciaire ordonnant son inscription ou d’un arrêt de la Cour de cassation annulant un jugement qui aurait prononcé sa radiation, prend, lui-même, une enveloppe. Sans quitter la salle du scrutin, il doit se rendre isolément dans la partie de la salle aménagée pour le soustraire aux regards pendant qu’il met son bulletin dans l’enveloppe ; il fait ensuite constater au président qu’il n’est porteur que d’une seule enveloppe ; le président le constate sans toucher l’enveloppe, que l’électeur introduit lui-même dans l’urne. / Dans chaque bureau de vote, il y a un isoloir par trois cents électeurs inscrits ou par fraction. Les isoloirs ne doivent pas être placés de façon à dissimuler au public les opérations électorales. / (…) ".

11. D’une part, s’il résulte de l’instruction que le nombre d’isoloirs du bureau n° 2 était inférieur à celui prescrit par l’article L. 62 du code électoral, il n’est pas démontré, ni même allégué, que cette circonstance aurait contraint des électeurs à voter sans passer par l’isoloir. D’autre part, il n’est pas établi que ces isoloirs ne permettaient pas aux électeurs de voter dans des conditions garantissant le secret du vote.

12. En troisième lieu, si M. A… soutient qu’une grande confusion régnait dans le bureau de vote n° 2, que le rôle des assesseurs n’était pas clairement défini, qu’il y avait plus de vingt électeurs en même temps, que des électeurs avaient déjà un bulletin avant de passer devant l’assesseur et que des numéros annotés sur du papier ont été distribués aux électeurs dans la file d’attente, il n’apporte aucun élément à l’appui de ses allégations. Si le procès-verbal des opérations électorales du bureau de vote n°1 indique que la directrice de campagne de M. C… a récupéré des enveloppes sur la table de décharge, cette seule circonstance n’est pas de nature à entacher d’irrégularité les opérations de vote.

13. En quatrième lieu, contrairement à ce que soutient M. A…, il ne résulte pas de l’instruction que le registre des émargements ne correspondait pas au registre des électeurs et qu’une soixante d’électeurs radiés des listes électorales aient néanmoins voté.

14. En cinquième lieu, d’une part, si M. A… fait valoir que des mandataires n’ont pas pu voter au motif que les procurations ne sont pas arrivées à temps à la mairie de Maripasoula et que des mandataires ont voté avec plusieurs procurations, il n’apporte aucun élément à l’appui de ces allégations. D’autre part, il résulte de l’instruction que, dans les trois bureaux de vote de la commune, huit procurations ont été rajoutées manuellement à la liste d’émargement principale alors qu’elles ne figuraient pas dans la liste des procurations. Ainsi, huit votes ont été irrégulièrement exprimés. Dès lors, il convient dans une telle circonstance, pour déterminer s’il y a lieu ou non d’annuler l’élection, de défalquer hypothétiquement ce suffrage du nombre total de voix obtenu par la liste proclamée vainqueur. Après cette déduction, la liste « Ensemble continuons le développement » conduite par M. C… obtiendrait 820 voix, soit un nombre qui demeure supérieur à la majorité absolue des suffrages exprimés qui est de 762 et permettant d’acquérir l’élection au premier tour du scrutin. Par suite, si des votes par procuration ont été irrégulièrement exprimés, cette circonstance n’a pas été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

15. En sixième lieu, si M. C… soutient que des colistiers de M. C… et des agents communaux auraient fait pression sur les électeurs, il n’apporte aucun élément à l’appui de ces allégations.

16. En dernier lieu, M. A… se prévaut devant le Conseil d’Etat des irrégularités qui résulteraient, de l’impossibilité matérielle de voter pour un nombre significatif d’électeurs en raison de l’épidémie de Covid-19. Ce grief, qui est nouveau en appel et ne revêt pas un caractère d’ordre public, n’est pas recevable.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa protestation tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé, le 15 mars 2020, pour l’élection des conseillers municipaux et communautaires de la commune de Maripasoula.

18. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. C… et autres au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. B… C… et autres au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. F… A…, à M. B… C…, à M. E… D… et au ministre de l’intérieur.

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