CEDH, Note d’information sur l'affaire 25444/94, 25 mars 1999, 25444/94

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Me Zia Oloumi · consultation.avocat.fr · 2 novembre 2019

Il est bon de savoir que l'instruction doit se faire pendant un « délai raisonnable » sinon vous pouvez mettre en jeu la responsabilité de l'Etat. Il conviendra pour se faire, d'assigner l'agent judiciaire de l'Etat dans le cadre d'une action en responsabilité sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire. Selon cet article, l'État est tenu de réparer le dommage causé, par faute lourde ou par déni de justice, en raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice. En France, la difficulté d'engager la responsabilité de l'État pour …

 

www.cabinetaci.com · 23 juin 2015

Droit de préparer sa défense Droit de préparer sa défense fait partie des prérogatives dont dispose chaque personne lors de son procès. L'article 6 § 1 de la CEDH énonce que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue « équitablement » et « publiquement ». En effet, les débats sont en principe publics. Le délibéré est toujours secret, tout comme la procédure d'enquête et d'instruction. Premièrement, le droit d'être informé des poursuites (le droit de préparer sa défense) Les personnes sont informées de l'engagement de poursuites judiciaires à leur encontre selon …

 
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Sur la décision

Référence :
CEDH, 25 mars 1999, n° 25444/94
Numéro(s) : 25444/94
Type de document : Note d'information
Niveau d’importance : Publiée au Recueil
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'Art. 6-1+6-3-a ; Violation de l'Art. 6-1+6-3-b ; Violation de l'Art. 6-1 ; Dommage matériel - réparation pécuniaire ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure nationale ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention
Identifiant HUDOC : 002-9401
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Texte intégral

Note d’information sur la jurisprudence de la Cour No 4

Mars 1999

Pélissier et Sassi c. France [GC] - 25444/94

Arrêt 25.3.1999 [GC]

Article 6

Article 6-3-a

Information sur la nature et la cause de l'accusation

Article 6-3-b

Facilités nécessaires

Temps nécessaire

Requalification de l’infraction par la cour d’appel sans avoir offert à la défense la possibilité de présenter convenablement ses arguments: violation

Article 6

Procédure pénale

Article 6-1

Délai raisonnable

Durée d'une procédure pénale: violation

En fait – Les requérants, François Pélissier et Philippe Sassi, ressortissants français, sont nés en 1944 et 1935 et résident à Sanary-sur-Mer et Cannes. A la suite d’une instruction pénale, les requérants furent renvoyés devant le tribunal correctionnel pour y être jugés de faits de banqueroute. En 1991, le tribunal correctionnel de Toulon les relaxa, aux motifs qu’ils ne pouvaient être considérés comme étant des gérants de droit ou de fait. La cour d’appel d’Aix-en-Provence, par un arrêt rendu le 26 novembre 1992, confirma l’impossibilité de retenir la qualité de gérant des requérants, mais décida de requalifier les faits en complicité de banqueroute. La cour d’appel condamna les requérants à une peine de dix-huit mois d’emprisonnement avec sursis, ainsi qu’à trente mille francs d’amende. La Cour de cassation rejeta le pourvoi des requérants le 14 février 1994.

Les requérants se plaignent de ce que la requalification des faits en complicité de banqueroute, requalification réalisée par la cour d’appel durant son délibéré et ayant entraîné leur condamnation, est intervenue sans débat contradictoire. Ils se plaignent également de la durée de la procédure. Ils invoquent l’article 6 §§ 1 et 3 a) et b) de la Convention. M. Pélissier se plaint également, au regard de l’article 6 § 1 de la Convention, de l’utilisation d’une attestation litigieuse par la cour d’appel.

En droit

Sur l’article 6 § 1 et 3 a) et b) quant à l’équité de la procédure : Concernant le grief tiré de l’utilisation d’une attestation litigieuse par la cour d’appel concernant le premier requérant, la Cour, après un rappel des principes fondamentaux qui se dégagent de sa jurisprudence, estime au vu de l’ensemble des éléments en sa possession que le document litigieux et son utilisation par la cour d’appel d’Aix-en-Provence n’ont pas été déterminants pour la déclaration de culpabilité de M. Pélissier et sa condamnation. Ainsi, la prise en compte du document contesté n’a pas eu pour effet de porter atteinte à l’équité de la procédure. Partant, l’utilisation du document litigieux par la cour d’appel n’a pas entraîné une violation de l’article 6 § 1 de la Convention. Restait à examiner la question de la requalification des faits par la cour d’appel d’Aix-en-Provence. Après avoir précisé la portée des dispositions de l’article 6 § 3 a) et b), la Cour a relevé que l’ordonnance de renvoi des requérants devant le tribunal correctionnel ne visait que le seul délit de banqueroute. Aucun élément ne permet de penser que la possibilité d’une complicité de banqueroute ait été réellement prise en compte au cours de l’instruction. Devant le tribunal correctionnel, les débats n’ont porté que sur le délit de banqueroute. Renvoyés devant la cour d’appel d’Aix-en-Provence, les requérants ne se virent à aucun moment reprocher de la part des autorités judiciaires une éventuelle complicité de banqueroute, que ce soit dans la citation à comparaître ou au cours des débats. Au vu des éléments de l’espèce, il n’est pas établi que les requérants auraient eu connaissance de la possibilité de requalification des faits en « complicité » de banqueroute par la cour d’appel et aucun des arguments avancés par le Gouvernement, pris ensemble ou isolément, ne pouvait suffire à garantir le respect des dispositions de l’article 6 § 3 a) de la Convention. Quant à la question de savoir si la notion de complicité en droit français impliquait, de la part des requérants, une connaissance suffisante de la possibilité de requalification du délit de banqueroute en complicité de banqueroute, la Cour constate que les dispositions des articles 59 et 60 du Code pénal applicable au moment des faits prévoyaient expressément que la complicité ne pouvait se trouver établie qu’avec la réunion d’un certain nombre d’éléments spécifiques, de conditions strictes et cumulatives. La Cour ne peut donc suivre le Gouvernement lorsqu’il soutient que la complicité ne constitue qu’un simple degré de participation à l’infraction principale. La Cour n’a pas à apprécier le bien-fondé des moyens de défense que les requérants auraient pu invoquer s’ils avaient eu la possibilité de débattre de la complicité de banqueroute. Elle relève simplement qu’il est plausible de soutenir que ces moyens auraient été différents de ceux choisis afin de contester l’action principale. Au demeurant, le principe d’interprétation stricte du droit pénal interdit d’éluder les éléments spécifiques de la complicité. La Cour considère également que la complicité ne constituait pas un élément intrinsèque de l’accusation initiale que les intéressés auraient connu depuis le début de la procédure. La Cour estime dès lors que la cour d’appel d’Aix-en-Provence devait, faisant usage de son droit incontesté de requalifier les faits dont elle était régulièrement saisie, donner la possibilité aux requérants d’exercer leurs droits de défense sur ce point d’une manière concrète et effective, et notamment en temps utile. En l’espèce la Cour ne relève aucun élément susceptible d’expliquer, par exemple, l’absence de renvoi de l’affaire pour rouvrir les débats ou, le cas échéant, de demande adressée aux requérants afin de recueillir leurs observations écrites en cours de délibéré. Il ressort au contraire du dossier que les requérants ne se sont pas vus offrir l’occasion d’organiser leur défense au regard de la nouvelle qualification, puisque seul l’arrêt de la cour d’appel leur a permis de connaître ce changement de qualification, ce qui était à l’évidence tardif. La Cour conclut qu’une atteinte a été portée au droit des requérants à être informés d’une manière détaillée de la nature et de la cause de l’accusation portée contre eux, ainsi qu’à leur droit à disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de leur défense. Il y a donc eu violation du paragraphe 3 a) et b) de l’article 6 de la Convention, combiné avec le paragraphe 1 du même article.

Conclusion : violation (unanimité).

Sur l’article 6 § 1 quant à la durée de la procédure : La Cour note que la période à prendre en considération pour apprécier la durée de la procédure au regard de l’exigence du « délai raisonnable » posée par l’article 6 § 1 a commencé avec l’inculpation de MM. Pélissier et Sassi, à savoir respectivement les 14 septembre 1984 et 12 juin 1985, et s’est terminée avec l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 14 février 1994. En conséquence, la procédure a duré neuf ans et cinq mois pour le premier requérant, huit ans, huit mois et deux jours pour le second. Le caractère raisonnable de la durée d’une procédure s’apprécie suivant les circonstances de la cause et eu égard aux critères consacrés par la jurisprudence de la Cour, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes. En l’espèce, la Cour estime que la complexité de l’affaire ne saurait justifier la durée de la procédure et elle ne relève aucun élément de nature à mettre en cause la responsabilité des requérants dans l’allongement de la procédure. La Cour estime en outre que l’instruction a connu des retards et des périodes de latence injustifiées, notamment au stade de l’instruction, qui sont imputables aux autorités nationales. Il y a donc eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention quant à la durée de la procédure.

Conclusion : violation (unanimité).

Sur l’application de l’article 41 : La Cour relève que la seule base à retenir pour l’octroi d’une satisfaction équitable réside en l’espèce dans le fait que les requérants n’ont pu jouir des garanties de l’article 6. Elle ne saurait certes spéculer sur ce qu’eût été l’issue du procès dans le cas contraire, mais n’estime pas déraisonnable de penser que les intéressés ont subi une perte de chances réelles. A quoi s’ajoute un préjudice moral auxquels les constats de violation figurant dans le présent arrêt ne suffisent pas à remédier. Statuant en équité, comme le veut l’article 41, elle leur alloue à chacun 90 000 FRF. Au titre des frais et dépens, la Cour, statuant en équité et sur la base des éléments en sa possession, accorde aux intéressés 70 000 FRF.

© Conseil de l’Europe/Cour européenne des droits de l’homme
Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

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