CEDH, Note d’information sur les affaires 24130/11 et 29758/11, 15 novembre 2016, 24130/11;29758/11

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Sur la décision

Référence :
CEDH, 15 nov. 2016, n° 24130/11;29758/11
Numéro(s) : 24130/11, 29758/11
Type de document : Note d'information
Niveau d’importance : Publiée au Recueil
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Non-violation de l'article 4 du Protocole n° 7 - Droit de ne pas être jugé ou puni deux fois-{général} (article 4 du Protocole n° 7 - Droit à ne pas être jugé ou puni deux fois ; Infraction pénale)
Identifiant HUDOC : 002-11404
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Texte intégral

Note d’information sur la jurisprudence de la Cour 201

Novembre 2016

A et B c. Norvège [GC] - 24130/11 et 29758/11

Arrêt 15.11.2016 [GC]

Article 4 du Protocole n° 7

Droit à ne pas être jugé ou puni deux fois

Procédures administrative et pénale parallèles au sujet de la même conduite : non-violation

En fait – Les requérants se virent infliger des majorations d’impôts à l’issue de procédures administratives pour défaut de mention de certains revenus dans leurs déclarations fiscales. Dans le cadre de procédures pénales parallèles, ils furent condamnés pour fraude fiscale à raison des mêmes omissions. Invoquant l'article 4 du Protocole n° 7, ils estiment avoir été poursuivis et punis deux fois pour les mêmes infractions.

Le 7 juillet 2015, une chambre de la Cour a décidé de se dessaisir en faveur de la Grande Chambre.

En droit – Article 4 du Protocole n° 7 : Cette disposition renferme trois garanties distinctes et dispose que nul i. ne peut être poursuivi, ii. jugé ou iii. puni deux fois pour la même infraction. La question de savoir si une procédure pénale revêt un caractère pénal au sens de l'article 4 du Protocole n° 7 s’apprécie sur la base des trois critères Engel élaborés pour les besoins de l’article 6 de la Convention. L’identité entre les infractions jugées dans le cadre de procédures distinctes dépend d’une analyse axée sur les faits plutôt que d’un examen formel consistant à comparer les éléments essentiels des infractions.

L’article 4 du Protocole no 7 a pour objet d’empêcher l’injustice que représenterait pour une personne le fait d’être poursuivie ou punie deux fois pour le même comportement délictueux. Il ne bannit pas les systèmes juridiques qui traitent de manière « intégrée » l’acte préjudiciable à la société en question, notamment en réprimant celui-ci dans le cadre de phases parallèles d’une réponse juridique conduites par des autorités différentes à des fins différentes. Il faut ménager un juste équilibre entre la préservation nécessaire des intérêts de l’individu protégés par le principe non bis in idem, d’une part, et la prise en compte de l’intérêt particulier pour la société de pouvoir réglementer de manière calibrée le domaine en question, d’autre part.

L'article 4 du Protocole n° 7 n’exclut pas la conduite de procédures mixtes, pourvu que certaines conditions soient remplies. En particulier, l’État défendeur doit établir de manière probante que les procédures mixtes en question étaient unies par un lien matériel et temporel suffisamment étroit. Cela signifie non seulement que les buts poursuivis et les moyens utilisés pour y parvenir doivent être en substance complémentaires et présenter un lien temporel, mais aussi que les éventuelles conséquences découlant d’une telle organisation du traitement juridique du comportement en question doivent être proportionnées et prévisibles pour le justiciable. Les éléments pertinents permettant de statuer sur l’existence d’un lien matériel suffisamment étroit sont notamment i) le point de savoir si les différentes procédures visent des buts complémentaires et concernent des intérêts juridiques différents heurtés par l’acte préjudiciable à la société en cause ; ii) le point de savoir si la mixité des procédures en question est une conséquence prévisible, aussi bien en droit qu’en pratique, du même comportement réprimé ; iii) le point de savoir si les procédures en question ont été conduites d’une manière qui évite autant que possible toute répétition dans le recueil et dans l’appréciation des éléments de preuve, notamment grâce à une interaction adéquate entre les diverses autorités compétentes, faisant apparaître que l’établissement des faits effectué dans l’une des procédures a été repris dans l’autre ; iv) et le point de savoir si la sanction imposée à l’issue de la procédure arrivée à son terme en premier a été prise en compte dans la procédure qui a pris fin en dernier, de manière à ne pas faire porter pour finir à l’intéressé un fardeau excessif. Le lien temporel doit être suffisamment étroit pour que le justiciable ne soit pas en proie à l’incertitude et à des lenteurs, et pour que les procédures ne s’étalent pas trop dans le temps. Plus le lien temporel est ténu, plus il faudra que l’État explique et justifie les lenteurs dont il pourrait être responsable dans la conduite des procédures.

Les autorités nationales compétentes ont jugé que le comportement des requérants appelait deux réponses : une sanction administrative et une sanction pénale. La sanction administrative que constitue la majoration d’impôt a une finalité générale de dissuasion, et elle vise aussi à compenser les ressources humaines et financières considérables consacrées par les autorités fiscales pour le compte de la collectivité aux contrôles et vérifications destinés à repérer les déclarations erronées. La sanction pénale poursuit des fins non seulement dissuasives mais aussi répressives s’agissant de la même omission préjudiciable pour la société, et comporte un élément additionnel de fraude délictueuse. Il est particulièrement important de constater que le juge interne a fixé les peines des requérants en tenant compte de ce qu’ils avaient déjà été lourdement sanctionnés par l’application de la majoration d’impôt. La conduite de procédures mixtes, avec une possibilité de cumul de différentes peines, était prévisible au vu des circonstances et les faits établis dans le cadre de l’une de ces procédures ont été repris dans l’autre.

Rien n’indique que les requérants aient subi un préjudice disproportionné ou une injustice et il existe un lien suffisamment étroit, aussi bien matériel que temporel, entre les deux procédures.

Conclusion : non-violation (seize voix contre une).

(Voir aussi Sergueï Zolotoukhine c. Russie [GC], 14939/03, 10 février 2009, Note d’information 116 ; Engel et autres c. Pays-Bas, 5100/71 et al., 8 juin 1976 ; R.T. c. Suisse (déc.), 31982/96, 30 mai 2000, Note d’information 18 ; Nilsson c. Suède, 73661/01, 13 décembre 2005, Note d’information 81 ; et Nykänen c. Finlande, 11828/11, 20 mai 2014)

© Conseil de l’Europe/Cour européenne des droits de l’homme
Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

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