CEDH, Note d’information sur l'affaire 10926/09, 14 janvier 2020, 10926/09

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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CEDH

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Sur la décision

Référence :
CEDH, 14 janv. 2020, n° 10926/09
Numéro(s) : 10926/09
Type de document : Note d'information
Organisation mentionnée :
  • Cour de justice de l'Union européenne
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Exception préliminaire jointe au fond et rejetée (Art. 35) Conditions de recevabilité ; (Art. 35-1) Épuisement des voies de recours internes ; Violation de l'article 8 - Droit au respect de la vie privée et familiale (Article 8 - Obligations positives ; Article 8-1 - Respect de la vie familiale) ; Dommage matériel - demande rejetée (Article 41 - Dommage matériel ; Satisfaction équitable) ; Préjudice moral - réparation (Article 41 - Préjudice moral ; Satisfaction équitable)
Identifiant HUDOC : 002-12713
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Texte intégral

Note d’information sur la jurisprudence de la Cour 236

Janvier 2020

Rinau c. Lituanie - 10926/09

Arrêt 14.1.2020 [Section II]

Article 8

Obligations positives

Article 8-1

Respect de la vie familiale

Interventions politiques et errements processuels pour empêcher le retour judiciairement ordonné d’une enfant illicitement retenue par son autre parent dans l’État défendeur : violation

En fait – Les deux requérants sont un ressortissant allemand (« le requérant ») et sa fille née en 2005 de mère lituanienne. En 2006, l’épouse du requérant quitta l’Allemagne pour emmener leur fille en vacances en Lituanie mais ne revint pas. S’ensuivirent de multiples procédures :

1)  En Allemagne : saisis par le requérant, les tribunaux lui accordèrent à titre provisoire l’autorité parentale exclusive et ordonnèrent le retour de l’enfant chez lui. En 2007, le divorce fut prononcé, avec attribution au requérant de la garde permanente de l’enfant.

2)  En Lituanie (où le litige prit une dimension politico-médiatique nationale) :

–  en octobre 2006, le requérant introduisit une action en retour sur le fondement de la Convention de La Haye sur l’enlèvement international d’enfants et du règlement « Bruxelles II bis » de l’Union européenne. En mars 2007, la cour d’appel ordonna le retour de l’enfant (décision immédiatement exécutoire et insusceptible de recours). En juin 2007 fut délivré un mandat d’exécution forcée ;

–  la mère et le procureur général cherchèrent plusieurs fois à faire rejuger la question du retour de l’enfant, par la voie de demandes en réouverture ou en cassation. En octobre 2007, le président de la Cour suprême prononça le sursis à l’exécution de la décision de retour ;

–  en avril 2008, la Cour suprême se tourna vers la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), ce qui retarda jusqu’en août 2008 sa décision (de rejet) sur les demandes de réouverture ou de cassation ;

–  en octobre 2008, alors que le retour de l’enfant était encore retardé, le requérant finit par aller sortir lui-même sa fille d’une garderie pour s’enfuir avec elle via la Lettonie (où il fut brièvement détenu, avant d’être autorisé à retourner en Allemagne) ; le parquet lituanien ouvrit alors contre lui une enquête pour enlèvement, mais classa l’affaire sans suite en novembre 2009.

En 2009, le requérant saisit la Cour européenne. La mère se réinstalla ensuite en Allemagne, et y obtint un droit de visite.

En droit – Article 8 : La Cour distingue deux périodes de développement de l’affaire.

a)  Jusqu’en juin 2007, bien que long – sept mois, au lieu de six semaines selon la Convention de La Haye –, le processus décisionnel ne présente pas d’aspects incompatibles avec l’article 8, si l’on tient compte des difficultés de l’affaire.

b)  Les développements ultérieurs amènent en revanche la Cour à la conclusion que, globalement, le comportement des autorités n’a pas été à la hauteur de leurs obligations positives.

Elle accorde également du poids à l’argument des requérants selon lequel l’harmonie familiale qu’a permise la modération de la mère après son retour en Allemagne n’aurait pas été possible à l’époque où le soutien constant des autorités lituaniennes allait jusqu’à l’induire en erreur quant à la possibilité de retenir l’enfant en Lituanie en dépit des décisions de justice et des obligations internationales de l’État.

i.  Réactions extrajudiciaires – Après que l’huissier eut entamé l’exécution de la décision ordonnant le retour, l’affaire a été marquée par une recrudescence de pressions publiques, politiques et institutionnelles (à l’exception notable du président de la République).

Outre une pétition publique et des agressions verbales contre le requérant (qualifié de « porc allemand » ou de « nazi ») ainsi que des menaces contre lui, son avocat ou l’huissier, la Cour est troublée par ce qui apparaît comme un ensemble de démarches officielles concertées visant à ce que l’enfant reste en Lituanie, avec notamment :

–  des membres du parlement contestant ouvertement la régularité des décisions de justice ; un ministre de la Justice entretenant l’espoir de la mère que l’affaire serait rejugée ;

–  des pressions contre l’huissier chargé de l’exécution des décisions de justice, ainsi que contre les services sociaux afin que ceux-ci reviennent sur leur avis (selon lequel un retour en Allemagne était dans l’intérêt de l’enfant) ;

–  une modification de la loi pour permettre à la fille du couple d’obtenir la nationalité lituanienne ;

–  un soutien juridique puis financier du gouvernement à la mère pour aider celle-ci à saisir la CJUE.

Ce faisceau d’initiatives, considérées dans leur globalité plutôt qu’isolément, dessine bien la preuve prima facie d’une politisation de l’affaire peu compatible avec l’équité requise du processus décisionnel dans l’exécution de la décision judiciaire de retour de l’enfant.

ii.  Vicissitudes procédurales – Bien que la remise en cause de la décision judiciaire de retour de l’enfant ne fût pas permise par le droit lituanien, elle a néanmoins été opérée par deux voies :

– d’une part, la réouverture de la procédure demandée par le procureur général, avec des arguments qui consistaient soit à remettre en question la chose déjà jugée, soit à faire profiter le parent enleveur du passage du temps, contredisant l’esprit de la Convention de La Haye ;

– d’autre part, l’admission d’un pourvoi en cassation, où la Cour suprême est de surcroît entrée dans l’examen de questions de fait qui sortaient des limites de sa compétence, limitée ici aux questions de droit.

Qui plus est, le président de la Cour suprême est personnellement intervenu pour permettre ce réexamen.

Les lenteurs consécutives ont encore été accrues par la décision de la Cour suprême de suspendre la procédure dans l’attente d’une réponse de la CJUE – quand bien même ce renvoi aurait été assorti d’une demande de traitement en urgence.

Cette intervention et ces vicissitudes procédurales étaient totalement contraires aux buts essentiels poursuivis aussi bien par la Convention de La Haye, par le règlement de l’Union européenne ou par l’article 8 de la Convention.

Quant au fait que le requérant ait fini par ramener sa fille en Allemagne d’une façon impromptue et drastique, la Cour n’estime pas nécessaire de se prononcer à ce sujet – tout en notant qu’il attendait depuis longtemps déjà et redoutait par ailleurs que de nouvelles lenteurs ne soient encore à venir au vu de l’intransigeance persistante de la mère.

Ainsi, le temps pris par les autorités lituaniennes pour rendre une décision définitive dans cette affaire n’était pas approprié à l’urgence de la situation.

Conclusion : violation (unanimité).

Article 41 : 30 000 EUR conjointement pour préjudice moral ; demande pour dommage matériel rejetée. La Cour accorde également 92 230 EUR pour frais et dépens eu égard à la complexité particulière de l’affaire, qui a nécessité le recours à des avocats multiples en droit international privé, droit de l’Union européenne, droit civil et pénal de Lituanie, qui ont représenté le requérant devant les juridictions civiles lituaniennes et la CJUE, ou assuré par la suite sa défense pénale.

© Conseil de l’Europe/Cour européenne des droits de l’homme
Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

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