CEDH, Note d’information sur l'affaire 885/12, 1er septembre 2022, 885/12

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Sur la décision

Référence :
CEDH, 1er sept. 2022, n° 885/12
Numéro(s) : 885/12
Type de document : Note d'information
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'article 1 du Protocole n° 1 - Protection de la propriété (Article 1 du Protocole n° 1 - Obligations positives ; Article 1 al. 1 du Protocole n° 1 - Respect des biens) ; Dommage matériel et préjudice moral - réparation (Article 41 - Préjudice moral ; Dommage matériel ; Satisfaction équitable)
Identifiant HUDOC : 002-13750
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Texte intégral

Note d’information sur la jurisprudence de la Cour 266

Septembre 2022

Safarov c. Azerbaïdjan - 885/12

Arrêt 1.9.2022 [Section V]

Article 1 du Protocole n° 1

Obligations positives

Article 1 al. 1 du Protocole n° 1

Respect des biens

Rejet non motivé d’une action en violation du droit d’auteur dirigée contre une partie privée qui avait publié sur Internet, sans autorisation et sans s’acquitter des redevances d’auteur, une version numérique de l’ouvrage du requérant : violation

En fait – Le requérant est l’auteur d’un livre qu’une organisation non gouvernementale (la défenderesse) publia sur son site Internet. L’ouvrage a depuis lors été retiré du site en question. Le requérant saisit les juridictions internes d’une action civile dans laquelle, invoquant la législation interne sur le droit d’auteur, il reprochait à la défenderesse d’avoir reproduit son livre au format numérique et de l’avoir publié sur son site Internet sans lui en avoir demandé l’autorisation ni lui avoir versé de redevances d’auteur. N’ayant pas obtenu gain de cause, il forma des recours jusque devant la Cour suprême, sans succès.

En droit – Article 1 du Protocole no 1 :

La reproduction du livre du requérant et sa publication non autorisée en ligne ont porté atteinte à son droit au respect de ses biens. Le litige dont il est question en l’espèce est certes survenu entre des parties privées, mais l’État avait l’obligation positive de prendre les mesures nécessaires pour protéger le droit de chacun à la propriété.

Le requérant ne reprochait pas au droit interne de ne pas protéger suffisamment les droits des auteurs : il se plaignait que les juridictions internes avaient appliqué la législation existante de manière illégale et arbitraire dans son affaire. Le droit interne exigeait en principe que toute personne souhaitant utiliser l’œuvre d’un auteur obtînt l’autorisation de ce dernier et lui versât des redevances d’auteur. Les juridictions internes ont néanmoins jugé les actions de la défenderesse justifiées, principalement au regard de plusieurs dispositions de la législation interne qui prévoyaient des exceptions à cette règle générale, à savoir :

–  La reproduction à des fins exclusivement personnelles –  La défenderesse était pourtant une personne morale et elle n’avait pas utilisé le livre du requérant à des fins exclusivement personnelles mais l’avait mis à la disposition d’un nombre illimité de lecteurs en ligne. En outre, cette exception prévue par le droit interne ne s’appliquait pas à la reproduction intégrale d’ouvrages, et les juridictions internes n’ont pas établi que le livre du requérant n’avait pas été reproduit dans son intégralité.

–  La reproduction par des archives et des établissements d’enseignement dans des cas particuliers – La Cour suprême n’a pas répondu à l’argument du requérant selon lequel la défenderesse ne relevait d’aucune des catégories susmentionnées : elle s’est contentée de noter que la requérante avait publié le livre du requérant sous l’onglet « Bibliothèque » de son site Internet dans le but de fournir des informations à propos de l’histoire du pays. Le Gouvernement a de même soutenu que les actes de la défenderesse n’avaient pas de visée commerciale. Si l’absence d’une telle visée était l’une des conditions requises pour que la disposition du droit interne en question trouvât à s’appliquer, il ne s’agissait toutefois pas du seul élément qui devait être pris en compte. Il appartenait aux juridictions internes d’interpréter cette disposition pour déterminer si la notion de « bibliothèques » qui y figurait englobait les services en ligne proposés par la défenderesse. Cependant, même à supposer que ces services pussent être considérés comme relevant de cette notion, les juridictions saisies n’ont pas précisé lequel des motifs prévus par la disposition en question justifiait la reproduction non autorisée du livre. La défenderesse a rendu le livre du requérant consultable en ligne gratuitement, le mettant ainsi pratiquement à la disposition du monde entier, et non uniquement des personnes qui se rendraient physiquement dans une bibliothèque donnée ; il aurait donc fallu que les juridictions internes justifient au moyen d’un raisonnement détaillé l’application de cette disposition du droit interne.

–  L’épuisement du droit de distribution – La règle de l’épuisement du droit de distribution concernait les exemplaires d’ouvrages publiés légalement en une quantité limitée qui étaient mis en circulation par leur vente en tant que biens matériels. Certes, le requérant avait publié son livre, dont des exemplaires matériels étaient disponibles sur le marché du livre, mais rien n’indique qu’il eût autorisé sa reproduction et sa communication au public sous un format numérique. La Cour suprême n’a pas expliqué pourquoi elle considérait que cette disposition du droit interne était applicable dans les circonstances de la cause.

Dans l’ensemble, la Cour juge que les juridictions internes n’ont pas présenté de motifs à même de justifier l’application à la situation en cause des exceptions susmentionnées prévues par le droit interne. Elle conclut donc que l’État défendeur ne s’est pas acquitté de son obligation positive.

Conclusion : violation (unanimité).

Article 41 : 5 000 EUR pour dommage matériel et préjudice moral.

© Conseil de l’Europe/Cour européenne des droits de l’homme
Rédigé par le greffe, ce résumé ne lie pas la Cour.

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