CEDH, GÜNDÜZ c. TURQUIE, 6 avril 2021, 51522/20

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, 6 avr. 2021, n° 51522/20
Numéro(s) : 51522/20
Type de document : Affaire communiquée
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Affaire communiquée
Identifiant HUDOC : 001-209804
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Texte intégral

 
Publié le 26 avril 2021

DEUXIÈME SECTION

Requête no 51522/20
Feryal Delfin GÜNDÜZ
contre la Turquie
introduite le 5 novembre 2020
communiquée le 6 avril 2021

OBJET DE L’AFFAIRE

La requête concerne la procédure pénale diligentée contre la requérante, enseignante-chercheuse dans une université turque, du chef de propagande en faveur d’une organisation terroriste pour avoir co-signé, avec plus de mille universitaires et intellectuels, une pétition, publiée le 11 janvier 2016 et intitulée « Nous ne serons pas les complices de ce crime ». Cette pétition condamnait les conditions entourant les opérations menées par les forces armées turques au sud-est du pays contre les membres du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, organisation illégale armée) barricadés dans les villes. Elle appelait aussi les autorités à mettre fin aux massacres, exils délibérés, couvre-feux et violations des droits de l’homme qui, selon eux, auraient lieu dans la région et à s’engager dans des négociations de paix.

Par un acte d’accusation du 26 octobre 2017, le procureur de la République d’Istanbul a inculpé la requérante de l’infraction de propagande en faveur d’une organisation terroriste pour avoir co-signé la pétition susmentionnée.

Le 13 mars 2019, la cour d’assises d’Istanbul a reconnu la requérante coupable de l’infraction reprochée et l’a condamnée, en application de l’article 7 § 2 de la loi no 3713, à un an et six mois d’emprisonnement avec sursis au prononcé du jugement. Elle a estimé à cet égard que le contenu de la pétition litigieuse était de nature à légitimer, glorifier et encourager les méthodes de contrainte, de violence et de menace du PKK, faisait la propagande de cette organisation et allait au-delà des limites de la liberté d’expression.

Le 3 avril 2019, l’opposition formée par la requérante contre la décision de la cour d’assises a été rejetée.

Le 10 mai 2019, la requérante a saisi la Cour constitutionnelle d’un recours individuel en alléguant notamment que sa condamnation pénale constituait une atteinte à son droit à la liberté d’expression.

Le 26 juillet 2019, la Cour constitutionnelle a conclu à la violation des droits à la liberté d’expression d’autres recourants et a octroyé à ces derniers une satisfaction équitable dans les recours individuels introduits par les intéressés concernant leur condamnation pénale pour avoir co-signé la même pétition.

Le 27 novembre 2019, saisie d’une demande de réouverture de la procédure introduite par la requérante à la suite de l’arrêt susmentionné de la Cour constitutionnelle, la cour d’assises d’Istanbul a décidé d’acquitter la requérante, en s’estimant lié par l’arrêt en question.

Le 29 avril 2020, la Cour constitutionnelle a déclaré le recours individuel de la requérante irrecevable pour non-épuisement des voies de recours, sans expliciter quelle voie de recours la requérante a omis d’épuiser.

Invoquant les articles 6 et 13 de la Convention, la requérante dénonce la décision d’irrecevabilité que la Cour constitutionnelle a rendue concernant son recours individuel alors que cette dernière avait conclu à une violation des droits à la liberté d’expression d’autres recourants dans les mêmes circonstances. Elle se plaint à cet égard du rejet par la haute juridiction de son recours individuel pour non-épuisement des voies des recours sans une motivation suffisante et sans une précision quant à la voie de recours qu’elle devait épuiser.

Invoquant l’article 10 de la Convention, la requérante allègue que la procédure pénale diligentée contre elle pour avoir co-signé une pétition, qui selon elle ne faisait que critiquer les politiques gouvernementales et demander le rétablissement la paix.

QUESTIONS AUX PARTIES

1.  La procédure menée devant la Cour constitutionnelle a-t-elle été équitable en l’espèce au sens de l’article 6 § 1 de la Convention ?

La Cour constitutionnelle a-t-elle rempli son obligation de motiver sa décision et de répondre aux griefs de la requérante tirés de la Convention (voir, entre autres, García Ruiz c. Espagne [GC], no 30544/96, § 26,
CEDH 1999-I) ?

La décision rendue par la haute juridiction en l’espèce peut-elle être considérée comme arbitraire ou manifestement déraisonnable eu égard à la motivation qu’elle contient quant aux griefs présentés par la requérante dans son recours individuel (voir Moreira Ferreira c. Portugal (nº 2) [GC], nº 19867/12, § 83, 11 juillet 2017 et les références qui y sont citées) ?

2.  Y a-t-il eu atteinte à la liberté d’expression de la requérante au sens de l’article 10 § 1 de la Convention, à raison de la procédure pénale diligentée à son encontre (Erdoğdu c. Turquie, no 25723/94, § 72, CEDH 2000‑VI, Dilipak c. Turquie, no 29680/05, § 50, 15 septembre 2015, Ergündoğan c. Turquie, no 48979/10, § 26, 17 avril 2018, Selahattin Demirtaş c. Turquie (no 3), no 8732/11, § 26, 9 juillet 2019, Ali Gürbüz c. Turquie, nos 52497/08 et 6 autres, §§ 59-69, 12 mars 2019, et Kaboğlu et Oran c. Turquie (no 2), no 36944/07, §§ 115-116, 20 octobre 2020) ?

Dans l’affirmative, cette atteinte était-elle prévue par la loi et nécessaire, au sens de l’article 10 § 2 (voir Faruk Temel c. Turquie, no 16853/05, §§ 53‑57, 1er février 2011, Belge c. Turquie, no 50171/09, §§ 31, 34 et 35, 6 décembre 2016, et Özer c. Turquie (no 3), no 69270/12, §§ 24-33, 11 février 2020) ?

En particulier, eu égard au contenu de la pétition co-signée par la requérante, au contexte dans lequel cette pétition s’inscrivaient, à sa capacité de nuire, et les circonstances de l’affaire, les juridictions nationales ont-elles effectué dans leur décisions un examen suffisant et une mise en balance adéquate entre les intérêts en jeu au regard des critères énoncés et mis en œuvre par elle dans les affaires relatives à la liberté d’expression (Gözel et Özer c. Turquie, nos 43453/04 et 31098/05, § 51, 6 juillet 2010, et Mart et autres c. Turquie, no 57031/10, § 32, 19 mars 2019) ?

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