CEDH, Cour (deuxième section), FABRE c. la FRANCE, 18 mars 2003, 69225/01

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Deuxième Section), 18 mars 2003, n° 69225/01
Numéro(s) : 69225/01
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 12 avril 2001
Jurisprudence de Strasbourg : Mifsud c. France (déc.), n° 57220/00, CEDH 2002-VII Comm. Eur. D.H. No 14464/88, déc. 8.10.91, D.R. 73, p. 268
Winterwerp c. Pays-Bas, arrêt du 24 octobre 1979, série A no 33, p. 18, § 40
Boyle et Rice c. Royaume-Uni, arrêt du 27 avril 1988, série A no 131, p. 23, § 52
Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas, arrêt du 27 octobre 1993, série A no 274, p. 19, § 32
Wassink c. Pays-Bas, arrêt du 27 septembre 1990, série A no 185-A, p. 14, § 38
Cherakrak c. France (déc.), n° 34075/96, 2.8.2000
Del Sol c. France, no 46800/99, § 23, 26 février 2002, non publié
García Ruiz c. Espagne [GC], no 30544/96, § 26, CEDH 1999-I
Mifsud c. France (déc.), n° 57220/00, CEDH 2002-VII Comm. Eur. D.H. No 14464/88, déc. 8.10.91, D.R. 73, p. 268
No 28134/95, déc. 2.7.97, non publiée
Papon c. France (no 2), no 54210/00, CEDH 2002-VII
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Partiellement irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-44144
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2003:0318DEC006922501
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Sur les parties

Texte intégral

DEUXIÈME SECTION

DÉCISION PARTIELLE

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 69225/01
présentée par Frédéric FABRE
contre la France

La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant le 18 mars 2003 en une chambre composée de

MM.A.B. Baka, président,
J.-P. Costa,

Gaukur Jörundsson,
K. Jungwiert,
V. Butkevych,
MmeW. Thomassen,
M.M. Ugrekhelidze, juges,
et de Mme S. Dollé, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 12 avril 2001,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Frédéric Fabre, est un ressortissant français, né en 1962 et résidant à Hesdigneul les Boulogne.

A.  Les circonstances de l’espèce

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.

1. Procédure pénale litigieuse

En raison de plusieurs plaintes, déposées avec constitution de partie civile, pour abus de confiance, escroqueries et tentatives d’escroquerie, un mandat d’arrêt fut délivré, le 16 avril 1996, contre le requérant.

Le 29 octobre 1996, le juge d’instruction renvoya l’affaire devant le tribunal correctionnel.

Localisé au Luxembourg postérieurement à la clôture de l’instruction, le requérant fut interpellé le 24 avril 1997.

Le 20 juin 1997, le procureur de la République de Lille adressa à Interpol une demande d’arrestation provisoire du requérant à titre extraditionnel, fondée sur l’urgence.

Le 30 juin 1997, le juge d’instruction de Luxembourg décerna un mandat d’arrêt provisoire contre le requérant.

Le 16 octobre 1997, le requérant signa une déclaration relative au principe de spécialité en matière d’extradition qu’il dénonça le lendemain.

Le requérant fut remis aux autorités françaises le 4 novembre 1997.

Le 10 novembre 1997, le tribunal correctionnel de Lille maintint le requérant en détention et renvoya l’affaire sur le fond à l’audience du 30 décembre 1997.

Le 28 novembre 1997, la cour d’appel de Douai, constatant que le requérant n’avait pas d’antécédents judiciaires et justifiait d’un domicile fixe et d’une situation familiale stable, estima qu’il présentait suffisamment de garanties de représentation en justice et ordonna sa mise en liberté.

En raison de la surcharge de l’audience, l’examen au fond de l’affaire fut renvoyé au 16 octobre 1998. A cette date, le tribunal correctionnel de Lille constata que l’extradition du requérant n’était régulière qu’eu égard aux faits dénoncés dans le mandat d’arrêt du 16 avril 1996. Statuant contradictoirement sur ces faits, il condamna le requérant à un mois d’emprisonnement et, statuant par défaut, le relaxa des autres faits.

Le 19 octobre 1998, le ministère public fit appel de ce jugement et le requérant fit un appel incident, le 23 octobre 1998, uniquement de la partie contradictoire de ce jugement.

Dans un premier temps, l’audience d’appel fut fixée au 14 septembre 2000. Malgré l’opposition du requérant qui insistait sur le fait que la demande d’extradition avait été fondée sur l’urgence, l’examen de l’affaire fut renvoyé, à plusieurs reprises, à une audience ultérieure.

Dans des conclusions du 9 octobre 2001, le requérant demanda à la cour d’appel de prononcer la nullité de la demande d’extradition et de la procédure subséquente. Il estimait, en effet, que le délai écoulé pour obtenir une décision définitive, en raison de multiples renvois de l’examen de l’affaire à des audiences ultérieures, tant devant le tribunal correctionnel, que devant la cour d’appel, était incompatible avec l’urgence qui motivait cette demande.

Le 20 décembre 2001, la cour d’appel de Douai déclara ce moyen irrecevable, le requérant ne l’ayant pas soulevé en première instance, alors que le tribunal correctionnel avait compétence pour en connaître. Au fond, la cour d’appel relaxa le requérant de tous les chefs d’accusation, excepté du chef de tentative d’escroquerie au préjudice du Crédit Lyonnais et le condamna à six mois d’emprisonnement avec sursis.

Le 20 décembre 2001, le requérant se pourvut en cassation.

Dans un mémoire ampliatif du 18 janvier 2002, le requérant se plaignit de la motivation, insuffisante et contradictoire, des décisions judiciaires ainsi que d’une violation des droits de la défense et d’une violation de l’article 6 § 2 de la Convention.

Le 23 septembre 2002, le requérant demanda à ce que les conclusions de l’avocat général lui soient envoyées.

Par un courrier du 14 octobre 2002, le procureur général lui répondit que les conclusions ne seraient présentées qu’oralement, « à l’audience publique de la chambre criminelle » du 27 novembre 2002, mais lui indiqua que l’avocat général envisageait de conclure au rejet du pourvoi. Suite à cette communication du sens des conclusions de l’avocat général, le requérant déposa, le 25 octobre 2002, des conclusions confirmatives de son mémoire ampliatif.

Par lettre du 23 octobre 2002, le greffier de la chambre criminelle de la Cour de cassation informa le requérant « que la procédure devant les chambres de la Cour de cassation est essentiellement écrite, les rapports sont faits oralement à l’audience (...) et aucune disposition légale n’impose au conseiller rapporteur de communiquer à quiconque son projet de rapport ». Il fut précisé, à nouveau, que le pourvoi du requérant serait examiné à l’audience du 27 novembre 2002.

En conséquence, le 27 novembre 2002, le requérant se présenta à la Cour de cassation, mais l’accès à l’audience lui fut interdit.

Par un arrêt du 27 novembre 2002, la chambre criminelle de la Cour de cassation, visant « les mémoires personnels produits », confirma la décision de rejet de l’exception de nullité et, estimant que le second moyen du requérant se bornait « à remettre en question l’appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus », rejeta le pourvoi.

2. Procédures annexes intentées par le requérant

Par citation directe, le requérant saisit le tribunal correctionnel, pour dénonciation calomnieuse, contre le crédit lyonnais et versa la consignation fixée, le 13 novembre 2000, par le tribunal correctionnel. Ayant pris conscience que cette action ne pouvait légalement prospérer, le requérant se désista.

Le 5 février 2001, le requérant porta plainte avec constitution de partie civile, du chef de détention arbitraire et atteinte à la liberté individuelle. Il se heurta, le 23 mai 2001, à un refus d’informer, aucune juridiction répressive n’ayant définitivement constaté le caractère illégal de la poursuite ou des actes accomplis.

Le 21 janvier 2002, le requérant sollicita une indemnisation du préjudice matériel et moral que lui avait causé sa détention provisoire, fondant sa requête sur l’article 149 du code de procédure pénale. La procédure n’étant pas terminée par une décision de relaxe définitive, le premier président de la cour d’appel de Douai la rejeta le 28 mars 2002.

Finalement, le requérant demanda l’aide juridictionnelle pour introduire une requête fondée sur l’article L781-1 du code de l’organisation judiciaire, le ministère d’avocat étant obligatoire devant le tribunal de grande instance. Le 13 janvier 2003, le bureau d’aide juridictionnelle, prenant en compte les revenus de toutes les personnes vivant au foyer du requérant, constata que les ressources du requérant excédaient les plafonds fixés par la loi et rejeta cette demande.

GRIEFS

1. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de n’avoir bénéficié d’une procédure ni équitable ni publique devant la Cour de cassation. Le requérant explique, en effet, que, d’une part, il se vit refuser la communication des conclusions de l’avocat général, celles-ci étant présentées oralement lors d’une audience publique et que, d’autre part, il se vit refuser l’accès à cette audience.

2. Invoquant l’article 5 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de l’arbitraire de la détention qu’il subit du 20 juin 1997 au 28 novembre 1997. Tout d’abord, il estime que, vu la durée de la procédure pénale, la demande de détention provisoire à titre extraditionnel ne pouvait être fondée sur l’urgence et que cette irrégularité entachait d’arbitraire la détention qui s’en est suivie. Il estime, ensuite, que la détention entre le 4 novembre 1997, date de sa remise aux autorités françaises, et le 10 novembre 1997, jour de l’audience du tribunal correctionnel, ne pouvait légalement durer que quatre jours. Finalement, le requérant estime que la décision de maintien en détention, prise le 10 novembre 1997 par le tribunal correctionnel de Lille, viole le droit interne.

3. Affirmant ne bénéficier d’aucun recours en indemnisation du préjudice causé par cette détention, le requérant demande à être indemnisé en vertu de l’article 5 § 5 de la Convention.

4. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de l’iniquité des décisions internes prises au cours de la procédure litigieuse. Il remet en cause leur motivation, estime que les juridictions n’ont pas pris en considération ses arguments et n’y ont pas répondu et conteste leur appréciation des faits.

5. Le requérant se plaint de ce que l’insuffisance et la contradiction des motifs viole la présomption d’innocence au sens de l’article 6 § 2 de la Convention.

6. Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de la durée de la procédure pénale et estime que le refus d’aide juridictionnelle le prive d’un accès concret, effectif et réel à un tribunal pour faire réparer le préjudice découlant de cette durée.

7. Le requérant allègue, finalement, la violation de l’article 13 de la Convention en ce qu’il n’aurait eu aucun recours effectif pour obtenir réparation du préjudice subi en raison des violations de la Convention dont il se plaint.

EN DROIT

1. Le requérant se plaint de ce que la procédure suivie devant la Cour de cassation ne fut ni publique ni équitable et invoque l’article 6 § 1 de la Convention dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement [et] publiquement (...) par un tribunal (...) qui décidera du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle »

En l’état actuel du dossier, la Cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l’article 54 § 2 b) de son règlement.

2. Le requérant se plaint de l’arbitraire de sa détention et invoque l’article 5 § 1 de la Convention dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales (...) :

c)  s’il a été arrêté et détenu en vue d’être conduit devant l’autorité judiciaire compétente, lorsqu’il y a des raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis une infraction ou qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l’empêcher de commettre une infraction ou de s’enfuir après l’accomplissement de celle-ci ; »

La Cour note que la détention dont se plaint le requérant prit fin le 28 novembre 1997 et que le requérant ne fut pas réincarcéré par la suite.

Or, la présente requête ne fut introduite que le 12 avril 2001, soit plus de six mois après la fin de la mesure dont il est allégué qu’elle viole la Convention.

Il apparaît donc que ce grief est tardif et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

3. Affirmant ne bénéficier d’aucun recours en indemnisation du préjudice causé par cette détention, le requérant demande à être indemnisé en vertu de l’article 5 § 5 de la Convention qui se lit comme suit :

« Toute personne victime d’une arrestation ou d’une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation. »

La Cour rappelle que le droit à réparation au sens de l’article 5 § 5 suppose qu’une violation de l’un des autres paragraphes de l’article 5 de la Convention ait préalablement été établie (Wassink c. Pays-Bas, arrêt du 27 septembre 1990, Série A no 185-A, p. 14, § 38), soit par un organe interne, soit par les organes de la Convention (Cherakrak c. France (déc), no 34075/96, du 2 août 2000).

Or, la Cour a déclaré irrecevable le grief du requérant tiré de l’article 5 § 1 de la Convention.

Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

4. Le requérant se plaint de l’iniquité des décisions internes prises au cours de la procédure litigieuse. Il remet en cause leur motivation, estime que les juridictions n’ont pas pris en considération ses arguments et n’y ont pas répondu et conteste leur appréciation des faits. Le requérant invoque l’article 6 § 1 de la Convention dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »

La Cour rappelle que, selon sa jurisprudence constante, les autorités nationales sont les mieux placées pour apprécier les preuves produites devant elles (voir, entre autres, Winterwerp c. Pays-Bas, arrêt du 24 octobre 1979, série A no 33, p. 18, § 40) et elle ne saurait substituer sa propre appréciation des faits à celle des juridictions nationales (voir Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas, arrêt du 27 octobre 1993, série A no 274, p. 19, § 32). Sa tâche consiste à rechercher si la procédure envisagée dans son ensemble a revêtu un caractère « équitable » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention.

En outre, si l’article 6 § 1 oblige les tribunaux à motiver leurs décisions, cette obligation ne peut se comprendre comme exigeant une réponse détaillée à chaque argument (voir, notamment, García Ruiz c. Espagne [GC], no30544/96, § 26, CEDH 1999-1).

En l’espèce, la Cour constate que le requérant a eu l’occasion de faire valoir ses arguments devant les juridictions pénales qui y ont répondu et ont rendu des décisions satisfaisant aux exigences de la motivation.

Partant, la Cour considère que ce grief doit être rejeté comme étant manifestement mal fondé, en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

5. Le requérant se plaint de ce que l’insuffisance et la contradiction des motifs viole la présomption d’innocence au sens de l’article 6 § 2 de la Convention qui se lit comme suit :

« Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ».

La Cour a examiné les griefs du requérant tels qu’ils ont été présentés. Compte tenu de l’ensemble des éléments en sa possession, et dans la mesure où elle est compétente pour connaître des allégations formulées, elle n’a relevé aucune apparence de violation des droits et libertés garantis par la Convention ou ses Protocoles.

La Cour considère, dès lors, que ce grief doit être rejeté comme étant manifestement mal fondé, en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

6. Le requérant se plaint de la durée de la procédure pénale et estime que le refus d’aide juridictionnelle le prive d’un accès concret, effectif et réel à un tribunal pour faire réparer le préjudice découlant de cette durée. Il invoque l’article 6 § 1 de la Convention, dont les dispositions pertinentes se lisent comme suit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. »

La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes et elle a déjà eu à se prononcer sur l’article L. 781-1 du code de l’organisation judiciaire au regard de cette exigence. La Cour a jugé que le recours fondé sur cet article permet de remédier à une violation alléguée du droit de voir sa cause entendue dans un « délai raisonnable » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention, quel que soit l’état de la procédure au plan interne (Papon c. France (no 2) (déc.), no 54210/00, CEDH 2001-XII (extraits) et Mifsud c. France (déc.) [GC], no 57220/00, CEDH 2002-VIII). Elle a précisé que ce recours avait acquis, à la date du 20 septembre 1999, le degré de certitude juridique requis pour pouvoir et devoir être utilisé aux fins de l’article 35 § 1 de la Convention, parvenant en conséquence à la conclusion que tout grief tiré de la durée d’une procédure judiciaire, introduit devant elle après le 20 septembre 1999 sans avoir préalablement été soumis aux juridictions internes dans le cadre d’un recours fondé sur l’article L. 781-1 du code de l’organisation judiciaire, est en principe irrecevable, quel que soit l’état de la procédure au plan interne.

En l’espèce, le requérant a saisi la Cour le 12 avril 2001 sans avoir préalablement exercé ce recours.

La Cour rappelle, également, que la Convention n’oblige pas à accorder l’aide judiciaire dans toutes les contestations en matière civile. En effet, il y a une nette distinction entre les termes de l’article 6 § 3 c), qui garantit le droit à l’aide judiciaire gratuite sous certaines conditions dans les procédures pénales, et ceux de l’article 6 § 1, qui ne renvoie pas du tout à l’aide judiciaire. Par ailleurs, un système d’assistance judiciaire ne peut fonctionner sans la mise en place d’un dispositif permettant de sélectionner les affaires susceptibles d’en bénéficier (Del Sol c. France, no 46800/99, 26 février 2002, CEDH 2002-..., § 23) et un système qui prévoit de subordonner son octroi à certaines conditions relatives, notamment, à la situation financière du demandeur ou aux chances de succès de la procédure (Boule c. France, no 28134/95, décision de la Commission du 2 juillet 1997, non publiée, et Del Sol c. France, précité, § 23) n’est pas illégitime.

Elle relève que, dans le cas d’espèce, l’aide juridictionnelle a été refusée au requérant, car celui-ci disposait au sein de son foyer de ressources supérieures au plafond fixé par la loi. Le fait qu’il soit tenu compte, pour ces calculs, à la fois des revenus du requérant et de ceux de son épouse est prévu par la loi et n’a rien d’arbitraire. Le requérant ne remplissait dès lors pas les conditions fixées par la loi pour obtenir cette aide juridictionnelle.

En conséquence, la Cour estime que le fait que l’aide juridictionnelle ait été refusée au requérant ne le dispensait pas d’exercer un recours fondé sur l’article L.781-1 du code de l’organisation judiciaire.

Il s’ensuit que le requérant n’a pas épuisé les voies de recours internes quant à son grief tiré de la durée de la procédure litigieuse.

Ce grief doit, en conséquence, être rejeté en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

7. Le requérant se plaint, finalement, de l’impossibilité, en droit français, de réparer le préjudice subi en raison des violations de la Convention. Il invoque l’article 13 de la Convention qui se lit comme suit :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la (...) Convention ont été violés, a droit à l’octroi d’un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l’exercice de leurs fonctions officielles. »

La Cour rappelle que l’interprétation de la Convention dans son ensemble impose certaines limitations au droit à bénéficier d’un recours, reconnu par l’article 13. Il en va ainsi lorsqu’il est allégué, comme en l’espèce, qu’une violation de la Convention a été commise par la plus haute instance de l’appareil juridique d’un Etat membre (décision de la Commission du 8 octobre 1991, no 14464/88, Décisions et rapports (DR) 73, p. 268).

La Cour rappelle, également, que l’article 13 s’interprète comme n’exigeant un recours en droit interne que s’agissant de griefs pouvant passer pour défendables selon la Convention (Boyle et Rice c. Royaume-Uni, arrêt du 27 avril 1988, série A no 131, p. 23, § 52).

Compte tenu de la conclusion à laquelle elle est parvenue sur les autres points, la Cour considère que le requérant ne présente aucun grief défendable auquel le recours prévu par l’article 13 pourrait s’appliquer.

Il s’ensuit que ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Ajourne l’examen du grief du requérant tiré de la violation, par la Cour de cassation, des principes d’équité et de publicité ;

Déclare la requête irrecevable pour le surplus.

S. DolléA.B. Baka
GreffièrePrésident

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