CEDH, Cour (première section), PICARD c. FRANCE, 6 octobre 2005, 38758/02

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

PREMIÈRE SECTION

DÉCISION

Requête no 38758/02
présentée par Claude Henri PICARD
contre la France

La Cour européenne des Droits de l’Homme (première section), siégeant le 6 octobre 2005 en une chambre composée de :

MM.C.L. Rozakis, président,
L. Loucaides,
J.-P. Costa,
P. Lorenzen,
MmeN. Vajić,
MM.D. Spielmann,
S.E. Jebens, juges,
et de M. S. Nielsen, greffier de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 23 octobre 2002,

Vu la décision de la Cour de se prévaloir de l’article 29 § 3 de la Convention et d’examiner conjointement la recevabilité et le fond de l’affaire,

Vu les déclarations formelles d’acceptation d’un règlement amiable de l’affaire,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Claude Henri Picard, est un ressortissant français, né en 1957 et résidant à Givry.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.

Le requérant était maître contractuel de l’enseignement privé. Il demanda son inscription, au titre de la session 1992, à la fois au concours d’accès à l’échelle de rémunération des professeurs agrégés (CAERPA), réservé aux maîtres de l’enseignement privé, et au concours externe de l’agrégation de mathématiques. Selon un décret du 10 mars 1964 relatif aux maîtres contractuels et agrées des établissements d’enseignement privés sous contrat, les maîtres contractuels des établissements d’enseignement privé sous contrat ne peuvent pas opter pour l’enseignement privé en cas de succès au concours externe. Ayant été admis au concours externe en juillet 1992, le requérant ne se présenta pas aux épreuves du CAERPA qui eurent lieu au début du mois de septembre 1992. Ayant néanmoins demandé à continuer d’être affecté dans l’enseignement privé, le requérant fut affecté provisoirement le 13 août 1992 en qualité de professeur agrégé stagiaire dans l’enseignement public à compter du 1er septembre 1992. Par un arrêté en date du 15 septembre 1992 et une décision du 19 novembre 1992 du Ministre de l’éducation nationale, le requérant fut affecté définitivement comme professeur agrégé dans l’enseignement public. Par une décision du recteur de l’académie de Dijon en date du 27 novembre 1992, il fut affecté à Givry.

Par une requête du 30 novembre 1992, le requérant saisit le tribunal administratif de Dijon en vue de l’annulation de la décision du 15 septembre 1992 confirmée par la décision du 19 novembre 1992 précitées ainsi que de la décision du recteur de l’académie de Dijon l’affectant à Givry. En outre, il sollicita l’allocation des rémunérations dues, selon lui, depuis le 1er octobre 1992.

Par un jugement du 29 mars 1994, le tribunal administratif de Dijon rejeta la requête du requérant au motif que le Ministre de l’éducation nationale avait fait une exacte application de la réglementation en vigueur. Par un courrier du 31 mars 1994, le greffier en chef du tribunal administratif de Dijon notifia ce jugement au requérant et lui indiqua que son appel éventuel devrait être porté devant le Conseil d’Etat.

Le 25 mai 1994, le requérant saisit le Conseil d’Etat d’une demande d’annulation du jugement du tribunal administratif. Par une ordonnance du 8 mars 1995, le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat attribua la requête à la cour administrative d’appel de Nancy.

Par une ordonnance du 29 août 1997 et « en application du décret no 97-457 du 9 mai 1997 portant création d’une cour administrative d’appel à Marseille et modifiant les articles R5, R7 et R8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel », le président de la cour administrative de Nancy transmit le dossier de la requête à la cour administrative de Lyon. Par un courrier du 27 mars 1998, le président de la cour administrative d’appel de Lyon informa le requérant de ce que la décision de la cour était susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office. Il l’invita en conséquence à présenter des observations écrites sur ce point avant le 1er avril 1998. Le requérant affirme avoir déposé un mémoire le 30 mars 1998. Par un arrêt du 24 avril 1998, suivant une audience du 3 avril 1998 au cours de laquelle le requérant a pu présenter ses observations, la cour administrative d’appel de Lyon rejeta la requête du requérant sans faire référence au moyen qui aurait pu être relevé d’office.

Le requérant se pourvut en cassation le 25 juin 1998. A l’issue de la séance de jugement du 28 juin 2000, son affaire fut placée en délibéré prolongé. Par un arrêt du 29 avril 2002, le Conseil d’Etat rejeta le pourvoi du requérant.

GRIEFS

Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, le requérant se plaint de différents griefs.

1. Il invoque tout d’abord la durée de la procédure qu’il attribue entièrement à des manœuvres des juridictions.

2. Il se plaint de manœuvre déloyale de la cour administrative d’appel de Lyon qui lui a imparti des délais de production de son mémoire trop court puisque c’est par un courrier du 27 mars 1998 que le président de la cour administrative d’appel lui a imparti un délai expirant le 1er avril 1998.

3. Il invoque ensuite le manque d’indépendance et d’impartialité des membres du Conseil d’Etat qui sont « à la solde de l’Etat français ». Il se plaint enfin de « falsifications de conclusions » et de « modifications du sens des mots » par les juridictions ayant eu à connaître de son affaire.

EN DROIT

Le 11 juillet 2005, la Cour a reçu du Gouvernement la déclaration suivante :

« Je déclare qu’en vue d’un règlement amiable de l’affaire susmentionnée, le gouvernement français offre de verser à Monsieur Claude PICARD la somme de 9000 (neuf mille) euros dans les trois mois suivant la date de notification de la décision de la Cour rendue conformément à l’article 37 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Ce versement vaudra règlement définitif de l’affaire.

A défaut de règlement dans ledit délai, le Gouvernement s’engage à verser, à compter de l’expiration de celui-ci et jusqu’au règlement effectif de la somme en question, un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne, augmenté de trois points de pourcentage.

La présente déclaration n’implique de la part du Gouvernement de la France aucune reconnaissance d’une violation de la Convention européenne des Droits de l’Homme en l’espèce. »

Le 26 juillet 2005, la Cour a reçu la déclaration suivante, signée par le requérant :

« Je note que le gouvernement français est prêt à verser à Monsieur Claude PICARD la somme de 9 000 (neuf mille) euros en vue d’un règlement amiable de l’affaire ayant pour origine la requête susmentionnée pendante devant la Cour européenne des droits de l’Homme.

J’accepte cette proposition et renonce par ailleurs à toute autre prétention à l’encontre de la France à propos des faits à l’origine de ladite requête. Je déclare l’affaire définitivement réglée.

La présente déclaration s’inscrit dans le cadre du règlement amiable auquel le Gouvernement et le requérant sont parvenus.  »

La Cour prend acte du règlement amiable auquel sont parvenues les parties. Elle estime que celui-ci s’inspire du respect des droits de l’homme tels que les reconnaissent la Convention et ses protocoles et n’aperçoit par ailleurs aucun motif d’ordre public justifiant de poursuivre l’examen de la requête (article 37 § 1 in fine de la Convention). En conséquence, il convient de mettre fin à l’application de l’article 29 § 3 de la Convention et de rayer l’affaire du rôle.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Décide de rayer la requête du rôle.

Søren NielsenChristos Rozakis
GreffierPrésident

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