CEDH, Cour (deuxième section), PIETRI c. FRANCE, 18 octobre 2005, 71765/01

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Deuxième Section), 18 oct. 2005, n° 71765/01
Numéro(s) : 71765/01
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 28 décembre 2000
Jurisprudence de Strasbourg : Hadjianastassiou c. Grèce, arrêt du 16 décembre 1992, série A no 252, p. 16, § 31
Cardot c. France, arrêt du 19 mars 1991, série A no 200, p. 18, §§ 34-36
Coëme et autres c. Belgique, nos 32492/96, 32547/96, 32548/96, 33209/96 et 33210/96, § 93, CEDH 2000 VII
Fressoz et Roire c. France [GC], no 29183/95, §§ 36-37, CEDH 1999 I
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-70953
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2005:1018DEC007176501
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Sur les parties

Texte intégral

DEUXIÈME SECTION

DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 71765/01
présentée par Michel PIETRI
contre la France

La Cour européenne des Droits de l’Homme (deuxième section), siégeant le 18 octobre 2005 en une chambre composée de :

MMJ.-P. Costa, président,
V. Butkevych,
MmesA. Mularoni,
E. Fura-Sandström,
D. Jočienė,
MM.D. Popović, juges,
.et de Mme S. Dollé, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 28 décembre 2000,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Michel Pietri, est un ressortissant français, né en 1943 et résidant à Aix En Provence. Il est représenté devant la Cour par Me Gaëtan di Marino, avocat inscrit au barreau d’Aix-en-Provence.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

1. La genèse de l’affaire

En 1976, le requérant créa aux alentours d’Aix-en-Provence un centre de loisirs sportifs, le « Set Club », constitué de courts de tennis et d’une piscine. Au fil des ans, ce centre évolua en un vaste complexe de loisirs, au travers duquel le requérant développa, avec son épouse, un réseau de sociétés commerciales (SARL Set Services, SCI Set Squash, SARL Set Horse, SA Set Golf, SA International Leisure, SCI Set International Immobilier, Entreprise Générale de Maçonnerie et de Menuiserie) et d’associations sportives (Set Club, Set Squash Club, Set Horse, Set Golf, Set Bridge, Set Gym), dont il assumait les fonctions de président ou de gérant statutaire.

Le 3 octobre 1990, l’administration fiscale entreprit l’examen de la situation fiscale personnelle des époux Piétri.

Le 14 novembre 1990, la gendarmerie d’Aix-en-Provence se rendit à Eguilles, sur les lieux d’un chantier en construction d’un centre équestre de la société Set Horse, et y effectua un contrôle d’identité des ouvriers présents, dont il s’avéra que certains d’entre eux étaient en situation irrégulière. Dans le cadre de l’enquête de flagrance qui s’ensuivit le jour même pour complicité de travail clandestin et infraction à la législation sur les étrangers, les gendarmes, accompagnés de fonctionnaires de la brigade de contrôle et de recherche des impôts d’Aix-en-Provence en tant qu’assistants techniques, procédèrent à une perquisition du domicile du requérant et des bureaux de la société Set Club, au cours de laquelle ils saisirent de très nombreux documents relatifs à l’activité professionnelle de ce dernier. Du 16 novembre au 20 décembre 1990, le requérant fut placé en détention provisoire.

Le 24 novembre 1990, à la suite de cette perquisition, une information judiciaire fut ouverte contre X pour « abus de biens sociaux, complicité et recel, défaut d’établissement de l’inventaire des comptes et du rapport de gestion par gérant de SARL et PDG de SA, non réunion, par gérant de SARL et Directeur Général de SA, de l’assemblée générale en vue de l’approbation des comptes, et abus de confiance ».

Le 27 novembre 1990, sur commission rogatoire, les enquêteurs de police et de gendarmerie, assistés par des agents de l’administration fiscale, procédèrent à diverses perquisitions au domicile du requérant, au cabinet de son comptable et dans les locaux du complexe sportif du Set Club ; ils y saisirent plusieurs centaines de documents et classeurs relatifs à l’administration et la gestion des sociétés et associations dirigées par le requérant. Le lendemain, en exécution de la même commission rogatoire, ils saisirent d’autres documents chez le conseil juridique et fiscal du requérant, Me Sauvaire. L’inventaire sur place s’avérant impossible en raison du volume des documents saisis, l’intégralité des pièces fut placée sous scellés provisoires, et transportée dans les locaux de la gendarmerie.

Du 6 au 14 décembre 1990, ces pièces furent triées par un officier de police judiciaire hors la présence du requérant, celui-ci étant alors incarcéré. Le 22 janvier 1991, cet officier de police dressa, en présence du requérant, un procès-verbal lui notifiant la saisie de tous les documents saisis à son domicile et dans les locaux et dépendances de ses sociétés ; le 6 février 1991, en présence du conseil du requérant, il dressa un deuxième procès-verbal relatif à la saisie des documents découverts chez ce dernier.

Le 19 février 1991, le magistrat instructeur indiqua au directeur des services fiscaux qu’il résultait de l’instruction pénale qu’il menait l’existence de présomptions de fraudes fiscales à l’encontre du requérant et de son épouse.

De février à juillet 1991, l’administration fiscale entreprit la vérification comptable des sociétés et associations dirigées par le requérant, ainsi que de la comptabilité de son entreprise de maçonnerie et de celle relative à l’activité de marchand de bien de son épouse. Par un soit-transmit du 6 juin 1991, le juge d’instruction, à la demande de l’administration fiscale, autorisa cette dernière à effectuer les opérations de contrôle dans les locaux de la gendarmerie en présence du requérant et de son conseil.

Le 2 juillet 1991, celui-ci écrivit au juge d’instruction le priant d’ordonner la restitution de l’ensemble des pièces saisies. Le 18 juillet suivant, il réitéra sa demande, précisant que chaque document désiré était surligné dans sa demande. Par une ordonnance du 31 juillet 1991, le magistrat refusa la restitution des documents saisis, mais autorisa la gendarmerie d’Aix-en-Provence à délivrer au conseil du requérant copie de chaque document ou série de documents surligné dans sa requête. En réponse, la gendarmerie indiqua que la restitution des pièces était techniquement impossible, au motif qu’elle ne disposait pas, vu le volume des documents saisis, de photocopieurs en nombre suffisant. Le 11 septembre et 21 octobre 1991, l’avocat du requérant se manifesta de nouveau auprès du juge, afin que ce dernier use de son autorité pour sommer la gendarmerie d’exécuter son ordonnance du 31 juillet 1991.

Entre-temps, du 26 juillet 1991 au 10 juillet 1992, l’administration fiscale notifia au requérant et à son épouse, ainsi qu’aux diverses sociétés et associations dirigées par le requérant, des redressements fiscaux au titre de l’impôt sur le revenu, l’impôt sur les sociétés et des revenus de capitaux mobiliers, d’un montant global de 63 339 799 FRF (9 640 760 euros environ).

2. Le déroulement des vérifications de comptabilité des entreprises, associations et activités liées au requérant

a) Vérification de la comptabilité de la SARL Set Services

Le 20 mars 1991 eut lieu l’examen du dossier de ladite société au cabinet de Me Sauvaire. Le 17 juin 1991, en présence de ce dernier, les pièces saisies furent consultées par le vérificateur à la gendarmerie d’Aix-en-Provence, qui dressa un constat d’absence de nombreuses pièces de comptabilité. Le 23 juillet 1991, le vérificateur communiqua au requérant une copie du procès-verbal de son audition effectuée par les services de gendarmerie le 22 janvier 1991, sur lequel se fondait notamment le redressement envisagé. Le 26 juillet 1991, le requérant se vit notifié le redressement fiscal, qui fut confirmé le 28 juillet 1992 suite à ses observations.

b) Vérification de la comptabilité de la SCI Set Squash

Après s’être présenté le 22 mars 1991 au siège de la société et constaté l’absence de comptabilité, le vérificateur, le 13 mai 1991, discuta du dossier de la société civile immobilière au cabinet du conseil du requérant. Le 4 juin 1991, le vérificateur demanda au requérant de lui présenter sa comptabilité qui, selon son conseil, était tenue sur support informatique. Le 20 juin 1991, le requérant ne se rendit pas au rendez-vous fixé à la gendarmerie en vue de l’examen contradictoire des pièces saisies. Il ressort de la notification de redressement du 28 août 1991 et d’une lettre de la direction générale des impôts datée du 18 septembre 1991, que la quasi totalité du redressement opéré à l’encontre de la SCI Set Squash ne résultait pas de l’exploitation des documents saisis ; seul un chef de redressement relatif à un abandon de créance provenait d’une correspondance échangée entre le requérant et son comptable, lettre qui lui fut communiquée le 26 août 1991.

c) Vérification de la comptabilité de la SCI Set International Immobilier

Il ressort du dossier que les opérations de vérifications eurent lieu dans les locaux d’une société anonyme « G²DC » sis à La Ciotat où étaient conservées les pièces relatives à la comptabilité de l’entreprise.

d) Vérification de la comptabilité de la SA Set Golf

Le 28 août 1991, le requérant se vit notifié le redressement fiscal relatif à la société susmentionnée, dans lequel il était mentionné que ce redressement était effectué à partir d’éléments non saisis par la gendarmerie ; la photocopie de l’ensemble de ces documents était également jointe au dossier. Après avoir examiné les observations écrites du requérant, la commission départementale des impôts confirma le redressement opéré.

e) Vérification de la comptabilité de la SARL Set Horse

A des dates non précisées, le vérificateur se rendit avec le requérant et son conseil à la gendarmerie pour y étudier les pièces saisies, puis au siège de l’entreprise et au cabinet comptable du conseiller fiscal. Ce dernier fut en mesure de reconstituer les bilans, comptes de résultats et inventaires des immobilisations à partir des documents saisis et les envoya au vérificateur. Le redressement fiscal fut notifié le 17 octobre 1991.

f) Vérification de la comptabilité de l’association Set Club

Au cours des mois de mai, juin, août et septembre 1991, cinq séances de vérifications eurent lieu au siège de l’association, au cours desquelles toutes les pièces de la comptabilité, selon le rapport de vérification établi à une date non précisée, furent présentées par le requérant ou son comptable. Le redressement fiscal fut notifié le 19 novembre 1991.

g) Vérification des activités commerciales non déclarées des époux Piétri

L’activité de maçonnerie du requérant fit l’objet, après plusieurs échanges de correspondances, de trois redressements fiscaux. Quant à l’activité de marchand de biens de l’épouse du requérant, le vérificateur, dressa un procès verbal le 13 mai 1991 dans lequel il constatait qu’aucune comptabilité relative à cette activité n’avait été saisie par la gendarmerie.

3. La procédure devant les juridictions pénales de jugement

Le directeur des services fiscaux, à une date non précisée, engagea sept procédures distinctes contre les époux Piétri pris à titre individuel et contre le requérant en tant que dirigeant ou président des sociétés et associations précitées. Le 24 décembre 1992, il saisit la commission des infractions financières qui rendit un avis favorable au dépôt de plaintes auprès du Procureur de la République tendant à l’application des sanctions pénales en matière d’impôts. Le 8 juin 2003, le parquet du tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence fut ainsi saisi de sept plaintes pénales pour fraudes fiscales, omissions et passations volontaires d’écritures comptables commises de 1989 à 1991 et relatives aux années 1988 à 1990.

Dans le cadre de l’enquête qui s’ensuivit, le requérant et son épouse furent entendus au cours des mois d’octobre et novembre 1993. Le 21 octobre 1993, le requérant, auditionné par un officier de police judiciaire, déclara qu’à ce jour, son expert comptable ayant pu consulter les documents nécessaires, la situation comptable pour l’ensemble des personnes physiques et morales visées avait été reconstituée. Le 19 novembre 1993, il joint au dossier une note de synthèse détaillée reprenant chacun des éléments que l’administration lui reprochait.

Par un jugement du 15 décembre 1994, le tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence, après avoir ordonné la jonction des sept procédures, déclara le requérant coupable des faits reprochés et le condamna à deux ans d’emprisonnement, dont dix-huit mois avec sursis, et à la privation des droits civiques, civils et de famille pendant trois ans ; son épouse fut condamnée à six mois d’emprisonnement avec sursis. Sur les exceptions de nullité de la procédure soulevées in limine litis par le requérant, le tribunal statua comme suit :

« Attendu que le conseil du prévenu par conclusions déposées in limine litis soulève la nullité des poursuites pour :

-          défaut de respect du débat contradictoire

-          violation des droits de la défense et des dispositions du Code de Procédure Pénale

-          détournement de procédure ;

Attendu que sur le défaut de respect du débat contradictoire, il résulte des pièces de la procédure que les documents saisis par les services de la gendarmerie lors de la perquisition effectuée le 27 novembre 1990 ont été examinés par le vérificateur dans les locaux de la gendarmerie en la présence des époux Piétri et de leur conseil, le 17 juin 1991, que ce défaut de respect du débat contradictoire aurait pu être retenu si les actes du vérificateur avaient été effectués à l’insu des contribuables ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;

(...) »

Dans le cadre de son mémoire en appel, le requérant reprit les exceptions de nullité précédemment soulevées. En ce qui concerne le défaut allégué de débat contradictoire, le requérant souligna tout d’abord l’ampleur des contrôles dont il avait fait l’objet, tant « au niveau des personnes et entités concernées » (officiers de police judiciaire, gendarmes et agents du fisc), que « des moyens mis en œuvres par l’administration fiscale » et du « travail de consultation des documents saisis ». Il estimait ensuite avoir entrepris « toutes les demandes possibles et imaginables pour obtenir copie d’un certain nombre de documents essentiels » et « tenté en vain d’instaurer un débat contradictoire », mais s’être heurté à une volonté manifeste de faire obstacle à un tel débat. Il soutenait enfin que l’on ne pouvait faire valoir, comme l’avait fait le tribunal correctionnel, que le principe du contradictoire avait été respecté dès l’instant où une réunion avait eu lieu dans les locaux de la gendarmerie le 17 juin 1991 en sa présence et celle de son conseil, dans la mesure où « cette réunion purement formelle, sans qu’ait été assuré un accès réel et efficace aux documents permettant aux droits de la défense de s’exercer utilement, ne [pouvait] à l’évidence satisfaire au principe [précité], alors surtout que l’ampleur du contrôle nécessitait (...) un accès réitéré et effectif aux documents comptables ».

Le 27 juin 1996, la cour d’appel d’Aix-en-Provence confirma le jugement déféré ayant rejeté les exceptions de nullité, par un arrêt ainsi motivé :

« Attendu qu’il ressort des documents figurant au dossier de la procédure que dès le début du contrôle fiscale les époux Piétri ont chargé (...) leur conseil juridique et fiscal de les représenter ; que le 12 décembre 1990, celui-ci a pris attache avec l’inspecteur central des impôts à Marseille et, de cette date jusqu’à la fin des opérations de vérification, il s’en est suivi un échange constant de correspondance entre les vérificateurs (qui ont reçu plus d’une dizaine de lettres) et le mandataire des prévenus lesquels ont eu par conséquent l’occasion à maintes reprises de s’expliquer sur les reproches de l’administration ;

Que s’il est exact que malgré leurs démarches réitérées les prévenus n’ont pu obtenir photocopie des documents saisis (...), ils ne sauraient pour autant alléguer la nullité de la procédure fiscale pour défaut de contradictoire dans la mesure où d’une part, il est constant que le 13 mai 1991 le [requérant] a été reçu dans les locaux de la gendarmerie où, en présence de l’inspecteur des impôts (...), il a pu constater que les documents réclamés par son épouse dans l’intérêt de sa défense n’avaient pas été saisis, contrairement à ce qu’elle prétendait, et d’autre part, il n’est pas soutenu par les prévenus que lors de la seconde réunion (...) le 17 juin 1991, toujours dans les locaux de la gendarmerie, en présence de leur conseil et du vérificateur, que l’accès aux documents saisis leur ait été refusé ; que d’ailleurs l’OPJ ayant établi la procédure pénale a rédigé une attestation datée du 31 mars 1992 dans laquelle il a affirmé sans être contredit : « nos locaux ont toujours été mis à leur disposition (...) et la plus grande facilité leur a été accordée (...) afin qu’ils puissent travailler dans les meilleurs conditions possibles. J’ai moi-même constaté à plusieurs reprises la présence du requérant ou de son conseil accompagné par des fonctionnaires des impôts dans la salle où sont gardés les scellés. Aucune entrave à la consultation des scellés n’a jamais été réalisée » ;

Qu’en l’état des éléments ci-dessus exposés c’est en vain que les époux Piétri se sont attachés à alléguer la nullité de la procédure fiscale pour absence de contradictoire et violation caractérisée des droits de la défense ;

Qu’il échet en conséquence de confirmer la décision déférée (...) et de renvoyer les débats au fond à une date ultérieure ;

(...) »

Par un arrêt du 29 janvier 1998, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, statuant au fond, confirma le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Le requérant se pourvut en cassation contre ces deux arrêts, alléguant une violation des droits de la défense du fait de l’absence de débat oral et contradictoire effectif lors de l’examen des documents comptables.

Le 21 juin 2000 la Cour de cassation rejeta les pourvois formés par le requérant et son épouse contre les deux arrêts d’appel, par un arrêt ainsi libellé :

« Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué qu’alors que la vérification fiscale personnelle des époux Piétri était en cours, les comptabilités des sociétés et associations dirigées par le mari ont été saisies par les services de la gendarmerie dans le cadre de procédures distinctes de droit commun ; que les documents placés sous scellés provisoires ont été triés courant décembre 1990 par un officier de police judiciaire en l’absence du requérant, qui était alors détenu ; que le 22 janvier 1991, en présence cette fois de ce dernier, l’OPJ a établi un procès-verbal de saisie et restitué aux époux Piétri les documents non placés sous scellés ; que des vérifications de comptabilité se sont par la suite déroulées dans les locaux de la gendarmerie où les pièces comptables saisies étaient déposées ;

Attendu que, pour rejeter l’exception de nullité soulevée par les prévenus et tirée de l’absence de débat oral et contradictoire avec les vérificateurs, l’arrêt se prononce par les motifs repris aux moyens ;

Qu’en l’état de ces énonciations souveraines des juges du fond, d’où ressort l’existence de tels débats avant notification des redressements, et dès lors qu’il n’est pas allégué que les époux Piétri se soient vu refuser l’accès aux documents saisis, la cour d’appel a justifié sa décision ;

D’où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;

(...) »

Le 19 octobre 2000, le parquet général notifia la décision au requérant.

4. La procédure devant les juridictions administratives

Parallèlement à la procédure pénale, et suite aux notifications des redressements fiscaux susmentionnés, le requérant, à titre individuel ou ensemble avec son épouse, ainsi qu’en tant que dirigeant ou président des sociétés et associations visées, saisit le tribunal administratif de Marseille aux fins d’obtenir la décharge des divers droits supplémentaires de taxe et des pénalités y afférentes. Dans le cadre de son recours, il alléguait, notamment, la méconnaissance des droits de la défense en raison de l’impossibilité d’obtenir copie des pièces saisies pour assurer utilement l’exercice des droits de la défense. Il s’ensuivit différents jugements et arrêts.

Par un jugement du 23 décembre 1997, le tribunal administratif de Marseille rejeta une requête formulée au nom de la société Set Horse. Le 30 juillet 2001, la cour administrative d’appel de Marseille confirma le jugement. Sur les moyens tirés de l’irrégularité de l’exercice par l’administration du droit de communication et de la non restitution de documents, la cour releva que les services fiscaux avaient transmis à la société en cause les documents utilisés, et estima qu’il résultait des constatations de fait contenues dans l’arrêt du 27 juin 1996 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence que les conditions mises à la consultation des pièces n’excédaient pas celles normalement nécessaires pour assurer la sécurité de la conservation de documents constituant des pièces à conviction d’un dossier pénal ; elle considéra enfin que la société, bien que n’ayant eu la possibilité de récupérer les originaux des pièces, avait pu les consulter et en prendre copie tout au long des opérations de contrôle. Le 18 décembre 2002, le Conseil d’Etat déclara le pourvoi formé par le requérant non admis, au motif qu’aucun des moyens à l’appui de celui-ci n’étaient de nature à permettre son admission.

Par un jugement du 30 juin 1998, le même tribunal rejeta une requête formulée au nom de la société Set Services, tendant à la décharge ou à la réduction des cotisations d’impôts sur les sociétés et de taxes sur la valeur ajoutée pour une certaine période. En appel, la cour d’administrative d’appel de Marseille, par un arrêt définitif du 27 janvier 2004, fit partiellement droit aux prétentions du requérant en accordant à la dite société la décharge du supplément de taxe sur la valeur ajouté. Elle rejeta le surplus des conclusions en relevant, d’une part, que la gendarmerie n’avait mis aucun obstacle à ce que les représentants de la société ou son conseil puissent effectuer eux-mêmes des copies des pièces du dossier et que, d’autre part, il résultait d’une lettre du 2 septembre 1991 du conseil juridique de la société et d’une attestation du 18 juillet 1996 du comptable de celle-ci que les copies des documents utiles lui avaient été communiquées soit pendant la vérification soit en tant qu’annexes à la notification du redressement en date du 26 juillet 1991.

Par quatre jugements du 25 novembre 1999 (concernant la SCI Set Squash, le requérant et son épouse) et deux du 9 décembre 1999 (concernant la société Set Horse et l’association Set Squash Club) – devenus définitifs –, le tribunal administratif de Marseille fit droit à sa demande. Il motiva ses décisions, en des termes quasi identiques, comme suit :

« Sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu’il résulte de l’instruction que, lors de plusieurs perquisitions effectuées le 27 novembre 1990, les services de police judiciaire ont saisis l’intégralité des documents comptables et extracomptables des sociétés et associations présidées par M. Piétri, ainsi que la totalité des pièces et documents relatifs aux activités exercées à titre personnel par ce dernier ; que, par une ordonnance du 31 juillet 1991, le juge d’instruction a refusé de restituer au requérant les documents ainsi saisis et placés sous scellés, mais l’a autorisé à en obtenir des photocopies ; qu’ainsi que le relève la Cour d’Appel d’Aix-en-Provence dans son arrêt du 27 juin 1996, M. Piétri n’a pu obtenir aucune reproduction desdites pièces malgré ses demandes réitérées ;

Considérant que si l’administration fiscale ne peut être regardée comme ayant méconnu, lors des vérifications de comptabilité qu’elle a diligentées en 1991 à l’encontre de M. Piétri et des associations et sociétés susvisées, et lors de l’examen de la situation fiscale personnelle de M. et Mme Piétri, les garanties dont le livre des procédures fiscales entoure les contrôles de cette nature, il résulte des faits évoqués précédemment que, faute d’avoir pu obtenir la reproduction des documents en cause, dont il n’est pas contesté que l’administration fiscale s’est inspirée pour établir les redressements ou qu’ils auraient pu être utilisés par les contribuables pour critiquer les impositions en litige, [le requérant] n’a pas été mis en mesure, dans les circonstances de l’espèce, de présenter utilement leur défense, alors même [qu’il] a pu accéder librement aux locaux où les scellés étaient conservés, une telle possibilité, eu égard notamment à l’importance des documents saisis et à l’étendue des contrôles, ne permettent pas une consultation efficace desdites pièces ; que, par suite, les impositions contestées, nécessairement affectées par la méconnaissance de ce principe général, ne peuvent qu’être annulées (...) ;

(...) »

5. La procédure devant les juridictions civiles

Suite à la mise en recouvrement, en 1993, des différents droits de taxes demandés dans le cadre des redressements fiscaux concernant les sociétés Set Club et Set Horse, le requérant et son épouse assignèrent l’administration fiscale aux fins d’obtenir le dégrèvement desdites taxes. En 1997 et 1998, l’administration leur accorda des dégrèvements fiscaux partiels, que le requérant et son épouse contestèrent devant le tribunal de grande instance d’Aix-en-Provence.

Par deux jugements du 17 mai 1999, ledit tribunal rejeta les recours du requérant et de son épouse. Par deux arrêts du 24 mars 2004, la cour d’appel d’Aix-en-Provence réforma les jugements déférés et fit droit à leur demande. Elle motiva ses décisions – en des termes quasi identiques – comme suit :

« (...).

[Le] défaut de communication [d’une copie des pièces saisies du fait des difficultés d’exécution de l’ordonnance du juge d’instruction du 31 juillet 1991] ne lui a pas permis, bien qu’il ait pu accéder aux locaux où les scellés étaient conservés, d’en avoir connaissance dans des conditions compatibles avec le caractère contradictoire de la procédure, eu égard à l’importance des pièces saisies et à l’étendue des contrôles exercés qui concernaient l’ensemble de sa situation fiscale, celle de son épouse, leur activité de marchand de bien et celle des sociétés de leur groupe sur une période de plusieurs années.

C’est donc à juste titre que l’appelant conclut à la réformation du jugement déféré (...) puisqu’il n’a pas pu présenter utilement sa défense (...). »

GRIEF

Invoquant l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, le requérant se plaint du défaut d’équité de la procédure pénale ayant abouti à l’arrêt du 21 juin 2000 de la Cour de cassation. Il soutient qu’il n’a pu présenter utilement sa défense, dans la mesure où il n’a pas eu accès, dans des conditions normales et suffisantes, aux documents comptables et extracomptables saisis qui constituaient la base des accusations portées contre lui.

EN DROIT

Le requérant se plaint du défaut d’équité de la procédure pénale ayant abouti à l’arrêt du 21 juin 2000 de la Cour de cassation. Il soutient qu’il n’a pu présenter utilement sa défense, dans la mesure où il n’a pas eu accès, dans des conditions normales et suffisantes, aux documents comptables et extracomptables saisis qui constituaient la base des accusations portées contre lui. Il invoque l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, lequel, dans ses parties pertinentes, se lit comme suit :

« 1.  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.

(...)

3.  Tout accusé a droit notamment à :

(...)

b)  disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

(...) »

1. Thèse des parties

a)  Le Gouvernement

α) Le Gouvernement soutient que le requérant a eu accès aux pièces saisies, dans des conditions satisfaisantes, aux fins de présenter sa défense.

Bien qu’il ne conteste pas le fait que l’ordonnance du juge d’instruction du 31 juillet 1991 n’a fait l’objet d’une pleine exécution, il considère qu’il est largement établi que le requérant, tant au cours de la procédure fiscale que devant les juridictions pénales, a pu librement préparer sa défense sur la base des différents éléments comptables. La présentation faite par l’intéressé de sa situation ne correspondrait pas à la réalité des faits.

Le Gouvernement relève tout d’abord que pour quatre, au moins, des activités du requérant visées dans les poursuites pénales, la comptabilité n’avait pas été saisie. S’agissant de l’activité de marchand de biens de l’épouse du requérant, le vérificateur dressa un procès verbal le 13 mai 1991 dans lequel il constatait qu’aucune comptabilité relative à cette activité n’avait été saisie par la gendarmerie. Pareillement, la vérification de la SA Set Golf Club a donné lieu à un redressement fiscal effectué à partir d’éléments non saisis par la gendarmerie. Enfin, il apparaît que les pièces relatives à la comptabilité de la SCI Set International Immobilier et de l’association Set Club étaient tenues respectivement par la société G²DC et au siège de ladite association, lesquelles ne firent l’objet d’aucune perquisition, et donc d’aucune saisie.

Le Gouvernement estime ensuite que le requérant ne saurait reprocher aux autorités françaises le défaut d’accès à une comptabilité qui n’existait parfois tout simplement pas, puisque la fraude reposait, en ce qui concerne la vérification de la SARL Set Services, sur un défaut ou une mauvaise tenue de la comptabilité en cause. Il relève sur ce point que lors de la consultation des pièces saisies à la gendarmerie le 17 juin 1991, le vérificateur dressa un constat d’absence de nombreuses pièces de comptabilité de ladite société.

Il observe également que, s’agissant de la SCI Set Squash, le requérant avait gardé un double de certains éléments comptables, le vérificateur ayant été informé par le conseil du requérant que la comptabilité était tenue sur support informatique qui, semble-t-il, n’a pas été saisi.

De façon plus générale, le Gouvernement, se référant notamment à l’attestation du 31 mars 1992 de l’officier de police judiciaire ayant établi la procédure pénale, relève que le requérant a eu une totale liberté d’accès aux pièces saisies, qu’il en fut informé à plusieurs reprises par les services fiscaux et qu’aucune entrave à la consultation des pièces n’a jamais été réalisée. Il fut d’ailleurs invité à consulter contradictoirement les pièces saisies au cours des procédures de vérification fiscale et d’en débattre, tant avec les vérificateurs que devant la commission départementale des impôts. Son attitude, selon le Gouvernement, démontre parfois une certaine latence dans la mesure où il ne se rendit pas à plusieurs reprises aux rendez-vous fixés par les vérificateurs à la gendarmerie. En outre, il ressort des propres dires du requérant lors de son audition le 21 octobre 1993 dans le cadre de l’enquête pénale, qu’il put reconstituer « la comptabilité de l’ensemble des personnes physiques ou morales visées » ; à cet égard, il fut pleinement en mesure de produire une note de synthèse détaillée, le 19 novembre 1993, démontrant qu’il avait disposé pour ce faire d’un large accès aux pièces litigieuses.

En ce qui concerne l’argument du requérant tiré des jugements rendus en sa faveur par le tribunal administratif de Marseille les 25 novembre et 9 décembre 1999, le Gouvernement estime que cette jurisprudence aurait très probablement fait l’objet d’une annulation en cas de recours. Il se réfère à l’arrêt de la cour d’administrative d’appel d’Aix-en-Provence du 27 janvier 2004 et cite une décision du Conseil d’Etat du 25 mai 2003.

Β) Le Gouvernement soutient qu’il n’y a pas eu violation de l’article 6 au cours de la procédure pénale.

Le Gouvernement fait valoir qu’il résulte du dossier que le requérant a disposé d’une copie de l’ensemble des pièces sur lesquelles se sont fondées les condamnations pénales. S’agissant du contrôle de la société Set Services, à titre d’exemple, le vérificateur lui communiqua le 23 juillet 1991 la copie du procès-verbal de son audition sur lequel se fondait le redressement fiscal envisagé. Pour ce qui est de la SCI du Set Squash, il relève que le seul élément à partir duquel fut décelée l’une des nombreuses fraudes fiscales – à savoir une correspondance échangée entre le requérant et son comptable – lui fut communiquée le 26 août 1991. De même, s’agissant de la SA du Set Golf, la photocopie de l’ensemble des pièces était jointe au redressement notifié, dans lequel il était également mentionné que ce redressement était effectué à partir d’éléments non saisis par la gendarmerie. En outre, les notifications des redressements, qui ont fait l’objet d’observations en réponse du requérant, étaient accompagnées, lorsque cela s’avérait nécessaire, des copies de l’ensemble des documents sur lesquels ils se fondaient.

Le Gouvernement soutient ensuite que le requérant a parfaitement pu consulter les dossiers pénaux détenus au service du parquet avant l’audience et qui étaient constitués sur la base des éléments communiqués par le fisc. Il note que le requérant, le jour de l’audience, s’est d’ailleurs abstenu de demander le renvoi de l’affaire pour cause de violation des droits de la défense, et rappelle que le requérant a lui-même reconnu qu’il avait pu reconstituer la comptabilité de l’ensemble des personnes et sociétés visées. Le Gouvernement estime également que la présente espèce est mutatis mutandis comparable à l’affaire Bendenoun c. France (arrêt du 26 janvier 1994, no 12547/86) dans laquelle la Cour, concluant à la non-violation de l’article 6 § 1, avait souligné que le requérant n’ignorait pas l’existence et la teneur de la plupart des documents et que lui-même et son conseil avaient eu accès au dossier complet.

En conclusion, à supposer même, pour les besoins du raisonnement, que l’accès aux pièces comptables pendant la procédure de contrôle fiscal préalable puisse être jugé insuffisant, et dans la mesure où le requérant n’allègue ni un défaut d’accès aux dossiers pénaux (au sein desquels se trouvaient une copie de l’ensemble des pièces sur lesquelles les juridictions judiciaires se sont fondées), ni une absence de débat contradictoire en première instance et en appel, le Gouvernement estime que l’instance pénale, dans son ensemble, n’a pas méconnu le droit du requérant à un procès équitable qu’il tient de l’article 6 § 1 de la Convention. Il en résulte que la requête est irrecevable comme étant manifestement mal fondé.

b) Le requérant

Le requérant ne produit pas d’observations en réplique à celles du Gouvernement, mais souhaite le maintien de sa requête au rôle de la Cour.

2. L’appréciation de la Cour

Les exigences du paragraphe 3 b) de l’article 6 de la Convention s’analysant en des éléments particuliers du droit à un procès équitable, garanti par le paragraphe 1, la Cour étudiera l’ensemble des griefs sous l’angle des deux textes combinés (voir Hadjianastassiou c. Grèce, arrêt du 16 décembre 1992, série A no 252, p. 16, § 31 ; voir également Coëme et autres c. Belgique, nos 32492/96, 32547/96, 32548/96, 33209/96 et 33210/96, § 93, CEDH 2000-VII). Appelée à se prononcer sur les difficultés rencontrées par le requérant dans la préparation de sa défense dans le cadre de la procédure pénale diligentée contre lui, elle recherchera si, considérée dans son ensemble, la procédure concernée a revêtu un caractère équitable.

Aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, la Cour ne peut être saisie qu’après épuisement des voies de recours internes (Cardot c. France, arrêt du 19 mars 1991, série A no 200, p.18 §§ 34 à 36). Si cette disposition doit s’appliquer « avec une certaine souplesse et sans formalisme excessif », elle ne se borne pas à exiger la saisine des juridictions nationales compétentes et l’exercice de recours destinés à combattre une décision déjà rendue. Il faut que l’intéressé ait soulevé devant les autorités nationales « au moins en substance, et dans les conditions et délais prescrits par le droit interne » les griefs qu’il entend formuler par la suite à Strasbourg (arrêt Fressoz et Roire c. France [GC], no 29183/95, CEDH 1999-I, §§ 36-37).

En l’espèce, dans la mesure où le requérant axa principalement sa défense tout au long de la procédure pénale sur la violation du principe du contradictoire lors de l’examen des documents comptables, mais non explicitement sur l’absence de facilités nécessaires à la préparation de sa défense, la question de l’épuisement des voies de recours internes est susceptible de se poser en tout premier lieu. Cependant, la Cour n’estime pas nécessaire de statuer sur ce motif d’irrecevabilité, la requête étant irrecevable pour défaut manifeste de fondement, en tout état de cause.

Dans la présente affaire, le requérant a fait l’objet d’une vaste opération de contrôle fiscale concernant sa situation personnelle et celle de son épouse, ainsi que l’ensemble des sociétés et associations qu’il dirigeait directement ou indirectement, et ce, sur une période de plusieurs années. Au cours de cette opération, des milliers de documents comptables furent saisis et entreposés dans les locaux de la gendarmerie d’Aix-en-Provence, et il n’est pas contesté que l’ordonnance du 31 juillet 1991 du juge d’instruction autorisant la gendarmerie à délivrer au conseil du requérant copie de chaque document souhaité ne reçut pas exécution, motifs pris qu’une telle action se heurtait à des obstacles d’ordre technique.

Pour autant, la Cour considère que le requérant, dans les circonstances particulières de la cause, a bien disposé du « temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense » tout au long des procédures fiscales et pénales dirigées à son endroit.

En ce qui concerne les opérations de vérification comptable dont le déroulement, tel qu’il ressort de l’exposé des faits, n’est pas contesté par le requérant, la Cour tient pour acquis tout d’abord que certaines pièces comptables sur lesquelles se fondirent les redressements n’avaient pas été saisies par la gendarmerie (Set Golf Club, SCI Set International Immobilier, activité de marchand de biens de son épouse, association Set Club), qu’elles n’existaient tout simplement pas (SARL Set Service) ou encore que le requérant avait conservé un double des documents sur support informatique (SCI Set Squash). La Cour relève ensuite que le requérant s’est vu communiqué, lors des vérifications ou à l’occasion de la notification des redressements fiscaux, copie de l’ensemble des documents sur lesquels ils se fondaient ou copie des éléments révélant une éventuelle fraude fiscale (Set Service, SCI Set Squash). Enfin, il est avéré que le requérant et son conseil ont bénéficié d’un accès libre et organisé à la gendarmerie d’Aix-en-Provence dans laquelle étaient entreposées les pièces saisies, et qu’ils purent d’ailleurs en prendre copie. A cet égard, si les locaux des services d’enquête peuvent ne pas être considérés, le cas échéant, comme le lieu le plus approprié pour y préparer sereinement sa défense, force est de constater que dans les circonstances de la cause, aucune entrave à la consultation des pièces de quelque nature que ce soit n’a été posée, et que les conditions entourant cette consultation n’étaient pas excessives.

S’agissant de la procédure pénale, la Cour note qu’il résulte des propres dires du requérant, lors de son audition le 21 octobre 1993, que son expert comptable avait pu consulter les documents qu’il jugeait nécessaires et que la situation comptable de l’ensemble des personnes physiques et morales concernées avait été entièrement reconstituée. Elle observe également, avec le Gouvernement, que le requérant et son conseil ont eu la possibilité de consulter les dossiers pénaux à l’intérieur desquels se trouvait une copie de l’ensemble des pièces sur lesquelles se sont fondés les juges répressifs, en première instance comme en appel.

La Cour n’attache enfin que peu de poids aux jugements et arrêts ayant constaté une violation des droits de la défense (jugement des 25 novembre et 9 décembre 1999 du tribunal administratif de Marseille et arrêts du 24 mars 2004 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence), dans la mesure où elle est amenée à se prononcer sur les circonstances particulières de la présente espèce, lesquelles s’inscrivent dans le cadre d’une procédure pénale uniquement, et non administrative ou civile. Si les décisions rendues en faveur du requérant peuvent être considérées comme un élément parmi d’autres sur lequel peut s’appuyer le requérant, elles ne sauraient toutefois constituer l’élément déterminant dans cette affaire.

Au final, la Cour estime que le requérant a bénéficié amplement du « temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense », conformément aux garanties de l’article 6 § 3 b) de la Convention, tant lors des opérations de contrôle fiscale que devant les juridictions pénales, et que la procédure pénale considérée dans son ensemble ne souffre d’aucun grief.

Dès lors, la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare a requête irrecevable.

S. DolléI. Cabral Baretto
GreffièrePrésident

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CEDH, Cour (deuxième section), PIETRI c. FRANCE, 18 octobre 2005, 71765/01