CEDH, Cour (cinquième section), PECKELS c. FRANCE, 7 avril 2009, 17119/06

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Cinquième Section), 7 avr. 2009, n° 17119/06
Numéro(s) : 17119/06
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 14 avril 2006
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Partiellement radiée du rôle ; Partiellement irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-92446
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2009:0407DEC001711906
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Sur les parties

Texte intégral

CINQUIÈME SECTION

DÉCISION

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 17119/06
présentée par Frédéric PECKELS
contre la France

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant le 7 avril 2009 en une chambre composée de :

Rait Maruste, président,
Jean-Paul Costa,
Karel Jungwiert,
Renate Jaeger,
Mark Villiger,
Isabelle Berro-Lefèvre,
Mirjana Lazarova Trajkovska, juges
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 14 avril 2006,

Vu la déclaration du 9 janvier 2009 par laquelle le gouvernement défendeur invite la Cour à rayer en partie la requête du rôle,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Frédéric Peckels, est un ressortissant français, né en 1962 et résidant à Charenton-le-Pont. Il est représenté devant la Cour par Olivier Colman, représentant de l’Association Française contre l’Abus Psychiatrique à Mons en Baroeul. Le gouvernement français (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme E. Belliard, directrice des affaires juridiques au ministère des Affaires étrangères.

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

Par un arrêté du 19 mars 2003, le maire de Charenton-le-Pont ordonna l’hospitalisation provisoire du requérant à l’hôpital Esquirol de Saint‑Maurice au motif que ses troubles du comportement représentaient un danger pour lui-même et pour la sécurité des tiers.

Par un arrêté du 21 mars 2003, le préfet du Val-de-Marne prononça l’hospitalisation d’office du requérant à compter du 19 mars 2003. La mesure fut reconduite par des arrêtés du 18 juillet 2003, du 29 décembre 2003 et du 16 janvier 2004.

Par une requête du 28 juillet 2004, le requérant sollicita la mainlevée de l’hospitalisation ordonnée en mars 2003.

Par une ordonnance du 15 septembre 2004, le juge des libertés et de la détention ordonna une double expertise psychiatrique du requérant confiée aux Drs C. et L.

A l’audience du 26 octobre 2004, l’affaire fut renvoyée à la demande du conseil du requérant. Le 9 novembre 2004, l’affaire fut à nouveau évoquée. Le conseil du requérant souleva un incident de procédure, maintint la demande de sortie définitive et sollicita la désignation de nouveaux experts invoquant que les opérations d’expertise n’avaient pas été contradictoires. Le préfet du Val-de-Marne n’était ni présent ni représenté et n’a fait parvenir aucune observation au magistrat.

Le 30 novembre 2004, le juge des libertés et de la détention ordonna deux nouvelles expertises confiées aux Drs F.R. C. et B. L. L’affaire fut renvoyée au 8 février 2005.

L’affaire fut entendue le 8 février 2005 et mise en délibéré au 15 mars 2005. Le délibéré fut prorogé successivement aux 19 avril, 17 mai et 7 juin 2005. En raison de l’indisponibilité du magistrat qui avait eu connaissance de l’affaire, les débats furent rouverts à l’audience du 12 octobre 2005.

Par une ordonnance du 25 octobre 2005, le juge des libertés et de la détention, au vu de conclusions divergentes, ordonna deux nouvelles expertises confiées aux Drs B. L. et M.-C. C. Ce dernier expert étant indisponible, l’expertise fut confiée au Dr F. L’affaire fut renvoyée à l’audience du 7 décembre 2005. Suite à la demande du conseil du requérant, l’affaire fut renvoyée au 14 décembre 2005. A l’audience du 14 décembre 2005, le préfet, qui n’était pas représenté, ne fit pas parvenir d’observations.

Par une ordonnance du 16 décembre 2005, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Créteil rejeta la demande du requérant tendant à la mainlevée de la mesure d’hospitalisation d’office.

Le requérant n’interjeta pas appel de cette ordonnance.

Le 16 octobre 2006, le préfet abrogea l’hospitalisation d’office du requérant.

GRIEFS

Invoquant l’article 5 § 4 de la Convention, le requérant se plaint du temps mis par le juge des libertés et de la détention pour statuer sur sa demande.

Invoquant l’article 8 de la Convention, le requérant se plaint des refus opposés par le préfet à ses demandes de sortie. Il se plaint également du fait que les sorties à l’essai qui lui furent accordées, l’aient été sous condition d’être accompagné d’infirmiers. Il estime que cette obligation constitue une ingérence disproportionnée dans sa vie privée et familiale.

Invoquant l’article 13 de la Convention, le requérant se plaint de l’absence de recours efficace pour obtenir certaines sorties à l’essai alors même que, selon lui, ces sorties auraient été sollicitées par les médecins.

EN DROIT

1.  Le requérant se plaint de la durée de l’examen de sa demande de sortie immédiate, formée le 28 juillet 2004 et examinée le 16 décembre 2005, soit presque 17 mois plus tard. Il invoque l’article 5 § 4 de la Convention qui dispose :

« Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d’introduire un recours devant un tribunal, afin qu’il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale. »

A la suite de la communication de ce grief, le Gouvernement, par une lettre du 9 janvier 2009 à laquelle était jointe une déclaration, a invité la Cour à rayer l’affaire du rôle pour autant qu’elle porte sur ledit grief, en vertu de l’article 37 de la Convention.

La déclaration se lit ainsi :

« Je soussignée, Mme Anne-Françoise TISSIER, agent du Gouvernement français, déclare que le gouvernement français offre de verser à M. Frédéric PECKELS, à titre gracieux, la somme de 7 200 (sept mille deux cents) Euros au titre de la requête enregistrée sous le no 17119/06.

Cette somme ne sera soumise à aucun impôt et sera versée sur le compte bancaire indiqué par le requérant dans les trois mois à compter de la date de l’arrêt de radiation rendu par la Cour sur le fondement de l’article 37 § 1 c) de la Convention sur le compte bancaire indiqué par le requérant. Le paiement vaudra règlement définitif de la cause.

Le Gouvernement reconnaît qu’en l’espèce il y a eu violation de l’article 5 § 4 de la Convention du fait du non-respect de l’exigence de bref délai pour l’examen de la demande de mainlevée de l’hospitalisation d’office du requérant. »

Le requérant s’oppose à la radiation du rôle et sollicite le versement d’un certain nombre de sommes au titre de l’article 41 de la Convention.

La Cour observe d’emblée que les parties ne sont pas parvenues à s’entendre sur les termes d’un règlement amiable de l’affaire. Elle rappelle qu’en vertu de l’article 38 § 2 de la Convention, les négociations menées dans le cadre de règlements amiables sont confidentielles. L’article 62 § 2 du règlement dispose en outre à cet égard qu’aucune communication orale ou écrite, ni aucune offre ou concession intervenues dans le cadre des ces négociations ne peuvent être mentionnées ou invoquées dans la procédure contentieuse.

La Cour partira donc de la déclaration faite le 9 janvier 2009 par le Gouvernement en dehors du cadre des négociations menées en vue de parvenir à un règlement amiable.

La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 37 de la Convention, elle peut à tout moment de la procédure décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances permettent de conduire à l’une des conclusions exposées aux alinéas a), b) ou c) du paragraphe 1 de cette disposition. L’article 37 § 1 c) permet en particulier à la Cour de rayer une requête du rôle si :

« pour tout autre motif dont la Cour constate l’existence, il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête ».

L’article 37 § 1 in fine dispose :

« Toutefois, la Cour poursuit l’examen de la requête si le respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles l’exige. »

La Cour rappelle que, dans certaines circonstances, il peut être indiqué de rayer une affaire du rôle en vertu de l’article 37 § 1 c) de la Convention sur la base d’une déclaration unilatérale du gouvernement défendeur même si le requérant souhaite que l’examen de l’affaire se poursuive. Ce seront toutefois les circonstances particulières de la cause qui permettront de déterminer si la déclaration unilatérale offre une base suffisante pour que la Cour conclue que le respect des droits de l’homme garantis par la Convention n’exige pas qu’elle poursuive l’examen de l’affaire (Tahsin Acar c. Turquie [GC], no 26307/95, § 75, CEDH 2004‑III ; Van Houten c. Pays-Bas (radiation), no 25149/03, § 33, CEDH 2005‑IX et Darque et 23 autres c. France (déc.) (radiation), 1er juillet 2008).

La Cour note que le grief communiqué au Gouvernement dans la présente affaire portait sur la durée de l’examen de la demande de sortie immédiate d’hospitalisation du requérant. Elle a déjà eu l’occasion de conclure au non-respect de l’exigence de « bref délai » au sens de l’article 5 § 4 (voir, par exemple, S.U. c. France, no 23054/03, 10 octobre 2006 ; Treboux c. France, no 7217/05, 3 octobre 2006 ; Van Glabeke c. France, no 38287/02, CEDH2006‑... ; Gaultier c. France, no 41522/98, 28 mars 2006 ; Mathieu c. France, no 68673/01, 27 octobre 2005 ; L. R. c. France, no 33395/96, 27 juin 2002, § 38, où il s’agissait de délais allant de vingt‑quatre jours et jusqu’à plus de dix mois).

Dans sa déclaration, le Gouvernement reconnaît qu’il y a eu en l’espèce violation de l’article 5 § 4 de la Convention et propose de payer 7 200 (sept mille deux cents) euros au requérant à titre de réparation.

La Cour en conclut, eu égard à la déclaration et au montant proposé, qu’il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de ce grief. Elle est en outre convaincue que le respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles n’exige pas qu’elle poursuive l’examen de celui-ci (article 37 § 1 in fine).

2.  Le requérant se plaint en outre des refus opposés par le préfet à ses demandes de sortie. Il se plaint également du fait que les sorties à l’essai qui lui furent accordées, l’aient été sous condition d’être accompagné d’infirmiers. Il estime que cette obligation constitue une ingérence disproportionnée dans sa vie privée et familiale et invoque l’article 8 de la Convention.

La Cour note qu’en l’espèce le requérant n’a formé aucun recours en annulation devant le juge administratif afin de contester les décisions du préfet rejetant ses demandes de sorties à l’essai ou leurs modalités, lorsque de telles mesures lui furent accordées.

Il s’ensuit que ce grief doit être rejeté pour non-épuisement des voies de recours internes, en application de l’article 35 §§ 1 et 4 de la Convention.

3.  Invoquant l’article 13 de la Convention, le requérant se plaint de l’absence de recours efficace pour obtenir certaines sorties à l’essai alors même que, selon lui, ces sorties auraient été sollicitées par les médecins.

Eu égard à ce qui précède, ce grief est manifestement mal fondé et doit être rejeté en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Prend acte des termes de la déclaration du Gouvernement ;

Décide de rayer la requête du rôle pour autant qu’elle porte sur la question de l’examen à bref délai de la demande de sortie immédiate formulée par le requérant ;

Déclare irrecevable le surplus de la requête.

              Claudia WesterdiekRait Maruste
GreffièrePrésident

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