CEDH, Cour (cinquième section), MESSIER c. FRANCE, 19 mai 2009, 25041/07

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Chronologie de l’affaire

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3La double poursuite des infractions boursières condamnée par la Cour européenne des Droits de l'Homme
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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Cinquième Section), 19 mai 2009, n° 25041/07
Numéro(s) : 25041/07
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 12 juin 2007
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Partiellement irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-92863
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2009:0519DEC002504107
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Sur les parties

Texte intégral

CINQUIÈME SECTION

DÉCISION PARTIELLE

SUR LA RECEVABILITÉ

de la requête no 25041/07
présentée par Jean-Marie MESSIER
contre la France

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant le 19 mai 2009 en une chambre composée de :

Peer Lorenzen, président,
Rait Maruste,
Jean-Paul Costa,
Karel Jungwiert,
Renate Jaeger,
Isabelle Berro-Lefèvre,
Zdravka Kalaydjieva, juges,
et de Claudia Westerdiek, greffière de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 12 juin 2007,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

Le requérant, M. Jean-Marie Messier, est un ressortissant français, né en 1956 et résidant à New-York. Il est représenté devant la Cour par la S.C.P. Piwnica et Molinie, avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation.

A.  Les circonstances de l’espèce

Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par le requérant, peuvent se résumer comme suit.

1.  La procédure devant la Commission des opérations de bourse puis l’Autorité des marchés financiers

Le requérant était, jusqu’au 1er juillet 2002, date de sa démission, président-directeur général de la société Vivendi Universal.

Le 3 juillet 2002, le directeur général de la Commission des opérations de bourse (COB) décida d’ouvrir une enquête sur l’information financière délivrée par Vivendi Universal à compter du 1er décembre 2000. Cette décision fut étendue le 10 juillet 2002 au marché des titres Vivendi Universal et Vivendi Environnement. Elle s’inscrivait dans le cadre d’une crise de confiance dans l’entreprise et sa direction. Le but de cette enquête était de déterminer si l’information financière qui avait été délivrée au marché depuis la fusion avec un groupe canadien en décembre 2000 était exacte, précise et sincère et si le management avait, le plus tôt possible, porté à la connaissance du public tout fait important susceptible, s’il était connu, d’avoir une incidence significative sur le cours de l’action.

Le chef du service de l’inspection de la COB acheva son rapport le 4 septembre 2003.

Le 5 septembre 2003, un membre de la COB fut désigné comme rapporteur. Ce rapporteur notifia des griefs, au requérant notamment, le 12 septembre 2003. Compte tenu du volume exceptionnel des pièces de la procédure et des nécessités de leur reproduction, il fut indiqué aux mis en cause que celles-ci seraient mises à leur disposition ultérieurement et qu’ils disposeraient d’un délai de trois mois après la date à laquelle les pièces leur seraient accessibles pour présenter leurs observations. Ces pièces furent mises à leur disposition le 29 octobre 2003.

Suite à l’entrée en vigueur de la loi du 1er août 2003 de sécurité financière, l’Autorité des marchés financiers (AMF) succéda à la COB. Un rapporteur fut nommé le 28 novembre 2003 et les mis en cause en furent informés par lettres du 23 décembre 2003. Ayant obtenu des délais supplémentaires du rapporteur, le requérant déposa ses observations le 8 mars 2004. Le requérant fut entendu, à sa demande, par le rapporteur le 24 mai 2004. En réponse à sa demande, le rapporteur convoqua le 13 juillet 2004 Mme G., directrice de la presse et des relations publiques de Vivendi Universal. Toutefois, cette dernière ne se présenta pas et le rapporteur estima qu’elle pourrait être entendue par la commission des sanctions, en séance.

Le 5 avril 2004, le journal La Tribune publia un entretien avec le secrétaire général de l’AMF. Celui-ci y parlait de la situation de Vivendi Universal notamment en ces termes :

« Sur cette base, avec les éléments dont je disposais à l’époque, j’ai souhaité rappeler à l’ordre le groupe sans pour autant dramatiser la situation en ouvrant une enquête dont je considérais qu’elle ne conduirait vraisemblablement pas à une sanction en raison du contexte de marché. (...) Depuis plusieurs mois, nous suivions de manière très attentive sa communication financière. Au cours de l’été, nous leur avons notamment rappelé que la communication d’un groupe coté doit se faire sur la base de données consolidées et pas seulement sur une partie des activités, en l’occurrence les media. En outre, le groupe ne respectait pas les prescriptions du régulateur en utilisant des agrégats spécifiques et souvent trompeurs. Mais il faut reconnaître que nous n’avions pas à l’époque mesuré l’étendue de ces pratiques regrettables, que nous avons pu analyser , de façon très précise, mais a posteriori dans le rapport d’enquête de la COB. (...) »

Le 13 juillet 2004, le rapport signé du rapporteur fut adressé aux mis en cause et le 26 août suivant, une lettre de convocation à la séance du 28 octobre 2004 leur fut remise par acte d’huissier. Par lettre du 20 octobre 2004, Mme G. fut invitée à se présenter le 28 octobre suivant devant la commission des sanctions de l’AMF.

A titre liminaire, le requérant fit valoir que l’enquête et le rapport n’avaient pas été conduits de manière contradictoire et impartiale, le dossier ne comportant pas toutes les pièces dont l’AMF disposait et les auditions demandées, dont celle de Mme G., n’ayant pas été effectuées. Il demandait en outre que la commission sursoie à statuer jusqu’à la fin de l’information judiciaire en cours afin que certaines pièces du dossier pénal puissent lui être présentées.

Dans sa décision du 3 novembre 2004, la commission des sanctions se prononça d’abord sur ces demandes. Elle rappela que le principe du contradictoire doit s’appliquer à partir du moment où un rapporteur est désigné et s’applique aux seules pièces figurant dans le dossier dont celui-ci est saisi. Elle constata qu’en l’espèce tous les mis en cause avaient eu communication du dossier, avaient été entendus par le rapporteur et avaient pu produire les documents qu’ils estimaient utiles à leur défense. Pour ce qui est des personnes susceptibles d’apporter leur témoignage, elle releva qu’elle avait répondu favorablement à toutes les demandes, que Mme G. notamment avait été entendue et qu’elle avait également déposé des documents écrits.

Sur le fond, la commission des sanctions conclut comme suit :

« Considérant que, si les manquements d’initiés ne sont pas caractérisés, il demeure que, durant la période d’octobre 2000 à avril 2002 où les difficultés financières du groupe augmentaient au rythme de ses acquisitions et se traduisaient par une incapacité croissante à générer la trésorerie indispensable à sa compétitivité, M. Jean-Marie Messier, président directeur général de V.U., a délibérément diffusé au nom de cette société, à propos de la consolidation de TELCO, ainsi que des dettes, des cash flow et des perspectives d’avenir du groupe, des informations inexactes et abusivement optimistes ; qu’il a trompé le public, surpris la confiance du marché et porté préjudice aux actionnaires ; que seront prononcées, à son égard et à celui de la société V.U. qu’il représentait, des sanctions proportionnées à la gravité des manquements visés aux articles 2 à 4 du règlement COB No 98-07 et L.621-14-I du code monétaire et financier qui ont été commis ; »

Le requérant fut condamné à une sanction pécuniaire d’un million d’euros.

2.  La procédure devant la cour d’appel de Paris

Le 3 décembre 2004, le journal La Tribune publia un entretien avec le président de la commission des sanctions de l’AMF. Celui-ci s’y exprimait notamment dans les termes suivants concernant la société Vivendi Universal :

« A l’issue de onze heures de plaidoiries et d’un long temps de réflexion, la sanction est sur le point d’être notifiée aux intéressés. (...) L’engagement de la rendre publique avant la fin de cette année a été pris. Il sera tenu. La publication de cette décision est donc toute proche. »

En réponse à une question, il indiqua encore qu’il « ne serait pas impossible » que des sanctions supérieures à 500 000 euros soient prononcées « prochainement ».

Le requérant fit appel de la décision du 3 novembre 2004. Il demandait l’annulation de la décision de la commission des sanctions de l’AMF en invoquant des irrégularités commises au cours de l’enquête. Il soutenait que des pièces réunies par les enquêteurs avaient disparu, que d’autres n’avaient, délibérément, pas été versées aux débats, qu’il avait été procédé à des auditions sans procès-verbal et que certains procès-verbaux avaient été établis de manière irrégulière. Il mentionnait notamment des DVD et CD contenant l’ensemble des courriels et des agendas des dirigeants de Vivendi Universal.

Dans ces observations, l’AMF se prononça comme suit sur ce dernier point :

« Ces supports informatiques n’ont pas été remis aux requérants au moment de la remise de la photocopie des dizaines de milliers de pages composant le dossier. Cette omission a-t-elle pour autant porté une atteinte aux droits de la défense ? La question ne pourrait se poser que si ces supports informatiques avaient été dissimulés aux requérants et contenaient des éléments inconnus d’eux et retenus à charge à leur encontre. Rien de tel. »

L’AMF exposa ensuite que l’existence de ces supports entre les mains de la COB n’avait pas été dissimulée, que les requérants ne pouvaient pas en ignorer le contenu puisqu’il s’agissait de leurs agendas et des échanges de courriels créés et reçus par eux, qu’ils n’avaient pas réclamé la remise de ces supports lorsque la copie du dossier d’enquête leur avait été remise, que les supports en cause étaient des copies et que les requérants détenaient eux‑mêmes, non seulement les originaux des courriels et agendas, mais également la copie de ces supports informatiques qu’ils s’étaient abstenus de verser au dossier. Elle conclut qu’elle répondrait positivement à toute demande de la cour d’appel et/ou des requérants tendant à la communication de ces supports.

La cour d’appel de Paris se prononça par arrêt du 28 juin 2005.

Elle releva tout d’abord que si l’irrégularité de forme d’un procès-verbal était établie, elle ne serait de nature qu’à justifier son annulation, sans entraîner l’annulation de la procédure dans son ensemble, et que les requérants ne visaient aucun procès-verbal en particulier.

En ce qui concerne les auditions, elle considéra que ne portent pas atteinte aux droits de la défense le défaut d’audition, au cours de l’enquête, de certaines personnes ou l’audition informelle de certaines autres dont les déclarations n’ont pas servi à la poursuite. Elle estima que les droits de la défense étaient suffisamment garantis dès lors que les personnes poursuivies avaient été mises en mesure d’obtenir, au moins devant la juridiction de jugement, l’audition de toute personne dont le témoignage leur paraissait utile à la manifestation de la vérité, ce qui avait été le cas en l’espèce.

Pour ce qui est des pièces, la cour constata qu’ayant enquêté sur la communication du groupe à partir du 31 décembre 2000, l’AMF avait nécessairement collecté des documents sans rapport avec les griefs notifiés et qu’il ne saurait dès lors lui être reproché de ne pas avoir versé au dossier la totalité des documents qu’elle détenait. Ainsi, le fait que l’AMF ait procédé à une sélection des pièces du dossier finalement soumis à la commission des sanctions n’était pas, en soi, de nature à vicier la procédure, à moins qu’il ne soit démontré que, manquant à son devoir de loyauté, elle n’ait distrait des éléments de nature à influer sur l’appréciation du bien-fondé des griefs retenus. En l’espèce, en admettant même que des pièces détenues par l’AMF aient disparu, ce qui n’était pas établi aux yeux de la cour d’appel, les requérants, qui en fournissaient la liste détaillée, ne précisaient pas en quoi ces pièces auraient été de nature à influer sur l’appréciation des faits et se bornaient à faire valoir qu’il était vraisemblable, compte tenu de leur absence au dossier, qu’elles contenaient des éléments à décharge.

La cour d’appel releva enfin que les requérants connaissaient l’identité de partie, sinon de la totalité, des auteurs des pièces prétendument manquantes et qu’ils pouvaient demander leur audition devant la commission des sanctions de l’AMF ou devant elle-même, ce qu’ils n’avaient pas fait. Elle écarta donc ce moyen.

Le requérant alléguait encore devant la cour d’appel la violation du principe d’impartialité du fait des déclarations faites par le secrétaire général de l’AMF et du président de la commission des sanctions dans le journal La Tribune. La cour d’appel estima sur ce point que, la commission des sanctions étant indépendante des autres services de l’AMF, elle n’avait pu être engagée par les propos du secrétaire général. Elle ajouta qu’aucune atteinte au principe invoqué ne résultait de ces déclarations qui se bornaient à commenter les conditions dans lesquelles l’AMF avait accompli sa mission de contrôle, sans porter d’appréciation sur les griefs notifiés.

Quant aux déclarations faites par le président de la commission le 4 décembre 2004, la cour d’appel releva que le délibéré était arrêté à cette date et que ces déclarations, même si elles étaient prématurées car publiées alors que la décision n’avait pas encore été notifiée aux parties poursuivies, n’avaient pu porter atteinte à l’impartialité de la commission.

Sur le fond, la cour d’appel réforma partiellement la décision déférée et condamna le requérant à une sanction de 500 000 euros.

3.  La procédure devant la Cour de cassation

Le requérant se pourvut en cassation contre cet arrêt.

Il invoquait tout d’abord l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention : il alléguait qu’en ayant jugé unilatéralement du sort des pièces recueillies dans le cadre de l’enquête et en entendant des personnes de manière informelle, l’AMF avait violé le principe de l’égalité des armes ; il se plaignait de que la cour d’appel n’avait pas recherché si un témoignage à décharge entendu à l’audience à une date où la partie poursuivie ne pouvait plus présenter d’observations écrites ni bénéficier d’un délai pour analyser ce témoignage, pouvait être utile à cette partie et de ce que certaines pièces incluses dans le dossier ne lui avaient pas été communiquées. Invoquant l’article 6 §§ 1 et 2, il invoquait la présomption d’innocence et faisait valoir que dans l’entretien qu’il avait accordé au journal La Tribune le 5 avril 2004, le secrétaire général de l’AMF avait donné son sentiment sur le caractère inexact de l’information délivrée par la société Vivendi Universal avant que la commission des sanctions de l’AMF eût pris sa décision ; il se plaignait également sous l’angle des mêmes dispositions de pas avoir été jugé par un tribunal impartial du fait des déclarations du président de la commission des sanctions de l’AMF et de celle du secrétaire général de l’AMF dans le journal La Tribune. Le requérant contestait enfin la qualification d’« information trompeuse » retenue par la cour d’appel.

Par arrêt du 19 décembre 2006, la Cour de cassation rejeta le pourvoi. Elle approuva l’analyse faite par la cour d’appel concernant la sélection des pièces du dossier par l’AMF et l’audition des témoins. Pour ce qui est de la présomption d’innocence, la Cour de cassation releva que le requérant n’avait pas soulevé ce moyen devant la cour d’appel, qu’il était nouveau et mélangé de fait et de droit et donc irrecevable. En ce qui concerne le manque allégué d’impartialité de la commission des sanctions de l’AMF, la Cour de cassation estima que les circonstances invoquées n’étaient pas de nature à créer, même en apparence, un doute sur son impartialité.

B.  Le droit et la pratique internes pertinents

1.  Code de commerce

Article L225-56

« I. – Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société. Il exerce ces pouvoirs dans la limite de l’objet social et sous réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées d’actionnaires et au conseil d’administration.

Il représente la société dans ses rapports avec les tiers. La société est engagée même par les actes du directeur général qui ne relèvent pas de l’objet social, à moins qu’elle ne prouve que le tiers savait que l’acte dépassait cet objet ou qu’il ne pouvait l’ignorer compte tenu des circonstances, étant exclu que la seule publication des statuts suffise à constituer cette preuve. »

Article L233-16

« I. – Les sociétés commerciales établissent et publient chaque année à la diligence du conseil d’administration, du directoire, du ou des gérants, selon le cas, des comptes consolidés ainsi qu’un rapport sur la gestion du groupe, dès lors qu’elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises ou qu’elles exercent une influence notable sur celles-ci, dans les conditions ci-après définies. (...) »

2.  Loi du 1er août 2003

Article 47

« Les règlements du Comité de la réglementation bancaire et financière, de la Commission des opérations de bourse et le règlement général du Conseil des marchés financiers demeurent applicables. (...) »

Article 49-IV

« La validité des actes de constatation et de procédure accomplis antérieurement à la première réunion de la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers ou de la Commission de contrôle des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance s’apprécie au regard des dispositions législatives et réglementaires en vigueur à la date à laquelle ils ont été pris ou accomplis.

Les procédures de sanction devant la Commission des opérations de bourse, le Conseil des marchés financiers et le Conseil de discipline de la gestion financière en cours à la date de la première réunion du collège de l’Autorité des marchés financiers sont poursuivies de plein droit par celui-ci devant la commission des sanctions dans les conditions prévues à l’article L. 621-15 du code monétaire et financier dans sa rédaction issue de la présente loi. Lorsque les griefs ont été notifiés par la Commission des opérations de bourse, le Conseil des marchés financiers et le Conseil de discipline de la gestion financière, la commission des sanctions est saisie du dossier en l’état. (...) »

3.  Code monétaire et financier (tel que modifié par la loi no 2003-76 du 1er août 2003)

Article L451-1-2

« I. – Les émetteurs français dont des titres de capital, ou des titres de créance dont la valeur nominale est inférieure à 1 000 euros et qui ne sont pas des instruments du marché monétaire, (...) publient et déposent auprès de l’Autorité des marchés financiers un rapport financier annuel dans les quatre mois qui suivent la clôture de leur exercice.

Ce rapport financier annuel est tenu à la disposition du public pendant cinq ans, selon des modalités prévues par le règlement général de l’Autorité des marchés financiers. Il comprend les comptes annuels, les comptes consolidés le cas échéant, un rapport de gestion, une déclaration des personnes physiques qui assument la responsabilité de ces documents et le rapport des commissaires aux comptes ou des contrôleurs légaux ou statutaires sur les comptes précités.

(...)

V. – Sans préjudice des règles du code de commerce applicables aux comptes annuels, aux comptes consolidés, au rapport de gestion et au rapport semestriel d’activité ainsi qu’aux rapports des commissaires aux comptes, le règlement général de l’Autorité des marchés financiers précise le contenu des documents mentionnés aux I, III et IV.

VII. – Sans préjudice des obligations prévues par le code de commerce, le règlement général de l’Autorité des marchés financiers fixe les modalités de publication, de dépôt et de conservation des documents et informations mentionnés au présent article.

(...) »

Article L465-2

« Est puni des peines prévues au premier alinéa de l’article L. 465-1 le fait, pour toute personne, d’exercer ou de tenter d’exercer, directement ou par personne interposée, une manœuvre ayant pour objet d’entraver le fonctionnement régulier d’un marché d’instruments financiers en induisant autrui en erreur. »

Article L621-1

« L’Autorité des marchés financiers, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers et tous autres placements donnant lieu à appel public à l’épargne, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers. »

Article L621-2

« I. – L’Autorité des marchés financiers comprend un collège, une commission des sanctions et, le cas échéant, des commissions spécialisées et des commissions consultatives.

Sauf disposition contraire, les attributions confiées à l’Autorité des marchés financiers sont exercées par le collège.

II. – Le collège est composé de seize membres :

(...)

Le président de l’Autorité des marchés financiers a qualité pour agir au nom de celle-ci devant toute juridiction.

(...)

III. – Dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, le collège peut donner délégation à des commissions spécialisées constituées en son sein et présidées par le président de l’Autorité des marchés financiers pour prendre des décisions de portée individuelle.

(...)

IV. – L’Autorité des marchés financiers comprend une commission des sanctions chargée de prononcer les sanctions mentionnées aux articles L. 621-15 et L. 621-17.

Cette commission des sanctions comprend douze membres :

1o Deux conseillers d’État désignés par le vice-président du Conseil d’État ;

2o Deux conseillers à la Cour de cassation désignés par le premier président de la Cour de cassation ;

3o Six membres désignés, à raison de leur compétence financière et juridique ainsi que de leur expérience en matière d’appel public à l’épargne et d’investissement de l’épargne dans des instruments financiers, par le ministre chargé de l’économie (...)

4o Deux représentants des salariés des entreprises ou établissements prestataires de services d’investissement, des sociétés de gestion d’organismes de placements collectifs, des entreprises de marché, des chambres de compensation, des gestionnaires de systèmes de règlement livraison et des dépositaires centraux, désignés par le ministre chargé de l’économie après consultation des organisations syndicales représentatives.

Le président est élu par les membres de la commission des sanctions parmi les personnes mentionnées aux 1o et 2o.

La commission des sanctions peut constituer des sections de six membres, présidées par l’une des personnes mentionnées aux 1o et 2o.

Les fonctions de membre de la commission des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège.

(...) »

Article L621-5-1

« L’Autorité des marchés financiers dispose de services dirigés par un secrétaire général. Pour la désignation de ce dernier, le président de l’autorité soumet une proposition au collège qui en délibère et formule un avis dans le délai d’un mois. A l’issue de ce délai, le secrétaire général est nommé par le président. Cette nomination est soumise à l’agrément du ministre chargé de l’économie. Jusqu’à la nomination du secrétaire général, les attributions de celui-ci peuvent être exercées par une personne désignée par le président de l’Autorité des marchés financiers.

(...) »

Article L621-9

« I. – Afin d’assurer l’exécution de sa mission, l’Autorité des marchés financiers effectue des contrôles et des enquêtes.

Elle veille à la régularité des opérations effectuées sur des titres faisant l’objet d’appel public à l’épargne. (...)

II. – L’Autorité des marchés financiers veille également au respect des obligations professionnelles auxquelles sont astreintes, en vertu des dispositions législatives et réglementaires, les entités ou personnes suivantes ainsi que les personnes physiques placées sous leur autorité ou agissant pour leur compte :

(...)

5o Les entreprises de marché ;

(...) »

Article L621-10

« Les enquêteurs peuvent, pour les nécessités de l’enquête, se faire communiquer tous documents, quel qu’en soit le support, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunications (...) et en obtenir la copie. Ils peuvent convoquer et entendre toute personne susceptible de leur fournir des informations. Ils peuvent accéder aux locaux à usage professionnel. »

Article L621-12

« Pour la recherche des infractions définies aux articles L. 465-1 et L. 465-2, le président du tribunal de grande instance dans le ressort duquel sont situés les locaux à visiter peut, sur demande motivée du secrétaire général de l’Autorité des marchés financiers, autoriser les enquêteurs de l’Autorité à effectuer des visites en tous lieux ainsi qu’à procéder à la saisie de documents (...)

Le juge doit vérifier que la demande d’autorisation qui lui est soumise est fondée ; cette demande doit comporter tous les éléments d’information en possession de l’Autorité de nature à justifier la visite. (...)

La visite s’effectue sous l’autorité et le contrôle du juge qui l’a autorisée. Il peut se rendre dans les locaux pendant l’intervention. A tout moment, il peut décider la suspension ou l’arrêt de la visite.

(...)

Les enquêteurs de l’Autorité, l’occupant des lieux ou son représentant et l’officier de police judiciaire peuvent seuls prendre connaissance des pièces avant leur saisie.

L’officier de police judiciaire veille au respect du secret professionnel et des droits de la défense conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 56 du code de procédure pénale. L’article 58 de ce code est applicable.

Le procès-verbal de visite relatant les modalités et le déroulement de l’opération est dressé sur-le-champ par les enquêteurs de l’Autorité. Un inventaire des pièces et documents saisis lui est annexé. Le procès-verbal et l’inventaire sont signés par les enquêteurs de l’Autorité et par l’officier de police judiciaire ainsi que les personnes mentionnées au cinquième alinéa du présent article ; en cas de refus de signer, mention en est faite au procès-verbal. (...)

Les pièces et documents qui ne sont plus utiles à la manifestation de la vérité sont restitués à l’occupant des lieux. »

Article L621-14

« I. – Le collège peut, après avoir mis la personne concernée en mesure de présenter ses explications, ordonner qu’il soit mis fin aux pratiques contraires aux dispositions législatives ou réglementaires, lorsque ces pratiques sont de nature à porter atteinte aux droits des épargnants ou ont pour effet de fausser le fonctionnement du marché, de procurer aux intéressés un avantage injustifié qu’ils n’auraient pas obtenu dans le cadre normal du marché, de porter atteinte à l’égalité d’information ou de traitement des investisseurs ou à leurs intérêts ou de faire bénéficier les émetteurs ou les investisseurs des agissements d’intermédiaires contraires à leurs obligations professionnelles. Ces décisions peuvent être rendues publiques.

II. (...)

En cas de poursuites pénales, l’astreinte, si elle a été prononcée, n’est liquidée qu’après que la décision sur l’action publique est devenue définitive. »

Article L621-15

« I. – Le collège examine le rapport d’enquête ou de contrôle établi par les services de l’Autorité des marchés financiers, ou la demande formulée par le gouverneur de la Banque de France, président de la Commission bancaire, ou par le président de l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles.

S’il décide l’ouverture d’une procédure de sanction, il notifie les griefs aux personnes concernées. Il transmet la notification des griefs à la commission des sanctions, qui désigne un rapporteur parmi ses membres. La commission des sanctions ne peut être saisie de faits remontant à plus de trois ans s’il n’a été fait pendant ce délai aucun acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction.

(...) »

II.-La commission des sanctions peut, après une procédure contradictoire, prononcer une sanction à l’encontre des personnes suivantes :

a)  Les personnes mentionnées aux 1o à 8o et 11o à 15o du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l’article L. 613-21 ;

(...)

d)  Toute personne qui, sur le territoire français, s’est livrée ou a tenté de se livrer à une opération d’initié ou s’est livrée à une manipulation de cours, à la diffusion d’une fausse information ou à tout autre manquement mentionné au dernier alinéa du I de l’article L. 621-14, dès lors que ces actes concernent un instrument financier admis aux négociations sur un marché réglementé d’un autre État membre de la Communauté européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou pour lequel une demande d’admission aux négociations sur un tel marché a été présentée.

III. – Les sanctions applicables sont :

a)  Pour les personnes mentionnées aux 1o à 8o, 11o, 12o et 15o du II de l’article L. 621-9, l’avertissement, le blâme, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des services fournis ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 10 millions d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ;

b)  Pour les personnes physiques placées sous l’autorité ou agissant pour le compte de l’une des personnes mentionnées aux 1o à 8o, 11o, 12o et 15o du II de l’article L.  621-9, l’avertissement, le blâme, le retrait temporaire ou définitif de la carte professionnelle, l’interdiction à titre temporaire ou définitif de l’exercice de tout ou partie des activités ; la commission des sanctions peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions une sanction pécuniaire dont le montant ne peut être supérieur à 1, 5 million d’euros ou au décuple du montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques mentionnées aux c et d du II ou à 300 000 euros ou au quintuple des profits éventuellement réalisés dans les autres cas ; les sommes sont versées au fonds de garantie auquel est affiliée la personne morale sous l’autorité ou pour le compte de qui agit la personne sanctionnée ou, à défaut, au Trésor public ;

(...)

Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements.

(...)

IV. – La commission des sanctions statue par décision motivée, hors la présence du rapporteur. Aucune sanction ne peut être prononcée sans que la personne concernée ou son représentant ait été entendu ou, à défaut, dûment appelé.

V. – La commission des sanctions peut rendre publique sa décision dans les publications, journaux ou supports qu’elle désigne, à moins que cette publication ne risque de perturber gravement les marchés financiers ou de causer un préjudice disproportionné aux parties en cause. Les frais sont supportés par les personnes sanctionnées. »

Article L621-15-1

« Si l’un des griefs notifiés conformément au deuxième alinéa du I de l’article L. 621-15 est susceptible de constituer un des délits mentionnés aux articles L. 465-1 et L. 465-2, le collège transmet immédiatement le rapport d’enquête ou de contrôle au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris.

(...)

Le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris peut transmettre à l’Autorité des marchés financiers, d’office ou à la demande de cette dernière, la copie de toute pièce d’une procédure relative aux faits objets de la transmission. »

Article L621-16

« Lorsque la Commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers a prononcé une sanction pécuniaire devenue définitive avant que le juge pénal ait statué définitivement sur les mêmes faits ou des faits connexes, celui-ci peut ordonner que la sanction pécuniaire s’impute sur l’amende qu’il prononce. »

Article L621-16-1

« Lorsque des poursuites sont engagées en application des articles L. 465-1 et L. 465-2, l’Autorité des marchés financiers peut exercer les droits de la partie civile. Toutefois, elle ne peut à l’égard d’une même personne et s’agissant des mêmes faits concurremment exercer les pouvoirs de sanction qu’elle tient du présent code et les droits de la partie civile. »

Article L621-18

« L’Autorité des marchés financiers s’assure que les publications prévues par les dispositions législatives ou réglementaires sont régulièrement effectuées par les émetteurs mentionnés à l’article L. 451-1-2.

Elle vérifie les informations que ces émetteurs publient. A cette fin, elle peut exiger des émetteurs, des personnes qui les contrôlent ou sont contrôlées par eux et de leurs commissaires aux comptes ou contrôleurs légaux ou statutaires qu’ils fournissent tous documents et informations utiles.

(...) »

Article L621-30

« L’examen des recours formés contre les décisions individuelles de l’Autorité des marchés financiers (...) est de la compétence du juge judiciaire. Ces recours n’ont pas d’effet suspensif sauf si la juridiction en décide autrement. Dans ce cas, la juridiction saisie peut ordonner qu’il soit sursis à l’exécution de la décision contestée si celle-ci est susceptible d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »

4.   Jurisprudence

  1. Arrêt du Conseil d’État du 2 novembre 2005 (Société Banque privée Fideuram Wargny)

« Quand elle [l’Autorité des marchés financiers] est saisie d’agissements pouvant donner lieu à des sanctions prévues par l’article L.621-15 du code monétaire et financier, [sa] commission des sanctions (...) doit être regardée comme décidant du bien-fondé d’accusations en matière pénale au sens de la convention européenne ; que toutefois, compte tenu du fait que sa décision peut faire l’objet d’un recours de pleine juridiction devant le Conseil d’Etat, la circonstance que la procédure conduite devant elle ne serait pas en tous points conforme aux prescriptions de l’article 6 § 1 de la convention n’est pas de nature à entraîner dans tous les cas une méconnaissance du droit à un procès équitable ; que cependant ‑et alors même que la commission n’est pas une juridiction au regard du droit interne‑, les moyens tirés de ce qu’elle aurait statué dans des conditions qui ne respecteraient pas le principe d’impartialité et le principe du respect des droits de la défense rappelés à l’article 6 de la convention européenne peuvent, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de cet organisme, être utilement invoqués à l’appui d’un recours formé devant le Conseil d’Etat à l’encontre de sa décision ; »

  1.   Arrêt du Conseil d’État du 22 juin 2006 (Global Equities)

« Considérant que la décision dont la suspension est demandée a été prise par la commission des sanctions de l’AMF ; que, contrairement à ce qui est soutenu, cette commission n’exerce aucun pouvoir réglementaire ; que les notifications de griefs faites par cette commission ne révèlent aucun pré-jugement des affaires ; que les personnes poursuivies ont pu s’expliquer devant la commission dans des conditions qui respectent les droits de la défense ; que le moyen tiré de la longueur excessive de la procédure ne peut utilement être invoqué à l’encontre de la décision litigieuse ; qu’aucun des moyens tirés d’une méconnaissance des obligations, rappelées par l’article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de suivre une procédure équitable et impartiale n’est donc, en l’état de l’instruction, de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision dont la suspension est demandée ; »

GRIEFS

1.  Sous l’angle de l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, le requérant se plaint de ce que le principe de l’égalité des armes et du contradictoire n’a pas été respecté car on lui a refusé le droit à la communication de l’ensemble des pièces recueillies dans le cadre de l’enquête et transmises à la Commission des sanctions de l’AMF. Il expose que, lorsqu’elle est saisie d’agissements pouvant donner lieu à des sanctions prévues par le code monétaire et financier, la Commission des sanctions de l’AMF doit être regardée comme décidant du bien-fondé d’accusations en matière pénale, au sens de l’article 6 § 3 de la Convention. En l’occurrence, le principe de l’égalité des armes justifierait donc selon lui que les enquêteurs de la COB, aujourd’hui de l’AMF, soient obligés de verser au dossier transmis aux autorités de jugement et aux personnes poursuivies l’ensemble des pièces qu’ils ont examinées ou recueillies dans le cadre de leur enquête et de dresser procès‑verbal de toute audition. Il souligne sur ce point la différence de moyens entre l’AMF et la personne poursuivie.

Il rappelle notamment qu’il n’a pas obtenu la communication des CD‑ROM et des DVD, contenant copie de l’ensemble des messageries et agendas des différents dirigeants de Vivendi Universal , officiellement cotés et figurant dans le dossier constitué pour la nécessité des poursuites.

2.  Invoquant encore l’article 6 §§ 1 et 3, le requérant se plaint de ce que le principe de l’égalité des armes a été méconnu du fait que le droit a été reconnu à l’AMF de décider des témoignages devant ou non être communiqués aux juges et à la partie poursuivie. Il fait valoir que les textes font obligation aux enquêteurs de l’AMF de dresser procès-verbal des déclarations qu’ils recueillent, lesquelles peuvent contenir des éléments de preuve à décharge.

3.  Le requérant estime encore que l’article 6 §§ 1 et 3 a été violé puisqu’il n’a pas pu faire entendre les témoins à décharge. Il souligne qu’il a demandé tout au long de l’instruction que Mme G., directrice de la communication de Vivendi Universal, soit entendue mais que le rapporteur l’a convoquée seulement à une date où son rapport était déjà rédigé, et qu’elle a été entendue finalement le jour de l’audience devant la commission des sanctions. Dès lors, selon le requérant, il n’a pas pu faire utilement valoir ce témoignage à décharge devant le rapporteur et aucun délai ne lui a été laissé pour tirer parti de cette audition.

4.  Se référant à l’article 6 § 2 de la Convention, le requérant soutient que la présomption d’innocence a été violée à son encontre du fait des déclarations du secrétaire général de l’AMF dans le journal La Tribune.

5.  Invoquant l’article 6 § 1 et le droit à un procès équitable, le requérant se plaint de ce que la Cour de cassation a rejeté son moyen tiré de la violation de la présomption d’innocence en le considérant comme nouveau, ce qu’il conteste.

6.  Le requérant se plaint encore de ne pas avoir bénéficié du principe d’impartialité garanti par l’article 6 § 1 du fait des déclarations dans la presse du secrétaire général de l’AMF et du Président de la Commission des Sanctions.

7.  Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, le requérant se plaint enfin de ce que son droit de propriété a été méconnu car il n’a pas bénéficié de procédures lui offrant une occasion adéquate de faire valoir son degré de faute par rapport à la commission de l’infraction qui a justifié qu’une amende lui ait été infligée.

EN DROIT

1.  Sous l’angle de l’article 6 §§ 1 et 3 de la Convention, le requérant se plaint de ce que le principe de l’égalité des armes n’a pas été respecté et de ce qu’il n’a pas bénéficié d’une procédure contradictoire car on lui a refusé le droit à la communication de l’ensemble des pièces recueillies dans le cadre de l’enquête, ainsi que de celles transmises à la commission des sanctions de l’AMF. Selon lui, les enquêteurs de l’AMF sont obligés de verser au dossier transmis aux autorités de jugement et aux personnes poursuivies l’ensemble des pièces qu’ils ont examinées ou recueillies dans le cadre de leur enquête et de dresser procès-verbal de toute audition. Il souligne sur ce point la différence de moyens entre l’AMF et la personne poursuivie. Il rappelle notamment qu’il n’a pas obtenu la communication des CD-ROM et des DVD, contenant copie de l’ensemble des messageries et agendas des différents dirigeants de Vivendi Universal, officiellement cotés et figurant dans le dossier constitué pour la nécessité des poursuites.

L’article 6 se lit, dans ses dispositions pertinentes, comme suit :

« 1.  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)


3.  Tout accusé a droit notamment à :

(...)

b)  disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ;

(...) »

La Cour part de l’idée que l’article 6 est applicable à la procédure litigieuse, dans la mesure où la commission des sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) doit être regardée comme décidant du bien-fondé d’« accusations en matière pénale » au sens de la Convention, comme cela se déduit de la jurisprudence du Conseil d’État précitée (voir Guisset c. France, no 33933/96, § 59, CEDH 2000‑IX).

En l’état actuel du dossier, la Cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l’article 54 § 2 b) de son règlement.

2.  Invoquant encore l’article 6 §§ 1 et 3, le requérant se plaint de ce que le principe de l’égalité des armes a été méconnu du fait que l’AMF a décidé des témoignages devant ou non être communiqués aux juges et à la partie poursuivie. Il fait valoir que les textes font obligation aux enquêteurs de l’AMF de dresser procès-verbal des déclarations qu’ils recueillent, lesquelles peuvent contenir des éléments de preuve à décharge.

L’article 6 se lit notamment comme suit :

« 1.  Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.

(...)

3.  Tout accusé a droit notamment à :

(...)

d)  interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. »

En l’état actuel du dossier, la Cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur la recevabilité de ce grief et juge nécessaire de communiquer cette partie de la requête au gouvernement défendeur conformément à l’article 54 § 2 b) de son règlement.

3.  Toujours sous l’angle de l’article 6 §§ 1 et 3, le requérant ajoute qu’il n’a pas pu faire entendre les témoins à décharge, que Mme G. a été entendue seulement le jour de l’audience devant la commission des sanctions. Dès lors, il estime ne pas avoir pu faire utilement valoir ce témoignage à décharge devant le rapporteur et bénéficier d’un délai pour tirer parti de cette audition.

Concernant, comme en l’espèce, l’audition de témoins à décharge, la Cour a déjà jugé (voir Guilloury c. France, no 62236/00, § 55, 22 juin 2006) que l’article 6 § 3 d) de la Convention n’exige pas la convocation et l’interrogation de tout témoin à décharge : ainsi que l’indiquent les mots « dans les mêmes conditions », il a pour but essentiel une complète « égalité des armes » en la matière. La notion d’« égalité des armes » n’épuise pourtant pas le contenu du paragraphe 3 d) de l’article 6, pas plus que du paragraphe 1 dont cet alinéa représente une application parmi beaucoup d’autres. La tâche de la Cour consiste à rechercher si la procédure litigieuse, considérée dans son ensemble, a revêtu le caractère équitable voulu par le paragraphe 1 (Vidal c. Belgique, 22 avril 1992, § 33, série A no 235-B). En effet, il ne suffit pas, au requérant qui allègue la violation de l’article 6 § 3 d), de démontrer qu’il n’a pas pu interroger un certain témoin à décharge. Encore faut-il qu’il rende vraisemblable que la convocation dudit témoin était nécessaire à la recherche de la vérité et que le refus de l’interroger a causé un préjudice aux droits de la défense (Erich Priebke c. Italie (déc.), no 48799/99, 5 avril 2001).

En l’espèce, la Cour relève que le requérant a demandé l’audition de Mme G., directrice de la presse et des relations publiques de Vivendi Universal, au rapporteur de l’AMF. Celle-ci fut convoquée une première fois par le rapporteur pour le 13 juillet 2004, mais elle ne se présenta pas. Elle fut reconvoquée et entendue finalement par la commission des sanctions de l’AMF le jour de l’audience le 28 octobre 2004. Le requérant a donc obtenu satisfaction sur ce point, la Convention ne prévoyant nullement que l’accusé doive bénéficier d’un délai quelconque après l’audition d’un témoin pour pouvoir « tirer partie » de sa déposition.

Par ailleurs, bien que visant dans sa requête « les témoins à décharge », le requérant ne mentionne pas le nom d’autres témoins à décharge qu’il aurait souhaité faire entendre.

Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

4. Le requérant se plaint encore de ne pas avoir bénéficié du principe d’impartialité garanti par l’article 6 § 1 du fait des déclarations dans la presse du secrétaire général de l’AMF et du Président de la Commission des sanctions.

La Cour rappelle qu’aux fins de l’article 6 § 1, l’impartialité doit s’apprécier selon une démarche subjective, essayant de déterminer la conviction et le comportement personnels de tel juge en telle occasion, et aussi selon une démarche objective amenant à s’assurer qu’il offrait des garanties suffisantes pour exclure à cet égard tout doute légitime (voir, entre autres, Hauschildt c. Danemark, 24 mai 1989, § 46, série A no 154, et Thomann c. Suisse, 10 juin 1996, § 30, Recueil 1996-III).

Dans la présente affaire, elle relève d’emblée que le secrétaire général de l’AMF ne siège pas dans la commission des sanctions, qui est indépendante des autres services de l’AMF, et n’a donc pas été appelé à juger le requérant.

Pour ce qui est du président de la commission des sanctions de l’AMF, la Cour constate que ses déclarations dans La Tribune datent du 3 décembre 2004, alors que la décision de sanction avait été adoptée le 3 novembre précédent. Par ailleurs, elle relève le caractère général des déclarations du président de la commission des sanctions.

Il s’ensuit que cette partie de la requête est manifestement mal fondée et doit être rejetée en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

5.  Le requérant soutient qu’il n’a pas bénéficié d’un procès équitable au sens de l’article 6 § 1 car son moyen tiré de la violation de la présomption d’innocence a été déclaré nouveau et donc irrecevable par la Cour de cassation. Il ajoute que la présomption d’innocence a été violée à son encontre du fait des déclarations du secrétaire général de l’AMF dans la presse.

L’article 6 se lit, dans ses passages pertinents, comme suit :

« 1.   Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.

(...)

2.  Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.»

La Cour rappelle par ailleurs qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes. A cet égard, elle souligne que tout requérant doit avoir donné aux juridictions internes l’occasion que l’article 35 § 1 a pour finalité de ménager en principe aux États contractants : éviter ou redresser les violations alléguées contre lui (Cardot c. France, 19 mars 1991, § 36, série A no 200). Néanmoins, les dispositions de l’article 35 ne prescrivent l’épuisement que des recours à la fois relatifs aux violations incriminées, disponibles et adéquats. Ils doivent exister à un degré suffisant de certitude non seulement en théorie mais aussi en pratique, sans quoi leur manquent l’effectivité et l’accessibilité voulues (voir notamment Vernillo c. France, 20 février 1991, § 27, série A no 198, et Dalia c. France, 19 février 1998, § 38, Recueil des arrêts et décisions 1998-I).

En l’espèce, la Cour observe que, si le requérant a soulevé devant la Cour de cassation un moyen tiré de l’article 6 § 2 de la Convention et de la violation de son droit à la présomption d’innocence en raison des déclarations faites dans la presse par le secrétaire général de l’AMF, il n’avait pas invoqué cette disposition devant la cour d’appel. En effet, le requérant n’avait mentionné cette déclaration et celle du président de la commission des sanctions de l’AMF que pour se plaindre du manque d’impartialité de la procédure.

Dans ces conditions, le requérant n’a pas épuisé les voies de recours internes sur ce point et le fait que la Cour cassation ait déclaré ce moyen irrecevable ne révèle aucune atteinte à l’équité du procès.

Dès lors, il convient de rejeter ces griefs en application de l’article 35  §§  1 et 4 de la Convention.

6. Invoquant l’article 1 du Protocole no 1, le requérant se plaint enfin de ce que son droit de propriété a été méconnu car il n’a pas bénéficié de procédures lui offrant une occasion adéquate de faire valoir son degré de faute par rapport à la commission de l’infraction qui a justifié qu’une amende lui ait été infligée.

Cet article se lit :

« Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.

Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu’ils jugent nécessaires pour réglementer l’usage des biens conformément à l’intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d’autres contributions ou des amendes. »

La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes (voir supra).

Elle constate qu’en l’espèce, le requérant n’a pas soulevé ce grief devant la Cour de cassation

Dans ces conditions, le requérant n’a pas épuisé les voies de recours internes sur ce point et il convient de rejeter ce grief en application de l’article 35  §§  1 et 4 de la Convention.

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Ajourne l’examen des griefs du requérant tirés du fait que l’intégralité des pièces et des témoignages recueillis au cours de l’enquête ne lui a pas été communiqué ;

Déclare la requête irrecevable pour le surplus.

              Claudia WesterdiekPeer Lorenzen
GreffièrePrésident

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CEDH, Cour (cinquième section), MESSIER c. FRANCE, 19 mai 2009, 25041/07