CEDH, Cour (cinquième section comité), MEDJAOURI c. FRANCE, 12 juin 2018, 45196/15

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Chronologie de l’affaire

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www.dbfbruxelles.eu · 17 juillet 2018

La requête d'un ressortissant algérien contestant son interdiction du territoire français est irrecevable dans la mesure où son expulsion n'est pas imminente (5 juillet) Décision Medjaouri c. France, requête n°45196/15 La Cour EDH rappelle qu'il est nécessaire que la mesure d'éloignement soit imminente ou proche pour que le requérant puisse se prétendre victime d'une violation de la Convention EDH, ce qui n'est pas le cas en l'espèce puisque l'arrêté d'expulsion date de 1997. Elle souligne que la fixation du pays de renvoi faisant l'objet d'une décision séparée, celle-ci pourrait être …

 

CEDH · 5 juillet 2018

Communiqué de presse sur l'affaire 45196/15

 

CEDH · 5 juillet 2018

Communiqué de presse sur les affaires 45196/15, 67149/17 et 41299/09

 
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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Cinquième Section Comité), 12 juin 2018, n° 45196/15
Numéro(s) : 45196/15
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 15 septembre 2015
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-184641
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2018:0612DEC004519615
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Sur les parties

Texte intégral

CINQUIÈME SECTION

DÉCISION

Requête no 45196/15
Rabah MEDJAOURI
contre la France

La Cour européenne des droits de l’homme (cinquième section), siégeant le 12 juin 2018 en un comité composé de :

Mārtiņš Mits, président,
André Potocki,
Lado Chanturia, juges,
et de Milan Blaško, greffier adjoint de section,

Vu la requête susmentionnée introduite le 10 septembre 2015,

Vu les observations soumises par le gouvernement défendeur et celles présentées en réponse par le requérant,

Après en avoir délibéré, rend la décision suivante :

EN FAIT

1.  Le requérant, M. Rabah Medjaouri, est un ressortissant algérien né en 1953 et résidant à Paris. Il a été représenté devant la Cour par Me J.M. Biju-Duval, avocat exerçant à Paris.

2.  Le gouvernement français (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. F. Alabrune, directeur des affaires juridiques au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères.

A.  Les circonstances de l’espèce

3.  Les faits de la cause, tels qu’ils ont été exposés par les parties, peuvent se résumer comme suit.

4.  Le requérant est arrivé en France à l’âge de 17 ans. Ses quatre enfants sont de nationalité française. Ses sœurs et sa mère vivent régulièrement sur le territoire national.

5.  Le requérant est diabétique et atteint d’une maladie cardiaque. Il a été opéré d’un rétrécissement aortique le 26 février 2015.

1.  Faits au moment de l’introduction de la requête

6.  À la suite de deux condamnations pénales en 1995 et 1996, le requérant fit l’objet d’un arrêté d’expulsion pris par le préfet de police de Paris le 11 avril 1997. Cet arrêté fut mis à exécution le 28 octobre 2000. Le requérant revint irrégulièrement sur le territoire français dès le début de l’année 2001.

7.  Entre 2001 et 2004, le requérant fut condamné à deux reprises.

8.  Par arrêt du 20 mars 2006, la cour d’appel d’Aix-en-Provence condamna le requérant à dix ans d’emprisonnement pour de nouvelles infractions relatives au trafic de stupéfiants et à une interdiction définitive du territoire français. Par un arrêt du 31 janvier 2011, cette cour rejeta la requête en relèvement d’interdiction du territoire présentée par le requérant, décision confirmée par la Cour de cassation le 18 janvier 2012.

9.  Le 7 mars 2011, le requérant sortit de prison. Le même jour, il fit une demande d’assignation à résidence auprès du ministre de l’Intérieur afin de pouvoir obtenir le relèvement de l’interdiction du territoire infligée le 20 mars 2006. Il compléta sa demande par la suite et sollicita une mesure d’assignation à résidence pour raisons médicales. Il demanda également auprès du préfet de police de Paris, dans le cadre du réexamen quinquennal prévu par l’article L. 524-2 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (ci-après CESEDA, paragraphe 21 ci-dessous), l’abrogation de l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997.

10.  Par une décision en date du 6 février 2013, le ministre de l’Intérieur rejeta ses demandes. Le préfet de police ne répondit pas à sa demande.

11.  Par un jugement du 31 janvier 2014, le tribunal administratif de Paris annula la décision implicite de refus d’abrogation de l’arrêté d’expulsion, considérant qu’elle était contraire à l’article 8 de la Convention en raison des liens intenses du requérant avec la France. S’agissant de la demande d’assignation, il jugea que rien n’indiquait que le requérant ne pourrait pas bénéficier d’un traitement approprié en Algérie. Par un arrêt du 31 décembre 2014, la cour administrative d’appel de Paris annula le jugement. Elle considéra, d’une part, que l’ordre public était toujours menacé, et, d’autre part, que les pièces produites n’étaient pas de nature à remettre en cause l’avis du médecin de la préfecture selon lequel les traitements étaient disponibles dans le pays. Le requérant ne forma pas de pourvoi à la suite du rejet de sa demande d’aide juridictionnelle pour absence de moyens sérieux.

2.  Faits postérieurs à la communication de la requête

12.  Par un arrêté du 26 février 2016, le requérant fut assigné à résidence jusqu’au 18 décembre 2016 afin de recevoir les soins nécessités par son état de santé.

13.  Le 27 septembre 2016, le requérant saisit la cour d’appel d’Aix‑en‑Provence d’une requête en relevé de l’interdiction définitive du territoire prononcée le 20 mars 2006.

14.  À la suite d’un nouvel avis du médecin de la préfecture du 22 novembre 2016 selon lequel l’état de santé de l’intéressé nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d’une exceptionnelle gravité et le traitement approprié était absent en Algérie, le ministre de l’Intérieur décida, par arrêté du 23 janvier 2017, de prolonger l’assignation à résidence du requérant jusqu’au 22 novembre 2017.

15.  Le 13 mars 2018, à la suite d’une demande d’information du greffe de la Cour, le Gouvernement indiqua que, par un arrêt du 24 octobre 2017, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait relevé le requérant de l’interdiction définitive du territoire prononcée le 20 mars 2006 pour la raison suivante :

« (...) Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la question de [la santé du requérant] constitue la question centrale et que compte tenu de cet état de santé et de la prise en charge médicale ne pouvant pas intervenir dans son pays d’origine, il convient, malgré un passé pénal particulièrement lourd, de trouver un cadre juridique plus adapté à sa situation que l’assignation à résidence constamment renouvelée ».

16.  Le Gouvernement précisa également que le préfet de police de Paris avait accordé au requérant une autorisation provisoire de séjour valable jusqu’au 4 mai 2018.

B.  Le droit et la pratique interne pertinents

17.  L’expulsion est une mesure prise par le ministre de l’Intérieur ou le préfet qui oblige un étranger à quitter le territoire français parce que sa présence constitue une menace pour l’ordre public français (articles L. 521‑1 à L. 521-3 du CESEDA). En cas de procédure ordinaire, l’étranger doit avoir été préalablement avisé de la mesure envisagée à son encontre, au moins quinze jours avant d’être entendu devant la commission d’expulsion qui donne un avis (article L. 522-1 du CESEDA).

18.  La décision d’expulser prend la forme d’un arrêté d’expulsion dont un exemplaire est remis à l’étranger. L’expulsion est immédiatement exécutoire (article L. 523-1 du CESEDA). L’administration peut procéder à son exécution par la force. Un recours en annulation contre l’arrêté d’expulsion est possible devant le tribunal administratif. Ce recours n’a pas de caractère suspensif et n’autorise pas l’étranger concerné à rester en France.

19.  La fixation du pays de renvoi d’un étranger sous le coup d’un arrêté d’expulsion fait l’objet d’une décision séparée et spécifique qui peut faire l’objet d’un recours distinct qui n’a pas d’effet suspensif (articles L. 513-3 et L. 523-2 du CESEDA).

20.  L’arrêté d’expulsion continue à produire ses effets tant qu’il n’a pas été abrogé. Il peut être à tout moment abrogé par le préfet ou le ministre de l’Intérieur ; l’étranger a aussi la possibilité d’en demander l’abrogation (articles L. 524-1 et R. 524-1 du CESEDA). Il ne peut être fait droit à une demande d’abrogation que si le ressortissant étranger réside hors de France. Toutefois, cette condition ne s’applique pas lorsque l’étranger subit une peine d’emprisonnement ferme, fait l’objet d’une assignation à résidence notamment pour raisons médicales (paragraphe 22 ci-dessous) ou pour la mise en œuvre de l’article L. 524-2 du CESEDA (paragraphe 21 ci‑dessous).

21.  L’article L. 524-2 du CESEDA institue un réexamen automatique des motifs de l’arrêté d’expulsion tous les cinq ans à compter de la date d’adoption de l’arrêté. L’autorité compétente tient compte de l’évolution de la menace pour l’ordre public que constitue la présence de l’intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu’il présente, en vue de prononcer éventuellement l’abrogation de l’arrêté. À défaut de notification à l’intéressé d’une décision explicite d’abrogation dans un délai de deux mois, ce réexamen est réputé avoir conduit à une décision implicite refusant l’abrogation. L’étranger peut présenter des observations écrites. Cette décision est susceptible de recours dans les conditions prévues à l’article R. 421-2 du code de justice administrative (ci‑après CJA). Selon l’article L. 524-2 précité, le réexamen ne donne pas lieu à la consultation de la commission des expulsions.

22.  L’étranger qui fait l’objet d’une expulsion et qui justifie être dans l’impossibilité de quitter le territoire français, en établissant qu’il ne peut ni regagner son pays d’origine, ni se rendre dans aucun autre pays, peut être assigné à résidence. Peut faire notamment l’objet d’une assignation à résidence l’étranger qui a fait l’objet d’un arrêté d’expulsion non exécuté lorsque son état de santé nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d’une exceptionnelle gravité, sous réserve qu’il ne puisse effectivement bénéficier d’un traitement approprié dans le pays de renvoi (article L. 523-4 du CESEDA).

GRIEFS

23.  Invoquant l’article 3 de la Convention, le requérant se plaint que l’exécution de la mesure d’expulsion aurait des conséquences d’une exceptionnelle gravité car la surveillance médicale et le traitement dont il a besoin ne pourraient être poursuivis en Algérie. Invoquant l’article 8 de la Convention, il allègue que le refus d’abroger l’arrêté d’expulsion pris à son encontre le 11 avril 1997 fait obstacle à toute admission au séjour et ordonne son éloignement vers l’Algérie en portant une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

EN DROIT

24.  Le requérant se plaint de la violation des articles 3 et 8 de la Convention dont les dispositions pertinentes sont ainsi libellées :

Article 3

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

Article 8

« 1.  Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...).

2.  Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien‑être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

25.  Le Gouvernement invite la Cour à déclarer la requête irrecevable comme étant prématurée dès lors que le requérant ne court pas de risque imminent de renvoi dans son pays d’origine et qu’il ne peut donc se prétendre victime au sens de l’article 34 de la Convention (Vijayanathan et Pusparajah c. France, 27 août 1992, série A no 241‑B).

26.  Il fait valoir que si l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997 est toujours en vigueur, n’ayant été ni annulé par le juge administratif ni abrogé par l’administration, il ne peut faire l’objet d’une exécution, forcée ou spontanée, qu’une fois le pays de destination fixé par l’autorité administrative (paragraphe 19 ci-dessus). Il précise que cette décision n’est pas toujours concomitante à l’arrêté d’expulsion, en particulier lorsque cette mesure a déjà été exécutée précédemment. Il constate que la décision fixant le pays de destination n’a pas été prise à ce jour et indique en conséquence qu’aucun risque d’éloignement effectif ne pèse sur le requérant. En tout état de cause, ce dernier disposerait de recours pour contester une telle décision administrative, en l’occurrence un recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif, assorti d’un référé-suspension prévu à l’article L. 521-1 du CJA, ou un référé-liberté prévu à l’article L 521-2 du CJA.

27.  En outre, le Gouvernement souligne que la jurisprudence administrative considère que lorsqu’un arrêté d’expulsion n’a pas reçu exécution pendant une durée considérée comme anormalement longue et que ce retard est exclusivement dû à une inaction de l’administration, l’exécution d’office de l’arrêté doit être regardée, non plus comme fondée sur l’arrêté d’expulsion initial mais sur un nouvel arrêté d’expulsion, dont l’existence est révélée par la mise en œuvre de l’arrêté (CE, ordonnance du 10 avril 2009, no 326863). La décision de mise à exécution tardive de l’arrêté d’expulsion peut alors faire l’objet d’un recours devant les juridictions administratives (TA Paris, ordonnance du 16 septembre 2013, no 1312171/9). Ainsi, si l’autorité administrative entendait aujourd’hui remettre à exécution l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997 qu’elle a déjà exécuté une première fois, elle se retrouverait dans la même situation qu’en cas d’exécution tardive de l’arrêté d’expulsion et devrait procéder à un nouvel examen de la situation de l’intéressé suivant la procédure prévue par l’article L. 522-1 du CESEDA (paragraphe 17 ci-dessus).

28.  Enfin, le Gouvernement précise que le préfet de police de Paris a accordé au requérant une autorisation provisoire de séjour valable jusqu’au 4 mai 2018.

29.  Le requérant souligne que l’arrêt rendu le 24 octobre 2017 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence fait droit à son argumentation selon laquelle son état de santé rend impossible son éloignement vers le pays dont il a la nationalité. Pour autant, il fait valoir que la suppression de l’assignation à résidence et les termes de l’autorisation provisoire de séjour dont les effets ont expiré le 4 mai 2018 confirment l’imminence du risque d’éloignement à la discrétion du Gouvernement, aucune garantie de séjour n’étant offerte au-delà de cette date.

30.  Le requérant considère qu’il est toujours sous le coup d’une expulsion, sur le fondement de l’arrêté initial ou sur le fondement d’une nouvelle décision d’expulsion implicite ou expresse, dès lors qu’aucun jugement ordonnant la suspension ou l’annulation de ces décisions n’a été rendu. Il fait valoir que les recours à sa disposition évoqués par le Gouvernement en cas de mise à exécution de l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997 (paragraphes 18, 19 et 26 ci-dessus) n’ont en eux-mêmes aucun caractère suspensif. Il soutient que l’absence d’abrogation de l’arrêté d’expulsion, malgré ses demandes réitérées, démontre par elle-même la réalité du risque d’une exécution imminente de cette décision. Il ajoute que l’arrêté d’expulsion a pour effet de le priver du droit au séjour sur le territoire et de le maintenir dans une précarité personnelle, sociale et professionnelle portant gravement atteinte à ses droits garantis par l’article 8 de la Convention. Le requérant conclut qu’il est victime au sens de l’article 34 de la Convention et que la requête ne peut en aucun cas être regardée comme étant prématurée.

31.  La Cour rappelle qu’un requérant ne peut se prétendre victime au sens de l’article 34 que s’il est ou a été directement touché par l’acte ou omission litigieux : il faut qu’il en subisse ou risque d’en subir directement les effets (Norris c. Irlande, 26 octobre 1988, §§ 30 et 31, série A no 142, Otto-Preminger-Institut c. Autriche, 20 septembre 1994, § 39, série A no 295‑A). Elle observe que dans certaines affaires, où les requérants sont sous le coup d’une mesure d’éloignement dont la mise en œuvre n’est ni imminente ni proche, elle considère qu’ils ne peuvent pas se prétendre victimes au sens de l’article 34 de la Convention (Vijayanathan et Pusparajah, précité, § 46, Arjan Pellumbi c. France (déc.), no 65730/01, 18 janvier 2005, Ay c. France (déc.) [Comité], no 6629/12, 3 mars 2015; voir, également, les affaires dans lesquelles la Cour a rayé les requêtes du rôle dans les mêmes circonstances, Khan c. Allemagne [GC], no 38030/12, § 34, 21 septembre 2016 ; voir, cependant, A.N. c. France, no 19919/13, 2 mai 2017.

32.  En l’espèce, la Cour constate que le requérant est toujours sous le coup de l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997, qui n’a été ni annulé ni abrogé. Cela étant, la Cour note que le Gouvernement français souligne que la mise à exécution de cette décision ne saurait être considérée comme imminente et que le requérant ne risque pas, pour le moment, d’être expulsé.

33.  La Cour n’aperçoit aucune raison de douter du sérieux de cette affirmation. Elle note, premièrement, que la fixation du pays de renvoi d’un étranger sous le coup d’un arrêté d’expulsion fait l’objet d’une décision séparée et spécifique (paragraphe 19 ci-dessus). Une telle mesure constitue, d’après le Gouvernement, un préalable juridique obligatoire à l’exécution d’une mesure d’éloignement (paragraphe 26 ci-dessus) et, si elle devait être prise, le requérant aurait la possibilité de la contester devant le tribunal administratif afin de formuler les griefs qu’il fait valoir devant la Cour. La Cour relève, deuxièmement, que le gouvernement français indique qu’en cas d’inexécution d’un arrêté d’expulsion pendant plusieurs années, un nouvel arrêté d’expulsion « implicite » doit se substituer à l’ancien, et l’autorité administrative, à cette occasion, devrait procéder à un nouvel examen de la situation du requérant. La Cour a déjà eu, en effet, l’occasion de constater que « selon la jurisprudence du Conseil d’État français, lorsqu’un arrêté d’expulsion est trop ancien, il ne peut plus être mis à exécution : l’autorité administrative doit, le cas échéant, prendre un autre arrêté au vu des circonstances à la date de cette nouvelle décision » (Arjan Pellumbi, précité). Enfin, la Cour note que, à la suite de la récente levée de l’interdiction du territoire par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, le requérant s’est vu délivrer une autorisation provisoire de séjour, ce qui indique que l’arrêté d’expulsion, contrairement à ce qu’il affirme, n’est pas, dans son cas, un obstacle insurmontable à la délivrance d’un titre de séjour.

34.  Il n’appartient pas à la Cour de spéculer sur le comportement futur des autorités françaises. Compte tenu de la nature subsidiaire du mécanisme de contrôle institué par la Convention, et eu égard à ce qui précède, la Cour estime que le requérant, bien que restant sous le coup de l’arrêté d’expulsion du 11 avril 1997, n’encourt pas de risque d’éloignement du territoire français proche ou imminent. Il ne peut donc se prétendre victime d’une violation des articles 3 et 8 de la Convention au sens de l’article 34. Soulignant par ailleurs que, le cas échéant, il aura la possibilité de saisir la Cour d’une nouvelle requête si des décisions internes lui faisant courir un tel risque devaient être prises, la Cour conclut que la requête doit être rejetée comme étant manifestement mal fondée au sens de l’article 35 §§ 3 a) et 4 de la Convention (mutatis mutandis, Arjan Pellumbi et Ay précités).

Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,

Déclare la requête irrecevable.

Fait en français puis communiqué par écrit le 5 juillet 2018.

Milan BlaškoMārtiņš Mits
Greffier adjointPrésident

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