CEDH, Commission, X. c. LA REPUBLIQUE FEDERALE D'ALLEMAGNE, 14 décembre 1970, 4256/69
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Sur la décision
Référence : | CEDH, Commission, 14 déc. 1970, n° 4256/69 |
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Numéro(s) : | 4256/69 |
Publication : | Recueil 37, pp. 67-69 |
Type de document : | Recevabilité |
Niveau d’importance : | Importance élevée |
Opinion(s) séparée(s) : | Non |
Conclusion : | Irrecevable |
Identifiant HUDOC : | 001-27937 |
Identifiant européen : | ECLI:CE:ECHR:1970:1214DEC000425669 |
Texte intégral
EN FAIT
Considérant que les faits de la cause peuvent se résumer ainsi:
Le requérant, ressortissant polonais, né en 1920 à Poddebice (Pologne),
se trouve actuellement détenu à la prison de Sarrebruck. Il avait saisi
le 14 avril 1962 la Commission d'une première requête (No 1622/62) que
la Commission déclara irrecevable le 8 juillet 1964.
Le requérant se plaignait à l'époque d'avoir encouru plusieurs
condamnations en République Fédérale d'Allemagne et il postulait son
rapatriement en Pologne.
Dans la présente requête il incrimine le jugement prononcé contre lui
le .. septembre 1966 par le tribunal régional de Sarrebruck le
condamnant pour vol en état de récidive à quatre ans et six mois de
réclusion. Le tribunal avait également ordonné la relégation à titre
de mesure de sûreté. La Cour fédérale de Justice rejeta le .. février
1967 le pourvoi en cassation formé par le requérant.
En 1970 le requérant demande à être mise en liberté provisoire. Le
tribunal régional de Sarrebruck rejeta une première demande de mise en
liberté provisoire pour vice de forme le .. mars 1970 et une deuxième
le .. avril 1970 au motif que le tribunal ne pouvait assumer la
responsabilité d'une telle mesure dans le cas du requérant.
Le requérant évoque également la question de son rapatriement vers la
Pologne qui faisait déjà l'objet de sa première requête No 1622/62.
En effet, alors qu'il purgeait une peine d'emprisonnement prononcée
contre lui, le requérant avait sollicité en 1961 auprès de la mission
militaire polonaise à Berlin l'autorisation de se rendre en Pologne.
Malgré le fait que cette autorisation lui avait été accordée, le
requérant ne s'est pas, lors de son élargissement le .. décembre 1961,
rendu en Pologne, et cela bien qu'il fût interdit de séjour en
République Fédérale d'Allemagne.
Le requérant indique qu'il a fait de nouvelles démarches en vue d'être
rapatrié vers la Pologne auprès du procureur d'Etat de Sarrebruck après
sa condamnation de 1966. Il semble cependant que le procureur n'ait pas
été en mesure de donner une quelconque suite à ces démarches car le
requérant refusait de remplir les formulaires nécessaires qui avaient
été mis à sa disposition.
Le requérant invoque les articles 2, 3, 4, 5, 6 et 7 de la Convention
de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales,
ainsi que les dispositions des Protocoles additionnels No 1 et 4.
Il prétend que son incarcération en République Fédérale d'Allemagne
serait fondamentalement injuste et compare les conditions de sa
détention à celles d'un camp de concentration nazi. Il allègue que
c'est par esprit de vengeance que les autorités judiciaires fédérales
noyautées par des éléments nazis feraient systématiquement obstacle à
son retour dans sa Pologne natale. Il insiste également sur ce que la
procédure ayant abouti à sa condamnation aurait été inéquitable et que
son défenseur, désigné d'office, aurait été un incapable.
Le requérant sollicite que la Commission reconnaisse le bien-fondé de
ses prétentions et lui vienne en aide, afin d'obtenir sa mise en
liberté, son rapatriement et une indemnisation adéquate du préjudice
subi par lui.
EN DROIT
Considérant d'abord, pour autant que le requérant allègue qu'une
violation de l'article 6 (art. 6) de la Convention de Sauvegarde des
Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales aurait entaché la
procédure qui s'est déroulée devant le requérant de Sarrebruck et qui
a abouti le .. septembre 1966 à sa condamnation pour vol; que la
Commission, selon l'article 26 in fine (art. 26) de la Convention ne
peut être saisie que "dans le délai de six mois, à partir de la date
de la décision interne définitive"; que plus de six mois se sont
écoulés entre l'arrêt de la Cour Fédérale de justice du .. février
1967, qui constituait sur le point considéré la décision interne
définitive, et l'introduction de la requête (le 30 janvier 1969);
qu'en outre, la Commission ne discerne aucune circonstance particulière
susceptible d'avoir interrompu ou suspendu le délai dont il s'agit;
qu'il appert, dès lors, que la requête est tardive à cet égard (article
27 par. 3 (art. 27-3));
Considérant ensuite, pour autant que le requérant demande son
rapatriement vers la Pologne, que cette demande faisait déjà l'objet
de la requête No 1622/62 qu'il avait introduite le 14 avril 1962 contre
la République Fédérale d'Allemagne, que la Commission, dans sa décision
du 8 juillet 1964, avait déclaré irrecevable cette requête comme étant
sous ce rapport incompatible avec les dispositions de la Convention;
Considérant que l'article 27 par. 1b) (art. 27-1-b) de la Convention
dispose que "la Commission ne retient aucune requête par application
de l'article 25 (art. 25), lorsque ... elle est essentiellement la même
qu'une requête précédemment examinée par la Commission ... et si elle
ne contient pas de faits nouveaux"; que cependant le requérant invoque
expressément à ce sujet le Protocole No 4, entré en vigueur à l'égard
de la République Fédérale d'Allemagne le 1er juin 1968; que l'article
2, par. 2 (art. P4-2-2) dudit Protocole garantit la liberté pour toute
personne de "quitter n'importe quel pays ..."; qu'il y a lieu de
constater que d'une part les revendications du requérant ont pour objet
une situation continue et que d'autre part, par l'entrée en vigueur
dudit Protocole, il s'est produit un changement de la qualification
juridique de ces revendications; que par conséquent, l'article 27, par.
1b) (art. 27-1-b) n'est pas d'application en l'espèce;
Considérant alors, pour autant que le requérant se fonde sur le
Protocole No 4 (P4) et sollicite que les autorités fédérales allemandes
l'autorisent á retourner en Pologne et même à supposer qu'il ait à ce
propos épuisé les voies de recours dont il disposait en droit interne,
que s'il est vrai que l'article 2 par. 2 (P4-2-2) dudit Protocole
stipule que "Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays,
y compris le sien", le par. 3 (P4-3) du même article prévoit néanmoins
des restrictions à cette liberté, "restrictions que celles qui prévues
par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société
démocratique .... (inter alia), au maintien de l'ordre public, ...."
qu'à ce sujet la Commission rappelle que le requérant se trouve détenu
à la prison de Sarrebruck en vertu d'une condamnation de droit pénal
commun, et qu'il dénonce le refus des autorités allemandes à le laisser
partir vers la Pologne, que le refus d'élargir une personne
régulièrement détenue dans un établissement pénitentiaire constitue
manifestement une restriction licite au sens envisagé par le par. 2 de
l'article 2 du Protocole 4 (P4-2-2), que cette interprétation est
confirmé par les Travaux préparatoires (cf. Travaux préparatoires Doc.
MC 65/161, page 18) dudit Protocole, desquels il ressort que la notion
du maintien de l'ordre public dans le texte du paragraphe 2 de
l'article 2 (P4-2-2) couvre les situations, telles qu'en l'espèce,
résultant des exigences de la répression de la délinquance et notamment
des mesures de détention ordonnée dans le cadre des procédures de la
recherche et de la poursuite des infractions pénales, que la Commission
se réfère à ce sujet également à sa décision du 5 février 1970 sur la
recevabilité de la requête No 3962/69 (in Recueil 33 page 68), que
partant cette partie de la requête doit être rejetée pour défaut
manifeste de fondement (Article 27, paragraphe 2 (art. 27-2) de la
Convention);
Considérant enfin les allégations du requérant sous l'angle de
l'article 3 (art. 3) de la Convention, par lesquelles il entend
dénoncer les conditions de sa détention, que l'examen du dossier ne
permet dégager, en l'état, et même d'office, aucune apparence de
violation des droits et libertés définis dans la Convention; qu'il y
a lieu, par conséquent, de rejeter la requête, sous cet aspect, pour
défaut manifeste de fondement (Article 27, paragraphe 2 (art. 27-2) de
la Convention);
Par ces motifs, DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE.