CEDH, Commission, VAN ACKER c. la BELGIQUE, 7 décembre 1990, 14607/89
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Sur la décision
Référence : | CEDH, Commission, 7 déc. 1990, n° 14607/89 |
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Numéro(s) : | 14607/89 |
Type de document : | Recevabilité |
Date d’introduction : | 17 septembre 1986 |
Niveau d’importance : | Importance faible |
Opinion(s) séparée(s) : | Non |
Conclusion : | IRRECEVABLE |
Identifiant HUDOC : | 001-24502 |
Identifiant européen : | ECLI:CE:ECHR:1990:1207DEC001460789 |
Sur les parties
- Avocat(s) :
Texte intégral
SUR LA RECEVABILITE
de la requête No 14607/89
présentée par Charles VAN ACKER
contre la Belgique
__________
La Commission européenne des Droits de l'Homme, siégeant en
chambre du conseil le 7 décembre 1990 en présence de
MM. C.A. NØRGAARD, Président
J.A. FROWEIN
S. TRECHSEL
G. SPERDUTI
E. BUSUTTIL
G. JÖRUNDSSON
A.S. GÖZÜBÜYÜK
A. WEITZEL
J.C. SOYER
H.G. SCHERMERS
H. DANELIUS
Mme G.H. THUNE
Sir Basil HALL
MM. F. MARTINEZ
C.L. ROZAKIS
Mme J. LIDDY
MM. L. LOUCAIDES
J.C. GEUS
A.V. ALMEIDA RIBEIRO
M.P. PELLONPÄÄ
M. H.C. KRÜGER, Secrétaire de la Commission ;
Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de
l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 17 septembre 1986 par Charles VAN ACKER
contre la Belgique et enregistrée le 2 février 1989 sous le No de
dossier 14607/89 ;
Vu les observations présentées par le Gouvernement défendeur
le 3 octobre 1989 et les observations en réponse présentées par le
requérant le 2 février 1990 ;
Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de
la Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante :
EN FAIT
Les faits de la cause, tels qu'ils ont été exposés par les
parties, peuvent se résumer comme suit :
Le requérant est un ressortissant belge, né en 1949 et
domicilié à Anvers. Devant la Commission, il est représenté par Maître
F. Lambrechts, avocat au barreau d'Anvers.
Le 13 octobre 1983, le requérant fut placé sous mandat
d'arrêt, entre autres du chef de plusieurs attentats à la pudeur sans
violence contre des mineurs de moins de 16 ans. Il fut remis en
liberté le 21 octobre 1983.
Par décision du 20 avril 1984, le requérant fut condamné par
le tribunal correctionnel d'Anvers à une peine d'emprisonnement de
trois mois, assortie d'un sursis de cinq ans en ce qui concerne la
partie de la peine non compensée par la détention préventive. Le
requérant interjeta appel de cette décision le 27 avril 1984.
Lors des débats devant la cour d'appel d'Anvers, le
requérant se plaignit de la durée de la procédure d'appel et invoqua
l'article 6 par. 1 de la Convention.
Par arrêt du 29 novembre 1985, la cour d'appel d'Anvers porta
la peine d'emprisonnement à six mois après avoir constaté que le
requérant s'était rendu coupable d'attentats à la pudeur contre de
jeunes garçons durant plusieurs années. Eu égard à l'absence de
condamnation antérieure, elle accorda cependant un sursis de cinq ans
pour la partie de la peine dépassant la durée de la détention
préventive, soit cinq mois et quinze jours. En ce qui concerne la
durée de la procédure d'appel, la cour observa que le délai qui
s'était écoulé entre l'appel et la comparution devant elle n'était pas
déraisonnable, compte tenu, d'une part, du fait que les personnes
placées sous mandat d'arrêt devaient bénéficier d'un examen
prioritaire de leur cause et, d'autre part, que l'examen d'un certain
nombre d'affaires qui lui étaient soumises avaient nécessité
plusieurs audiences non programmées de telle manière que les autres
affaires n'avaient pu être examinées.
Le 2 décembre 1985, le requérant introduisit un pourvoi en
cassation contre cet arrêt.
Par arrêt du 15 avril 1986, la Cour de cassation rejeta le
pourvoi du requérant. En ce qui concerne le moyen relatif au respect
du délai raisonnable prévu à l'article 6 par. 1 de la Convention, la
Cour de cassation déclara que la cour d'appel n'avait pas voulu
justifier un délai excessif mais qu'au contraire elle avait indiqué
que l'affaire avait été traitée dans un délai raisonnable compte tenu,
d'une part, du fait que, par sa nature concrète, l'affaire avait un
caractère moins urgent que d'autres affaires et, d'autre part, qu'en
raison de circonstances de nature non structurelle, mais tenant au
cours normal des affaires, elle n'avait pu être appelée plus tôt. La
Cour de cassation estima que la cour d'appel avait pu légalement
décider que la durée de la procédure n'avait pas été déraisonnable.
GRIEFS
Le requérant allègue qu'il n'a pas bénéficié d'un examen de sa
cause dans un délai raisonnable, en violation de l'article 6 par. 1 de
la Convention. Il fait valoir que pour l'examen du caractère
raisonnable du délai, il faut examiner l'affaire "in concreto". A cet
égard, il observe que dans le cas d'espèce, la simplicité de l'affaire
et l'absence de retards qui lui étaient imputables permettaient un
examen plus rapide de sa cause, particulièrement au niveau de la
procédure d'appel. Il soutient en outre que la cour d'appel d'Anvers
a justifié le retard par des circonstances étrangères au cas d'espèce,
en contradiction avec le principe d'un examen "in concreto".
PROCEDURE
La requête a été introduite le 17 septembre 1986 et
enregistrée le 2 février 1989.
Le 9 mai 1989, la Commission a décidé d'inviter le
Gouvernement belge à présenter par écrit ses observations sur la
recevabilité et le bien-fondé de la requête.
Les observations du Gouvernement défendeur ont été présentées
le 3 octobre 1989.
Les observations en réponse du requérant ont été présentées le
2 février 1990.
EN DROIT
Le requérant se plaint de la durée excessive de la procédure
pénale dirigée contre lui. Il invoque l'article 6 par. 1 (art. 6-1)
de la Convention qui dispose que "toute personne a droit à ce que sa
cause soit entendue ... dans un délai raisonnable par un tribunal ...
qui décidera ... du bien-fondé de toute accusation en matière pénale
dirigée contre elle".
Le Gouvernement fait valoir que le délai d'environ 2 ans et
demi pour toute une procédure pénale ne peut être considéré d'office
comme non raisonnable.
La Commission a examiné ce grief compte tenu de la période
écoulée depuis le début de la procédure, le 13 octobre 1983, jusqu'à
son achèvement par le rejet, le 15 avril 1986, du pourvoi du requérant
par la Cour de cassation, après que le tribunal correctionnel d'Anvers
se fut prononcé le 20 avril 1984 et la cour d'appel d'Anvers le
29 novembre 1985. La durée à prendre en considération dans cette
affaire est donc de deux ans, six mois et deux jours.
La Commission rappelle que, conformément à la jurisprudence
constante de la Cour et à sa propre jurisprudence, le caractère
raisonnable de la durée d'une procédure relevant de l'article 6 par. 1
(art. 6-1) de la Convention doit s'apprécier dans chaque espèce suivant les
circonstances de la cause et en tenant compte de trois critères : la
complexité de l'affaire, le comportement du requérant et la manière
dont l'affaire a été conduite par les autorités.
La Commission estime que sans pouvoir être qualifiés de
complexes, les faits de la cause présentaient cependant quelques
difficultés, puisqu'il s'agissait d'attentats à la pudeur commis
pendant plusieurs années contre des mineurs de moins de seize ans.
Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces et documents
soumis à la Commission que le comportement du requérant ait retardé la
procédure d'examen de l'affaire.
Quant au comportement des autorités judiciaires, la Commission
observe que le tribunal correctionnel d'Anvers s'est prononcé dans un
délai de six mois et sept jours après la délivrance du mandat d'arrêt
et que la Cour de cassation a rendu son arrêt quatre mois et treize
jours après l'introduction du pourvoi en cassation. Ces délais ne
sont en aucune façon excessifs et ne peuvent donc être considérés
comme déraisonnables.
En ce qui concerne la cour d'appel, la Commission constate que
celle-ci s'est prononcée un an, sept mois et deux jours après que
l'appel eut été interjeté. Saisie d'un grief relatif à la durée de la
procédure d'appel, la cour d'appel a estimé qu'elle s'était prononcée
dans un délai raisonnable, eu égard notamment au fait que des
personnes placées sous mandat d'arrêt - ce qui n'était pas le cas du
requérant - devaient bénéficier d'un examen prioritaire de leur cause.
Quant à la Cour de cassation, elle a estimé que la cour d'appel, en
invoquant le caractère moins urgent de l'affaire du requérant et le
fait que cette affaire n'avait pu être examinée plus tôt compte tenu
du cours normal des affaires, avait légalement décidé que la durée de
la procédure n'avait pas été déraisonnable.
De l'avis de la Commission, la procédure d'examen de l'affaire
par la cour d'appel d'Anvers a été relativement longue. Toutefois,
elle a déjà constaté que les faits de la cause présentaient certaines
difficultés. Quant à la motivation donnée par la cour d'appel
d'Anvers en ce qui concerne la durée de la procédure d'appel, la
Commission rappelle que dans son arrêt Stögmüller (Cour eur. D.H.,
arrêt Stögmüller du 10 novembre 1969, Série A n° 9, p. 40 par. 5), la
Cour a relevé que l'article 5 par. 3 (art. 5-3) de la Convention, qui
se rapporte aux seuls prévenus détenus, "implique qu'une diligence
particulière doit être apportée à la poursuite de la procédure le
concernant" (cf également, Ventura c/Italie, Rapport Comm. 15.12.80,
D.R. 23, p. 39 par. 183). Les motifs donnés par la cour d'appel ne
peuvent donc être considérés d'emblée comme injustifiés. Par
ailleurs, à supposer que des retards aient pu se produire durant la
procédure d'appel, la Commission estime qu'eu égard aux circonstances
de la cause et aux critères dégagés par les organes de la Convention
en l'espèce, ces retards ne se "révèlent pas assez graves pour
permettre de considérer comme excessive la durée globale du procès"
(cf Cour Eur. D.H., arrêt Pretto et autres du 8 décembre 1983,
série A n° 71, p. 34 par. 15).
En conclusion, la Commission considère que la durée totale à
prendre en considération dans le cas d'espèce, qui a comporté un
examen de l'affaire par trois degrés de juridiction, n'a pas porté
atteinte au droit du requérant à un jugement dans un délai
raisonnable, au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention.
Il s'ensuit que la requête doit être rejetée comme étant
manifestement mal fondée au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2)
de la Convention.
Par ces motifs, la Commission, à la majorité,
DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE.
Le Secrétaire Le Président
de la Commission de la Commission
(H.C. KRÜGER) (C.A. NØRGAARD)