CEDH, Commission (deuxième chambre), TOURNEUR c. la FRANCE, 5 mai 1993, 20621/92

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Commission (Deuxième Chambre), 5 mai 1993, n° 20621/92
Numéro(s) : 20621/92
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 26 août 1992
Jurisprudence de Strasbourg : Cour Eur. D.H. Arrêt Brogan et autres du 29 novembre 1988, série A n° 145-B, p. 61
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-25289
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:1993:0505DEC002062192
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Sur les parties

Texte intégral

                          SUR LA RECEVABILITE

                 de la requête No 20621/92

                 présentée par Maurice TOURNEUR

                 contre la France

                            __________

      La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième

Chambre), siégeant en chambre du conseil le 5 mai 1993 en présence de

           MM.   S. TRECHSEL, Président de la Deuxième Chambre

                 G. JÖRUNDSSON

                 A. WEITZEL

                 J.-C. SOYER

                 H.G. SCHERMERS

                 H. DANELIUS

           Mme   G.H. THUNE

           MM.   F. MARTINEZ

                 L. LOUCAIDES

                 J.-C. GEUS

                 M.A. NOWICKI

           M.    K. ROGGE, Secrétaire de la Deuxième Chambre ;

      Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de

l'Homme et des Libertés fondamentales ;

      Vu la requête introduite le 26 août 1992 par Maurice TOURNEUR

contre la France et enregistrée le 14 septembre 1992 sous le No de

dossier 20621/92 ;

      Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la

Commission ;

      Après avoir délibéré,

      Rend la décision suivante :

EN FAIT

      Le requérant, de nationalité française, est né en 1949 à Bethune.

Il exerce la profession d'artisan marinier et réside à Conflans-Sainte-

Honorine.  Dans la procédure devant la Commission, il est représenté

par Me Gaschignard, avocat au barreau de Paris.

      Les faits, tels qu'ils ont été exposés par le requérant, peuvent

être résumés comme suit.

      Suite à un signalement d'enfant en danger, transmis au procureur

par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales,

et après avoir recueilli divers témoignages, le requérant, soupçonné

de s'être livré en 1986 à des actes incestueux sur l'une de ses filles

mineure, fut convoqué au commissariat de police de Saint-Germain-en-

Laye et placé en garde à vue le 11 avril 1990.

      Au cours de cette garde à vue, le requérant fut interrogé à deux

reprises et confronté à sa fille également à deux reprises. Après avoir

commencé par nier les faits, le requérant admit avoir abusé de sa

fille. Il fut conduit devant le juge d'instruction et placé sous mandat

de dépôt le 13 avril 1990 et libéré sous contrôle judiciaire le 27

novembre 1990.

      Par un arrêt du 8 avril 1992, la chambre d'accusation de la cour

d'appel de Versailles prononça la mise en accusation du requérant, qui

fut conduit à la maison d'arrêt des Yvelines, et le renvoya devant la

cour d'assises des Yvelines pour viol sur mineure de quinze ans par

ascendant légitime.

      Le requérant se pourvut en cassation contre cet arrêt, invoquant

notamment l'article 5 par. 1 et 3 et l'article 6 par. 3 de la

Convention.

      Son pourvoi fut rejeté par un arrêt de la Cour de cassation en

date du 7 juillet 1992. Celle-ci estima en effet qu'il avait été fait

une exacte application de l'article 77 du Code de procédure pénale,

dont les dispositions ne sont pas incompatibles avec la Convention.

GRIEFS

1.    Le requérant se plaint d'avoir été maintenu en état d'arrestation

pendant quarante-huit heures à des fins autres que celles prévues par

la Convention en ce qu'il aurait été interrogé et confronté à sa fille

dans le but d'obtenir des aveux et non en vue d'être conduit devant un

magistrat. Il allègue donc la violation des paragraphes 1 c) et 3 de

l'article 5 de la Convention.

2.    Le requérant estime également avoir été "accusé" sans bénéficier

des garanties d'un procès équitable et notamment sans disposer du temps

et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense. Il allègue

ainsi la violation de l'article 6 par. 3 b) de la Convention.

EN DROIT

1.    Le requérant se plaint d'avoir été détenu à des fins autres que

celles prévues par la Convention et invoque les paragraphes 1 c) et 3

de l'article 5 (art. 5).

      Cet article dispose :

           "1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul

           ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas

           suivants et selon les voies légales :

           ...

           (c) s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit

           devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des

           raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis une

           infraction ou qu'il y a des motifs raisonnables de croire

           à la nécessité de l'empêcher de commettre une infraction ou

           de s'enfuir après l'accomplissement de celle-ci;"

           "3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions

           prévues au paragraphe 1 c du présent article, doit être

           aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat

           habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et

           a le droit d'être jugé dans un délai raisonnable, ou

           libérée pendant la procédure (...)."

      La Commission constate tout d'abord que le requérant a été arrêté

et détenu en garde à vue selon les voies légales, en l'occurrence

l'article 77 du Code de procédure pénale, c'est à dire pendant

quarante-huit heures, délai jugé raisonnable par les organes de la

Convention et qui n'est pas contesté par le requérant.

      En l'espèce, la Commission relève que le requérant conteste le

but de sa garde à vue qui aurait consisté, selon lui, uniquement à le

faire avouer et non à le conduire devant l'autorité compétente.

      La Commission rappelle que selon sa jurisprudence, "l'objectif

de l'article 5 par. 1 c) (art. 5-1-c) est essentiellement conditionnel

en ce que l'arrestation ou la détention ont pour but de traduire la

personne arrêtée ou détenue devant l'autorité judiciaire compétente.

La condition ne se matérialise que si l'interrogatoire de la personne

arrêtée ou détenue, ou l'enquête générale, confirment les soupçons"

(voir Terence Brogan et autres c/Royaume-Uni, rapport Comm. 14.5.87,

par. 96, Cour eur.D.H., série A n° 145, p.61). Par ailleurs, "l'enquête

a précisément pour but de recueillir les preuves nécessaires et la

détention facilite la conduite de l'enquête" (voir Terence Brogan et

autres, rapport précité, par. 93) .

      Sur ce point, le requérant ne démontre pas en quoi le seul but

de sa garde à vue aurait été de le faire avouer et non de le conduire,

comme le prévoit la Convention, devant l'autorité judiciaire

compétente. La Commission note à cet égard que le requérant a bel et

bien été conduit devant le juge d'instruction qui a délivré un mandat

de dépôt en date du 13 avril 1990, à l'issue de la garde à vue.

      La Commission relève par ailleurs qu'au cours de sa garde à vue,

le requérant fut entendu deux fois sur les faits qui lui étaient

reprochés et que deux confrontations furent organisées avec sa fille.

Or le requérant ne démontre pas en quoi ces actes n'auraient pas eu

pour but de recueillir les preuves nécessaires à la poursuite de

l'enquête.

      La Commission n'aperçoit donc en l'espèce aucune apparence de

violation de l'article 5 (art. 5) de la Convention.

      Il s'ensuit que la requête est à cet égard manifestement mal

fondée au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.

2.    Le requérant allègue par ailleurs la violation de l'article 6

par. 3 b) (art. 6-3-b) de la Convention.

      Cet article dispose :

           "Tout accusé a droit notamment à :

           ...

           b. disposer du temps et des facilités nécessaires à la

           préparation de sa défense (...)".

      Le requérant estime que la personne gardée à vue est en fait

"accusée" au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention et

doit dès lors bénéficier des garanties d'un procès équitable dès le

début de la garde à vue.

      La Commission rappelle que la question de savoir si un procès est

conforme aux exigences de l'article 6 (art. 6) de la Convention,

s'apprécie sur la base d'un examen de l'ensemble de la procédure. Or,

le requérant n'ayant pas encore été jugé, la requête est prématurée sur

ce point. En l'état de l'affaire, il n'est donc pas possible

d'entrevoir une violation de l'article 6 par. 3 b) (art. 6-3-b) de la

Convention.

      Il s'ensuit que cette partie de la requête est également

manifestement mal fondée au sens de l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de

la Convention.

      Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité,

      DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE

   Le Secrétaire de la                            Le Président de la

    Deuxième Chambre                               Deuxième Chambre

      (K. ROGGE)                                     (S. TRECHSEL)

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