CEDH, Commission (deuxième chambre), SOCIETE COVEXIM S.A. c. la FRANCE, 21 mai 1997, 32509/96
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Sur la décision
Référence : | CEDH, Commission (Deuxième Chambre), 21 mai 1997, n° 32509/96 |
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Numéro(s) : | 32509/96 |
Type de document : | Recevabilité |
Date d’introduction : | 10 mai 1996 |
Niveau d’importance : | Importance faible |
Opinion(s) séparée(s) : | Non |
Conclusion : | Irrecevable |
Identifiant HUDOC : | 001-28696 |
Identifiant européen : | ECLI:CE:ECHR:1997:0521DEC003250996 |
Texte intégral
SUR LA RECEVABILITÉ
de la requête N° 32509/96
présentée par la Société COVEXIM S.A.
contre la France
__________
La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième
Chambre), siégeant en chambre du conseil le 21 mai 1997 en présence de
Mme G.H. THUNE, Présidente
MM. J.-C. GEUS
G. JÖRUNDSSON
A. GÖZÜBÜYÜK
J.-C. SOYER
H. DANELIUS
F. MARTINEZ
M.A. NOWICKI
I. CABRAL BARRETO
J. MUCHA
D. SVÁBY
P. LORENZEN
E. BIELIUNAS
E.A. ALKEMA
A. ARABADJIEV
Mme M.-T. SCHOEPFER, Secrétaire de la Chambre ;
Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de
l'Homme et des Libertés fondamentales ;
Vu la requête introduite le 10 mai 1996 par la Société
COVEXIM S.A. contre la France et enregistrée le 5 août 1996 sous le
N° de dossier 32509/96 ;
Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la
Commission ;
Après avoir délibéré,
Rend la décision suivante :
EN FAIT
La requérante, COVEXIM S.A., est une société anonyme de droit
suisse dont le siège social est à Genève. Elle a pour objet de
participer à toutes entreprises industrielles, commerciales,
mobilières, immobilières, sans faire appel au public pour l'obtention
de fonds. Elle agit par son administrateur unique, M. Emmanuel Vernet.
Devant la Commission, la requérante est représentée par
Maître P.F. RYZIGER, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de
cassation.
Les faits, tels qu'ils ont été présentés par la requérante,
peuvent se résumer comme suit.
La requérante est propriétaire d'une villa qu'elle a fait
construire en France et qu'elle a mise à disposition d'un ressortissant
belge. L'administration fiscale française a procédé à une vérification
de la comptabilité de la requérante, laquelle n'avait pas produit la
déclaration de ses résultats pour les années 1977 à 1980, et l'a taxée
d'office à l'impôt sur les sociétés. La notification de redressement
du 9 décembre 1981 a été confirmée le 5 février 1982 et les droits
correspondant aux redressements de l'impôt sur les sociétés ont été mis
en recouvrement le 30 juin 1982, assortis d'une majoration de 25 % pour
défaut de déclaration fiscale. La réclamation formulée par la
requérante a été rejetée le 9 novembre 1984.
La requérante a saisi le tribunal administratif de Nice, le
15 janvier 1987, d'une requête tendant à la décharge des impositions
dues au titre de l'impôt sur les sociétés. Par jugement du
27 septembre 1991, le tribunal administratif de Nice a accordé à la
requérante la décharge totale des impositions litigieuses, du fait de
leur contrariété avec la convention fiscale franco-suisse.
Par arrêt du 2 décembre 1992, la cour d'appel de Lyon a fait
droit à l'appel de l'administration fiscale et remis à la charge de la
requérante l'impôt sur les sociétés auquel elle avait été assujettie,
assorti de la majoration de 25 % pour défaut de déclaration.
Au soutien de son pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat,
la requérante invoqua un moyen unique de cassation tiré de la violation
de la convention franco-suisse précitée et de la législation fiscale
française applicable.
Le 13 novembre 1995, la commission d'admission des pourvois en
cassation du Conseil d'Etat décida de ne pas admettre la requête de la
requérante, pour absence de moyens sérieux au sens de l'article 11 de
la loi du 31 décembre 1987. Selon cet article, l'admission des pourvois
en cassation "est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi
est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux".
GRIEFS
1. La requérante estime que l'absence de motivation de la décision
de non-admission de son pourvoi par le Conseil d'Etat constitue une
violation de son droit à un procès équitable au sens de l'article 6
par. 1 de la Convention.
2. La requérante soutient que l'arrêt de la cour administrative
d'appel, confirmé par le Conseil d'Etat, constitue une violation de
l'article 1er du Protocole N° 1 à la Convention.
EN DROIT
1. La requérante estime que l'absence de motivation de la décision
de non-admission de son pourvoi par le Conseil d'Etat constitue une
violation de son droit à un procès équitable au sens de l'article 6
par. 1 (art. 6-1) de la Convention, ainsi libellé :
"Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue
équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera, soit des
contestations sur ses droits et obligations de caractère civil,
soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée
contre elle (...)"
La requérante soutient que l'article 6 (art. 6) de la Convention
trouve à s'appliquer en l'espèce. La Commission n'estime pas nécessaire
de se prononcer sur ce point puisque le grief se heurte à un autre
motif de rejet. Elle rappelle en effet sa jurisprudence selon laquelle
lorsque la loi nationale subordonne la recevabilité d'un recours à une
décision par laquelle la juridiction compétente déclare que le recours
soulève une question de droit très importante et présente des chances
de succès, il peut suffire que cette juridiction se borne à citer la
disposition légale prévoyant cette procédure (N° 8769/79, X c. R.F.A.,
déc. 16.7.81, D.R. 25, p. 242 ; N° 18441/91, Ouendeno c. France,
déc. 2.3.94, non publiée et N° 20087/92, E.M. c. Norvège,
déc. 26.10.95, D.R. 83, p. 5).
La Commission relève en l'espèce que la décision de rejet de la
commission d'admission était fondée sur l'absence de moyens sérieux,
soit l'un des deux motifs prévus par l'article 11 de la loi du
31 décembre 1987. Elle ne relève, dès lors, aucune apparence de
violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention
(spécialement N° 26561/93, déc. Rebai c. France du 25.2.97, à paraître
au D.R. 88).
Il s'ensuit que le grief est manifestement mal fondé, au sens de
l'article 27 par. 2 (art. 27-2) de la Convention.
2. La requérante soutient que l'arrêt de la cour administrative
d'appel de Lyon a porté atteinte au libre usage de ses biens, en
violation de l'article 1er du Protocole N° 1 (P1-1) à la Convention.
La Commission rappelle que l'épuisement des voies de recours
internes au sens de l'article 26 (art. 26) de la Convention n'est pas
réalisé par le seul exercice des recours mais exige que le requérant,
même sans citer la disposition pertinente, soumette aux autorités
compétentes le grief qu'il fait valoir devant la Commission
(N° 15669/89, déc. 28.6.93, D.R. 75, p. 39).
En l'espèce, la Commission constate que la requérante a omis de
soulever devant le Conseil d'Etat le fait que les impositions et les
majorations litigieuses constitueraient une entrave au libre usage de
ses biens, et n'a donc pas épuisé les voies de recours internes qui lui
étaient ouvertes en droit français. De plus, l'examen de l'affaire n'a
permis de déceler aucune circonstance particulière qui aurait pu la
dispenser, selon les principes de droit international généralement
reconnus en la matière, de soulever ce grief en l'espèce.
Il s'ensuit que le grief doit être rejeté, par application des
articles 26 et 27 par. 3 (art. 26, 27-3) de la Convention.
Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité,
DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE.
M.-T. SCHOEPFER G.H. THUNE
Secrétaire Présidente
de la Deuxième Chambre de la Deuxième Chambre
Textes cités dans la décision