CEDH, Commission (deuxième chambre), SAUSSIER c. la FRANCE, 20 mai 1998, 35884/97

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Commission (Deuxième Chambre), 20 mai 1998, n° 35884/97
Numéro(s) : 35884/97
Type de document : Recevabilité
Date d’introduction : 30 janvier 1997
Jurisprudence de Strasbourg : No 19028/91, déc. 9.9.92, D.R. 73, p. 239
No 25062/94, déc. 18.10.95, D.R. 83, p. 77
No 28140/95, déc. 15.5.96, non publiée
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusion : Irrecevable
Identifiant HUDOC : 001-29578
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:1998:0520DEC003588497
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Texte intégral

                         SUR LA RECEVABILITÉ

                      de la requête N° 35884/97

                      présentée par Jean-Louis SAUSSIER

                      contre la France

                            __________

     La Commission européenne des Droits de l'Homme (Deuxième

Chambre), siégeant en chambre du conseil le 20 mai 1998 en présence de

           MM.  J.-C. GEUS, Président

                M.A. NOWICKI

                G. JÖRUNDSSON

                J.-C. SOYER

                H. DANELIUS

           Mme  G.H. THUNE

           MM.  F. MARTINEZ

                I. CABRAL BARRETO

                J. MUCHA

                D. SVÁBY

                P. LORENZEN

                E. BIELIUNAS

                E.A. ALKEMA

                A. ARABADJIEV

           Mme  M.-T. SCHOEPFER, Secrétaire de la Chambre ;

     Vu l'article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de

l'Homme et des Libertés fondamentales ;

     Vu la requête introduite le 30 janvier 1997 par Jean-Louis

SAUSSIER contre la France et enregistrée le 2 mai 1997 sous le N° de

dossier 35884/97 ;

     Vu le rapport prévu à l'article 47 du Règlement intérieur de la

Commission ;

     Après avoir délibéré,

     Rend la décision suivante :

EN FAIT

     Le requérant, de nationalité française, né en 1948, est

administrateur de société et réside à Lausanne (Suisse). Devant la

Commission, il est représenté par Maître Pierre Lemarchand, avocat au

barreau de Paris.

     Les faits, tels qu'ils ont été exposés par le requérant, peuvent

se résumer comme suit.

1.   Circonstances particulières de l'espèce

     Le 13 novembre 1993, le requérant fut mis en examen par

commission rogatoire internationale d'un juge d'instruction de Lille

pour des faits de complicité d'usage de faux en écritures de commerce.

     Le requérant élut domicile chez son avocat, du barreau de Lille,

conformément aux dispositions de l'article 116 du Code de procédure

pénale.

     Par ordonnance du 8 août 1994, le requérant fut renvoyé devant

le tribunal correctionnel de Lille.

     Le 17 août 1994, une citation à comparaître fut adressée au

requérant au domicile élu chez son avocat, en vue de l'audience des 5,

6 et 7 octobre 1994.

     Au début de l'audience, le requérant ne comparut pas. Son avocat

déposa des conclusions in limine litis pour invoquer la nullité de la

citation, estimant que celle-ci aurait dû être délivrée au domicile

suisse de son client, et demanda un renvoi de l'audience.

     Par jugement du 7 novembre 1994, le tribunal correctionnel de

Lille rejeta l'exception de nullité, estimant la citation régulière

puisque l'adresse suisse concernait non pas le domicile personnel du

requérant mais l'adresse d'une société qu'il dirigeait. Il releva que

le requérant avait connu la date d'audience et disposé du temps

nécessaire pour préparer sa défense. Par ailleurs, le tribunal déclara

le requérant coupable des faits reprochés et le condamna à une peine

de deux mois d'emprisonnement avec sursis. Le jugement fut déclaré

contradictoire à signifier. Le requérant en interjeta appel.

     Par arrêt du 11 mai 1995, la cour d'appel de Douai releva que le

requérant avait bien eu connaissance de la date d'audience du tribunal

correctionnel mais que le tribunal correctionnel aurait dès lors dû

rendre un jugement par défaut et non un jugement contradictoire.

     La cour d'appel constatant la nullité du jugement, évoqua

l'affaire. Elle déclara le requérant coupable des faits reprochés, le

condamna à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis ainsi

qu'à une amende de quatre-vingt mille francs, et prononça

l'interdiction de ses droits civiques, civils et de famille pour une

durée de cinq ans.

     Devant la cour d'appel de Douai, le requérant et son avocat se

présentèrent le premier jour d'audience mais pas les jours suivants.

La cour d'appel rendit un arrêt contradictoire à signifier.

     Par arrêt du 20 août 1996, sur pourvoi du requérant, la Cour de

cassation estima la procédure régulière au regard des dispositions du

Code de procédure pénale.

2.   Droit interne pertinent

     Code de procédure pénale

     Article 116 alinéa 5 et 6 : «...la personne mise en examen

     doit déclarer au juge d'instruction son adresse

     personnelle. Elle peut toutefois lui substituer l'adresse

     d'un tiers chargé de recevoir les actes qui lui sont

     destinés... L'adresse déclarée doit être située, si

     l'information se déroule en métropole, dans un département

     métropolitain...

     La personne est avisée qu'elle doit signaler au juge

     d'instruction jusqu'au règlement de l'information, par

     nouvelle déclaration ou par lettre recommandée avec demande

     d'avis de réception, tout changement de l'adresse déclarée.

     Elle est également avisée que toute notification ou

     signification faite à la dernière adresse déclarée sera

     faite à sa personne...»

GRIEFS

1.   Le requérant estime qu'il n'a jamais été cité régulièrement

devant les juridictions de jugement. Il invoque l'article 6 par. 1 de

la Convention.

2.   Le requérant se plaint également de n'avoir pu bénéficier du

double degré de juridiction, le jugement rendu par le tribunal

correctionnel de Lille ayant été annulé. Il invoque l'article 2 du

Protocole N° 7.

EN DROIT

1.   Le requérant estime qu'il n'a jamais été cité régulièrement

devant les juridictions de jugement. Il invoque l'article 6 par. 1 et

3 b) (art. 6-1, 6-3-b) de la Convention, lequel prévoit notamment :

     «1.   Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue

     équitablement (...) par un tribunal (...) qui décidera

     (...) du bien-fondé de toute accusation en matière pénale

     dirigée contre elle. (...).

     3.    Tout accusé a droit notamment à : (...)

     b.    disposer du temps et des facilités nécessaires à la

     préparation de sa défense ;

     (...).»

     La Commission rappelle qu'elle n'est pas compétente pour examiner

une requête relative à des erreurs de fait ou de droit prétendument

commises par une juridiction interne, sauf si et dans la mesure où ces

erreurs lui semblent susceptibles d'avoir entraîné une atteinte aux

droits et libertés garantis par la Convention (cf., notamment,

N° 25062/94, déc. 18.10.95, D.R. 83, p. 77).

     En l'espèce, la Commission ne voit aucune raison de mettre en

cause le constat porté par les juridictions internes quant à la

régularité des citations à comparaître destinées au requérant.

     En tout état de cause, la Commission constate que la citation à

comparaître avait été adressée au domicile élu par le requérant,

conformément aux dispositions de l'article 116 du Code de procédure

pénale. La Commission relève également que, tant devant le tribunal

correctionnel que devant la cour d'appel, le requérant était

effectivement au courant de la date d'audience et avait été mis en

mesure de préparer sa défense, ce dont attestent notamment la présence

de l'avocat du requérant devant le tribunal correctionnel de Lille, le

dépôt in limine litis de conclusions motivées et la présence simultanée

du requérant et de son avocat lors de la première audience devant la

cour d'appel de Douai.

     Il s'ensuit que ce grief doit être rejeté comme étant

manifestement mal fondé, conformément aux dispositions de l'article 27

par. 2 (art. 27-2) de la Convention.

2.   Le requérant se plaint également de n'avoir pu bénéficier du

double degré de juridiction, le jugement rendu par le tribunal

correctionnel de Lille ayant été annulé. Il invoque l'article 2 du

Protocole N° 7 (P7-2), selon lequel :

     «1.   Toute personne déclarée coupable d'une infraction

     pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une

     juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la

     condamnation.  L'exercice de ce droit, y compris les motifs

     pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi.

     2.    Ce droit peut faire l'objet d'exceptions pour des

     infractions mineures telles qu'elles sont définies par la

     loi ou lorsque l'intéressé a été jugé en première instance

     par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et

     condamné à la suite d'un recours contre son acquittement.»

     La Commission relève que le requérant a bénéficié d'un double

degré de juridiction au fond, l'appel interjeté par lui ayant

précisément permis de faire contrôler et censurer le jugement de

première instance.

     La Commission constate cependant que la cour d'appel de Douai a

annulé le jugement de première instance et évoqué l'affaire. Cependant,

à supposer qu'un tel cas de figure soit de nature à ne laisser

subsister qu'un seul degré de juridiction, la Commission note que le

requérant a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de l'arrêt rendu

par la cour d'appel. Le réexamen susceptible d'intervenir devant la

Cour de cassation était limité aux seules questions de droit.

     La Commission rappelle que la deuxième phrase de l'article 2

par. 1 du Protocole N° 7 (P7-2-1) prévoit que l'exercice du droit à

réexamen doit être régi par la loi, mais l'article ne précise ni sa

portée ni sa mise en oeuvre réelle. Comme le montre clairement la

référence à la nécessité d'une loi pour régir les motifs d'examen, les

Etats disposent d'un pouvoir discrétionnaire pour décider des modalités

d'exercice de ce droit d'examen. Ce dernier peut être limité, à

condition que les limitations prévues par la loi ne vident pas pareil

réexamen de son sens (cf. N° 19028/91, déc. 9.9.1992, D.R. 73, p. 239).

     La Commission constate qu'en l'espèce la limitation du réexamen

aux questions de droit était conforme aux règles caractéristiques

régissant les procédures devant plusieurs Cours suprêmes, qui ne

siègent que pour vérifier la légalité du jugement rendu sur le fond.

La Commission estime dès lors que la possibilité d'exercice, par le

requérant, du droit de réexamen tel que le prévoit le droit français,

répondait aux exigences de l'article 2 du Protocole N° 7 (P7-2)

(cf. N° 19028/91, Nielsen c. Danemark, déc. 9.9.92, D.R. 73, p. 239 ;

N° 28140/95, déc. du 15.5.96, non publiée).

     Il s'ensuit que ce grief doit être rejeté comme étant

manifestement mal fondé, conformément à son article 27 par. 2

(art. 27-2) de la Convention.

     Par ces motifs, la Commission, à l'unanimité,

     DECLARE LA REQUETE IRRECEVABLE.

      M.-T. SCHOEPFER                              J.-C. GEUS

         Secrétaire                                Président

   de la Deuxième Chambre                    de la Deuxième Chambre

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