CEDH, Cour (chambre), AFFAIRE ORTENBERG c. AUTRICHE, 25 novembre 1994, 12884/87

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www.revuegeneraledudroit.eu · 21 février 2021

Imprimer ... 722 • Le droit de l'Union est, depuis ses débuts, un droit qui a été voulu par les auteurs des traités originaires et par la Cour de justice, comme le droit d'un ordre juridique autonome, droit directement applicable dans les Etats membres et dont la primauté et l'application uniforme sont des éléments considérés comme consubstantiels (selon CJCE, 15 juillet 1964, Costa contre ENEL, Aff. n°C-6/64,Rec. CJCE, p. 1141 : « La Communauté constitue un nouvel ordre juridique de droit international, au profit duquel les États ont limité, bien que dans des domaines restreints, …

 

CEDH · 25 novembre 1994

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Chambre), 25 nov. 1994, n° 12884/87
Numéro(s) : 12884/87
Publication : A295-B
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Arrêt Albert et Le Compte c. Belgique du 10 février 1983, série A no 58, p. 16, par. 29
Arrêt Editions Périscope c. France du 26 mars 1992, série A no 234-B, p. 66, par. 40
Arrêt H. c. France du 24 octobre 1989, série A no 162-A, p. 20, par. 47
Arrêt Obermeier c. Autriche du 28 juin 1990, série A no 179
Arrêt Zumtobel c. Autriche du 21 septembre 1993, série A no 268-A
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Non-violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure civile ; Article 6-1 - Accès à un tribunal) ; Non-violation de l'article 6 - Droit à un procès équitable (Article 6 - Procédure civile ; Article 6-1 - Procès équitable)
Identifiant HUDOC : 001-62450
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:1994:1125JUD001288487
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Sur les parties

Texte intégral

        En l'affaire Ortenberg c. Autriche*,

        La Cour européenne des Droits de l'Homme, constituée,

conformément à l'article 43 (art. 43) de la Convention de sauvegarde

des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales ("la Convention")

et aux clauses pertinentes de son règlement A**, en une chambre

composée des juges dont le nom suit:

        MM. R. Ryssdal, président,

            F. Matscher,

            L.-E. Pettiti,

            R. Macdonald,

            C. Russo,

            A. Spielmann,

            R. Pekkanen,

            A.N. Loizou,

        Sir John Freeland,

ainsi que de M. H. Petzold, greffier f.f.,

        Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 27 mai et

25 octobre 1994,

        Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date:

_______________

Notes du greffier

* L'affaire porte le n° 33/1993/428/507.  Les deux premiers chiffres

en indiquent le rang dans l'année d'introduction, les deux derniers la

place sur la liste des saisines de la Cour depuis l'origine et sur

celle des requêtes initiales (à la Commission) correspondantes.

** Le règlement A s'applique à toutes les affaires déférées à la Cour

avant l'entrée en vigueur du Protocole n° 9 (P9) et, depuis celle-ci,

aux seules affaires concernant les Etats non liés par ledit Protocole

(P9).  Il correspond au règlement entré en vigueur le 1er janvier 1983

et amendé à plusieurs reprises depuis lors.

_______________

PROCEDURE

1.      L'affaire a été déférée à la Cour par la Commission européenne

des Droits de l'Homme ("la Commission") le 9 septembre 1993, dans le

délai de trois mois qu'ouvrent les articles 32 par. 1 et 47 (art. 32-1,

art. 47) de la Convention.  A son origine se trouve une requête

(n° 12884/87) dirigée contre la République d'Autriche et dont une

ressortissante de cet Etat, Mme Margarete Ortenberg, avait saisi la

Commission le 10 septembre 1986 en vertu de l'article 25 (art. 25).

        La demande de la Commission renvoie aux articles 44 et 48

(art. 44, art. 48) ainsi qu'à la déclaration autrichienne reconnaissant

la juridiction obligatoire de la Cour (article 46) (art. 46).  Elle a

pour objet d'obtenir une décision sur le point de savoir si les faits

de la cause révèlent un manquement de l'Etat défendeur aux exigences

de l'article 6 par. 1 (art. 6-1).

2.      En réponse à l'invitation prévue à l'article 33 par. 3 d) du

règlement A, la requérante a exprimé le désir de participer à

l'instance et désigné son conseil (article 30), que le président a

autorisé à employer l'allemand (article 27 par. 3).

3.      La chambre à constituer comprenait de plein droit

M. F. Matscher, juge élu de nationalité autrichienne (article 43 de la

Convention) (art. 43), et M. R. Ryssdal, président de la Cour

(article 21 par. 3 b) du règlement A).  Le 24 septembre 1993, celui-ci

a tiré au sort le nom des sept autres membres, à savoir

M. L.-E. Pettiti, M. R. Macdonald, M. C. Russo, M. N. Valticos,

M. R. Pekkanen, M. A.N. Loizou et Sir John Freeland, en présence du

greffier (articles 43 in fine de la Convention et 21 par. 4 du

règlement A) (art. 43).  Ultérieurement, M. A. Spielmann, suppléant,

a remplacé M. Valticos, empêché (articles 22 paras. 1 et 2, et 24

par. 1 du règlement A).

4.      En sa qualité de président de la chambre (article 21 par. 5 du

règlement A), M. Ryssdal a consulté, par l'intermédiaire du greffier

adjoint, l'agent du gouvernement autrichien ("le Gouvernement"),

l'avocat de la requérante et le délégué de la Commission au sujet de

l'organisation de la procédure (articles 37 par. 1 et 38).

Conformément à l'ordonnance rendue en conséquence, les mémoires du

Gouvernement et de la requérante sont parvenus au greffier

le 25 février 1994.  Les 8 et 28 avril, la Commission lui a fourni

divers documents qu'il avait demandés sur les instructions du

président.

5.      Ainsi qu'en avait décidé ce dernier, les débats se sont

déroulés en public le 24 mai 1994, au Palais des Droits de l'Homme à

Strasbourg.  La Cour avait tenu auparavant une réunion préparatoire.

        Ont comparu:

- pour le Gouvernement

  M.  W. Okresek, chef de la division des affaires

      internationales, service constitutionnel,

      chancellerie fédérale,                                   agent,

  Mme E. Bertagnoli, division des droits de l'homme,

      département de droit international,

      ministère fédéral des Affaires étrangères,          conseiller;

- pour la Commission

  M.  F. Ermacora,                                           délégué;

- pour la requérante

  Me  H. Blum, avocat,                                       conseil.

        La Cour a entendu en leurs déclarations M. Okresek, M. Ermacora

et Me Blum.

EN FAIT

I.      Les circonstances de l'espèce

6.      Ressortissante autrichienne, Mme Ortenberg est propriétaire

d'une maison d'habitation à Leonding, près de Linz (Haute-Autriche).

     A.  Les procédures administratives

7.      Le 12 septembre 1980, le conseil municipal de Leonding adopta

un plan d'occupation des sols (Flächenwidmungsplan) qui qualifia de

constructible une zone comprenant cinq parcelles (725/3-7) jouxtant la

propriété de la requérante.  Le 30 janvier 1981, il se prononça en

faveur d'un plan de réglementation des constructions (Bebauungsplan)

qui autorisa l'édification de maisons en terrasses sur ce terrain.

8.      Par la suite, le maire de la ville accorda des permis de

construire à chaque propriétaire de parcelle.  Mme Ortenberg interjeta

appel (Berufung) de ces décisions devant le conseil municipal,

contestant notamment la légalité des plans d'occupation des sols et de

réglementation des constructions et se plaignant des nuisances

importantes qui résulteraient pour elle des bâtiments envisagés.  Le

conseil la débouta.

9.      La requérante formula alors des réclamations administratives

(Vorstellungen) devant le gouvernement du Land de Haute-Autriche.  Par

des décisions (Bescheide) des 27 mai (parcelle 725/7), 8 juillet

(parcelle 725/6), 3 septembre (parcelle 725/5), 14 octobre (parcelle

725/4) et 22 octobre 1982 (parcelle 725/3), ce dernier les rejeta,

faute de violation des droits subjectifs de voisinage de Mme Ortenberg,

prévus par les articles 23 par. 2 et 46 par. 3 de la loi de 1976 sur

les normes de construction du Land de Haute-Autriche

(Oberösterreichische Bauordnung - paragraphe 15 ci-dessous).  Il

précisa que, selon les experts, les nuisances provoquées par le bruit,

la poussière et les odeurs ne dépasseraient pas les normes locales

applicables et que les maisons envisagées se conformaient au plan de

réglementation des constructions.

    B. Les procédures juridictionnelles

10.     Mme Ortenberg se pourvut devant la Cour constitutionnelle quant

aux parcelles 725/6 et 725/7, alléguant la violation de ses droits

constitutionnels et l'application de règlements illégaux (gesetzwidrige

Verordnungen).

        Parallèlement, elle intenta trois recours (Beschwerden) devant

la Cour administrative (parcelles 725/3, 725/4 et 725/5).  Elle

dénonçait une violation de ses droits subjectifs de voisinage, en

raison des nuisances dues à la construction d'une voie d'accès attenant

à sa propriété et qui n'auraient pas été correctement évaluées par les

experts, mais aussi du non-respect de certaines normes en matière de

construction.

11.     Le 2 octobre 1985, la Cour constitutionnelle, doutant de la

conformité des plans d'occupation des sols et de réglementation des

constructions à la loi d'aménagement du Land de Haute-Autriche

(Oberösterreichisches Raumordnungsgesetz), suspendit la procédure

engagée devant elle et décida de procéder à un examen de leur légalité.

Elle indiqua notamment qu'aux termes de cette loi, un reclassement en

terrain constructible de la zone verte en question ne pouvait

s'envisager que s'il servait des intérêts publics prédominants, ce qui

n'avait pas été le cas en l'espèce.

        Le 3 décembre 1985, la Cour administrative saisit également la

Cour constitutionnelle, lui demandant d'annuler les règlements relatifs

aux plans ci-dessus mentionnés, car ils valaient aussi pour les

parcelles 725/3, 725/4 et 725/5.

12.     Le 19 mars 1986, la Cour constitutionnelle joignit l'ensemble

des procédures dont il s'agit et, statuant sur le renvoi de la Cour

administrative, conclut à la légalité des plans d'occupation des sols

et de réglementation des constructions.  D'après elle, le terrain

jouxtant les parcelles en question, d'une superficie trois fois

supérieure, ayant été classé zone constructible dès 1971 par le conseil

municipal de Leonding, l'autorité administrative n'avait procédé qu'à

un élargissement minime de l'espace constructible, ce qui n'allait pas

à l'encontre de la loi d'aménagement du Land de Haute-Autriche.

        Simultanément, la cour rejeta les recours de Mme Ortenberg,

faute de violation de ses droits constitutionnels, et la renvoya devant

la Cour administrative (parcelles 725/6 et 725/7).

13.     Cette dernière débouta l'intéressée par des arrêts des

30 septembre (parcelle 725/5) et 14 octobre 1986 (parcelles 725/3 et

725/4), qui contenaient les motifs suivants:

          "(...)

          Le voisin disposant d'un droit subjectif fondé sur le droit

        public au respect de la disposition mentionnée ci-dessus

        [article 23 par. 2 de la loi de 1976 sur les normes de

        construction du Land de Haute-Autriche] et qui, par principe,

        doit être pris en compte lors de la procédure de délivrance du

        permis de construire, (...) vu les circonstances de l'espèce,

        il s'agissait de rechercher si l'intensification de la

        circulation automobile, causée par la construction envisagée,

        sur la voie d'accès devant longer le terrain de la requérante,

        allait constituer pour cette dernière une source de nuisance

        considérable (...)

          Il ressort des conclusions portant sur la question du bruit,

        figurant dans les observations de la sous-division du

        gouvernement du Land de Haute-Autriche (du 23 mai 1982),

        compétente en matière de protection contre les nuisances, que

        la voie reliant le garage à la jonction avec la route du

        Zaubertal a une longueur de 48 m, que la distance moyenne de

        cette voie à l'habitation de la requérante est d'environ 25 m,

        et qu'en présumant une vitesse moyenne de 5 km/h il faut

        environ 35 secondes pour parcourir la distance entre le garage

        et la jonction avec la voie publique (...)

          (...)

          (...) Compte tenu du fait que la requérante s'est abstenue

        de contester par des déclarations concrètes, pendant la

        procédure, les conclusions déjà exposées de l'expert, la cour

        ne saurait attacher une importance fondamentale - au sens de

        l'article 42 par. 2, alinéa 3 b) et c), de la loi sur la Cour

        administrative, et justifiant de ce fait l'annulation de la

        décision contestée - au fait que, contrairement à la demande

        exprimée par la requérante, l'intensité du bruit de fond n'ait

        pas été mesurée, ni aux insuffisances alléguées de l'expertise

        médicale, d'autant moins que la requérante n'a pas établi les

        raisons qui auraient amené les autorités compétentes, à

        supposer qu'il en fût allé autrement, à conclure que le

        surcroît de circulation automobile - dont la très faible

        importance est incontestée - aurait entraîné une nuisance

        considérable pour la requérante sur sa propriété (...)

          Compte tenu de l'interdiction de présenter des éléments

        nouveaux résultant de l'article 41 par. 1 de la loi sur la

        Cour administrative, la cour ne saurait se prononcer sur

        l'allégation de la requérante, selon laquelle la moyenne

        horaire estimée à 40 véhicules automobiles circulant de jour

        sur la route du Zaubertal est tout à fait surestimée.

          (...)

          Ni dans sa réclamation administrative contre cette décision

        [du conseil municipal de Leonding] ni dans son recours, la

        requérante n'a établi de manière concrète le bien-fondé de ses

        réclamations.  Aussi, le caractère substantiel de la violation

        alléguée des règles de procédure, au sens de l'article 42

        par. 2, alinéa 3, de la loi sur la Cour administrative, ne

        pouvant être décelé, le présent recours fondé sur une

        prétendue violation des règles de procédure (Verfahrensrüge)

        ne saurait entraîner l'annulation de la décision contestée.

          (...)

          En conséquence, le présent recours s'avère non fondé dans

        son ensemble et doit donc être rejeté, conformément à

        l'article 42 par. 1 de la loi sur la Cour administrative.

          (...)"

14.     Le 28 octobre 1986, la Cour administrative rejeta également les

recours de Mme Ortenberg concernant les parcelles 725/6 et 725/7, qui

lui avaient aussi été soumis par la Cour constitutionnelle, en

reprenant les motifs exposés dans ses précédents arrêts

(paragraphe 13 ci-dessus).

II.     Le droit interne pertinent

     A. La loi sur les normes de construction du Land de Haute-

        Autriche

15.     Deux dispositions de la loi de 1976 sur les normes de

construction du Land de Haute-Autriche entrent en ligne de compte en

l'espèce:

                              Article 23

          "(1) Tous les bâtiments doivent être planifiés et construits

        de manière à respecter, compte tenu de l'état des

        connaissances techniques, les exigences normales auxquelles de

        pareils bâtiments doivent correspondre en matière de sécurité,

        de solidité, de protection contre l'incendie, d'isolation

        calorifuge et sonore, de santé, d'hygiène, de protection de

        l'environnement et de la "Zivilisation", et de manière à ne

        pas porter atteinte à l'aspect des lieux et du paysage (...)

          (2) En particulier, tous les éléments d'une construction

        doivent être planifiés et construits de manière à éviter, dans

        la mesure du possible, toutes atteintes à l'environnement.

        Sont ainsi qualifiées celles qui sont de nature à (...) créer

        des nuisances considérables pour la collectivité et, en

        particulier, pour les utilisateurs des bâtiments et le

        voisinage, telles que (...) le bruit (...)"

                              Article 46

          "(1) (...)

          (2) Les voisins peuvent soulever des objections contre la

        délivrance d'un permis de construire au motif que le projet de

        construction est de nature à violer leurs droits subjectifs.

        Ceux-ci peuvent être fondés sur le droit privé (objections de

        droit privé) ou sur le droit public (objections de droit

        public).

          (3) Dans la procédure de délivrance du permis de construire,

        les objections de droit public soulevées par les voisins ne

        doivent être prises en compte que si elles reposent sur des

        dispositions du droit de la construction, d'un plan

        d'occupation des sols ou d'un plan de réglementation des

        constructions qui ne servent pas seulement l'intérêt public,

        mais aussi celui du voisinage.  Elles incluent, en

        particulier, l'ensemble des dispositions concernant le type de

        construction, les utilisations possibles du terrain à bâtir,

        la situation du projet de construction, les distances par

        rapport aux parcelles limitrophes et bâtiments voisins, la

        hauteur des bâtiments, leur exposition à la lumière et leur

        aération ainsi que les dispositions concernant la protection

        de la santé et celle du voisinage contre les nuisances."

     B. Les recours devant la Cour constitutionnelle

16.     Sur requête (Beschwerde), la Cour constitutionnelle recherche

si une décision administrative (Bescheid) a porté atteinte à un droit

garanti par la Constitution, ou a appliqué un règlement (Verordnung)

contraire à la loi, une loi contraire à la Constitution ou un traité

international incompatible avec le droit autrichien (article 144

par. 1 de la Constitution fédérale - Bundesverfassungsgesetz).

     C. Les recours devant la Cour administrative

17.     Selon l'article 130 de la Constitution fédérale, la Cour

administrative connaît notamment des requêtes qui allèguent

l'illégalité d'un acte administratif.

        L'article 41 par. 1 de la loi sur la Cour administrative

(Verwaltungsgerichtshofsgesetz) est ainsi libellé:

          "Dans la mesure où elle ne relève aucune illégalité

        résultant de l'incompétence de l'autorité défenderesse ou de

        violations de règles de procédure (article 42 par. 2,

        alinéas 2 et 3) (...), la Cour administrative examine la

        décision attaquée en se fondant sur les faits constatés par

        ladite autorité et sous l'angle des griefs soulevés (...).  Si

        elle estime que des motifs, non encore révélés à l'une des

        parties, peuvent être déterminants pour statuer [sur l'un de

        ces griefs] (...), elle entend les parties à ce sujet et, au

        besoin, suspend la procédure."

        Aux termes de l'article 42 par. 2 de la même loi,

          "La Cour administrative annule la décision attaquée, si

        celle-ci est illégale

        1) par son contenu, [ou]

        2) en raison de l'incompétence de l'autorité défenderesse,

        [ou]

        3) à cause d'un vice de procédure résultant:

           a) de ce que l'autorité défenderesse a tenu pour établis

        des faits qui, sur un point essentiel, se trouvent démentis

        par le dossier, ou

           b) de ce qu'il échet de les compléter sur un tel point, ou

           c) de ce que l'autorité défenderesse a méconnu des règles

        de procédure dont le respect aurait pu l'amener à prendre une

        décision différente."

18.     La procédure consiste pour l'essentiel en un échange de

mémoires (article 36).  Si l'une des parties le demande, la Cour

administrative peut tenir une audience contradictoire et, en principe,

publique (articles 39 et 40).

19.     Si la cour annule la décision incriminée, "l'administration est

tenue (...) en utilisant les moyens légaux à sa disposition, d'assurer

sans délai, dans le cas d'espèce, la situation juridique correspondant

à l'opinion (Rechtsansicht) exprimée par la Cour administrative"

(article 63 par. 1).

PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

20.     Mme Ortenberg a saisi la Commission le 10 septembre 1986.

Invoquant l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, elle se

plaignait de ne pas avoir eu accès à un tribunal doté de la plénitude

de juridiction et de ne pas avoir bénéficié d'un procès équitable.

Elle dénonçait en outre une atteinte à son droit de propriété, tel

qu'il est garanti par l'article 1 du Protocole n° 1 (P1-1).

21.     Le 29 juin 1992, la Commission a retenu la requête

(n° 12884/87) quant au grief soulevé sur le terrain de l'article 6

par. 1 (art. 6-1) et l'a déclarée irrecevable pour le surplus.  Dans

son rapport du 14 mai 1993 (article 31) (art. 31), elle conclut à

l'absence de violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) en ce qui

concerne l'accès à un tribunal (quinze voix contre une) et le caractère

équitable de la procédure (unanimité).  Le texte intégral de son avis

et des deux opinions concordantes dont il s'accompagne figure en annexe

au présent arrêt*.

_______________

* Note du greffier: pour des raisons d'ordre pratique il n'y figurera

que dans l'édition imprimée (volume 295-B de la série A des

publications de la Cour), mais chacun peut se le procurer auprès du

greffe.

_______________

CONCLUSIONS PRESENTEES A LA COUR

22.     Dans son mémoire, le Gouvernement invite la Cour à dire

        "que l'article 6 (art. 6) de la Convention ne s'applique pas

        en l'espèce et, en ordre subsidiaire, qu'il n'y a pas eu

        violation du droit de la requérante à ce que sa cause fût

        entendue par un tribunal ni de son droit à un procès équitable

        garantis par l'article 6 par. 1 (art. 6-1) (...)".

23.     De son côté, la requérante prie la Cour

        "1)  de constater que la requérante (...), dans la procédure

        concernant la construction de maisons d'habitation sur le

        terrain attenant à sa propriété et du fait des décisions

        rendues par la Cour constitutionnelle et la Cour

        administrative dans le cadre de cette procédure, a été lésée

        dans

           a) son droit à ce que sa cause fût entendue par un tribunal

        au sens de l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention,

        appelé à décider sur ses droits de caractère civil,

           b) son droit à être entendue équitablement, au sens de

        l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, ainsi que

           c) son droit au respect de ses biens, conformément à

        l'article 1 du Protocole n° 1 (P1-1) (...)

        2)  d'accorder à la requérante, conformément à l'article 50

        (art. 50) de la Convention, un dédommagement approprié d'un

        montant de 1 140 000 schillings autrichiens, plus un montant

        correspondant aux frais de procédure, et de condamner la

        République d'Autriche à verser cette somme à la requérante

        (...)".

EN DROIT

I.      SUR LA VIOLATION ALLEGUEE DE L'ARTICLE 6 PAR. 1 (art. 6-1) DE

        LA CONVENTION

24.     Mme Ortenberg se plaint de n'avoir pas eu accès à un tribunal

doté de la plénitude de juridiction ni bénéficié d'un procès équitable

et public.  Elle invoque l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la

Convention, ainsi libellé:

        "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue

        équitablement [et] publiquement (...) par un tribunal (...)

        qui décidera (...) des contestations sur ses droits et

        obligations de caractère civil (...)"

    A.  Sur l'applicabilité de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

25.     Le Gouvernement estime ce texte inapplicable en l'espèce.  Le

droit des voisins de s'opposer à la délivrance d'un permis de

construire en vertu de l'article 46 par. 3 de la loi sur les normes de

construction du Land de Haute-Autriche (paragraphe 15 ci-dessus)

revêtirait un caractère essentiellement public.  En effet, il viserait

à assurer le respect des dispositions légales et notamment celles qui

tendent à la protection de l'environnement.  En outre, la délivrance

d'un permis de construire concernerait la relation entre une autorité

publique et un tiers, et n'affecterait pas directement le propriétaire

d'un terrain adjacent.

26.     Mme Ortenberg affirme en revanche qu'elle intenta les

procédures dont il s'agit afin d'éviter toute atteinte à ses droits

patrimoniaux et que leur issue eut donc une incidence directe sur ses

droits et obligations de caractère civil.

27.     Tel est aussi en substance l'avis de la Commission.

28.     La Cour rappelle que l'article 6 par. 1 (art. 6-1) joue dès

lors que l'action a un objet "patrimonial" et se fonde sur une atteinte

alléguée à des droits eux aussi patrimoniaux (arrêt Editions Périscope

c. France du 26 mars 1992, série A n° 234-B, p. 66, par. 40) ou que son

issue est "déterminante pour des droits et obligations de caractère

privé" (arrêt H. c. France du 24 octobre 1989, série A n° 162-A, p. 20,

par. 47).

        Elle note que l'article 46 par. 2 de la loi sur les normes de

construction du Land de Haute-Autriche confère expressément aux voisins

la possibilité de s'opposer à la délivrance d'un permis de construire

en dénonçant une méconnaissance de leurs droits subjectifs, qui

"peuvent être fondés sur le droit privé (objections de droit privé) ou

sur le droit public (objections de droit public)"

(paragraphe 15 ci-dessus).

        En l'occurrence, la requérante s'appuya sur le droit public et

allégua le non-respect des dispositions de l'article 23 par. 2 de la

loi précitée (paragraphe 15 ci-dessus).  Ce faisant, elle voulut

néanmoins éviter une atteinte à ses droits patrimoniaux, car elle

estimait que les travaux sur le terrain attenant à sa propriété en

compromettraient la jouissance et en réduiraient la valeur marchande.

        Compte tenu du lien étroit existant entre la procédure engagée

par l'intéressée et les répercussions de l'issue de ladite procédure

sur sa propriété, le droit en question revêtait un caractère "civil".

        Partant, l'article 6 par. 1 (art. 6-1) trouve à s'appliquer.

    B.  Sur l'observation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

        1. Le droit d'accès à un tribunal

29.     D'après la requérante, ni la Cour constitutionnelle ni la Cour

administrative ne peuvent passer pour un "tribunal" au sens de

l'article 6 par. 1 (art. 6-1).

        La première ne disposerait pas d'un pouvoir de contrôle en fait

et en droit, et se serait limitée à procéder à un examen sommaire des

plans d'occupation des sols et de réglementation des constructions.

        Quant à la seconde, elle posséderait un large pouvoir de

contrôle en droit, mais se trouverait liée en fait par les

constatations des autorités administratives, sauf dans les cas de

violation substantielle des règles de procédure prévus à l'article 42

par. 2, alinéa 3, de la loi sur la Cour administrative (paragraphe 17

ci-dessus).  Ladite juridiction ne serait donc pas habilitée à

administrer directement les preuves, ni à établir elle-même les faits

ni à prendre en compte des éléments nouveaux.  De plus, en cas

d'annulation d'une décision administrative, elle ne pourrait se

prononcer au lieu et place de l'autorité censurée, mais devrait

toujours lui renvoyer le dossier.  Bref, elle n'exercerait qu'un

contrôle de légalité, que l'on ne saurait assimiler à un contentieux

de pleine juridiction.

30.     Pour le Gouvernement, au contraire, la Cour administrative

jouit de compétences qui, combinées avec celles de la Cour

constitutionnelle, présentent une étendue suffisante aux fins de

l'article 6 par. 1 (art. 6-1).  En vertu de l'article 42 par. 2,

alinéa 3, de la loi sur la Cour administrative, elle disposerait d'un

large pouvoir de contrôle en ce qui concerne tant l'établissement des

faits que l'administration des preuves.  En l'espèce, tout comme dans

l'affaire Zumtobel c. Autriche (arrêt du 21 septembre 1993, série A

n° 268-A), la Cour administrative aurait ainsi revu les faits en

détail.  De plus, en cas d'annulation d'une décision administrative,

l'autorité censurée serait liée par l'avis de la Cour administrative

(article 63 par. 1 de la loi précitée - paragraphe 19 ci-dessus).

31.     La Cour le rappelle: il faut, sur le terrain de l'article 6

par. 1 (art. 6-1) de la Convention, que la décision d'une autorité

administrative qui ne remplit pas elle-même les conditions posées par

cet article subisse le contrôle ultérieur d'un "organe judiciaire de

pleine juridiction" (arrêt Albert et Le Compte c. Belgique du

10 février 1983, série A n° 58, p. 16, par. 29).

32.     Telle n'est pas la Cour constitutionnelle.  En l'occurrence,

elle ne pouvait examiner que la légalité des plans d'occupation des

sols et de réglementation des constructions ce qui, de l'aveu même du

Gouvernement, ne lui permit pas d'étudier l'ensemble des faits de la

cause.  Elle ne possédait donc pas la compétence exigée par

l'article 6 par. 1 (art. 6-1).

33.     Quant au contrôle exercé par la Cour administrative, son

ampleur doit s'apprécier à la lumière de la circonstance que la

délivrance du permis de construire ne s'analyse pas en un acte purement

discrétionnaire de l'administration: il reste soumis aux règles

énoncées par les articles 23 et 46 de la loi sur les normes de

construction du Land de Haute-Autriche (paragraphe 15 ci-dessus).  Il

revenait à la Cour administrative de s'assurer de l'observation de ces

textes.  A cet égard, le présent litige se distingue de l'affaire

Obermeier c. Autriche (arrêt du 28 juin 1990, série A n° 179) et se

rapproche davantage de l'affaire Zumtobel (arrêt précité).

34.     Avec la Commission, la Cour note que, dans ses arrêts de 1986

(paragraphe 13 ci-dessus), la Cour administrative procéda à un examen

approfondi, point par point, des griefs de la requérante, sans jamais

se voir contrainte de décliner sa compétence pour y répondre.  Elle

étudia notamment en détail la question de savoir si la circulation sur

la voie d'accès allait constituer une "nuisance considérable", avant

de conclure de manière motivée à l'absence de violation des règles de

procédure au sens de l'article 42 par. 2, alinéa 3 b) et c), de la loi

sur la Cour administrative.

        Compte tenu du fait qu'il s'agit d'une décision d'opportunité

de l'administration et eu égard à la nature des griefs de

Mme Ortenberg, le contrôle de la Cour administrative a, en l'espèce,

répondu aux exigences de l'article 6 par. 1 (art. 6-1).

        2. Le droit à un procès équitable

35.     La requérante se plaint ensuite de ne pas avoir bénéficié d'un

procès équitable.

36.     La Cour constitutionnelle ne se trouve pas en cause, faute de

constituer aux fins de la présente affaire un "tribunal" au sens de

l'article 6 par. 1 (art. 6-1) (paragraphe 32 ci-dessus).

37.     Il n'en va pas de même de la Cour administrative.  Toutefois,

la Cour européenne constate, avec le Gouvernement, que Mme Ortenberg

ne fournit aucun élément de nature à jeter un doute sur le caractère

équitable de la procédure suivie en l'espèce devant cette juridiction.

        3. Le droit à un procès public

38.     La requérante reproche à la Cour administrative de n'avoir pas

tenu d'audience.

39.     La Cour constate que le grief n'a pas été soulevé devant la

Commission.  Partant, elle n'a pas compétence pour l'examiner.

        4. Conclusion

40.     En résumé, il n'y a pas eu violation de l'article 6 par. 1

(art. 6-1).

II.     SUR LA VIOLATION ALLEGUEE DE L'ARTICLE 1 DU PROTOCOLE N° 1

        (P1-1)

41.     Dans son mémoire, Mme Ortenberg dénonce en outre une atteinte

à son droit de propriété, contraire à l'article 1 du Protocole n° 1

(P1-1).

42.     Déclaré irrecevable par la Commission, le 29 juin 1992, pour

tardiveté (articles 26 et 27 par. 3 de la Convention - paragraphe 21

ci-dessus) (art. 26, art. 27-3), le grief sort du cadre du litige

déféré à la Cour.  Dès lors, celle-ci n'a pas compétence pour en

connaître.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, A L'UNANIMITE,

1.      Dit qu'il n'y a pas eu violation de l'article 6 par. 1

        (art. 6-1) de la Convention quant à l'accès à un tribunal;

2.      Dit qu'il n'y a pas eu violation de l'article 6 par. 1

        (art. 6-1) de la Convention en ce qui concerne le caractère

        équitable de la procédure;

3.      Dit qu'elle n'a pas compétence pour examiner le grief tiré de

        l'absence d'audience devant la Cour administrative;

4.      Dit qu'elle n'a pas compétence pour connaître du grief soulevé

        sur le terrain de l'article 1 du Protocole n° 1 (P1-1).

        Fait en français et en anglais, puis prononcé en audience

publique au Palais des Droits de l'Homme, à Strasbourg,

le 25 novembre 1994.

Signé: Rolv RYSSDAL

        Président

Signé: Herbert PETZOLD

       Greffier f.f.

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CEDH, Cour (chambre), AFFAIRE ORTENBERG c. AUTRICHE, 25 novembre 1994, 12884/87