CEDH, Cour (chambre), AFFAIRE WERNER c. AUTRICHE, 24 novembre 1997, 21835/93

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Chambre), 24 nov. 1997, n° 21835/93
Numéro(s) : 21835/93
Publication : Recueil 1997-VII
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Arrêt Ankerl c. Suisse du 23 octobre 1996, Recueil 1996-V, pp. 1567-1568, § 38
Arrêt Axen c. Allemagne case du 8 décembre 1983, série A n° 72, p. 14, § 32
Arrêt Diennet c. France du 26 septembre 1995, série A n° 325-A, pp. 14-15, § 33, p. 15, § 34
Arrêt Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas du 27 octobre 1993, série A n° 274, p. 19, § 33
Arrêt Editions Périscope c. France du 26 mars 1992, série A n° 234-B, p. 66, § 40
Arrêt Georgiedis c. Grèce du 29 mai 1997, Recueil 1997-III, pp. 958-959, § 30, p. 959, §§ 32, 34 et 35
Arrêt Håkansson et Sturesson c. Suède du 21 février 1990, série A n° 171-A, p. 20 § 64, pp. 20-21, § 67
Arrêt Lobo Machado c. Portugal du 20 février 1996, Recueil of Judgments et Décision ("Recueil") 1996-I, p. 206, § 31
Arrêt Masson et Van Zon c. Pays-Bas du 28 septembre 1995, série A n° 327-A, p. 17, § 44, p. 19, § 51
Arrêt Nideröst-Huber c. Suisse du 18 février 1997, Recueil 1997-I, p. 108, § 28, p. 110, § 40
Arrêt Pauger c. Autriche du 28 mai 1997, Recueil 1997-III, pp. 895-896, §§ 58-63, p. 896, § 60
Arrêt Pretto et autres c. Italie du 8 décembre 1983, série A n° 71, p. 11, § 21, p. 12, § 26 in fine, p. 13, § 27
Arrêt Ruiz-Mateos c. Espagne du 23 juin 1993, série A n° 262, p. 25, § 63
Arrêt Schuler-Zgraggen c. Suisse du 24 juin 1993, série A n° 263, pp. 19-20, § 58
Arrêt Sutter c. Suisse case du 22 février 1984, série A n° 74, pp. 14-15, § 34
Arrêt Szücs c. Autriche du 24 novembre 1997, Recueil 1997-VII
Arrêt Vermeulen c. Belgique du 20 février 1996, Recueil 1996-I, p. 234, § 33
Arrêt Zumtobel c. Autriche du 21 septembre 1993, série A n° 268-A, p. 14, § 34
Niveau d’importance : Importance moyenne
Opinion(s) séparée(s) : Oui
Conclusions : Exception préliminaire jointe au fond (non-épuisement des voies de recours internes) ; Exception préliminaire rejetée (non-épuisement des voies de recours internes) ; Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - constat de violation suffisant ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure nationale ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention
Identifiant HUDOC : 001-62677
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:1997:1124JUD002183593
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Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE WERNER c. AUTRICHE

(138/1996/757/956)

ARRET

STRASBOURG

24 novembre 1997

Cet arrêt peut subir des retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des arrêts et décisions 1997, édité par Carl Heymanns Verlag KG (Luxemburger Straße 449, D-50939 Cologne) qui se charge aussi de le diffuser, en collaboration, pour certains pays, avec les agents de vente dont la liste figure au verso.


Liste des agents de vente

Belgique : Etablissements Emile Bruylant (rue de la Régence 67,

  B-1000 Bruxelles)

Luxembourg : Librairie Promoculture (14, rue Duchscher

  (place de Paris), B.P. 1142, L-1011 Luxembourg-Gare)

Pays-Bas : B.V. Juridische Boekhandel & Antiquariaat

  A. Jongbloed & Zoon (Noordeinde 39, NL-2514 GC La Haye)


SOMMAIRE[1]

Arrêt rendu par une chambre

Autriche – absence d'audience publique et de prononcé public de jugements par un tribunal et une cour d'appel dans une procédure portant sur une demande d'indemnité pour la détention subie (loi de 1969 sur l'indemnisation en matière pénale et article 82 du code de procédure pénale) – absence de communication des observations du procureur général dans ladite procédure devant la cour d'appel (article 35 § 2 du code de procédure pénale en vigueur à l'époque des faits)

I.Article 6 § 1 de la Convention

A.Exception préliminaire du Gouvernement (non‑épuisement des voies de recours internes)

Question étroitement liée à celle du bien-fondé du grief.

Conclusion : jonction au fond (unanimité).

B. Bien-fondé du grief

1. Applicabilité

Rappel de la jurisprudence.

Requérant avait un droit à être indemnisé au titre de sa détention provisoire, dès lors que les conditions prévues par la loi étaient remplies – existence d'une contestation sur ce droit – issue de la procédure devant les juridictions pénales compétentes directement déterminante pour son droit – caractère civil du droit à réparation de l'intéressé.

Conclusion : applicabilité (unanimité).

2. Observation

a)      Absence de débats publics et de prononcé public des jugements

  1. Réserve de l'Autriche

Question non évoquée dans le mémoire du Gouvernement devant la Cour – se heurte donc à forclusion – non-lieu à un examen d'office.

ii. Absence de débats publics

Rappel de la jurisprudence.

En principe, droit à une audience publique – acquis qu'en pratique une telle procédure ne donne jamais lieu à des débats publics – on ne saurait dès lors reprocher à l'intéressé de


ne pas avoir fait une demande qui n'avait aucune chance d'aboutir – la protection de la vie privée de l'intéressé ne l'emporte pas sur le principe de la publicité prévue à l'article 6 § 1.

Conclusion : rejet de l'exception et violation (unanimité).

iii. Absence de prononcé public des jugements
 

Rappel de la jurisprudence.

Autorisation accordée aux tiers, s'ils justifient d'un intérêt légitime, d'obtenir une copie des jugements ne constitue pas un libre accès de chacun au texte intégral des jugements – en Autriche, cette possibilité n'existe que pour les arrêts de la Cour suprême, de la Cour administrative et de la Cour constitutionnelle – par ailleurs, absence de nécessité pour les juridictions compétentes de formuler des déclarations qui emporteraient violation de la présomption d'innocence.

Conclusion : violation (unanimité).

b)  Procès équitable

Rappel de la jurisprudence.

Respect du principe de l'égalité des armes exigeait que le requérant obtînt communication des observations du procureur général et qu'il eût la possibilité de les commenter.

Conclusion : violation (huit voix contre une).

II.Article 50 de la Convention

A.  Dommage matériel : absence de lien de causalité entre les violations dénoncées et le préjudice matériel allégué.

B.  Frais et dépens : remboursement fixé en équité.

Conclusion : Etat défendeur tenu de payer au requérant une certaine somme pour frais et dépens (unanimité).

RÉFÉRENCES À LA JURISPRUDENCE DE LA COUR

8.12..1983, Pretto et autres c. Italie ; 8.12.1983, Axen c. Allemagne ; 22.2.1984, Sutter c. Suisse ; 21.2.1990, Håkansson et Sturesson c. Suède ; 26.3.1992, Editions Périscope c. France ; 23.6.1993, Ruiz-Mateos c. Espagne ; 24.6.1993, Schuler-Zgraggen c. Suisse ; 21.9.1993, Zumtobel c. Autriche ; 27.10.1993, Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas ; 26.9.1995, Diennet c. France ; 28.9.1995, Masson et Van Zon c. Pays-Bas ; 20.2.1996, Lobo Machado c. Portugal ; 20.2.1996, Vermeulen c. Belgique ; 23.10.1996, Ankerl c. Suisse ; 18.2.1997, Nideröst-Huber c. Suisse ; 28.5.1997, Pauger c. Autriche ; 29.5.1997, Georgiadis c. Grèce ; 24.11.1997, Szücs c. Autriche


En l'affaire Werner c. Autriche[2],

La Cour européenne des Droits de l'Homme, constituée conformément à l'article 43 de la Convention de sauvegarde des Droits et de l'Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention ») et aux clauses pertinentes de son règlement B[3], en une chambre composée des juges dont le nom suit :

MM.R. Ryssdal, président,

F. Gölcüklü,

F. Matscher,

L.-E. Pettiti,

A. Spielmann,

N. Valticos,

MmeE. Palm,

MM.L. Wildhaber,

B. Repik,

ainsi que de MM. H. Petzold, greffier, et P.J. Mahoney, greffier adjoint,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil les 27 juin et 20 octobre 1997,

Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date :

PROCéDURE

1.  L'affaire a été déférée à la Cour par la Commission européenne des Droits de l'Homme (« la Commission ») le 28 octobre 1996, et par le gouvernement de la République d'Autriche (« le Gouvernement ») le 25 novembre 1996, dans le délai de trois mois qu'ouvrent les articles 32 § 1 et 47 de la Convention. A son origine se trouve une requête (n° 21835/93) dirigée contre l'Autriche et dont un ressortissant de cet Etat, M. Johannes Werner, avait saisi la Commission le 16 mars 1993 en vertu de l'article 25.

La demande de la Commission renvoie aux articles 44 et 48 ainsi qu'à la déclaration autrichienne reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour (article 46), la requête du Gouvernement à l'article 48. Elles ont pour objet d'obtenir une décision sur le point de savoir si les faits de la cause révèlent un manquement de l'Etat défendeur aux exigences de l'article 6 § 1 de la Convention.

2.  Le requérant a exprimé le désir de participer à la procédure et a désigné son conseil (article 31 du règlement B), que le président a autorisé à employer l'allemand (article 28 § 3).

3.  La chambre à constituer comprenait de plein droit M. F. Matscher, juge élu de nationalité autrichienne (article 43 de la Convention), et M. R. Ryssdal, président de la Cour (article 21 § 4 b) du règlement B). Le 29 octobre 1996, celui-ci a décidé qu'aux fins d'une bonne administration de la justice, cette affaire ainsi que l'affaire Szücs c. Autriche seraient examinées par la même chambre (article 21 § 7). Le même jour, il a tiré au sort, en présence du greffier, le nom des sept autres membres, à savoir M. F. Gölcüklü, M. L.-E. Pettiti, M. A. Spielmann, M. N. Valticos, Mme E. Palm, M. L. Wildhaber et M. B. Repik (articles 43 in fine de la Convention et 21 § 5 du règlement B).

4.  En sa qualité de président de la chambre (article 21 § 6 du règlement B), M. Ryssdal a consulté, par l'intermédiaire du greffier, l'agent du Gouvernement, l'avocat du requérant et le délégué de la Commission au sujet de l'organisation de la procédure (articles 39 § 1 et 40). Conformément à l'ordonnance rendue en conséquence, le greffier a reçu les mémoires du Gouvernement et du requérant le 2 avril 1997.

Le 24 janvier 1997, la Commission avait produit divers documents de la procédure suivie devant elle ; le greffier l'y avait invitée sur les instructions du président.

5.  Ainsi qu'en avait décidé ce dernier, les débats consacrés à cette affaire ainsi qu'à l'affaire Szücs se sont déroulés en public le 25 juin 1997, au Palais des Droits de l'Homme à Strasbourg. La Cour avait tenu auparavant une réunion préparatoire.

Ont comparu :

- pour le Gouvernement
M.  F. Cede, ambassadeur, ministère fédéral
des Affaires étrangères,agent,
Mmes  I. Gartner, procureur, département des affaires
criminelles et des grâces, ministère fédéral
de la Justice,
  I. Siess, service constitutionnel,
chancellerie fédérale,conseillères ;

- pour la Commission

M.    A. Weitzel,délégué ;


- pour le requérant

Me      G. Bürstmayr, avocat au barreau de Munich,conseil ;

- pour M. Szücs

Me     T. Schreiner, avocat au barreau d'Eisenstadt,conseil.

La Cour a entendu en leurs déclarations M. Weitzel, Me Bürstmayr, Me Schreiner, M. Cede et Mme Gartner.

EN FAIT

I.Les circonstances de l'espèce

6.  Ressortissant autrichien né en 1963, M. Johannes Werner réside à Vienne.

A.La détention provisoire

7.  Le 15 mai 1991, la police arrêta M. et Mme Hauser (paragraphe 25 ci-dessous), soupçonnés d'avoir frauduleusement utilisé la carte de crédit d'une tierce personne lors d'achats effectués dans différents magasins de Vienne pour une valeur d'environ 200 000 schillings autrichiens (ATS). Le 17 mai, ils furent placés en détention provisoire.

8.  Le 1er juillet 1991, la police arrêta également le requérant, soupçonné d'avoir été le complice des époux Hauser en falsifiant la signature sur la carte de crédit. Le 3 juillet, il fut placé en détention provisoire.

9.  Le 8 juillet 1991, les époux Hauser furent remis en liberté, et, le 19 juillet, l'intéressé.

B.L'arrêt des poursuites

10.  Le 24 février 1992, le juge d'instruction près le tribunal régional (Landesgericht) de Vienne décida d'abandonner les poursuites à la suite des conclusions d'un expert en graphologie, d'après lesquelles il était peu probable que les signatures figurant sur les reçus de la carte de crédit volée fussent de la main de M. Werner, ainsi qu'au fait que les témoins cités par le procureur n'avaient pas de souvenirs assez précis.

C.La demande d'indemnité pour la détention subie

11.  Entre-temps, le 4 février 1992,  le parquet (Staatsanwaltschaft) avait demandé au tribunal régional de dire que le requérant et les époux Hauser n'avaient pas droit au versement d'une indemnité pour la détention subie, conformément à l'article 2 § 1 b) de la loi de 1969 sur l'indemnisation en matière pénale (Strafrechtliches Entschädigungsgesetz, « loi de 1969 » – paragraphe 19 ci-dessous), au motif que les soupçons à leur égard n'avaient pas été dissipés.

12.  Le 21 avril 1992, le juge d'instruction entendit l'intéressé et les époux Hauser et les informa de la démarche du parquet.

13.  Ceux-ci sollicitèrent de l'Etat un dédommagement pour le préjudice matériel causé par leur maintien en détention.

14.  Le 3 juin 1992, la chambre du conseil (Ratskammer) du tribunal régional de Vienne, siégeant à huis clos, rejeta leurs demandes d'indemnité, au motif que, contrairement aux exigences de l'article 2 § 1 b) de la loi de 1969, les soupçons à leur égard n'avaient pas été dissipés. Aucun représentant du parquet n'assista aux délibérations.

15.  Le 15 juin 1992, M. Werner et les époux Hauser interjetèrent appel de cette décision auprès de la cour d'appel (Oberlandesgericht) de Vienne. Ils demandèrent à la cour d'appel de recueillir de nouvelles preuves et notamment d'entendre des témoins.

16.  Le 2 septembre 1992, le parquet général (Oberstaatsanwaltschaft) soumit ses observations écrites. Il demanda à la cour d'appel de débouter les demandeurs et de ne pas recueillir de nouvelles preuves, étant donné que les déclarations des témoins n'étaient pas susceptibles d'innocenter les premiers. Ces observations ne furent pas communiquées au requérant et aux époux Hauser.

17.  Le 29 octobre 1992, la cour d'appel de Vienne, siégeant à huis clos, débouta les demandeurs.

Elle statua en ces termes :

« Il y a d'abord lieu de répondre aux demandeurs que leur thèse selon laquelle les soupçons ne doivent pas être entièrement dissipés pour que puisse être accordée une indemnité sur le fondement de l'article 2 § 1 b) de la loi sur l'indemnisation en matière pénale se trouve contredite par la jurisprudence constante des tribunaux autrichiens. Uniforme, celle-ci prévoit en effet que les soupçons doivent être dissipés à un degré tel qu'il soit prouvé que l'intéressé n'est pas punissable et ne peut être poursuivi pour le comportement à l'origine de sa détention. Si cela demeure seulement incertain, les soupçons ne sont pas dissipés au sens de l'article 2 § 1 b) de la loi. Le reproche des demandeurs selon lequel cette jurisprudence opère un renversement de la charge de la preuve ne correspond pas à la réalité car des preuves concluantes doivent être produites pour que puisse être admise la dissipation des soupçons.

A cet égard, il ne se justifie pas d'ouvrir aux demandeurs, comme ils l'exigent, la possibilité de prouver leur innocence dans le cadre d'une nouvelle instruction, car les preuves offertes ne sauraient être considérées comme propres à conduire audit résultat. Dès lors en effet que les soupçons pesant sur les demandeurs reposent essentiellement sur les observations des témoins en date du 16 mars 1991 et que, de surcroît, il n'est pas possible de déterminer à quel moment les autres faits ont eu lieu, on ne peut escompter des résultats concluants d'une nouvelle instruction où seraient produits, pour les 18 et 19 mars, le relevé des heures et des itinéraires du demandeur Johannes Werner, ainsi que les disques de son tachygraphe, car les faits incriminés peuvent avoir eu lieu pendant les pauses effectuées au cours des trajets, ou encore avant ou après ceux-ci, d'autant que les relevés horaires soumis par l'intéressé présentent des trous. Les témoins cités ont déjà été entendus par la police et ont déjà été confrontés aux demandeurs en l'espèce. Si les poursuites ont été abandonnées, c'est essentiellement en raison du fait qu'avec le temps la mémoire desdits témoins est devenue hésitante. Toutefois, si elle s'est montrée à ce point défaillante qu'elle ne pouvait plus être considérée comme suffisante pour établir la culpabilité, elle ne saurait non plus constituer, dans la présente procédure, une base suffisante pour une indemnisation.

Les demandeurs ne contestent pas que l'enquête de la police avait fait naître contre eux des soupçons concrets. Dès lors que ceux-ci n'ont pu être dissipés par la suite mais que, compte tenu des doutes subsistants, ils n'ont simplement pas suffi pour prononcer un verdict de culpabilité, les conditions auxquelles, en vertu de l'article 2 § 1 b) de la loi sur l'indemnisation en matière pénale, il y a lieu de satisfaire pour pouvoir prétendre à une indemnité ne sont pas remplies. Les demandes ne peuvent donc être accueillies. »

Aucun représentant du parquet général n'assista aux délibérations.

II.Le droit interne pertinent

A.Oralité et publicité des débats judiciaires

18.  L'article 90 § 1 de la Constitution fédérale dispose :

« Les débats judiciaires en matière civile et pénale sont oraux et publics. La loi prévoit les exceptions à cette règle. »

B.Indemnité au titre de la détention provisoire

19.  Les dispositions pertinentes de la loi de 1969 sont ainsi libellées :

Article 2 § 1 b)

« 1) A droit à une indemnité :

a) (...)

b) la victime qui, mise en garde à vue ou en détention provisoire par une juridiction nationale (...), parce que soupçonnée d'une infraction passible de poursuites en Autriche, a été ultérieurement acquittée de ce chef d'inculpation ou autrement mise hors de cause, si les soupçons pesant sur elle ont été dissipés ou si la poursuite se trouve exclue pour d'autres raisons qui existaient déjà à l'époque de l'arrestation ;

(...) »

Article 6

« 1) (...)

2) Le tribunal qui acquitte une personne ou la met autrement hors de cause (…) (article 2 § 1 b) ou c)) doit décider, d'office ou sur demande de la personne concernée ou du parquet, si les conditions d'indemnisation prévues à l'article 2 §§ 1 b) ou c), 2 et 3 se trouvent réunies ou s'il existe un des motifs d'exclusion énumérés à l'article 3. (...) Si les poursuites sont abandonnées sur décision du juge d'instruction, c'est la chambre du conseil qui statue.

3) Avant de statuer, la juridiction doit entendre la personne arrêtée ou condamnée et recueillir les preuves nécessaires à sa décision, pour autant que celles-ci n'ont pas déjà été produites dans la procédure pénale (...)

4) La décision, qu'il n'y a pas lieu de publier, doit, dans le cadre de la procédure prévue au paragraphe 2, une fois la décision au pénal passée en force de chose jugée, être signifiée à la personne arrêtée ou condamnée, et ce par remise en mains propres, ainsi qu'au procureur (...)

5) La personne arrêtée ou condamnée et le procureur peuvent interjeter appel de la décision devant la juridiction supérieure ; ils ont quatorze jours pour ce faire.

6) La juridiction compétente pour statuer sur le recours doit ordonner à la juridiction pénale de première instance d'effectuer des investigations complémentaires, pour autant que cela soit nécessaire pour la décision. Si c'est le tribunal de première instance qui est appelé à statuer, les investigations doivent être effectuées par le juge d'instruction.

7) Dès lors qu'elle est passée en force de chose jugée, la décision lie les juridictions pour la suite de la procédure. »

20.  Si les juridictions estiment que les conditions des articles 2 et 3 sont remplies, l'intéressé doit saisir le département des finances (Finanzprokuratur) pour que sa demande soit accueillie. Si aucune décision n'est prise sur sa demande dans un délai de six mois, ou si sa demande est partiellement ou entièrement refusée, le demandeur peut engager une action civile contre la République d'Autriche (articles 7 et 8 de ladite loi).

21.  En règle générale, il n'y a pas d'audience publique devant la chambre du conseil et devant la cour d'appel dans les procédures de recours (Beschwerden) contre une décision de la chambre du conseil. Ces deux juridictions statuent à huis clos, après avoir entendu, respectivement, le représentant du parquet et celui du parquet général (article 32 § 1 et article 35 § 2 du code de procédure pénale – Strafprozeßordnung).

22.  A l'époque des faits, l'article 35 § 2 du code de procédure pénale était ainsi rédigé :

« [Les procureurs] peuvent assister aux délibérations de la Cour, pour autant qu'elles n'ont pas pour objet une décision qui doit être rendue lors de l'audience principale [Hauptverhandlung], ou lors du « jour d'audience » [Gerichtstag] fixé pour statuer sur un appel ou un recours en nullité ; ils ne peuvent cependant être présents lors du vote et de la prise de décision [Beschlußfassung]. »

Depuis le 1er janvier 1994, ledit article se lit ainsi :

« Lorsque le procureur près une juridiction d'appel formule des observations au sujet d'un pourvoi en cassation ou d'un appel contre un jugement ou contre une autre décision de justice, la juridiction d'appel doit communiquer ces observations à l'accusé (l'intéressé) et lui signaler qu'il peut s'exprimer à leur propos dans un délai qui doit être fixé de manière raisonnable. Cette communication n'est pas nécessaire si le procureur se borne à conclure au rejet du recours sans autre argumentation, s'il se borne à conclure à l'accueil du recours ou si la juridiction d'appel fait droit au recours de l'accusé. »

C.Accès au dossier pénal

23.  L'article 82 du code de procédure pénale dispose :

« Les tribunaux apprécient librement si une partie ou son représentant dûment mandaté peuvent être autorisés, en dehors des cas expressément prévus par le code de procédure pénale, à consulter des pièces du dossier ou si des copies peuvent leur en être délivrées, pour autant que les intéressés démontrent de manière plausible que ces copies leur sont nécessaires pour pouvoir demander une indemnisation, pour étayer leur demande de révision ou pour d'autres motifs. »

D.Accès du public aux arrêts des plus hautes juridictions

24.  La Cour constitutionnelle et la Cour administrative ont pour pratique de mettre à disposition leurs arrêts sur simple demande adressée au greffe. Elles publient en outre annuellement une sélection de leurs décisions. A la suite d'une modification apportée en 1991 à la loi sur la Cour suprême, les arrêts de la Cour suprême (Oberster Gerichtshof) sont également à la disposition du public, sur simple demande. La Cour suprême publie également chaque année une sélection de ses arrêts.

PROCéDURE DEVANT LA COMMISSION

25.  M. Werner a saisi la Commission le 16 mars 1993, en même temps que M. et Mme Hauser, co-requérants qui ont par la suite retiré leur requête. Invoquant l'article 6 § 1 de la Convention, M. Werner se plaignait de ce que le tribunal régional et la cour d'appel de Vienne, statuant sur sa demande d'indemnité pour la détention subie, n'avaient pas tenu d'audience publique et n'avaient pas rendu leurs jugements publiquement. Il soutenait également qu'il n'avait pas bénéficié d'un procès équitable devant la cour d'appel de Vienne, car il n'avait pu répliquer aux observations du procureur général, ni faire interroger des témoins. Enfin, invoquant l'article 6 § 2 de la Convention, il alléguait la violation du principe de la présomption d'innocence.

26.  Les 2 septembre 1994 et 23 octobre 1995, la Commission a retenu la requête (n° 21835/93) quant aux griefs relatifs à l'absence d'audience publique et de prononcé public des jugement et arrêt rendus par le tribunal régional et la cour d'appel de Vienne, de même quant à celui relatif à l'absence de procès équitable devant la cour d'appel, faute pour le requérant d'avoir pu répondre aux observations du procureur général. Elle l'a déclarée irrecevable pour le surplus.

Dans son rapport du 3 septembre 1996  (article 31), elle conclut à la violation de l'article 6 § 1 en ce qui concerne l'absence d'audience publique (vingt-cinq voix contre quatre) et de prononcé public des jugements (vingt-sept voix contre deux) par les juridictions autrichiennes, ainsi qu'en ce qui concerne l'absence de procès équitable devant la cour d'appel de Vienne (vingt-six voix contre trois). Le texte intégral de son avis et des quatre opinions séparées dont il s'accompagne figure en annexe au présent arrêt [4].

CONCLUSIONS PRéSENTéES à LA COUR

27.  Dans son mémoire commun à la présente affaire et à l'affaire Szücs c. Autriche (arrêt du 24 novembre 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-VII), le Gouvernement demande à la Cour :

« 1. De déclarer les présentes requêtes irrecevables au regard de l'article 27 § 2 de la Convention, pour défaut manifeste de fondement en l'absence des violations de la Convention alléguées par les requérants dans la mesure où lesdites requêtes ne doivent pas être rejetées pour défaut d'épuisement des voies de recours internes au regard de l'article 27 § 3 de la Convention ;

ou

2. De dire qu'il n'y a pas eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention dans les procédures engagées en vertu de la loi sur l'indemnisation pénale ».

28.  Le requérant, de son côté, invite la Cour à constater la violation de ses droits, garantis par l'article 6 § 1 de la Convention, à :


« a) une audience publique dans la procédure relative à sa demande d'indemnité en vertu de la loi sur l'indemnisation pénale ;

b) un prononcé public des décisions des juridictions saisies de cette demande ;

c) l'égalité des armes (procès équitable) ».

L'intéressé prie aussi la Cour de condamner l'Autriche à lui verser les frais et dépens encourus ainsi qu'une satisfaction équitable au titre de l'article 50 de la Convention.

EN DROIT

  1.                SUR LA VIOLATION ALLéGUéE DE L'ARTICLE 6 § 1 de la Convention

29.  M. Werner se prétend victime de violations de l'article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement (…) par un tribunal (…) qui décidera (…) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (…). Le jugement doit être rendu publiquement (…) »

Il se plaint de ce que le tribunal régional et la cour d'appel de Vienne, statuant sur sa demande d'indemnité pour la détention subie, n'ont pas tenu d'audience publique ni rendu leurs jugements publiquement. Il allègue également qu'il n'a pas bénéficié d'un procès équitable devant la cour d'appel de Vienne, car il n'a pas eu communication des observations du procureur général.

  1. Sur l'exception préliminaire du Gouvernement

30.   Le Gouvernement soutient, comme déjà devant la Commission, que le requérant n'a pas épuisé les voies de recours internes en ce qui concerne son grief relatif à l'absence d'audience publique, faute d'avoir expressément demandé la tenue d'une telle audience. Il aurait dès lors renoncé à tout droit dont il aurait pu disposer à cet égard.

31.  La Cour estime, avec la Commission, que la question de la renonciation éventuelle de l'intéressé à la tenue d'une audience publique et celle du bien-fondé du grief soulevé sur ce terrain sont étroitement liées (voir, en dernier lieu, l'arrêt Pauger c. Autriche du 28 mai 1997, Recueil des arrêts et décisions 1997-III, pp. 895–896, §§ 58–63). En conséquence, elle décide de joindre l'exception préliminaire au fond de l'affaire.

  1. Sur le bien-fondé des griefs

1. Applicabilité de l'article 6 § 1

32.  Selon le requérant, la procédure litigieuse portait sur ses droits de caractère civil. Il avait demandé réparation au titre de dommages patrimoniaux résultant de sa détention provisoire, et il y aurait eu contestation sérieuse sur son droit à être indemnisé. La deuxième étape de la procédure se déroulant devant des juridictions civiles, il serait incompréhensible d'exclure de l'applicabilité de l'article 6 § 1 l'étape préalable, mais indispensable, devant les juridictions pénales. Enfin, la décision de ces dernières était directement déterminante pour son droit à réparation.

33.  Le Gouvernement, en revanche, estime que la procédure litigieuse ne relève pas de l'article 6, au motif que, comme dans l'affaire Masson et Van Zon c. Pays-Bas (arrêt du 28 septembre 1995, série A n° 327-A), l'intéressé ne disposait pas d'un « droit » en droit interne. En effet, d'après la loi sur l'indemnisation en matière pénale, le simple fait d'acquitter une personne ayant été détenue ou d'abandonner les poursuites dirigées contre elle n'impliquerait pas que celle-ci dispose automatiquement d'un droit à indemnisation. Celui-ci n'existerait que si tous les soupçons avaient été dissipés, ce que les tribunaux compétents apprécieraient de manière discrétionnaire, de sorte que l'on ne saurait parler de l'existence d'un « droit ». Par ailleurs, la décision des juridictions pénales ne serait pas directement déterminante pour le droit en question, car la personne lésée doit faire valoir ultérieurement ses prétentions à indemnisation devant les juridictions civiles.

34.  La Cour rappelle que l'article 6 § 1 s'applique à des contestations sur un droit que l'on peut prétendre, au moins de manière défendable, reconnu en droit interne. Il doit s'agir d'une contestation réelle et sérieuse ; elle peut concerner aussi bien l'existence même d'un droit que son étendue ou ses modalités d'exercice. Enfin, l'issue de la procédure doit être directement déterminante pour le droit en question, l'article 6 § 1 ne se contentant pas, pour entrer en jeu, d'un lien ténu ni de répercussions lointaines (voir notamment l'arrêt Masson et Van Zon précité, p. 17, § 44, et l'arrêt Georgiadis c. Grèce du 29 mai 1997, Recueil 1997-III, pp. 958–959, § 30).

35.  La Cour relève qu'en l'espèce l'article 2 § 1 b) de la loi sur l'indemnisation en matière pénale (paragraphe 19 ci-dessus) prévoit qu'une personne acquittée ou mise hors de cause après sa détention dispose d'un droit à indemnisation si « les soupçons pesant sur elle ont été dissipés ».

Dans l'affaire Masson et Van Zon, l'octroi d'une telle indemnité était entièrement laissée à l'appréciation discrétionnaire des juges, même si les conditions prévues par la loi étaient remplies (arrêt précité, p. 19, § 51), ce qui a amené la Cour à conclure à l'absence d'un droit en droit interne. Dans la présente espèce, au contraire, le requérant avait un droit à être indemnisé au titre de sa détention provisoire, dès lors que les conditions prévues par la loi étaient remplies. Celle-ci se rapproche donc davantage de l'affaire Georgiadis, où une disposition similaire du code de procédure pénale grec crée un droit à réparation pour une personne ayant été acquittée après sa détention (arrêt précité, p. 959, § 32).

A l'instar de la Commission, la Cour considère donc qu'il existait un « droit ».

36.  Par ailleurs, M. Werner soutenait qu'il avait un droit à réparation en vertu de la loi sur l'indemnisation en matière pénale, car les soupçons qui pesaient sur lui à l'origine auraient été dissipés, alors que les juridictions pénales compétentes estimaient que cette condition n'était pas remplie. Il y avait donc « contestation » sur un droit au sens de l'article 6 § 1.

37.  Enfin la Cour note que l'article 6 § 7 de la loi sur l'indemnisation en matière pénale prévoit que « [d]ès lors qu'elle est passée en force de chose jugée, la décision [sur l'octroi de ladite indemnité] lie les juridictions pour la suite de la procédure » (paragraphe 19 ci-dessus). Indépendamment du fait que d'autres étapes procédurales pouvaient s'avérer nécessaires (paragraphe 20 ci-dessus), l'issue de la procédure devant les juridictions pénales compétentes était donc directement déterminante pour le droit à réparation de l'intéressé.

38.  Quant au « caractère civil » de ce droit, la Cour rappelle que la notion de « droits et obligations de caractère civil » ne doit pas s'interpréter par simple référence au droit interne de l'Etat défendeur et que l'article 6 § 1 s'applique indépendamment de la qualité des parties comme de la nature de la loi régissant la « contestation » et de l'autorité compétente pour trancher (arrêt Georgiadis précité, p. 959, § 34). Pour qu'un droit revête un caractère civil, il suffit que l'action ait un objet patrimonial et se fonde sur une atteinte alléguée à des droits eux aussi patrimoniaux (arrêt Editions Périscope c. France du 26 mars 1992, série A n 234-B, p. 66, § 40).

39.  Dans l'affaire Georgiadis, la Cour a conclu au caractère civil du droit à réparation après acquittement d'une personne ayant subi une détention (arrêt précité, p. 959, § 35). Elle ne voit pas de raison de s'écarter de cette analyse en l'espèce, où le droit à réparation du requérant portait sur une indemnité réclamée au titre de la détention subie après l'abandon des poursuites par le juge d'instruction (paragraphe 10 ci-dessus).

40.  Partant, elle conclut, avec la Commission, que l'article 6 § 1 s'applique à la procédure litigieuse.

2. Observation de l'article 6 § 1

a)  Absence de débats publics et de prononcé public des jugements

i. La réserve autrichienne à l'article 6

41.  A l'audience devant la Cour, le Gouvernement a fait valoir que la Cour ne peut connaître des griefs tirés de l'absence de débats publics et de prononcé public des jugements dans la procédure relative à l'indemnisation en matière pénale, cette procédure tombant sous le coup de la réserve autrichienne à l'article 6 de la Convention, ainsi libellée :

« Les dispositions de l'article 6 de la Convention seront appliquées dans la mesure où elles ne portent atteinte, en aucune façon, aux principes relatifs à la publicité de la procédure juridique énoncés à l'article 90 de la Loi fédérale constitutionnelle dans sa version de 1929. »

42.  La Cour note que le Gouvernement n'a pas évoqué la question de la réserve dans son mémoire devant la Cour. Elle estime dès lors devoir appliquer la disposition de l'article 50 § 1 du règlement B, ainsi libellé :

« Si une partie entend soulever une exception préliminaire, elle en formule et motive le texte par écrit (…) avant l'expiration du délai fixé, en vertu de l'article 39 § 1, pour le dépôt du premier mémoire à présenter par elle. »

La question de savoir si ces griefs (paragraphe 41 ci-dessus) sont couverts par ladite réserve se heurte donc à la forclusion et il n'y a pas lieu de l'examiner d'office.

ii. L'absence de débats publics

43.  Le requérant soutient qu'il aurait dû bénéficier d'une audience publique devant les juridictions pénales appelées à statuer sur sa demande d'indemnité, car celles-ci devaient non seulement résoudre des questions juridiques, mais également établir les faits. L'absence d'une demande en ce sens de sa part ne saurait passer pour une renonciation à son droit à des débats publics, étant donné que les dispositions pertinentes de la législation autrichienne ne prévoient pas de tels débats.

44.  Le Gouvernement, en revanche, estime que faute d'en avoir fait la demande, M. Werner avait renoncé sans équivoque à son droit à la tenue d'une audience publique, et il se réfère à l'affaire Håkansson et Sturesson c. Suède (arrêt du 21 février 1990, série A n° 171-A). En effet, tenir une audience dans une procédure portant sur une demande d'indemnisation ne serait nullement exclu par le droit autrichien, ce serait même la règle lorsque la décision est prise juste après celle rendue publiquement sur l'accusation au pénal. A titre subsidiaire, le Gouvernement fait valoir qu'une audience n'était pas nécessaire en l'espèce, la procédure ne portant que sur la clarification d'une question de droit, les faits ayant déjà été établis dans la procédure pénale au principal, et même pas souhaitable dans l'intérêt du justiciable, car elle portait sur des questions d'intérêt personnel relatives à la dissipation des soupçons.

45.  La Cour rappelle que la publicité des débats judiciaires constitue un principe fondamental consacré par l'article 6 § 1. Ladite publicité protège les justiciables contre une justice secrète échappant au contrôle du public ; elle constitue aussi l'un des moyens de contribuer à préserver la confiance dans les cours et tribunaux. Par la transparence qu'elle donne à l'administration de la justice, elle aide à atteindre le but de l'article 6 § 1 : le procès équitable, dont la garantie compte parmi les principes de toute société démocratique au sens de la Convention (voir, par exemple, l'arrêt Diennet c. France du 26 septembre 1995, série A n 325-A, pp. 14–15, § 33).

46.  En l'occurrence, ni le tribunal régional ni la cour d'appel de Vienne n'ont consacré de débats publics à la demande d'indemnité du requérant (paragraphes 14 et 17 ci-dessus). Celui-ci avait en principe droit à une audience publique, aucune des exceptions de la seconde phrase de l'article 6 § 1 n'entrant en jeu (arrêt Håkansson et Sturesson précité, p. 20, § 64).

47.  Il est vrai que M. Werner n'a pas expressément sollicité la tenue d'une audience publique et la Cour doit examiner s'il a de ce fait renoncé à son droit.

48.  A l'audience devant la Cour, les comparants se sont opposés sur les dispositions législatives pertinentes applicables en l'espèce. A cet égard, l'argument du Gouvernement, d'après lequel la tenue d'une audience publique dans une procédure d'indemnisation serait la règle, ne saurait jouer en l'espèce, puisque justement, il n'y a pas eu d'audience au principal sur l'accusation pénale, les poursuites ayant été abandonnées par le juge d'instruction (paragraphe 10 ci-dessus). Même si les dispositions pertinentes n'excluaient pas expressis verbis, comme ce fut le cas dans l'affaire Diennet (arrêt précité, p. 15, § 34), la tenue d'une audience publique, la Cour, avec la Commission, estime acquis qu'en pratique une telle procédure, relevant de l'article 6 § 2 de la loi sur l'indemnisation pénale (paragraphe 19 ci-dessus), après abandon des poursuites par le juge d'instruction, ne donne jamais lieu à des débats publics. Cela se dégage à la fois clairement de l'esprit de la loi et de l'analyse qu'en fait la doctrine.

Dès lors, on ne saurait reprocher à l'intéressé de n'avoir pas formulé une demande qui n'avait aucune chance d'aboutir. Sur ce point, la présente espèce se distingue fondamentalement des affaires Håkansson et Sturesson (arrêt précité, pp. 20–21, § 67), Schuler-Zgraggen c. Suisse (arrêt du 24 juin 1993, série A n° 263, pp. 19–20, § 58), Zumtobel c. Autriche (arrêt du 21 septembre 1993, série A n° 268-A, p. 14, § 34) et Pauger (arrêt précité, p. 896, § 60), où les dispositions pertinentes prévoyaient expressément, à certaines conditions, la possibilité de débats publics.

49.  Quant à la nécessité de tels débats, la Cour estime, avec la Commission, que la question de la responsabilité pénale est entièrement distincte de celle du dédommagement au titre de la détention, de sorte que la procédure d'indemnisation ne saurait passer pour une « instance d'appel » par rapport à l'action principale devant les juridictions pénales, au cours de laquelle la détention provisoire a été ordonnée. Elle note par ailleurs que l'instance pénale, elle non plus, n'a pas donné lieu à une audience publique.

50.  Enfin, l'argument du Gouvernement relatif à la nécessité de protéger la vie privée du requérant n'emporte pas la conviction. Comme le Gouvernement lui-même le rappelle, quand une personne est mise hors de cause par un tribunal dans une procédure pénale, celui-ci tient toujours une audience et tranche immédiatement après et publiquement la question de l'attribution d'une indemnité pour la détention subie. Même en admettant qu'il en va différemment lorsque, comme en l'espèce, l'abandon des poursuites émane du juge d'instruction, devant lequel la procédure n'est pas publique, la Cour n'estime pas qu'il fallût faire prévaloir la protection de la vie privée de M. Werner sur le principe de publicité prévu à l'article 6 § 1 de la Convention.

51.  Partant, la Cour rejette l'exception préliminaire du Gouvernement et, statuant au fond, estime qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 en raison de l'absence de débats publics dans la procédure litigieuse.

iii. L'absence de prononcé public des jugements

52.  Le requérant allègue que, contrairement aux exigences de l'article 6 § 1, ni le tribunal régional ni la cour d'appel de Vienne n'ont rendu leurs décisions publiquement.

53.  D'après le Gouvernement, cette exigence était respectée en l'espèce, l'article 82 du code de procédure pénale (paragraphe 23 ci-dessus) permettant à des tiers d'accéder aux dossiers et d'obtenir des copies s'ils justifient d'un intérêt légitime. De plus, la compétence limitée des juridictions, qui ne devaient statuer que sur la dissipation des soupçons à l'encontre de l'intéressé, justifierait l'absence de prononcé public des décisions, comme dans l'affaire Pretto et autres c. Italie (arrêt du 8 décembre 1983, série A n° 71). Enfin, le huis clos se justifierait également dans l'intérêt du justiciable, ces décisions risquant de préciser que des soupçons pèsent toujours sur lui, ce qui porterait atteinte à la présomption d'innocence.

54.  La Cour rappelle que les principes régissant la publicité des débats (paragraphe 45 ci-dessus) valent également pour le prononcé public des jugements (voir, par exemple, l'arrêt Pretto et autres précité, p. 11, § 21) et tendent à un même but : le procès équitable, dont la garantie compte parmi les principes fondamentaux de toute société démocratique au sens de la Convention.

55.  Elle a déjà eu à plusieurs reprises à statuer sur l'exigence d'un prononcé public des jugements énoncée à l'article 6 § 1, estimant qu'il convenait « dans chaque cas, d'apprécier à la lumière des particularités de la procédure dont il s'agit, et en fonction du but et de l'objet de l'article 6 § 1, la forme de publicité du « jugement » prévue par le droit interne de l'Etat en cause » (arrêt Pretto et autres précité, p. 12, § 26 in fine). Ainsi, dans cette affaire (p. 13, § 27), elle a considéré, eu égard à la compétence limitée de la Cour de cassation, que le dépôt de l'arrêt au greffe, qui permettait à chacun d'avoir accès au texte intégral de l'arrêt, suffisait pour répondre à cette exigence. Dans l'affaire Axen c. Allemagne (arrêt du 8 décembre 1983, série A n° 72, p. 14, § 32), elle a estimé que le prononcé public d'une décision d'une Cour suprême n'était pas nécessaire dès lors que les jugements des tribunaux inférieurs avaient été rendus publiquement. Enfin, dans l'affaire Sutter c. Suisse (arrêt du 22 février 1984, série A n° 74, pp. 14–15, § 34), elle a jugé que le prononcé public d'une décision du Tribunal militaire de cassation ne s'imposait pas, l'accès du public à cette décision étant assuré par d'autres moyens, à savoir la possibilité de demander une copie de l'arrêt au greffe du tribunal et sa publication ultérieure dans un recueil officiel de jurisprudence.

56.  En l'espèce, conformément à l'article 6 § 4 de la loi sur l'indemnisation en matière pénale (paragraphe 19 ci-dessus), les décisions du tribunal régional et de la cour d'appel de Vienne ont fait l'objet d'une notification au requérant et non d'un prononcé en séance publique.

57.  Certes, comme le soutient le Gouvernement, une tierce personne peut être autorisée, en vertu de l'article 82 du code de procédure pénale (paragraphe 23 ci-dessus), à avoir accès aux dossiers et à obtenir des copies des jugements qu'ils contiennent, si elle justifie d'un intérêt légitime. Cette autorisation est cependant, dans chaque cas, soumise à la libre appréciation des tribunaux compétents et il ne s'agit pas là d'un libre accès de chacun au texte intégral des jugements.

58.  En effet, en Autriche la possibilité d'obtenir le texte intégral des jugements auprès du greffe n'existe que pour les arrêts de la Cour suprême, de la Cour administrative et de la Cour constitutionnelle (paragraphe 24 ci-dessus), et non pour des jugements et décisions des cours d'appel ou des tribunaux de première instance.

59.  Par ailleurs, l'argument du Gouvernement relatif à la préservation de la présomption de l'innocence du requérant ne saurait prospérer. D'une part, la Cour, avec la Commission, ne voit pas la nécessité pour les juridictions compétentes de formuler, dans le cadre de procédures engagées en vertu de la loi sur l'indemnisation en matière pénale, des déclarations qui emporteraient violation de la présomption d'innocence garantie par l'article 6 § 2. D'autre part, il peut être important pour l'intéressé que la dissipation des soupçons à son égard soit portée à la connaissance du public.

60.  Dès lors, considérant qu'aucune décision judiciaire n'a été rendue publiquement et que la publicité n'a pas été suffisamment assurée par d'autres moyens, la Cour conclut, avec la Commission, à la violation de l'article 6 § 1 sur ce point.

b) Procès équitable

61.  Le requérant soutient qu'au mépris de l'exigence de l'« égalité des armes », il n'a pas eu communication des observations du procureur général dans la procédure devant la cour d'appel de Vienne.

62.  D'après le Gouvernement, ce principe a été respecté en l'espèce, aucun membre du parquet général n'ayant assisté aux délibérations. Par ailleurs, il existerait une différence entre les affaires civiles – telle la présente – et les affaires pénales quant à l'applicabilité concrète de ce principe. Dans une affaire civile, une des parties doit avoir le dernier mot et, en l'occurrence, c'était le procureur général, agissant en qualité de représentant du défendeur, c'est-à-dire de l'Etat. De plus, les observations de ce dernier ne contenaient aucun élément nouveau.

63.  La Cour examinera le grief à la lumière de l'ensemble du paragraphe 1 de l'article 6, car le principe de l'égalité des armes représente un élément de la notion plus large de procès équitable, qui englobe aussi le droit fondamental au caractère contradictoire de l'instance (arrêt Ruiz-Mateos c. Espagne du 23 juin 1993, série A n° 262, p. 25, § 63). Par ailleurs, le principe de l'égalité des armes – au sens d'un « juste équilibre » entre les parties – requiert que chaque partie se voie offrir une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire (voir notamment les arrêts Dombo Beheer B.V. c. Pays-Bas du 27 octobre 1993, série A n° 274, p. 19, § 33, et Ankerl c. Suisse, du 23 octobre 1996, Recueil 1996-V, pp. 1567–1568, § 38).

64.  En l'espèce, le requérant a introduit un recours devant la cour d'appel de Vienne en vue d'obtenir une indemnité pour la détention subie (paragraphe 15 ci-dessus). Dans le cadre de cette procédure, il n'a pas eu communication des observations remises à la cour d'appel par le procureur général, qui représentait le défendeur, c'est-à-dire l'Etat, et n'a donc pas eu la possibilité d'y répondre.

65.  Or le droit à une procédure contradictoire implique, pour une partie, de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l'autre, ainsi que de les discuter (voir l'arrêt Ruiz-Mateos précité, p. 25, § 63).

66.  Peu importe, à cet égard, que l'affaire relève du contentieux civil, car il ressort de la jurisprudence en la matière (voir notamment les arrêts Lobo Machado c. Portugal et Vermeulen c. Belgique du 20 février 1996, Recueil 1996-I, respectivement p. 206, § 31, et p. 234, § 33, et l'arrêt Nideröst-Huber c. Suisse du 18 février 1997, Recueil 1997-I, p. 108, § 28) que les exigences découlant du droit à une procédure contradictoire sont en principe les mêmes au civil comme au pénal.

67.  En l'espèce, le respect du principe de l'égalité des armes exigeait que M. Werner obtînt communication des observations du procureur général et qu'il eût la possibilité de les commenter. Tel n'ayant pas été le cas, l'intéressé s'est trouvé dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire.

68.  La Cour relève par ailleurs, comme le Gouvernement l'a indiqué dans son mémoire, que l'article 35 § 2 du code de procédure pénale (paragraphe 22 ci-dessus) prévoit désormais la communication d'office par la cour d'appel à la partie adverse de toute observation formulée par le parquet dans le cadre d'un recours contre une décision du tribunal régional.

69.  Compte tenu de tous ces éléments, la Cour conclut, avec la Commission, à la violation de l'article 6 § 1 de la Convention en raison de l'absence de communication par la cour d'appel des observations du parquet général au requérant.

II.Sur l'application de l'article 50 de la Convention

70.  Aux termes de l'article 50 de la Convention,

« Si la décision de la Cour déclare qu'une décision prise ou une mesure ordonnée par une autorité judiciaire ou toute autre autorité d'une Partie Contractante se trouve entièrement ou partiellement en opposition avec des obligations découlant de la (...) Convention, et si le droit interne de ladite Partie ne permet qu'imparfaitement d'effacer les conséquences de cette décision ou de cette mesure, la décision de la Cour accorde, s'il y a lieu, à la partie lésée une satisfaction équitable. »

  1. Dommage matériel

71.  M. Werner réclame 18 000 schillings autrichiens (ATS) pour dommage matériel, en compensation de la perte de salaire subie au cours de sa détention.

72.  A l'instar de la Commission et du Gouvernement, la Cour relève l'absence de lien de causalité entre les violations constatées et le préjudice matériel allégué ; on ne saurait en effet spéculer sur l'issue d'une procédure conforme aux exigences de l'article 6 § 1.


  1. Frais et dépens

73.  Le requérant demande aussi 268 699 ATS au titre des frais et dépens occasionnés par les procédures menées devant les juridictions internes, dont 251 501 ATS pour la procédure pénale et 17 198 ATS pour la procédure relative à la demande d'indemnisation pour la détention subie. Il réclame en outre 162 295 ATS au titre de la procédure suivie devant les organes de la Convention.

74.  Le Gouvernement trouve ces montants excessifs. En ce qui concerne la procédure interne, il considère que seul le recours devant la cour d'appel de Vienne, dont les frais s'élevaient à 8 501,40 ATS, visait à prévenir ou faire corriger une violation de la Convention. Quant à la procédure suivie à Strasbourg, eu égard aux griefs déclarés admissibles par la Commission, il estime raisonnable un montant de 100 000 ATS.

75.  Le délégué de la Commission se prononce en faveur d'un remboursement des frais et dépens exposés devant les organes de la Convention.

76.  La Cour rappelle que d'après sa jurisprudence, pour avoir droit à l'allocation de frais et dépens, la partie lésée doit les avoir supportés afin d'essayer de prévenir ou faire corriger une violation de la Convention, d'amener la Commission puis la Cour à la constater et d'en obtenir l'effacement. Il faut aussi que se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux (voir, parmi d'autres, l'arrêt Nideröst-Huber précité, p. 110, § 40).

77.  Comme l'indique le Gouvernement, seuls les frais afférents à l'instance devant la cour d'appel de Vienne ont été engagés pour faire corriger les violations relatives à l'absence d'audience publique et de prononcé public du jugement du tribunal régional de Vienne. La Cour alloue donc, à ce titre, la somme de 8 501,40 ATS.

Quant aux frais entraînés par la représentation de M. Werner à Strasbourg, la Cour, statuant en équité et à l'aide des critères qu'elle applique en la matière, décide d'allouer un montant de 120 000 ATS.

  1. Intérêts moratoires

78.  Selon les informations dont dispose la Cour, le taux légal applicable en Autriche à la date d'adoption du présent arrêt est de 4 % l'an.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

  1. Joint au fond, à l'unanimité, l'exception préliminaire du Gouvernement, mais la rejette, à l'unanimité, après examen au fond ;
  2. Dit, à l'unanimité, que l'article 6 § 1 de la Convention s'applique à la procédure litigieuse ;
  3. Dit, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention en raison de l'absence de débats publics dans cette procédure ;
  4. Dit, à l'unanimité, qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention en raison de l'absence de prononcé public des jugements dans cette procédure ;
  5. Dit, par huit voix contre une, qu'il y a eu violation de l'article 6 § 1 de la Convention en raison de l'absence de communication par la cour d'appel de Vienne des observations du parquet général au requérant ;
  6. Dit, à l'unanimité,

a) que l'Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois, 128 501 (cent vingt-huit mille cinq cent un) schillings autrichiens et 40 (quarante) groschen pour frais et dépens ;

b) que ce montant sera à majorer d'un intérêt simple de 4 % l'an à compter de l'expiration dudit délai et jusqu'au versement ;

  1. Rejette, à l'unanimité, la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français et en anglais, puis prononcé en audience publique au Palais des Droits de l'Homme, à Strasbourg, le 24 novembre 1997.

     Pour le président 
Signé : Feyyaz Gölcüklü
     Juge

Signé : Herbert Petzold

             Greffier

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 51 § 2 de la Convention et 55 § 2 du règlement B, l'exposé de l'opinion partiellement concordante et partiellement dissidente de M. Matscher.

Paraphé : F. G.

Paraphé : H. P.


OPINION PARTIELLEMENT CONCORDANTE
ET PARTIELLEMENT DISSIDENTE
DE M. LE JUGE MATSCHER

1.Comme je l’ai déjà observé à maintes reprises (voir notamment mon opinion séparée dans l’affaire Fischer c. Autriche, arrêt du 26 avril 1995, série A n° 312), dans certaines procédures et en particulier en ce qui concerne celle relative à l’octroi d’une indemnité au titre de la détention provisoire (ou dans des affaires semblables), la publicité des débats et le prononcé public du jugement ne sont d’aucune utilité ni pour l’intéressé ni pour le public en général. En effet dans les affaires de ce genre, elles ne constituent nullement des « garanties procédurales ».

Si, avec la chambre unanime, j’ai voté pour un constat de violation à cet égard, ce n’était que pour me conformer à une jurisprudence établie de la Cour.

2.D’après moi, il n’y a pas eu méconnaissance du principe de l’égalité des armes ou du principe du contradictoire.

J’admets qu’on aurait pu communiquer au requérant les observations du parquet général plaidant pour le rejet de l’appel ; cependant, d’une part, le requérant devait être conscient de la position que le parquet général adopterait, étant donné que le parquet avait déjà auparavant demandé le rejet de la demande d’indemnisation, et, d’autre part, même si le requérant avait été en possession du texte des observations du parquet général, il n’aurait eu aucune possibilité d’y répondre, la cour d’appel décidant sur la seule base du dossier (recours du requérant et observations du parquet général). En somme, l’égalité des armes n’a pas été violée dans sa substance.

En ce qui concerne le principe du contradictoire, celui-ci n’exige pas un double ou un triple échange de mémoires, chacune des deux parties ayant eu la chance de présenter son point de vue. La situation n’est différente que dans une procédure pénale, où, d’après un principe général reconnu et appliqué aussi dans la jurisprudence de la Cour, l’accusé doit avoir toujours le dernier mot. Mais ici nous sommes en présence d’une procédure civile, dans laquelle le principe du contradictoire exige seulement que chacune des parties ait une chance égale de présenter son point de vue, ce qui a été le cas en l’espèce.


[1].  Rédigé par le greffe, il ne lie pas la Cour.

[2]Notes du greffier

. L'affaire porte le n 138/1996/757/956. Les deux premiers chiffres en indiquent le rang dans l'année d'introduction, les deux derniers la place sur la liste des saisines de la Cour depuis l'origine et sur celle des requêtes initiales (à la Commission) correspondantes.

[3]. Le règlement B, entré en vigueur le 2 octobre 1994, s'applique à toutes les affaires concernant les Etats liés par le Protocole n 9.

[4].  Note du greffier : pour des raisons d'ordre pratique il n'y figurera que dans l'édition imprimée (Recueil des arrêts et décisions, 1997) mais chacun peut se le procurer auprès du greffe.

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CEDH, Cour (chambre), AFFAIRE WERNER c. AUTRICHE, 24 novembre 1997, 21835/93