CEDH, Cour (quatrième section), AFFAIRE NASCIMENTO c. PORTUGAL, 27 septembre 2001, 42918/98

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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CEDH · 27 septembre 2001

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Quatrième Section), 27 sept. 2001, n° 42918/98
Numéro(s) : 42918/98
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Arrêt Frydlender c. France [GC], n° 30979/96, § 47, CEDH 2000-VII
Arrêt Martins Moreira c. Portugal du 26 octobre 1988, série A n° 143, p. 21, § 60
Arrêt Silva Pontes c. Portugal du 23 mars 1994, n° 286-A, p. 15, § 39
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement partiel frais et dépens - procédure de la Convention
Identifiant HUDOC : 001-64241
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:2001:0927JUD004291898
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Sur les parties

Texte intégral

QUATRIÈME SECTION

AFFAIRE NASCIMENTO c. PORTUGAL

(Requête n° 42918/98)

ARRÊT

STRASBOURG

27 septembre 2001

DÉFINITIF

27/12/2001

Cet arrêt deviendra définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention.


En l’affaire Nascimento c. Portugal,

La Cour européenne des Droits de l’Homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

MM.G. Ress, président,
A. Pastor Ridruejo,
L. Caflisch,
J. Makarczyk,
I. Cabral Barreto,
MmeN. Vajić,
M.M. Pellonpää, juges,
et de M.V. berger, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 6 septembre 2001,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1.  A l’origine de l’affaire se trouve une requête (n° 42918/98) dirigée contre la République portugaise et dont un ressortissant de cet Etat, M. Agripino Evaristo do Nascimento (« le requérant »), avait saisi la Commission européenne des Droits de l’Homme (« la Commission ») le 18 août 1998 en vertu de l’ancien article 25 de la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales (« la Convention »).

2.  Le requérant est représenté devant la Cour par Me N. Mandy, avocat à Lyon (France). Le gouvernement portugais (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, M. A. Henriques Gaspar, Procureur général adjoint.

3.  Le requérant alléguait que la durée d’une procédure civile à laquelle il est partie était excessive.

4.  La requête a été transmise à la Cour le 1er novembre 1998, date d’entrée en vigueur du Protocole n° 11 à la Convention (article 5 § 2 du Protocole n° 11).

5.  La requête a été attribuée à la quatrième section de la Cour (article 52 § 1 du règlement). Au sein de celle-ci, la chambre chargée d’examiner l’affaire (article 27 § 1 de la Convention) a été constituée conformément à l’article 26 § 1 du règlement.

6.  Par une décision du 28 septembre 2000, la chambre a déclaré la requête recevable.

7.  Tant le requérant que le Gouvernement ont déposé des observations écrites sur le fond de l’affaire (article 59 § 1 du règlement).


EN FAIT

8.  Le requérant est un ressortissant portugais né en 1953 et résidant à Lyon (France).

9.  Victime d’un accident de la circulation survenu le 24 août 1981, le requérant introduisit le 18 février 1987 devant le tribunal de Chaves une demande en dommages et intérêts contre le Fonds de garantie automobile (ci-après « le Fonds »).

10.  Par une ordonnance du 2 mars 1987, le juge invita le requérant à déposer une nouvelle demande en vue de suppléer les déficiences de la précédente ainsi qu’à produire une traduction portugaise de certains documents qu’il avait joints en langue étrangère. Le 16 mars 1987, le requérant déposa une nouvelle demande et sollicita un délai de trente jours afin de joindre la traduction en cause. Le 2 avril 1987, le requérant produisit la traduction en question.

11.  Le 21 avril 1987, le juge ordonna la citation à comparaître du Fonds. Celui-ci déposa ses conclusions en réponse le 19 mai 1987.

12.  Le 2 juin 1987, le requérant demanda l’intervention forcée du conducteur du véhicule ayant participé à l’accident. Celui-ci étant un ressortissant espagnol résidant en Espagne, le juge délivra une commission rogatoire internationale le 23 octobre 1987.

13.  Le 15 mars 1988, le ministère public fut chargé de traiter la commission rogatoire internationale.

14.  Le 8 mars 1989, le ministère portugais des Affaires étrangères informa le tribunal que la citation n’avait pas pu être effectuée en raison d’une erreur dans l’adresse de la personne en cause. Par une ordonnance du 13 mars 1989, le juge invita le requérant à se prononcer sur cette information. Le 25 octobre 1989, le requérant indiqua une nouvelle adresse.

15.  Une deuxième commission rogatoire internationale fut délivrée et transmise au ministère public le 20 novembre 1989.

16.  Le 30 décembre 1992, le ministère des Affaires étrangères informa le tribunal du décès de la personne en question, survenu le 28 janvier 1992.

17.  Par une ordonnance du 6 janvier 1993, le juge prononça la suspension de l’instance.

18.  Le 5 juin 1995, le requérant demanda l’habilitation de l’héritière de la personne en cause. Par un jugement du 13 octobre 1995, le tribunal reconnut à l’héritière en question qualité pour participer à la procédure.

19.  Le 16 mai 1997, le juge ordonna la citation à comparaître de cette défenderesse.

20.  Le 6 janvier 1998, le juge rendit une décision préparatoire (despacho saneador) spécifiant les faits déjà établis et ceux restant à établir.

21.  Le 13 février 1998, le requérant déposa sa liste de témoins. Il demanda également au tribunal d’effectuer une inspection des lieux de l’accident.

22.  Par une ordonnance du 17 février 1998, le juge fit droit à la demande d’inspection en cause. Il ordonna par ailleurs l’envoi d’une commission rogatoire au tribunal de Lisbonne aux fins d’audition d’un témoin. Le 24 avril 1998, le tribunal de Lisbonne envoya deux cassettes avec l’enregistrement de la déposition en cause.

23.  Le 28 mai 1998, le juge fixa l’audience au 15 octobre 1998. Ce jour-là, au cours de l’audience, le tribunal constata que les cassettes envoyées par le tribunal de Lisbonne ne contenaient aucun enregistrement. Le président reporta l’audience sine die et ordonna de délivrer une nouvelle commission rogatoire au tribunal de Lisbonne. Cette commission rogatoire fut retournée le 23 novembre 1998.

24.  Le 24 novembre 1998, le juge fixa l’audience au 15 janvier 1999, date à laquelle elle eut lieu.

25.  Le 18 février 1999, le tribunal rendit son jugement faisant partiellement droit au requérant. Celui-ci et le Fonds interjetèrent des appels contre ce jugement devant la cour d’appel (Tribunal da Relação) de Porto.

26.  La procédure est toujours pendante devant cette dernière juridiction.

EN DROIT

I.  SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 § 1 DE LA CONVENTION

27.  Le requérant dénonce la durée de la procédure en cause. Il allègue la violation de l’article 6 § 1 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

28.  La période à considérer a débuté avec l’introduction de la demande, le 18 février 1987. La procédure étant toujours pendante devant la cour d’appel de Porto, la durée en cause est à ce jour de quatorze ans et sept mois.

29.  Pour rechercher s’il y a eu dépassement du délai raisonnable, il y a lieu d’avoir égard aux circonstances de la cause et aux critères consacrés par la jurisprudence de la Cour, en particulier la complexité de l’affaire, le comportement du requérant et celui des autorités compétentes (voir, parmi beaucoup d’autres, l’arrêt Silva Pontes c. Portugal du 23 mars 1994, n° 286‑A, p. 15, § 39).

30.  Pour le requérant, la durée en cause est manifestement excessive.

31.  Le Gouvernement soutient que la procédure n’a pas connu une durée déraisonnable. Il relève que les principaux retards sont dus au comportement du requérant ainsi qu’à des éléments que les autorités nationales ne peuvent pas contrôler, comme l’exécution des commissions rogatoires internationales par les autorités étrangères. S’agissant des retards imputables au tribunal de Chaves, la surcharge du rôle de cette juridiction les expliquerait.

32.  La Cour relève d’abord que la procédure revêtait une certaine complexité matérielle, due à la nationalité espagnole de l’un des intervenants dans l’accident. Toutefois, cela ne saurait expliquer la durée de la procédure.

33.  S’agissant du comportement du requérant, la Cour note certains retards qui lui sont imputables. Ainsi le requérant n’a demandé l’habilitation de l’héritière que le 5 juin 1995, alors qu’il était en mesure de le faire dès le 6 janvier 1993. La Cour considère cependant que ce retard n’explique pas la durée totale de la procédure.

34.  S’agissant du comportement des autorités judiciaires, la Cour relève d’abord un délai d’inactivité entre le 13 octobre 1995, date du jugement d’habilitation, et le 16 mai 1997, date à laquelle le juge ordonna la citation à comparaître de la nouvelle défenderesse.

35.  Quant aux délais provoqués par l’exécution des commissions rogatoires internationales, qui ont été significatifs, il est vrai que l’on ne saurait tenir le gouvernement portugais pour responsable des actes des autorités d’un autre Etat. Il n’en demeure pas moins que le juge reste chargé de la mise en état et de la conduite rapide du procès (arrêt Martins Moreira c. Portugal du 26 octobre 1988, série A n° 143, p. 21, § 60). Or, en l’espèce, il ressort du dossier que le tribunal de Chaves est resté passif, alors que les deux commissions rogatoires internationales en cause ont entraîné un retard de quatre ans environ, sans s’enquérir sur les raisons d’un si long délai et sans prendre, le cas échéant, les mesures appropriées. Aux yeux de la Cour, l’Etat défendeur porte donc une part de responsabilité dans ce retard.

36.  La Cour prend enfin note des arguments du Gouvernement relatifs à la surcharge du rôle du tribunal de Chaves. Elle réaffirme toutefois sa jurisprudence constante selon laquelle il incombe aux Etats contractants d’organiser leur système judiciaire de telle sorte que leurs juridictions puissent garantir à chacun le droit d’obtenir une décision définitive sur les contestations relatives à ses droits et obligations de caractère civil dans un délai raisonnable (arrêt Frydlender c. France [GC], n° 30979/96, § 47, CEDH 2000-VII).

37.  Au vu des circonstances de la cause, la Cour conclut ainsi qu’il y a eu dépassement du « délai raisonnable » et, partant, violation de l’article 6 § 1.


II.  SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

38.  Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A.  Dommage

39.  M. Nascimento réclame pour dommage moral et matériel la somme de 300 000 francs français (FRF), qui correspondrait aux intérêts des sommes qu’il aurait dû légitimement percevoir depuis de nombreuses années, dans le cadre de la procédure interne.

40.   Le Gouvernement considère que la somme demandée ne présente aucun lien de causalité avec la violation constatée et qu’elle est en tout état de cause excessive.

41.  La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation de l’article 6 § 1 et un quelconque dommage matériel dont le requérant aurait à souffrir, et rejette en conséquence les prétentions de ce dernier à ce titre. En revanche, elle juge que le requérant a subi un tort moral du fait de la durée de la procédure litigieuse. Compte tenu des circonstances de la cause et statuant en équité comme le veut l’article 41, elle lui octroie 50 000 FRF à ce titre.

B.  Frais et dépens

42.  Le requérant demande à ce titre 60 000 FRF. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Cour.

43.  La Cour décide d’allouer au requérant 10 000 FRF de ce chef.

C.  Intérêts moratoires

44.  Les sommes accordées étant libellées en francs français, la Cour juge approprié de fixer le taux moratoire légal applicable en France, soit 4,26 % l’an.


PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1.  Dit, qu’il y a eu violation de l’article 6 § 1 de la Convention ;

2.  Dit,

a)  que l’Etat défendeur doit verser au requérant, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes : 50 000 (cinquante mille) francs français pour dommage moral et 10 000 (dix mille) francs français pour frais et dépens ;

b)  que ces montants seront à majorer d’un intérêt simple de 4,26 % l’an à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement ;

3.  Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 27 septembre 2001 en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Vincent BergerGeorg Ress
GreffierPrésident

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