CEDH, Cour (chambre), AFFAIRE MASSA c. ITALIE, 24 août 1993, 14399/88

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Chronologie de l’affaire

Commentaire1

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CEDH · 24 août 1993

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Sur la décision

Référence :
CEDH, Cour (Chambre), 24 août 1993, n° 14399/88
Numéro(s) : 14399/88
Publication : A265-B
Type de document : Arrêt
Jurisprudence de Strasbourg : Arrêt Francesco Lombardo c. Italie du 26 novembre 1992, série A no 249-B, p. 26, par. 17
Arrêt Giancarlo Lombardo c. Italie du 26 novembre 1992, série A no 249-C, p. 42, par. 16, p. 43, par. 18
Arrêt Glasenapp c. Allemagne du 28 août 1986, série A no 104, p. 26, par. 49
Arrêt Kosiek c. Allemagne du 28 août 1986, série A no 105, p. 20, par. 35
Arrêt Trevisan c. Italie du 26 février 1993, série A no 257-F, p. 17, par. 18
Niveau d’importance : Importance faible
Opinion(s) séparée(s) : Non
Conclusions : Violation de l'Art. 6-1 ; Dommage matériel - demande rejetée ; Préjudice moral - réparation pécuniaire ; Remboursement frais et dépens - procédure de la Convention
Identifiant HUDOC : 001-62389
Identifiant européen : ECLI:CE:ECHR:1993:0824JUD001439988
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Sur les parties

Texte intégral

       En l'affaire Massa c. Italie*,

       La Cour européenne des Droits de l'Homme, constituée,

conformément à l'article 43 (art. 43) de la Convention de

sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

("la Convention")** et aux clauses pertinentes de son règlement,

en une chambre composée des juges dont le nom suit:

       MM. R. Ryssdal, président,

           R. Macdonald,

           C. Russo,

           A. Spielmann,

           S.K. Martens,

           I. Foighel,

       Sir John Freeland,

       MM. A.B. Baka,

           M.A. Lopes Rocha,

ainsi que de MM. M.-A. Eissen, greffier, et H. Petzold, greffier

adjoint,

       Après en avoir délibéré en chambre du conseil

les 23 avril et 23 juin 1993,

       Rend l'arrêt que voici, adopté à cette dernière date:

_______________

Notes du greffier

* L'affaire porte le n° 23/1992/368/442.  Les deux premiers

chiffres en indiquent le rang dans l'année d'introduction, les

deux derniers la place sur la liste des saisines de la Cour

depuis l'origine et sur celle des requêtes initiales (à la

Commission) correspondantes.

** Tel que l'a modifié l'article 11 du Protocole n° 8 (P8-11),

entré en vigueur le 1er janvier 1990.

_______________

PROCEDURE

1.     L'affaire a été déférée à la Cour par la Commission

européenne des Droits de l'Homme ("la Commission") le

10 juillet 1992, dans le délai de trois mois qu'ouvrent les

articles 32 par. 1 et 47 (art. 32-1, art. 47) de la Convention.

A son origine se trouve une requête (n° 14399/88) dirigée contre

la République italienne et dont un ressortissant de cet Etat,

M. Aldo Massa, avait saisi la Commission le 2 novembre 1988 en

vertu de l'article 25 (art. 25).

       La demande de la Commission renvoie aux articles 44 et 48

(art. 44, art. 48) ainsi qu'à la déclaration italienne

reconnaissant la juridiction obligatoire de la Cour (article 46)

(art. 46).  Elle a pour objet d'obtenir une décision sur le point

de savoir si les faits de la cause révèlent un manquement de

l'Etat défendeur aux exigences de l'article 6 par. 1 (art. 6-1).

2.     En réponse à l'invitation prévue à l'article 33 par. 3 d)

du règlement, le requérant a manifesté le désir de participer à

l'instance et a désigné son conseil (article 30).

3.     Le 26 septembre 1992, le président de la Cour a estimé

qu'il y avait lieu de confier à une chambre unique, en vertu de

l'article 21 par. 6 du règlement et dans l'intérêt d'une bonne

administration de la justice, l'examen de la présente cause et

des affaires Scuderi et M.R. c. Italie*.

_______________

* Affaires nos 19/1992/364/438 et 20/1992/365/439.

_______________

4.     La chambre à constituer de la sorte comprenait de plein

droit M. C. Russo, juge élu de nationalité italienne (article 43

de la Convention) (art. 43), et M. R. Ryssdal, président de la

Cour (article 21 par. 3 b) du règlement).  Le même jour, celui-ci

a tiré au sort le nom des sept autres membres, à savoir

M. R. Macdonald, M. A. Spielmann, M. S.K. Martens, M. I. Foighel,

Sir John Freeland, M. A.B. Baka et M. M.A. Lopes Rocha, en

présence du greffier (articles 43 in fine et 21 par. 4 du

règlement) (art. 43).

5.     Ayant assumé la présidence de la chambre (article 21

par. 5 du règlement), M. Ryssdal a consulté par l'intermédiaire

du greffier l'agent du gouvernement italien ("le Gouvernement"),

la déléguée de la Commission et l'avocat du requérant au sujet

de l'organisation de la procédure (articles 37 par. 1 et 38).

Conformément à l'ordonnance rendue en conséquence, le greffier

a reçu, le 8 novembre 1992, les demandes de satisfaction

équitable de M. Massa (article 50 de la Convention) (art. 50),

le 25 novembre le mémoire du Gouvernement et le 19 janvier 1993

les observations de la déléguée de la Commission.

6.     Le 18 décembre 1992, celle-ci avait produit le dossier de

la procédure suivie devant elle; le greffier l'y avait invitée

sur les instructions du président.

7.     Ainsi qu'en avait décidé ce dernier - qui avait autorisé

le requérant à employer la langue italienne (article 27 par. 3

du règlement) -, les débats se sont déroulés en public

le 21 avril 1993, au Palais des Droits de l'Homme à Strasbourg.

La Cour avait tenu auparavant une réunion préparatoire.

       Ont comparu:

- pour le Gouvernement

  M. G. Raimondi, magistrat détaché au Service du

        contentieux diplomatique du ministère

        des Affaires étrangères,                  coagent;

- pour la Commission

  Mme J. Liddy,                                        déléguée;

- pour le requérant

  Me G. Massa, avocat,                            conseil.

       La Cour les a entendus en leurs déclarations et

plaidoiries.

EN FAIT

8.     Ancien officier de l'armée de terre, M. Aldo Massa habite

Viareggio (province de Lucques).

9.     Le 9 mai 1967, il demanda au ministère de l'Education

nationale de lui octroyer une pension de réversion à la suite du

décès de son épouse, qui avait exercé la profession de directrice

d'école.

       Le ministère lui opposa un refus par un décret du

21 mars 1968, notifié le 19 avril 1968.

       Arguant de l'inconstitutionnalité de ce texte au regard

du principe d'égalité, garanti par l'article 3 de la

Constitution, l'intéressé saisit la Cour des comptes, le

1er juillet 1968, d'un recours qu'elle rejeta le 6 février 1976.

10.    Le 25 janvier 1980, un arrêt de la Cour constitutionnelle

vint reconnaître la rétroactivité de la loi n° 33 du

9 décembre 1977 sur l'égalité de traitement entre hommes et

femmes en matière de travail.  En conséquence, M. Massa pouvait

désormais prétendre à une pension de réversion.  Il s'adressa

donc, le 20 octobre 1980, au ministère de l'Education nationale

qui, le 16 mai 1981, lui répondit favorablement.  Toutefois,

la pension ne fut accordée qu'à compter du 18 décembre 1977, date

de l'entrée en vigueur de ladite loi.  Quelques mois auparavant,

l'intéressé avait introduit auprès du président de la République,

le 1er avril 1980, un recours "extraordinaire" pour se plaindre

de sa situation.

11.    Le 23 avril 1985, le requérant invita la Cour des comptes

à annuler la décision ministérielle du 16 mai 1981 et à lui

allouer la pension litigieuse à partir du premier jour du mois

suivant le décès de son épouse (le 23 mars 1967).

12.    Le 29 juin 1985, le dossier fut transmis au procureur

général pour qu'il instruisît l'affaire et formulât ses

conclusions, dont le dépôt eut lieu le 5 mars 1986.

13.    Le 10 janvier 1987, le président de la section compétente

fixa au 11 mai 1987 la date des débats.  Le 18 juillet 1986, le

requérant avait fait parvenir au greffe un mémoire sollicitant

un traitement plus rapide de sa cause, mais en vain.

       A l'audience, la Cour des comptes ordonna aux

administrations concernées de lui communiquer certains documents

dont elle avait besoin pour statuer.  Ils furent versés au

dossier les 19 janvier 1987, 28 décembre 1987 et 12 mars 1988.

14.    Là-dessus, l'inspection d'académie de Lucques suspendit

l'exécution d'un décret par lequel le ministère de l'Education

nationale avait arrêté, le 3 novembre 1986, le montant définitif

de la pension.  M. Massa en fut averti le 29 octobre 1987.

15.    Une audience qui devait se dérouler le 21 novembre 1990

fut renvoyée au 25 janvier 1991 à la demande du requérant.

16.    A cette date, la Cour des comptes accueillit les

prétentions de l'intéressé.  Le texte de sa décision fut déposé

au greffe le 18 mars 1991.

17.     Le 19 novembre 1990, le requérant avait signalé à la

Commission que son recours du 1er avril 1980 au président de la

République n'avait toujours pas eu de suite.

18.    D'après les renseignements fournis par le Gouvernement et

le conseil de l'intéressé, l'inspection d'académie a pris acte,

le 3 août 1992, de l'arrêt de la Cour des comptes, permettant

ainsi le versement de la pension litigieuse dès la fin du mois

de novembre de la même année.  Quant aux intérêts et à

l'équivalent de la dépréciation de la monnaie, la direction

départementale du Trésor devrait procéder sous peu à leur

paiement.

PROCEDURE DEVANT LA COMMISSION

19.    M. Massa a saisi la Commission le 2 novembre 1988.  Il

alléguait que n'ayant pu jouir librement d'une pension de

réversion, il avait subi une atteinte à son droit au respect de

sa vie familiale (article 8 de la Convention) (art. 8); qu'il

n'avait pas bénéficié d'un recours effectif (article 13)

(art. 13) contre la décision de l'inspection d'académie de

Lucques suspendant l'exécution du décret du 3 novembre 1986;

enfin, que la durée de l'examen de son action devant la Cour des

comptes et de son recours au président de la République avait

dépassé le "délai raisonnable" prévu à l'article 6 par. 1

(art. 6-1).

20.    Le 8 juillet 1991, la Commission a retenu la requête

(n° 14399/88) quant au grief tiré de la longueur de la procédure

engagée le 23 avril 1985 devant la Cour des comptes; elle l'a

rejetée pour le surplus.  Dans son rapport du 13 mai 1992

(article 31) (art. 31), elle conclut, par six voix contre deux,

à la violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1).  Le texte

intégral de son avis et de l'opinion dissidente dont il

s'accompagne figure en annexe au présent arrêt*.

_______________

* Note du greffier: pour des raisons d'ordre pratique il n'y

figurera que dans l'édition imprimée (volume 265-B de la série

A des publications de la Cour), mais on peut se le procurer

auprès du greffe.

_______________

CONCLUSIONS PRESENTEES A LA COUR PAR LE GOUVERNEMENT

21.    A l'audience, le Gouvernement a prié la Cour "de bien

vouloir rejeter la requête de l'intéressé".

EN DROIT

I.     SUR LA VIOLATION ALLEGUEE DE L'ARTICLE 6 PAR. 1

       (art. 6-1)

22.    Le requérant dénonce la durée de la procédure suivie

devant la Cour des comptes depuis le 23 avril 1985.  Il invoque

l'article 6 par. 1 (art. 6-1) de la Convention, aux termes duquel

       "Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue

       (...) dans un délai raisonnable, par un tribunal (...)

       qui décidera (...) des contestations sur ses droits et

       obligations de caractère civil (...)"

     A. Sur l'applicabilité de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

23.    Requérant et Commission estiment ce texte applicable en

l'espèce, tandis que le Gouvernement défend la thèse opposée.

24.    Selon le Gouvernement, le droit à une pension de

réversion ne revêt pas un caractère personnel et patrimonial car

les relations de service entre l'Etat et l'épouse du requérant

auraient entièrement relevé du droit public.  Il ne se

rattacherait pas non plus à un contrat de travail, la nomination

d'un fonctionnaire ayant son origine dans un acte unilatéral de

l'administration, soumis à une législation spéciale.

25.    Le requérant affirme au contraire que si un fonctionnaire

se trouve bien lié, pendant sa période d'activité, par un contrat

de droit public avec l'Etat, son départ à la retraite ou son

décès le place, lui ou ses héritiers, dans une situation proche

de celle d'un employé du secteur privé.

26.    Les contestations concernant le recrutement, la carrière

et la cessation d'activité des fonctionnaires sortent, en règle

générale, du champ d'application de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

(sur l'accès à la fonction publique, voir les arrêts Glasenapp

et Kosiek c. Allemagne du 28 août 1986, série A n° 104, p. 26,

par. 49, et n° 105, p. 20, par. 35), mais l'intervention de

l'autorité publique par une loi ou un règlement n'a pas empêché

la Cour, dans plusieurs affaires, de conclure au caractère civil

du droit en cause (voir notamment les arrêts Francesco Lombardo

et Giancarlo Lombardo c. Italie du 26 novembre 1992, série A

n° 249-B, p. 26, par. 17, et n° 249-C, p. 42, par. 16).

       Nonobstant les aspects de droit public signalés par le

Gouvernement, à l'origine du présent litige figure l'obligation,

pour l'Etat, de verser à l'époux d'une fonctionnaire une pension

de réversion conformément à la législation en vigueur.  En

s'acquittant de cette obligation, l'Etat n'use pas de

prérogatives discrétionnaires; en la matière, il peut se comparer

à un employeur partie à un contrat de travail régi par le droit

privé.  Dès lors, le droit du requérant à une pension de

réversion présente un "caractère civil" au sens de l'article 6

par. 1 (art. 6-1), lequel trouve donc à s'appliquer en l'espèce.

     B. Sur l'observation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1)

27.    Reste à savoir s'il y a eu dépassement du "délai

raisonnable".

       Commission et requérant répondent par l'affirmative, le

Gouvernement par la négative.

28.    La période à considérer n'a pas commencé, comme l'affirme

l'intéressé, dès le moment où il s'adressa au ministère de

l'Education nationale, le 20 octobre 1980, mais le 23 avril 1985,

avec la saisine de la Cour des comptes (paragraphes 10-11

ci-dessus).  Elle a pris fin le 18 mars 1991, date du dépôt de

l'arrêt de celle-ci (voir en dernier lieu l'arrêt

Giancarlo Lombardo c. Italie précité, série A n° 249-C, p. 43,

par. 18).

29.    Le caractère raisonnable de la durée d'une procédure

s'apprécie à l'aide des critères qui se dégagent de la

jurisprudence de la Cour et suivant les circonstances de

l'espèce, lesquelles commandent en l'occurrence une évaluation

globale.

30.    Le Gouvernement excipe de la complexité de l'affaire et

du comportement du requérant, responsable du renvoi de l'audience

du 21 novembre 1990 (paragraphe 15 ci-dessus).  Il invoque en

outre la surcharge du rôle de la section compétente de la Cour

des comptes.

31.    La Cour note, avec la Commission, qu'il s'agissait d'une

affaire assez simple et que l'ajournement susmentionné ne

prolongea guère la procédure; le 18 juillet 1986, M. Massa avait

d'ailleurs essayé d'accélérer celle-ci (paragraphe 13 ci-dessus).

Il échet de relever, en revanche, deux périodes d'inactivité

imputables à l'Etat défendeur: du 5 mars 1986 (dépôt des

conclusions du procureur général) au 11 mai 1987 (première

audience), puis du 12 mars 1988 (dépôt des derniers documents

requis par la Cour des comptes) au 21 novembre 1990 (deuxième

audience).

       Quant au dernier argument du Gouvernement, il ne saurait

prospérer car l'article 6 par. 1 (art. 6-1) astreint les Etats

contractants à organiser leur système judiciaire de telle sorte

que leurs juridictions puissent remplir chacune de ses exigences

(voir en dernier lieu l'arrêt Trevisan c. Italie du

26 février 1993, série A n° 257-F, p. 17, par. 18).

       Dans ces conditions, les retards observés se révèlent

assez importants pour qu'il faille considérer comme excessive la

durée totale de la procédure.

       Il y a donc eu violation de l'article 6 par. 1

(art. 6-1).

II.    SUR L'APPLICATION DE L'ARTICLE 50 (art. 50)

32.    D'après l'article 50 (art. 50),

       "Si la décision de la Cour déclare qu'une décision prise

       ou une mesure ordonnée par une autorité judiciaire ou

       toute autre autorité d'une Partie Contractante se trouve

       entièrement ou partiellement en opposition avec des

       obligations découlant de la (...) Convention, et si le

       droit interne de ladite Partie ne permet

       qu'imparfaitement d'effacer les conséquences de cette

       décision ou de cette mesure, la décision de la Cour

       accorde, s'il y a lieu, à la partie lésée une

       satisfaction équitable."

     A. Dommage

33.    Le requérant demande 100 000 ECU pour dommage matériel et

250 000 pour tort moral.  Il invoque l'impossibilité d'acheter

un logement faute de moyens, ainsi que les sentiments d'angoisse

et de souffrance éprouvés tout au long de la procédure.

34.    D'après la Commission, seul peut appeler réparation un

préjudice matériel qui découlerait du dépassement du délai

raisonnable, et non de la durée totale de la procédure.  Le

requérant aurait cependant subi un certain dommage matériel et

moral pour lequel il y aurait lieu de lui octroyer 5 000 ECU.

35.    Avec le Gouvernement, la Cour relève que M. Massa n'a pas

démontré l'existence d'un dommage matériel résultant de la

violation de l'article 6 par. 1 (art. 6-1).  Du reste, la loi

italienne prévoit le remboursement de l'équivalent de la

dépréciation de la monnaie et le versement d'intérêts au taux

annuel de 10 % à un plaideur obtenant gain de cause.

       Quant au second aspect du préjudice allégué, le

Gouvernement tire aussi argument de l'entrée en vigueur du

décret-loi du 8 mars 1993 (n° 54) qui institue des sections

régionales de la Cour des comptes, destinées à permettre au juge

de se rapprocher du citoyen.  M. Massa n'en a pas moins souffert

un tort moral qu'aux yeux de la Cour le simple constat d'un

manquement aux exigences de la Convention ne suffit pas à

compenser.  Il échet donc de lui allouer 10 000 000 lires

italiennes.

     B. Frais et dépens

36.    L'intéressé réclame en outre 8 365 000 lires pour frais

et dépens supportés devant les organes de Strasbourg.

       Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de la Cour qui,

estimant raisonnable le montant demandé, l'accorde en entier.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, A L'UNANIMITE,

1.     Dit que l'article 6 (art. 6) s'applique en l'espèce et a

       été violé;

2.     Dit que l'Etat italien doit verser au requérant, dans les

       trois mois, 10 000 000 (dix millions) lires italiennes

       pour tort moral et 8 365 000 (huit millions trois cent

       soixante-cinq mille) pour frais et dépens;

3.     Rejette les demandes de satisfaction équitable pour le

       surplus.

       Fait en français et en anglais, puis prononcé en audience

publique au Palais des Droits de l'Homme, à Strasbourg,

le 24 août 1993.

Signé: Rolv RYSSDAL

       Président

Signé: Marc-André EISSEN

       Greffier

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