Conseil d'Etat, 8 / 9 SSR, du 21 août 1996, 154488, publié au recueil Lebon
Chronologie de l’affaire
Résumé de la juridiction
Ne doivent suivre le régime fiscal des éléments incorporels de l’actif immobilisé de l’entreprise que les droits constituant une source régulière de profits, dotés d’une pérennité suffisante et susceptibles de faire l’objet d’une cession (1). Par suite, les redevances versées par le concessionnaire de droits d’exploitation d’une marque au titre d’un contrat dont les stipulations interdisent la sous-concession de ces droits ne constituent pas le prix d’acquisition d’un élément incorporel de l’actif immobilisé.
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Le Conseil d'Etat juge, pour les situations antérieures à l'entrée en vigueur des dispositions du règlement ANC 2015-05, que les primes d'option constituent la contrepartie de l'acquisition d'un actif et ne peuvent pas être déduites fiscalement. L'affaire Deutsche Bank a trouvé sa conclusion [1] . Au cours de cette longue procédure où, en toile de fond, il n'a été question que de l'exercice de déduction des primes d'option, le Conseil d'Etat tranche pour leur non-déductibilité, par principe. Peut-être faut-il commencer par rappeler les grandes étapes de ce contentieux. La société Deutsche …
Les redevances versées, notamment en rémunération de droits de propriété industrielle, et plus généralement de droits d'exploitation respectant certaines conditions doivent être immobilisées. Les conséquences financières d'une telle qualification sont redoutables et peuvent conduire à remettre en cause l'équilibre économique du contrat : les dépenses qui concourent à l'acquisition d'un élément d'actif incorporel ne sont en effet pas admises en déduction pour la détermination du résultat fiscal. Les conditions cumulatives nécessaires à cette immobilisation ont été posées par l'arrêt SA …
Sur la décision
Référence : | CE, 8 / 9 ss-sect. réunies, 21 août 1996, n° 154488, Lebon |
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Juridiction : | Conseil d'État |
Numéro : | 154488 |
Importance : | Publié au recueil Lebon |
Type de recours : | Plein contentieux fiscal |
Décision précédente : | Cour administrative d'appel de Nancy, 13 octobre 1993 |
Dispositif : | Annulation renvoi |
Identifiant Légifrance : | CETATEXT000007922098 |
Identifiant européen : | ECLI:FR:CESSR:1996:154488.19960821 |
Sur les parties
- Président : M. Groux
- Rapporteur : M. Froment-Meurice
- Rapporteur public : M. Arrighi de Casanova
- Avocat(s) :
- Parties : S.A. Sife
Texte intégral
Vu la requête sommaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat les 20 décembre 1993 et 18 avril 1994, présentés pour la société anonyme Sife, dont le siège social est … (Bas-Rhin) ; la S.A. Sife demande au Conseil d’Etat 1°) d’annuler l’arrêt du 14 octobre 1993 par lequel la cour administrative d’appel de Nancy a, sur le recours du ministre du budget, annulé le jugement du 8 octobre 1991 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu’il l’avait déchargé, comme venant aux droits de la S.A. Electroli, des suppléments d’impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes auxquels elle avait été assujettie au titre des années 1980, 1981 et 1983, et l’a rétablie au rôle de cet impôt à concurrence, en droits et pénalités, de sommes s’élevant à 62 881 F, 179 888 F et 166 688 F ; 2°) de condamner l’Etat à lui payer, en application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 17 790 F, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel ;
Vu l’ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
– le rapport de M. Froment-Meurice, Conseiller d’Etat,
– les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société anonyme Sife,
– les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un contrat conclu le 27 septembre 1979, M. Emile X…, qui était alors président-directeur général de la S.A. Electroli, devenue la S.A. Sife, a concédé à cette société la licence exclusive d’exploitation, sur le territoire français, de la marque d’appareils électroménagers « Kity » et de la marque de service « avant-vente » de ces appareils, « Kity-Conseil », dont il était titulaire et qu’il avait déposées, la première, en 1960 et en 1975, la seconde le 22 mars 1979 ; que cette concession avait été consentie pour une durée de dix ans, renouvelable par tacite reconduction, moyennant le paiement par la société concessionnaire d’une redevance égale à 0,5% du chiffre d’affaires hors taxes résultant de l’exploitation commerciale des deux marques ; que la concession ne pouvait être résiliée par M. X… que dans deux cas définis par l’article 8 du contrat ; que, celui-ci ne prévoyait, en son article 3, le droit pour la société concessionnaire d’accorder des sous-concessions que pour la marque « Kity-Conseil » ;
Considérant que ne doivent suivre le régime fiscal des éléments incorporels de l’actif immobilisé de l’entreprise que les droits constituant une source régulière de profits, dotés d’une pérennité suffisante et susceptibles de faire l’objet d’une cession ; qu’en jugeant que, eu égard à la durée et à l’étendue du champ d’application territorial de la concession des deux marques Kity et Kity-Conseil, les redevances versées à M. Emile X… par la société anonyme Sife devaient être regardées comme rémunérant l’acquisition, par cette société, d’éléments incorporels de son actif immobilisé, sans tenir compte de la non-cessibilité du droit d’exploiter la marque « Kity », la cour administrative d’appel de Nancy a commis une erreur de droit ; que la S.A. Sife est, dès lors, fondée à demander l’annulation de l’arrêt attaqué ; qu’il y a lieu en l’espèce, de renvoyer l’affaire devant la cour administrative d’appel de Nancy ;
Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, par application des dispositions de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner l’Etat à payer à la S.A. Sife la somme de 17 790 F qu’elle réclame, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Nancy du 14 octobre 1993 est annulé.
Article 2 : L’affaire est renvoyée devant la cour administrative d’appel de Nancy.
Article 3 : L’Etat paiera à la S.A. Sife, au titre de l’article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 17 790 F.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la S.A. Sife, au Président de la cour administrative d’appel de Nancy et au ministre de l’économie et des finances.
Textes cités dans la décision
Le Conseil d'Etat juge, pour les situations antérieures à l'entrée en vigueur des dispositions du règlement ANC 2015-05, que les primes d'option constituent la contrepartie de l'acquisition d'un actif et ne peuvent pas être déduites fiscalement. L'affaire Deutsche Bank a trouvé sa conclusion [1] . Au cours de cette longue procédure où, en toile de fond, il n'a été question que de l'exercice de déduction des primes d'option, le Conseil d'Etat tranche pour leur non-déductibilité, par principe. Peut-être faut-il commencer par rappeler les grandes étapes de ce contentieux. La société …