CJCE, n° C-23/63, Conclusions de l'avocat général de la Cour, Société anonyme Usines Emile Henricot et autres contre Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier, 16 octobre 1963

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 16 oct. 1963, Henricot e.a. / Haute Autorité, C-23/63
Numéro(s) : C-23/63
Conclusions jointes de l'Avocat général Roemer présentées le 16 octobre 1963. # Société anonyme Usines Emile Henricot et autres contre Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. # Affaires jointes 23, 24 et 52-63 # Koninklijke Nederlandsche Hoogovens en Staalfabrieken NV contre Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier. # Affaire 28-63.
Date de dépôt : 8 mai 1963
Solution : Recours en annulation : rejet pour irrecevabilité, Recours en responsabilité : rejet pour irrecevabilité
Identifiant CELEX : 61963CC0023
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1963:28
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Sur les parties

Texte intégral

Conclusions de l’avocat général

M. KARL ROEMER

16 octobre 1963

Traduit de l’allemand

Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

Comme les débats oraux dans les affaires 23, 24, 28 et 52-63 ont pratiquement été groupés au cours d’une seule audience, nous nous permettons également de grouper nos conclusions dans un seul exposé. Cela paraît d’autant moins critiquable que la question juridique centrale sur la recevabilité du recours est identique dans les quatre cas. Bien entendu, les conclusions supplémentaires, présentées dans chaque affaire sous des formes différentes à côté des conclusions principales, feront l’objet d’un examen séparé.

Tout comme dans les affaires 53 et 54-63, les entreprises requérantes ont reçu de la Haute Autorité des lettres datées du 8 avril 1963, dans lesquelles, dans le cadre du mécanisme de péréquation de la ferraille, la direction générale de l’acier, direction du marché, fait le décompte des avoirs et des dettes des entreprises envers le mécanisme de péréquation sur la base de la décision 7-63 et les invite à verser certaines sommes à la Haute Autorité avant le 31 mai 1963.

Pour différentes raisons, qui ne nous intéressent pas encore au stade actuel de la procédure, les entreprises considèrent que ces décomptes sont incorrects. Elles ont donc formé des recours dont l’objectif principal est leur annulation.

La Haute Autorité ne s’est pas encore prononcée sur le bien-fondé de ces moyens: tout comme dans les affaires 53 et 54-63, elle conclut au rejet des recours en raison du fait que les lettres ne présentent pas le caractère de décision.

C’est pourquoi, dans ces affaires aussi, la Cour aura surtout à se préoccuper de savoir s’il est possible de considérer que les lettres du 8 avril 1963 sont des décisions attaquables.

1.

Les requérantes s’en remettent unanimement à la Cour pour apprécier cette question. Notamment, elles ne font pas valoir d’arguments qui, pour la solution de ce problème, pourraient conduire à un résultat autre que dans les affaires 53 et 54-63.

Nous nous permettons donc de renoncer à répéter nos déductions, pour nous contenter de rappeler le résultat auquel nous sommes parvenu dans les affaires 53 et 54-63 en ce qui concerne l’appréciation à porter sur les lettres, dont la forme et le fond sont parfaitement identiques, si les chiffres varient: ni les critères obligatoires imposés par la décision 22-60 et que la Haute Autorité n’a pas encore modifiés, ni la jurisprudence de la Cour (notamment dans les affaires 42 et 49-59) ne permettent de considérer ces lettres commes des décisions attaquables. Toutes les conclusions en ce sens sont donc irrecevables.

2.

Pour les conclusions supplémentaires présentées dans les différentes affaires, voici ce qui apparaît :

a)

Dans l’affaire 23-63, la requérante demande en outre l’annulation d’une prétendue décision de la Haute Autorité qui serait contenue dans une lettre du 5 avril 1963. Cette lettre émane également de la direction générale de l’acier, direction du marché, et contient des explications sur le décompte de la ferraille (quantité de ferraille envisagée, application du principe de la proportionnalité pour déterminer les quantités de ferraille non recensées). Elle ne porte ni la signature d’un membre de la Haute Autorité, ni la mention «pour la Haute Autorité».

En conséquence, pour la qualification juridique, il est impossible d’aboutir à un résultat autre que pour les lettres du 8 avril 1963. Il n’y a pas de décision attaquable et les conclusions sur ce point ne sont donc pas recevables.

b)

De même, dans l’affaire 23-63, il est dit à la page 1 de la requête, dans le cadre de la description de l’objet du litige, que le recours en annulation est dirigé, en cas de besoin, contre la décision 7-63.

Mais dans l’exposé des motifs du recours, ce point n’est ni repris ni développé et notamment on ne voit pas bien si le recours tend à l’annulation directe de la décision 7-63 ou s’il oppose seulement l’exception d’illégalité. Comme enfin cette mention ne réapparaît plus à la page 7 de la requête, dans la formulation finale des conclusions, qui est bien la seule à devoir être obligatoire, on peut admettre que la requérante n’entendait nullement attaquer directement la décision 7-63, mais qu’elle pensait éventuellement opposer une exception d’illégalité. Mais, indépendamment du fait qu’il n’est aucunement développé et que pour cette raison il y a déjà lieu de ne pas en tenir compte, vu la qualification donnée aux lettres des 5 et 8 avril 1963 qui permettrait seulement d’invoquer l’exception d’illégalité, il n’y a pas lieu d’examiner davantage ce point.

c)

Dans l’affaire 28-63, la requérante conclut subsidiairement à l’annulation de l’article 6 de la décision 7-63. Mais elle déclare expressément dans ses observations sur les conclusions de la Haute Autorité qu’il est préférable, dans l’état actuel de la procédure, de joindre le sort des conclusions subsidiaires à celui des conclusions principales. Ces dernières, qui visent la lettre du 8 avril 1963, se sont avérées irrecevables; ainsi, d’après la volonté de la requérante, la nécessité d’apprécier cette conclusion subsidiaire disparaît-elle aussi.

d)

Enfin, dans les affaires 23, 24 et 52-63, nous trouvons des conclusions subsidiaires tendant à l’attribution de dommages-intérêts pour faute de service commise par la Haute Autorité dans l’établissement de l’assiette de la péréquation de la ferraille.

Mais, dans les trois procès, ces conclusions subsidiaires sont formulées de telle sorte qu’il est inutile de les examiner si l’on suit le jugement que nous proposons sur les conclusions principales. En effet, elles sont seulement présentées pour le cas où la décision attaquée de la Haute Autorité serait considérée comme légale (affaires 23 et 24-63) ou bien, et c’est la formule employée dans l’affaire 52-63, pour le cas où la décision attaquée ne pourrait être annulée, c’est-à-dire si elle doit être maintenue parce qu’elle doit être considérée comme légale.

Dans les trois cas, ces conditions ne peuvent se réaliser, car l’acte attaqué ne peut être qualifié de décision et la Cour ne peut donc examiner sa légalité.

3. La question des dépens

En ce qui concerne la décision sur les dépens, les requérantes dans les présentes affaires concluent également à la condamnation de la Haute Autorité aux dépens, conformément à l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure. Leurs arguments à l’appui de ces conclusions sont sensiblement les mêmes: ils renvoient aux formules des lettres attaquées, notamment au délai qui y est fixé, ainsi qu’à la mention de la décision 7-63, dont l’article 6 contient également un délai de paiement. Ils renvoient aux formules de la note explicative où il est également question d’ordres de paiement: cette note ne permet aux entreprises de présenter leurs observations que dans la mesure où la Haute Autorité n’a pas encore pris position sur certaines questions (la requérante dans l’affaire 52-63 remarque notamment qu’avant de recevoir la lettre du 8 avril 1963 elle a déjà exposé à plusieurs reprises à la Haute Autorité son point de vue sur les questions d’assiette qui sont également litigieuses dans la présente affaire, et que la Haute Autorité lui a déjà répondu une fois par lettre du 8 octobre 1902). Les requérantes se réfèrent également à la jurisprudence de la Cour sur la qualification des actes de la Haute Autorité. En outre, la requérante dans l’affaire 24-63 expose encore qu’elle a demandé des explications à la Haute Autorité pendant la durée du délai de recours: celle-ci lui a répondu que la lettre du 8 avril 1963 ne constituait pas une décision mais qu’elle ne pouvait garantir que la Cour partageait cette opinion. Enfin, la requérante dans l’affaire 52-63 se réfère à des opinions contradictoires émanant des représentants de la Haute Autorité dans les assemblées des liquidateurs du mécanisme de péréquation de la ferraille, ainsi qu’à un conseil du représentant français au comité de liquidation qui aurait suggéré aux entreprises de former un recours contre les lettres du 8 avril 1963.

Les plus importants de ces arguments correspondent à ceux qui ont été exposés dans les affaires 53 et 54-63. En les appréciant, nous avons admis que les formules des lettres du 8 avril 1963 pouvaient parfaitement donner l’impression qu’il s’agissait d’ordres administratifs obligatoires, donc de décisions de la Haute Autorité, et nous avons affirmé que tous les autres points de vue importants pour la décision sur les dépens, non-respect manifeste des critères de la décision 22-60, arrêts antérieurs de la Cour sur des cas semblables, déclarations de membres et de fonctionnaires de la Haute Autorité, ne pouvaient être de nature à atténuer l’impression provoquée par le contenu des lettres attaquées, au point de permettre de considérer le dépôt des recours comme déraisonnable.

Cette constatation suffirait déjà pour en arriver aux mêmes conclusions sur les dépens que dans les affaires 53 et 54-63, et cela aussi pour l’affaire 23-63 où, en plus, une lettre de la Haute Autorité du 5 avril 1963 est attaquée; mais, dans certaines des affaires, il s’y ajoute des circonstances qui auraient pu encore renforcer les requérantes, s’il en était besoin, dans leur décision de former un recours. C’est le cas lorsque des services de la Haute Autorité ont déjà discuté par écrit avec les requérantes des problèmes d’assiette, ce dont elles pouvaient tirer la conclusion qu’il ne leur était plus possible de présenter leurs observations dans le sens de la note explicative et que la déclaration de la Haute Autorité était donc définitive, et c’est le cas dans la mesure où les requérantes ont été amenées à agir par ce qu’elles avaient appris des déclarations contradictoires des représentants de la Haute Autorité dans les assemblées du comité de liquidation.

Dans cette affaire également, nous sommes donc convaincu que, par son comportement, la Haute Autorité a donné lieu au dépôt du recours et doit ainsi supporter les dépens.

Nos conclusions tendent donc au rejet du recours pour irrecevabilité et, dans la question des dépens, à la condamnation de la défenderesse, selon l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure.

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