CJCE, n° C-180/83, Arrêt de la Cour, Hans Moser contre Land Baden-Württemberg, 28 juin 1984
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CJUE, Cour, 28 juin 1984, Moser, C-180/83 |
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Numéro(s) : | C-180/83 |
Arrêt de la Cour du 28 juin 1984. # Hans Moser contre Land Baden-Württemberg. # Demande de décision préjudicielle: Arbeitsgericht Reutlingen - Allemagne. # Libre circulation des travailleurs - Notion de travailleur. # Affaire 180/83. | |
Date de dépôt : | 22 août 1983 |
Solution : | Renvoi préjudiciel |
Identifiant CELEX : | 61983CJ0180 |
Identifiant européen : | ECLI:EU:C:1984:233 |
Sur les parties
- Juge-rapporteur : Bosco
- Avocat général : Sir Gordon Slynn
Texte intégral
Avis juridique important
|61983j0180
Arrêt de la cour du 28 juin 1984. – hans moser contre land baden-württemberg. – demande de décision préjudicielle: arbeitsgericht reutlingen – allemagne. – libre circulation des travailleurs – notion de travailleur. – affaire 180/83.
Recueil de jurisprudence 1984 page 02539
Sommaire
Parties
Objet du litige
Motifs de l’arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
1 . questions prejudicielles – saisine de la cour – pertinence des questions soulevees – necessite d ' une decision prejudicielle – appreciation par le juge national
( traite cee , art . 177 )
2 . libre circulation des personnes – travailleurs – dispositions du traite – situations internes a un etat membre – inapplicabilite
( traite cee , art . 48 )
Sommaire
1 . dans le cadre de la repartition des fonctions juridictionnelles entre les juridictions nationales et la cour operee par l ' article 177 du traite , il incombe au juge national , qui est seul a avoir une connaissance directe des faits de l ' affaire ainsi que des arguments avances par les parties et qui devra assumer la responsabilite de la decision judiciaire a intervenir , d ' apprecier , en pleine connaissance de cause , la pertinence des questions de droit soulevees par le litige dont il se trouve saisi et la necessite d ' une deci sion prejudicielle pour etre en mesure de rendre son jugement .
2.L ' article 48 du traite ne s ' applique pas a des situations purement internes a un etat membre , telles que celle d ' un ressortissant d ' un etat membre qui n ' a jamais reside ou travaille dans un autre etat membre . un tel ressortissant ne peut pas invoquer ledit article 48 pour s ' opposer a l ' application , a son egard , de la legislation de son propre pays l ' excluant d ' une formation professionnelle determinee .
Parties
Dans l ' affaire 180/83 ,
Ayant pour objet une demande adressee a la cour , en vertu de l ' article 177 du traite cee , par l ' arbeitsgericht ( tribunal du travail ) reutlingen ( rfa ) et tendant a obtenir , dans le litige pendant devant cette juridiction entre
Hans moser , demandeur ,
Et
Land baden-wurttemberg , defendeur ,
Objet du litige
Une decision a titre prejudiciel sur l ' interpretation de l ' article 48 du traite cee ,
Motifs de l’arrêt
1 par ordonnance du 18 aout 1983 , parvenue a la cour le 22 aout 1983 , l ' arbeitsgericht reutlingen a pose , en vertu de l ' article 177 du traite cee , trois questions prejudicielles relatives a l ' interpretation de l ' article 48 du traite cee .
2 ces questions ont ete soulevees dans le cadre d ' un litige opposant m . hans moser , ressortissant allemand , aux autorites du land baden-wurttemberg ( ci-apres le land ), a propos du refus d ' admettre m . moser au stage preparatoire necessaire pour acceder , apres reussite au deuxieme examen d ' etat , a la fonction d ' instituteur dans l ' enseignement primaire .
3 il ressort de l ' ordonnance de renvoi que le refus des autorites du land etait motive par le fait que m . moser n ' offrait pas , contrairement a ce qui est exige par la legislation du land en matiere d ' acces aux emplois dans la fonction publique , les garanties suffisantes quant a sa fidelite a la loi fondamentale de la republique federale d ' allemagne , du fait de son appartenance au parti communiste allemand .
4 la question ayant ete portee devant l ' arbeitsgericht reutlingen , celui-ci a considere que le refus oppose par le land pourrait priver m . moser de la possibilite de poser sa candidature a un poste d ' instituteur aupres des ecoles situees dans les etats membres autres que la republique federale d ' allemagne . selon la juridiction nationale , l ' attribution d ' un tel poste pourrait etre exclue pour des personnes qui , comme m . moser , n ' ont pas pu effectuer le stage preparatoire . l ' arbeitsgericht s ' est des lors demande si la legislation du land etait compatible avec le principe de la libre circulation des travailleurs vise par l ' article 48 du traite . dans ces conditions , il a decide de surseoir a statuer et de poser a la cour les questions suivantes :
' a ) le terme ' travailleurs ' au sens de l ' article 48 , paragraphe 2 , du traite cee , vise-t-il egalement les personnes qui , apres avoir passe le premier examen d ' etat donnant acces a la fonction d ' instituteur des grund- et hauptschulen ( enseignement primaire ), demandent a etre admises au stage preparatoire au deuxieme examen d ' etat donnant acces a la fonction d ' instituteur de l ' enseignement primaire en dehors d ' un statut de fonctionnaire et qui sont deja affectes a un seminaire de formation pratique a l ' enseignement?
B)en cas de reponse affirmative a la question sous a ):
Le refus du land defendeur d ' employer sur la base d ' un rapport contractuel se situant en dehors de l ' administration publique , un candidat a la fonction d ' instituteur qui demande a etre admis au stage preparatoire au deuxieme examen d ' etat donnant acces a la fonction d ' instituteur de l ' enseignement primaire , constitue-t-il une discrimination fondee sur la nationalite en ce qui concerne les autres conditions de travail au sens de l ' article 48 , paragraphe 2 , du traite cee?
C)en cas de reponse negative a la question sous b ):
Le refus du land defendeur d ' employer un candidat a la fonction d ' instituteur , en raison de son appartenance au parti communiste allemand ( dkp ), dans un rapport contractuel se situant en dehors de l ' administration publique , en vue de l ' obtention du deuxieme examen d ' etat donnant acces a la fonction d ' instituteur de l ' enseignement primaire , constitue-t-il une violation de l ' article 48 , paragraphe 3 , lettres a ) et b ) du traite cee?
'
5 dans les observations qu ' il a soumises a la cour , le gouvernement de la republique federale d ' allemagne emet des doutes quant a la competence de la cour pour statuer sur la demande de la juridiction nationale , la reponse aux questions posees n ' etant pas , a son avis , necessaire pour la solution du litige .
6 comme la cour l ' a affirme par une jurisprudence constante , notamment dans l ' arret du 14 fevrier 1980 ( onpts/damiani , 53/79 , recueil p . 273 ), dans le cadre de la repartition des fonctions juridictionnelles entre les juridictions nationales et la cour operee par l ' article 177 du traite , il incombe au juge national , qui est seul a avoir une connaissance directe des faits de l ' affaire ainsi que des arguments avances par les parties et qui devra assumer la responsabilite de la decision judiciaire a intervenir , d ' apprecier , en pleine connaissance de cause , la pertinence des questions de droit soulevees par le litige dont il se trouve saisi et la necessite d ' une decision prejudicielle pour etre en mesure de rendre son jugement .
7 le gouvernement allemand rappelle cependant que , dans l ' arret du 16 decembre 1981 ( foglia/novello , 244/80 , recueil p . 3045 ), la cour a declare qu ' elle ne se considere pas competente pour repondre a des questions d ' interpretation posees par une juridiction nationale dans le cadre de constructions procedurales arrangees par les parties en vue d ' amener la cour a prendre position sur certains problemes de droit communautaire qui ne repondent pas a un besoin objectif inherent a la solution d ' un contentieux .
8 dans la presente affaire , toutefois , aucun element n ' est apparu permettant de conclure qu ' il s ' agit d ' un des cas exceptionnels vises par la jurisprudence evoquee ci-dessus .
9 le gouvernement allemand fait egalement valoir que l ' ordonnance de renvoi repose sur une erreur manifeste quant a l ' objet et a la portee des dispositions de droit communautaires qui y sont visees . il souligne , a cet effet , que m . moser est ressortissant allemand et qu ' il n ' a jamais travaille ou reside dans un etat membre autre que la republique federale d ' allemagne . sa situation serait , par consequent , tout a fait etrangere aux dispositions de l ' article 48 du traite , dont on demande l ' interpretation .
10 il convient , cependant , de constater que les circonstances invoquees par le gouvernement allemand relevent du fond des questions posees par la juridiction nationale . par consequent , si elles peuvent entrer en consideration pour repondre a ces questions , elles sont sans pertinence lorsqu ' il s ' agit d ' apprecier la competence de la cour pour statuer sur la demande prejudicielle .
11 les objections soulevees par le gouvernement allemand quant a la competence de la cour ne peuvent donc etre retenues .
12 par les trois questions posees a la cour , la juridiction nationale vise , en substance , a savoir si l ' article 48 du traite couvre le cas d ' une personne se trouvant dans la situation de m . moser et , plus specialement , si cette personne peut se prevaloir de l ' article 48 pour s ' opposer a l ' application a son egard d ' une legislation , telle celle en vigueur au land , en vertu de laquelle l ' acces a la formation professionnelle necessaire pour devenir instituteur dans l ' enseignement primaire est refuse aux personnes ne donnant pas des garanties suffisantes de fidelite a la loi fondamentale .
13 la reponse a ces questions depend , en premier lieu , de la determination du champ d ' application de l ' article 48 du traite .
14 il convient , a cet egard , de rappeler que , comme la cour l ' a precise dans l ' arret du 28 mars 1979 ( saunders , 175/76 , recueil p . 1128 ), cette disposition vise , en application du principe general enonce a l ' article 7 , a eliminer dans la legislation des etats membres les dispositions qui , en ce qui concerne l ' emploi , la remuneration et les autres conditions de travail , imposent au travailleur ressortissant d ' un autre etat membre un traitement plus rigoureux ou le placent dans une situation de droit ou de fait desavantageuse par rapport a la situation faite , dans les memes circonstances , a un national .
15 il s ' ensuit que les dispositions du traite en matiere de libre circulation des travailleurs , et particulierement l ' article 48 , ne peuvent etre appliquees a des situations purement internes a un etat membre , c ' est-a-dire en l ' absence de tout element de rattachement a l ' une quelconque des situations envisagees par le droit communautaire .
16 dans le cas vise par la juridiction nationale , il s ' agit , comme le gouvernement allemand l ' a souligne a juste titre , d ' un ressortissant allemand , ayant toujours vecu et reside en republique federale d ' allemagne , qui s ' oppose au refus des autorites allemandes de l ' admettre , sur la base de la legislation de ce meme etat , a une formation professionnelle determinee .
17 pour etablir l ' existence d ' un lien avec les dispositions communautaires , m . moser a fait valoir , dans les observations soumises a la cour , que l ' application a son egard de la legislation allemande en cause , en le mettant dans l ' impossibilite de completer sa formation en tant qu ' instituteur , a pour resultat de l ' empecher de poser sa candidature pour des postes d ' instituteur dans les ecoles situees dans les autres etats membres .
18 cet argument ne saurait etre retenu . en effet , une perspective professionnelle purement hypothetique dans un autre etat membre ne constitue pas un lien suffisant avec le droit communautaire pour justifier l ' application de l ' article 48 du traite .
19 il s ' ensuit que la situation d ' une personne telle que celle visee par la juridiction nationale ne presente aucun lien avec les dispositions de droit communautaire en matiere de libre circulation des travailleurs .
20 il convient , des lors , de repondre aux questions posees par la juridiction en ce sens que l ' article 48 du traite cee ne s ' applique pas a des situations purement internes a un etat membre , telles que celle d ' un ressortissant d ' un etat membre qui n ' a jamais reside ou travaille dans un autre etat membre , et qu ' un tel ressortissant ne peut pas invoquer ledit article 48 pour s ' opposer a l ' application , a son egard , de la legislation de son propre pays .
Décisions sur les dépenses
Sur les depens
21 les frais exposes par le gouvernement de la republique federale d ' allemagne et par la commission des communautes europeennes , qui ont soumis des observations a la cour , ne peuvent faire l ' objet d ' un remboursement . la procedure revetant , a l ' egard des parties au principal , le caractere d ' un incident souleve devant la juridiction nationale , il appartient a celle-ci de statuer sur les depens .
Par ces motifs ,
Dispositif
La cour ,
Statuant sur les questions a elle soumises par l ' arbeitsgericht reutlingen , par ordonnance du 18 aout 1983 , dit pour droit :
L ' article 48 du traite cee ne s ' applique pas a des situations purement internes a un etat membre , telles que celle d ' un ressortissant d ' un etat membre qui n ' a jamais reside ou travaille dans un autre etat membre . un tel ressortissant ne peut pas invoquer ledit article 48 pour s ' opposer a l ' application , a son egard , de la legislation de son propre pays .