CJCE, n° T-55/91, Arrêt du Tribunal, Olivier Fascilla contre Parlement européen, 21 mai 1992

  • Statut des fonctionnaires et régime des autres agents·
  • Concours sur titres et épreuves·
  • Refus d' admission aux épreuves·
  • Obligation de motivation·
  • Déroulement du concours·
  • Décision faisant grief·
  • Fonction publique·
  • Fonctionnaires·
  • Recrutement·
  • Concours

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Tribunal de première instance, 21 mai 1992, Fascilla / Parlement, T-55/91
Numéro(s) : T-55/91
Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 21 mai 1992. # Olivier Fascilla contre Parlement européen. # Fonctionnaires - Concours - Expérience professionnelle - Motivation de la décision de rejet de candidature. # Affaire T-55/91.
Date de dépôt : 4 juillet 1991
Précédents jurisprudentiels : Cour du 5 avril 1979, Kobor/Commission, 112/78
Cour du 9 février 1984, Kohler/Cour des Comptes, 316/82 et 40/83
Tribunal du 13 décembre 1990, González Holguera/Parlement, points 42-45, T-115/89
Solution : Recours de fonctionnaires : obtention
Identifiant CELEX : 61991TJ0055
Identifiant européen : ECLI:EU:T:1992:66
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Texte intégral

Avis juridique important

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61991A0055

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 21 mai 1992. – Olivier Fascilla contre Parlement européen. – Fonctionnaires – Concours – Expérience professionnelle – Motivation de la décision de rejet de candidature. – Affaire T-55/91.


Recueil de jurisprudence 1992 page II-01757


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


++++

Fonctionnaires – Recrutement – Concours – Concours sur titres et épreuves – Refus d’ admission aux épreuves – Décision faisant grief – Obligation de motivation – Portée

(Statut des fonctionnaires, art. 25, alinéa 2; annexe III, art. 5)

Sommaire


L’ obligation de motivation de toute décision individuelle prise en application du statut a pour but, d’ une part, de fournir à l’ intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée et, d’ autre part, de rendre possible le contrôle juridictionnel. S’ agissant de la décision d’ un jury de concours de ne pas admettre un candidat aux épreuves, il appartient au jury d’ indiquer précisément quelles sont les conditions arrêtées dans l’ avis de concours qui ont été jugées non satisfaites par le candidat. Si, dans le cas d’ un concours à participation nombreuse, le jury peut, dans un premier stade, se limiter à motiver le refus de façon sommaire et ne communiquer aux candidats que les critères et le résultat de la sélection, il est néanmoins tenu de fournir, ultérieurement, des explications individuelles à ceux des candidats qui le demandent expressément.

Cette exigence de motivation n’ est pas satisfaite lorsque, dans la lettre adressée à un candidat non admis aux épreuves, le jury, après avoir procédé, à la demande de l’ intéressé, au réexamen de sa candidature, ne précise pas les raisons pour lesquelles la formation et l’ expérience professionnelle du candidat ont été jugées inférieures au seuil d’ admission fixé par l’ avis de concours.

Parties


Dans l’ affaire T-55/91,

Olivier Fascilla, agent auxiliaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Maisières (Belgique), représenté par Mes Jean-Noël Louis, Thierry Demaseure et Véronique Leclercq, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la Fiduciaire Myson SARL, 1, rue Glesener,

partie requérante,

contre

Parlement européen, représenté par M. Jorge Campinos, jurisconsulte, et initialement par M. Roland Bieber, puis par M. François Vainker, membres du service juridique, en qualité d’ agents, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l’ annulation de la décision du jury du concours général PE/107/C refusant d’ admettre le requérant aux épreuves de ce concours,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de MM. R. García-Valdecasas, président, R. Schintgen et C. P. Briët, juges,

greffier: M. H. Jung

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 17 mars 1992,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


Les faits à l’ origine du recours

1 Le requérant, M. Olivier Fascilla, s’ est porté candidat au concours général PE/107/C organisé par le Parlement européen (ci-après « Parlement ») pour la constitution d’ une liste de réserve de recrutement de dactylographes de langue française, dont la carrière portait sur les grades 5 et 4 de la catégorie C.

2 L’ avis de concours, publié au JO C 118 du 12 mai 1990, page 28, disposait quant aux conditions d’ admission aux épreuves:

« III. Concours – Nature et conditions d’ admission

A. Conditions générales

B. Conditions particulières

1. Titres, diplômes et/ou expérience professionnelle requis

a) Justifier avoir accompli des études de niveau moyen (secondaires inférieures, commerciales, techniques, professionnelles) sanctionnées par un diplôme, ou posséder une expérience professionnelle d’ un niveau équivalent;

b) Posséder une expérience professionnelle en rapport avec la 'Nature des fonctions’ visée au titre I, d’ une durée d’ au moins deux ans, acquise postérieurement au niveau exigé au point a) ci-dessus.

Seront prises en considération au titre de l’ expérience professionnelle les périodes de stage de spécialisation ou de perfectionnement ou les formations complémentaires en rapport avec les fonctions décrites au titre I, dûment attestées par des certificats ou diplômes."

3 Selon le titre I de l’ avis de concours, les fonctions dont il s’ agissait consistaient à exécuter des travaux courants de bureau comprenant, notamment, des travaux de dactylographie.

4 L’ avis de concours comportait un titre V, intitulé « Réexamen des candidatures », dont le libellé était le suivant:

« Tout candidat a le droit de demander un réexamen de sa candidature s’ il estime qu’ une erreur a été commise. Dans ce cas il peut, dans un délai de 20 jours à compter de la date d’ envoi de la lettre lui annonçant que sa candidature n’ a pas été retenue (le cachet de la poste faisant foi), adresser une réclamation, en mentionnant le numéro du concours sur la lettre et sur l’ enveloppe, au service du recrutement, Parlement européen, BAK 222, L-2929 Luxembourg.

Dans les 30 jours qui suivent la date d’ envoi de la lettre du candidat demandant le réexamen (le cachet de la poste faisant foi), le jury réexamine alors le dossier, en tenant compte des observations du candidat."

5 Le requérant est titulaire du diplôme d’ enseignement secondaire inférieur, correspondant en Belgique à des études de niveau moyen, du diplôme d’ enseignement secondaire supérieur, du diplôme d’ aptitude à accéder à l’ enseignement supérieur et du diplôme de gradué en secrétariat obtenu au terme d’ un cycle d’ études de deux ans. Il a exercé une activité de secrétariat auprès d’ une société privée belge.

6 Par lettre-type du 4 mars 1991, le président du jury du concours a informé le requérant qu’ il n’ avait pas été admis à participer aux épreuves, au motif suivant (voir point 7 de la lettre du 4 mars 1991): « Manque d’ une expérience professionnelle d’ au moins deux ans (point III.B.1 de l’ avis de vacance de concours) ».

7 Par lettre du 14 mars 1991, le requérant a introduit une réclamation contre cette décision. Il a sollicité un réexamen de sa candidature en se prévalant du fait qu’ il est titulaire d’ un diplôme de gradué en secrétariat de direction, titre obtenu à la fin de ses études secondaires supérieures.

8 Par lettre du 5 avril 1991, le président du jury a accusé réception de la lettre de réclamation du 14 mars 1991 et a informé le requérant de ce qui suit: « Au cours de sa réunion du 3 avril 1991 le jury a procédé au réexamen de votre dossier et a pris note de vos observations. J’ ai le regret de vous informer qu’ aucun élément ne lui a permis de revenir sur sa décision initiale. En effet, le cumul de votre formation et de votre expérience professionnelle se révèle inférieur au seuil d’ admission ».

9 Par lettre du 10 avril 1991, le requérant a informé le jury qu’ il avait été admis, en mai 1990, aux épreuves du concours COM/677/C organisé par la Commission des Communautés européennes (ci-après « Commission »), dont les conditions d’ admission étaient similaires à celles du concours PE/107/C organisé par le Parlement. Il a sollicité un nouvel examen de sa candidature et, dans l’ éventualité d’ un refus, une « explication rationnelle quant à ce refus ».

10 Par lettre du 22 mai 1991, le président du jury a informé le requérant que « chaque acte de candidature a fait l’ objet d’ un examen minutieux sur la base des dispositions de l’ avis de concours ». Il a, en outre, « rappelé » au requérant que sa lettre n’ avait pas valeur de réclamation.

La procédure

11 C’ est dans ces conditions que, par requête déposée au greffe du Tribunal de première instance le 4 juillet 1991, le requérant a introduit le présent recours.

12 Après le dépôt du mémoire en défense, le requérant a renoncé à déposer un mémoire en réplique. Le défendeur a pareillement renoncé à déposer un mémoire en duplique.

13 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d’ instruction préalables. Toutefois, par lettre de son greffier du 20 janvier 1992, le Tribunal a invité le défendeur à répondre à plusieurs questions concernant la prise en compte, au titre de l’ expérience professionnelle, des formations complémentaires. Le requérant a été invité à produire une pièce justifiant la durée de son activité auprès de la société qui l’ avait employé.

14 La procédure orale s’ est déroulée le 17 mars 1992. Les représentants des parties ont été entendus en leur plaidoirie et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal.

15 Le requérant conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

— annuler la décision du 5 avril 1991 du jury du concours général PE/107/C de ne pas l’ admettre aux épreuves de ce concours et, pour autant que de besoin, la décision du 22 mai 1991 confirmant la décision de rejet de sa candidature;

— condamner le défendeur aux dépens.

16 Le défendeur conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

— déclarer le recours non fondé;

— statuer sur les dépens en conformité avec les dispositions applicables.

Sur le fond

Sur le moyen unique tiré de la violation de l’ obligation de motivation

17 A l’ appui de son recours, le requérant invoque la violation de l’ article 25, deuxième alinéa, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après « statut »), aux termes duquel « toute décision individuelle prise en application du présent statut doit être communiquée par écrit, sans délai, au fonctionnaire intéressé. Toute décision faisant grief doit être motivée ».

18 Se fondant sur la jurisprudence de la Cour et du Tribunal quant à l’ obligation de motivation (voir arrêt de la Cour du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, 195/80, Rec. p. 2861; conclusions de l’ avocat général Mme Rozès sous l’ arrêt de la Cour du 9 février 1984, Kohler/Cour des Comptes, 316/82 et 40/83, Rec. p. 667; arrêt du Tribunal du 20 mars 1991, Perez Minguez Casariego/Commission, point 73, T-1/90, Rec. p. II-143), le requérant estime qu’ en l’ espèce il convient d’ examiner, d’ une part, si la motivation de la décision attaquée lui fournit une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d’ un vice permettant d’ en contester la légalité et, d’ autre part, si la motivation de la décision permet au Tribunal d’ exercer son contrôle sur la légalité de la décision.

19 En premier lieu, le requérant expose que la motivation de la décision du 5 avril 1991 n’ explique pas en quoi le cumul de sa formation et de son expérience professionnelle se révélerait inférieur au seuil d’ admission et qu’ elle ne fournit, dès lors, pas une quelconque indication lui permettant d’ en apprécier le bien-fondé et au Tribunal d’ exercer son contrôle sur la légalité de la décision.

20 Le requérant fait valoir qu’ il avait transmis au jury du concours, avec son acte de candidature, une copie de l’ ensemble de ses diplômes ainsi qu’ une attestation de travail établie par la société qui l’ avait employé. D’ une part, il résulterait de ces pièces, quant à la condition relative aux études, que le requérant justifiait d’ études de niveau moyen sanctionnées par un diplôme. D’ autre part, il en résulterait, quant à la condition relative à l’ expérience professionnelle, que le jury aurait dû prendre en considération la formation complémentaire en secrétariat de deux ans acquise par le requérant.

21 En second lieu, le requérant se prévaut de son admission aux épreuves du concours général COM/C/677, organisé par la Commission, dont les conditions d’ admission étaient similaires à celles du concours PE/107/C. Selon lui, il est de jurisprudence constante (voir arrêts de la Cour du 5 avril 1979, Kobor/Commission, 112/78, Rec. p. 1573, et du 21 mars 1985, De Santis/Cour des comptes, 108/84, Rec. p. 947) que le jury d’ un concours est tenu de motiver de manière spécifique son appréciation des titres d’ un candidat, lorsqu’ elle est moins favorable que celle dont le candidat a bénéficié lors d’ un concours précédent qui présentait des conditions d’ admission identiques.

22 Le requérant admet que dans un arrêt du 12 juillet 1989, Belardinelli/Cour de justice (225/87, Rec. p. 2353), la Cour a restreint la portée de cette obligation en précisant que celle-ci « … ne trouve à s’ appliquer que dans la mesure où l’ intéressé a attiré l’ attention du jury sur ce point ». Or, en l’ espèce, le requérant aurait attiré l’ attention du jury du concours sur la décision plus favorable qui avait été adoptée par le jury du concours COM/C/677, de sorte que le jury du concours PE/107/C aurait été tenu de motiver de manière spécifique les raisons pour lesquelles il avait considéré que le cumul de la formation et de l’ expérience professionnelle du requérant était inférieur au seuil d’ admission.

23 Le requérant conclut en faisant valoir que la décision attaquée est entachée d’ un défaut ou, à tout le moins, d’ une insuffisance de motivation, d’ une erreur manifeste d’ appréciation et a été prise en méconnaissance des conditions imposées par l’ avis de concours.

24 Le défendeur renvoie également, à titre liminaire, à la jurisprudence de la Cour quant à la finalité et la portée du devoir de motivation qui incombe à un jury de concours (voir arrêts du 8 mars 1988, Sergio/Commission, point 48, 64/86, 71/86 à 73/86 et 78/86, Rec. p. 1399; du 9 juin 1983, Verzyck/Commission, 225/82, Rec. p. 1991, et du 26 novembre 1981, Michel/Parlement, précité).

25 Il ajoute que, dans plusieurs arrêts, la Cour a admis que le jury d’ un concours à participation nombreuse peut procéder en deux étapes dans l’ exercice de son devoir de motivation (voir arrêts du 28 février 1989, Basch/Commission, 100/87, 146/87 et 153/87, Rec. p. 447, et du 16 décembre 1987, Beiten/Commission, 206/85, Rec. p. 530; voir également les arrêts Belardinelli/Cour de justice, Michel/Parlement, Verzyck/Commission et Sergio/Commission, précités).

26 Par ailleurs, à la suite de la réclamation introduite par le requérant le 14 mars 1991, le président du jury, dans sa réponse du 5 avril 1991, aurait fourni des explications individuelles en précisant que « le cumul de votre formation et de votre expérience professionnelle se révèle inférieur au seuil d’ admission ». D’ une lecture combinée de cette dernière réponse et de celle contenue dans la lettre du 4 mars 1991, il serait clairement ressorti que, selon l’ avis du jury, le candidat ne possédait pas les deux années d’ expérience professionnelle requises. Le requérant lui-même, en signalant dans sa lettre du 10 avril 1991 que dans le concours organisé par la Commission les deux années d’ études supérieures avaient été prises en considération au titre de l’ expérience professionnelle, aurait montré qu’ il était parfaitement conscient du fait que le refus d’ admission était dû à la non-reconnaissance de ce diplôme en tant que preuve de son expérience professionnelle.

27 Le défendeur explique ensuite la façon dont le jury a pris en considération la formation complémentaire prévue au titre I, point B.1.b), deuxième alinéa, de l’ avis de concours, à savoir toutes les périodes de stage effectuées dans le cadre de cette formation, à condition qu’ elles aient été dûment justifiées par des certificats des entreprises dans lesquelles les stages avaient été accomplis ou qu’ elles aient été inscrites sur le diplôme, dans le cas du graduat par exemple. Le jury aurait décompté comme expérience professionnelle, dans leur intégralité, les périodes de stage effectuées dans le cadre des périodes de perfectionnement ou de formation complémentaire.

28 En réponse aux questions posées par le Tribunal avant l’ ouverture de la procédure orale, le Parlement a insisté sur le fait que l’ expérience professionnelle exigée devait consister en une expérience pratique « sur le terrain ». La formation complémentaire, qui ne justifierait pas de véritables stages pratiques, ne serait pas à considérer comme une telle expérience pratique. En l’ espèce, le fait que les cours suivis par M. Fascilla et qui ont mené au diplôme de gradué en secrétariat s’ étaient étalés sur un cycle d’ études de deux ans et que la dactylographie n’ avait constitué qu’ un cours parmi bien d’ autres aurait déterminé le Parlement à ne retenir, à ce titre, qu’ une période forfaitaire de trois mois. Ces trois mois, cumulés avec les dix mois d’ expérience effective auprès d’ une société privée, auraient conféré au requérant une expérience professionnelle de treize mois. Le Parlement a ajouté que l’ avis de concours n’ obligeait pas le jury à prendre en considération en totalité les « formations complémentaires » en tant que telles, le deuxième alinéa du point B.1.b) se limitant à indiquer que ces formations seraient « prises en considération ».

29 Par conséquent, ce serait à juste titre que le jury a rejeté la candidature du requérant en refusant de considérer l’ intégralité de la durée des études de graduat qu’ il a effectuées comme formation complémentaire en rapport avec les fonctions décrites au titre I, à savoir: exécution de travaux courants de bureau, comprenant notamment des travaux de dactylographie.

30 Quant à l’ argument tiré de la similitude des conditions d’ admission aux épreuves des concours PE/107/C et COM/C/677, le défendeur soutient que cette similitude, dont la réalité n’ est pas contestée, n’ implique pas à elle seule que le jury du concours PE/107/C aurait dû arriver à la même conclusion que le jury du concours COM/C/677, en raison de la liberté d’ appréciation qui est reconnue à chaque jury.

31 Le défendeur ne conteste pas non plus que, dans une telle situation, le jury est tenu de motiver spécialement sa décision, mais il soutient qu’ en l’ espèce cette obligation de motivation spéciale n’ existait pas, l’ information concernant l’ admission du requérant aux épreuves du concours organisé par la Commission n’ ayant été portée à la connaissance du jury que par la lettre du 10 avril 1990, c’ est-à-dire après le réexamen de son dossier de candidature par le jury.

32 Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante (voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 1990, González Holguera/Parlement, points 42-45, T-115/89, Rec. p. II-831), l’ obligation de motivation de toute décision individuelle prise en application du statut a pour but, d’ une part, de fournir à l’ intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est ou non fondée et, d’ autre part, de rendre possible le contrôle juridictionnel. Pour ce qui est plus particulièrement des décisions de refus d’ admission à concourir, la Cour a précisé qu’ il est nécessaire, à cet effet, que le jury indique précisément quelles sont les conditions arrêtées dans l’ avis de concours qui ont été jugées non satisfaites par le candidat (voir, par exemple, les arrêts du 30 novembre 1978, Salerno/Commission, 4/78, 19/78 et 28/78, Rec. p. 2403, 2416, et du 21 mars 1985, De Santis/Cour des comptes, précité, Rec. p. 958).

33 Il convient de relever également que, en cas de concours à participation nombreuse, une jurisprudence établie autorise le jury à se limiter, dans un premier stade, à motiver le refus de façon sommaire et à ne communiquer aux candidats que les critères et le résultat de la sélection (voir arrêt du 12 juillet 1989, Belardinelli/Cour de justice, précité).

34 Le Tribunal estime que, compte tenu du fait qu’ il s’ agit en l’ espèce d’ un concours à participation nombreuse, la décision du 4 mars 1991 qui fait état du « manque d’ une expérience professionnelle d’ au moins deux ans (point III.B.1. de l’ avis de vacance de concours) » dans le chef du requérant satisfait à l’ obligation de motivation prescrite à l’ article 25 du statut.

35 Néanmoins, conformément à la même jurisprudence, le jury du concours est tenu de fournir ultérieurement des explications individuelles à ceux des candidats qui le demandent expressément. En l’ espèce, le Tribunal constate que la motivation donnée dans la décision du 5 avril 1991, laquelle a été adoptée à la suite de la demande de réexamen (« le cumul de votre formation et de votre expérience professionnelle se révèle inférieur au seuil d’ admission ») et qui fait l’ objet de la demande en annulation, reste très sommaire également.

36 Il est exact que le requérant a pu puiser dans les termes de la lettre du 5 avril 1991, lus en combinaison avec ceux de la lettre du 4 mars 1991, l’ information qu’ aussi bien sa formation que son expérience professionnelle effective avaient été prises en considération pour l’ appréciation de l’ expérience professionnelle de deux ans exigée par l’ avis de concours, mais que, pour une raison non autrement expliquée, le jury avait estimé que le seuil des deux ans n’ était pas atteint. Le requérant n’ a pu tout au plus que se douter que son diplôme de gradué en secrétariat de direction, obtenu à la suite de deux années d’ études supérieures, dont il s’ était prévalu dans sa lettre du 14 mars 1991, n’ avait pas été pris en considération ou n’ avait été pris en considération qu’ en partie. Le fait que, dans sa lettre du 10 avril 1991, le requérant ait fait état de ses deux années d’ études supérieures, prises en considération au titre de l’ expérience professionnelle par le jury du concours organisé par la Commission, ne signifie pas pour autant qu’ il était sûr de ce que c’ était le diplôme justifiant ces études supérieures qui n’ avait pas été pris en considération lors de l’ examen de sa candidature au concours organisé par le Parlement.

37 Le caractère insuffisant de la motivation fournie au requérant se trouve confirmé par les explications fournies par le Parlement, aussi bien dans son mémoire en défense que dans le contexte de la plaidoirie à l’ audience du Tribunal du 17 mars 1992, en ce qui concerne les modalités de computation de la formation complémentaire du requérant. En effet, la décision du 5 avril 1991 ne fournit aucune indication ni quant au fait que le jury a subordonné la prise en compte des formations complémentaires à la justification de stages pratiques dûment justifiés, ni quant au mode de computation employé effectivement par le jury pour décompter les formations scolaires complémentaires et pour arriver finalement à une prise en compte forfaitaire de trois mois à titre d’ expérience professionnelle. Le Tribunal considère que, même en comparant les documents produits par le requérant avec les indications fournies par le président du jury, le requérant ne pouvait raisonnablement en déduire les motifs pour lesquels le jury avait considéré ces attestations comme insuffisantes. Il lui était donc impossible d’ apprécier si le rejet de sa candidature était bien fondé ou non.

38 Il suit de ces considérations que la décision refusant d’ admettre le requérant à participer au concours litigieux est entachée d’ un défaut de motivation. En conséquence, la demande du requérant doit être déclarée justifiée.

39 Il découle de ce qui précède, et sans qu’ il soit besoin d’ examiner les autres arguments invoqués par le requérant, que la décision attaquée du 5 avril 1991 doit être annulée.

40 A titre surabondant, quant au refus du Parlement de prendre en compte le diplôme du requérant de formation complémentaire en secrétariat, au motif que cette formation ne comportait pas de stages pratiques, le Tribunal estime que le Parlement fait un amalgame injustifié entre les deux membres de phrase du deuxième alinéa du point III.B.1.b) de l’ avis de concours, à savoir d’ une part, les « périodes de stage, de spécialisation ou de perfectionnement » et, d’ autre part, les « formations complémentaires ». En effet, il est manifeste que l’ avis de concours, dont le jury devait respecter scrupuleusement les termes, n’ exige pas de « stages pratiques » en rapport avec les formations complémentaires. Il en résulte qu’ il n’ est pas justifié que celles-ci soient prises en considération pour une période réduite à trois mois. Par conséquent, la décision du Parlement aurait dû encourir l’ annulation également pour erreur manifeste d’ appréciation et méconnaissance des conditions imposées par l’ avis de concours.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

41 Aux termes de l’ article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’ il est conclu en ce sens. Le Parlement ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens, les dépens du requérant.

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1) La décision du 5 avril 1991 du jury du concours général PE/107/C de ne pas admettre M. Olivier Fascilla aux épreuves de ce concours est annulée.

2) Le Parlement est condamné à l’ ensemble des dépens.

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