CJCE, n° T-6/92, Arrêt du Tribunal, Andreas Reinarz contre Commission des Communautés européennes, 26 octobre 1993

  • Les sources du droit de la fonction publique européenne·
  • Obligation d' assistance incombant à l' administration·
  • Fonctionnaires en service et fonctionnaires retraités·
  • Principes du droit de la fonction publique européenne·
  • Statut des fonctionnaires et régime des autres agents·
  • Adoption d' un commun accord par les institutions·
  • Absence de discrimination 10. fonctionnaires·
  • Remboursement identique des frais de maladie·
  • Actes dont l' illégalité peut être excipée·
  • Irrecevabilité 3. exception d' illégalité

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Tribunal de première instance, 26 oct. 1993, Reinarz / Commission, T-6/92
Numéro(s) : T-6/92
Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 26 octobre 1993. # Andreas Reinarz contre Commission des Communautés européennes. # Fonctionnaires - Acte faisant grief - Remboursement des frais de garde-malade - Réduction des remboursements. # Affaires jointes T-6/92 et T-52/92.
Date de dépôt : 31 janvier 1992
Précédents jurisprudentiels : Cour ( arrêt du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission, 92/78
Cour du 10 décembre 1969, Grasselli/Commission, 32/68
Cour du 17 décembre 1981, Bellardi-Ricci e.a./Commission, 178/80
Cour du 18 mars 1975, Acton e.a./Commission, 44/74, 46/74 et 49/74
Cour du 19 mars 1975, Gillet/Commission, 28/74, Rec. p. 463, 473
Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission ( 17/78, Rec. p. 189
Cour du 21 mai 1987, Rau e.a., 133/85 à 136/85
Cour du 25 mars 1982, Munk/Commission, 98/81
Cour du 28 mai 1980, Kuhner/Commission ( 33/79 et 75/79, Rec. p. 1677
Cour du 4 février 1982, Buyl e.a./Commission, 817/79
Cour du 5 juillet 1984, Ooms/Commission, 115/83
Cour du 7 mai 1986, Rihoux e.a./Commission, 52/85
Cour du 9 décembre 1982, Plug/Commission, 191/81
Tribunal du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T-33/89 et T-74/89
Tribunal du 3 avril 1990, Pfloeschner/Commission, T-135/89
Tribunal du 4 juillet 1991, Herremans/Commission, T-47/90
Solution : Recours de fonctionnaires : rejet pour irrecevabilité, Recours de fonctionnaires : rejet sur le fond
Identifiant CELEX : 61992TJ0006
Identifiant européen : ECLI:EU:T:1993:89
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Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

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61992A0006

Arrêt du Tribunal de première instance (quatrième chambre) du 26 octobre 1993. – Andreas Reinarz contre Commission des Communautés européennes. – Fonctionnaires – Acte faisant grief – Remboursement des frais de garde-malade – Réduction des remboursements. – Affaires jointes T-6/92 et T-52/92.


Recueil de jurisprudence 1993 page II-01047


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


++++

1. Fonctionnaires – Recours – Acte faisant grief – Notion – Note d’ information contenant des renseignements administratifs – Exclusion

(Statut des fonctionnaires, art. 91)

2. Fonctionnaires – Recours – Recours visant, en l’ absence d’ un acte faisant grief, à faire apprécier la légalité d’ une disposition normative – Irrecevabilité

(Statut des fonctionnaires, art. 91)

3. Exception d’ illégalité – Portée – Actes dont l’ illégalité peut être excipée – Réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes

(Traité CEE, art. 184)

4. Fonctionnaires – Sécurité sociale – Assurance maladie – Réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes – Adoption d’ un commun accord par les institutions – Admissibilité – Conditions

(Statut des fonctionnaires, art. 72, § 1)

5. Fonctionnaires – Sécurité sociale – Assurance maladie – Frais de maladie – Frais de garde-malade – Plafonds de remboursement – Admissibilité – Conditions

(Statut des fonctionnaires, art. 72, § 1; réglementation relative à la couverture des risques de maladie, annexe I, point X)

6. Fonctionnaires – Sécurité sociale – Assurance maladie – Frais de maladie – Frais de garde-malade – Modification de la réglementation dans le sens d’ une diminution du remboursement – Violation des principes des droits acquis et de la confiance légitime – Absence

(Statut des fonctionnaires, art. 72, § 1; réglementation relative à la couverture des risques de maladie, annexe I, point X)

7. Fonctionnaires – Obligation d’ assistance incombant à l’ administration – Portée

(Statut des fonctionnaires, art. 24)

8. Fonctionnaires – Recours – Réclamation administrative préalable – Identité d’ objet et de cause – Moyens et arguments ne figurant dans la réclamation que sous forme de renvoi à d’ autres écrits – Recevabilité

(Statut des fonctionnaires, art. 90 et 91)

9. Fonctionnaires – Égalité de traitement – Fonctionnaires en service et fonctionnaires retraités – Remboursement identique des frais de maladie – Absence de discrimination

(Statut des fonctionnaires, art. 72, § 1; réglementation relative à la couverture des risques de maladie, annexe I, point X)

10. Fonctionnaires – Sécurité sociale – Assurance maladie – Frais de maladie – Modalités et taux de remboursement – Maîtrise des dépenses et exigences du principe de proportionnalité

(Statut des fonctionnaires, art. 72, § 1; réglementation relative à la couverture des risques de maladie, annexe I, point X)

Sommaire


1. Ne font grief, au sens de l’ article 91, paragraphe 1, du statut, que les actes qui sont susceptibles d’ affecter directement la position juridique d’ un fonctionnaire, ce qui n’ est pas le cas de simples lettres d’ information contenant seulement des renseignements administratifs, telle une note qui se limite à informer l’ intéressé de l’ entrée en vigueur et du contenu d’ une nouvelle réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes.

2. Dans le cadre d’ un recours introduit en vertu de l’ article 91 du statut, le Tribunal n’ est compétent que pour contrôler la légalité d’ un acte faisant grief au requérant et ne saurait, en l’ absence d’ une mesure d’ application particulière, se prononcer dans l’ abstrait sur la légalité d’ une norme à caractère général, telle la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes.

3. L’ article 184 du traité est l’ expression d’ un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d’ obtenir l’ annulation d’ une décision qui la concerne directement et individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs, constituant la base juridique de la décision attaquée. Par conséquent, cette exception ne saurait être limitée aux actes ayant la forme d’ un règlement, seul visé à l’ article 184, mais doit recevoir une interprétation large en ce sens qu’ elle englobe tous les actes d’ ordre général.

Or, la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes, prise en exécution de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, régit en substance le remboursement des différents frais de maladie et présente un caractère général, étant donné qu’ elle s’ applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’ égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite. Par conséquent, bien qu’ elle ne se présente pas sous la forme d’ un règlement, cette réglementation peut faire l’ objet d’ une exception d’ illégalité.

La portée d’ une exception d’ illégalité doit cependant être limitée à ce qui est indispensable à la solution du litige. Ainsi, l’ acte général dont l’ illégalité est soulevée doit être applicable, directement ou indirectement, à l’ espèce qui fait l’ objet du recours, et il doit exister un lien juridique direct entre la décision individuelle attaquée et l’ acte général en question.

4. Le statut ne contenant pas toutes les normes applicables dans le domaine de la sécurité sociale des fonctionnaires, les institutions des Communautés sont habilitées, en vertu de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, à adopter, d’ un commun accord, des dispositions en marge du statut lui-même. Cette habilitation est conforme aux principes du traité. En effet, il ne s’ agit pas d’ un transfert de compétence législative proprement dite du Conseil aux autres institutions, étant donné que l’ adoption de la réglementation présuppose le commun accord des institutions, donc également celui du Conseil qui a accordé l’ habilitation.

L’ article 72, paragraphe 1, du statut laisse aux auteurs de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes le soin de préciser le champ d’ application de cette couverture en édictant des dispositions supplémentaires, dans le respect des dispositions du statut et des objectifs que celui-ci poursuit.

5. L’ article 72 du statut ne contenant pas de règles spécifiques en ce qui concerne le remboursement de frais de garde-malade, il est évident que la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes doit contenir de telles règles à leur sujet.

L’ article 72 ne confère pas aux bénéficiaires du régime commun d’ assurance maladie le droit d’ obtenir, dans les différentes hypothèses qu’ il envisage, un remboursement des frais exposés de 80 %, de 85 % ou de 100 %. Ces taux fixent la limite maximale des remboursements et n’ imposent pas aux institutions l’ obligation de rembourser les intéressés, dans tous les cas, dans les proportions indiquées.

La fixation de plafonds de remboursement par les dispositions d’ exécution, dans le but de sauvegarder l’ équilibre financier du régime d’ assurance maladie, ne constitue pas une violation de l’ article 72 du statut pour autant qu’ en établissant ces plafonds les institutions communautaires respectent le principe de couverture sociale qui est à la base de cet article.

6. Ni l’ article 72, paragraphe 1, du statut, ni la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes ne prévoyant, en matière de frais de garde-malade, de taux de remboursement fixes, mais seulement des taux maximaux, le simple fait que, pendant une certaine période, l’ application qui a été faite par les institutions communautaires de cet article a été particulièrement favorable aux intéressés n’ est pas de nature à avoir créé un droit acquis dans leur chef. Par ailleurs, étant donné que, dans le domaine du remboursement des frais de maladie, il y a lieu de procéder à une constante adaptation des règles applicables en fonction des ressources disponibles et de la nécessité de sauvegarder un équilibre financier, la diminution pour l’ avenir du remboursement pour certaines prestations ne se heurte pas au principe du respect de la confiance légitime.

7. L’ obligation d’ assistance, énoncée par l’ article 24 du statut, vise la défense des fonctionnaires, par l’ institution, contre des agissements de tiers et non contre les actes émanant d’ elle-même, dont le contrôle relève d’ autres dispositions du statut.

8. La concordance exigée entre les moyens avancés dans la réclamation et ceux soulevés dans le recours a pour but de permettre et de favoriser un règlement amiable du différend surgi entre le fonctionnaire et l’ administration. Pour satisfaire à cet impératif, il importe que cette dernière soit en mesure de connaître les griefs et desiderata de l’ intéressé. Tel est le cas de moyens ne figurant pas explicitement dans la réclamation, mais dans des réclamations antérieures auxquelles elle renvoie.

9. La discrimination consiste à traiter de manière identique des situations qui sont différentes ou de manière différente des situations qui sont identiques.

En ce qui concerne l’ assurance maladie, les fonctionnaires retraités ne sauraient être considérés comme une catégorie à part d’ assurés qui, du seul fait qu’ elle est constituée d’ anciens fonctionnaires, serait plus exposée au risque d’ être confrontée à des frais de garde-malade. Il s’ agit là plutôt d’ un risque général de la vie qui peut se réaliser dans le chef de tout fonctionnaire, en activité ou à la retraite. S’ il est vrai que les fonctionnaires risquent d’ être confrontés, à un âge plus avancé, à des frais plus élevés causés par une maladie de longue durée, on peut légitimement s’ attendre à ce qu’ ils aient pris, en temps utile, les précautions financières adéquates. En effet, eu égard au libellé de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, qui ne prévoit que des taux de remboursement maximaux, l’ adoption de telles mesures préventives était et demeure indiquée, une réduction du taux de remboursement étant possible à tout moment. Le fait d’ avoir omis de prendre des mesures de cette nature ne saurait être imputé, sous le couvert d’ une discrimination, ni aux auteurs du statut ni à ceux de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes.

10. Le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché, étant entendu que, lorsqu’ un choix s’ offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante.

Appliqué aux dispositions fixant les taux et modalités de remboursement des frais de maladie dans le cadre de la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes, il n’ est susceptible, compte tenu de la complexité des problèmes posés par la sauvegarde du nécessaire équilibre financier du régime commun qui conduit à reconnaître un large pouvoir d’ appréciation aux institutions communautaires, de conduire à la constatation de l’ illégalité de mesures de réduction des remboursements que si celles-ci se révèlent manifestement inappropriées, dans leur principe ou dans leur résultat, au regard de l’ objectif d’ économie qui les inspire.

Parties


Dans les affaires jointes T-6/92 et T-52/92,

Andreas Hans Reinarz, ancien fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, représenté par Me Francis Herbert, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l’ étude de Me Carlos Zeyen, 67, rue Ermesinde,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Hendrik van Lier, membre du service juridique, en qualité d’ agent, assisté de Me Jules Stuyck, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Nicola Annecchino, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet, respectivement, l’ annulation de la note de la Commission du 27 mars 1991, dans la mesure où elle concerne les modalités de remboursement à l’ avenir des frais de garde-malade exposés par le requérant pour son épouse (affaire T-6/92), et celle de la décision de la Commission du 5 juillet 1991, par laquelle une retenue de 6 300 BFR a été effectuée sur le remboursement de certains frais de garde-malade exposés par le requérant pour son épouse (affaire T-52/92),

LE TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. C. W. Bellamy, président, H. Kirschner et A. Saggio, juges,

greffier: M. H. Jung

vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 26 mai 1993,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


Faits à l’ origine des recours, cadre juridique et déroulement de la procédure

1 Le requérant, M. Andreas Hans Reinarz, ancien fonctionnaire (de grade A 2) de la Commission, a cessé définitivement ses fonctions auprès des Communautés le 1er mai 1973. Selon son passeport néerlandais et un permis de conduire émis par les autorités de Wasa British Columbia (Canada) (annexe C 8 à la requête T-6/92 et annexe 1 à la réplique T-52/92), il est actuellement domicilié au Canada, où, selon les fiches de renseignements personnels contenues dans son dossier individuel, se trouve depuis 1973 son « adresse privée ».

2 En juin 1988, pendant un séjour chez ses enfants à Dworp (Beersel), en Belgique, son épouse a été atteinte d’ une maladie grave. Depuis lors, elle est soignée à Dworp.

3 En raison de cette maladie, le requérant a demandé et obtenu, au titre de l’ article 72, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après « statut »), que les frais de garde-malade exposés pour son épouse soient remboursés à 100 %. Cette prise en charge a été accordée, en dernier lieu, pour la période comprise entre le 15 mai 1991 et le 14 mai 1994.

4 Jusqu’ au 31 décembre 1990, en vertu des points IV, paragraphe 1, deuxième alinéa, et X, paragraphe 2, sous a), de l’ annexe I à la réglementation relative à la couverture des risques de maladie des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après, d’ une part, « annexe I », d’ autre part, « réglementation de couverture »), établie d’ un commun accord par les institutions des Communautés en exécution de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, les remboursements, versés sur autorisation préalable du bureau liquidateur, pour des prestations telles notamment que les services prestés par des gardes-malades étaient limités à un plafond tel – à savoir le double d’ un montant maximal de 4 830 BFR par garde de 24 heures – que le requérant bénéficiait effectivement d’ un remboursement à 100 % des frais de garde-malade.

5 Depuis le 1er janvier 1991, le point IV, paragraphe 1, troisième alinéa, de l’ annexe I prévoit, entre autres pour les prestations de garde-malade, de nouveaux plafonds de remboursement, indiqués au point X. En vertu de la nouvelle rédaction qu’ a reçue celui-ci, le remboursement ne peut être accordé, sur autorisation préalable, que jusqu’ à un plafond de 2 415 BFR par 24 heures pour une première période de 90 jours [point X, paragraphe 2, sous c)]. Au-delà de cette période, le remboursement est limité à un plafond égal au traitement de base d’ un fonctionnaire de grade C 5, échelon 1, diminué d’ un montant égal à 10 % du traitement de base ou de la pension de l’ affilié [point X, paragraphe 2, sous d)]. Enfin, selon le point XV, paragraphe 3, deuxième alinéa, de l’ annexe I, la partie des frais considérée comme excessive par le bureau liquidateur ne donne pas lieu à remboursement. La disposition d’ interprétation relative à cette dernière disposition prévoit, en substance, que les frais dépassant de 50 % le coût correspondant à 100 % des plafonds prévus sont à considérer comme excessifs et ne donnent donc pas lieu à remboursement.

6 Le 29 mars 1991, le requérant, qui séjournait à ce moment-là en Belgique, a reçu à l’ adresse « Hauwaertstraat 52, Dworp », une note datée du 27 mars 1991 et signée par le responsable du bureau liquidateur de la direction générale Personnel et administration de la Commission. Dans son premier alinéa, cette note informait le requérant qu’ il avait obtenu une autorisation préalable, jointe à la note, concernant le remboursement des frais de garde-malade de son épouse, et ce pour une période de 90 jours. Dans ses deuxième et troisième alinéas, elle attirait l’ attention du requérant sur la nouvelle rédaction des points IV et X, susmentionnés, prévoyant un remboursement plafonné à 2 415 BFR par 24 heures pour une période de 90 jours, et l’ informait que, « à l’ issue de cette période, et pour autant qu’ il y ait une nouvelle autorisation préalable, le remboursement prévu est plafonné à un montant égal au traitement de base d’ un fonctionnaire de grade C 5, échelon 1 (actuellement plus ou moins 72 000 BFR), diminué d’ un montant égal à 10 % de votre pension de base ». La note se terminait par le paragraphe suivant: « La présente note vous est adressée pour vous permettre de prendre les dispositions nécessaires pour l’ avenir. » Un extrait des dispositions susmentionnées de la nouvelle réglementation de couverture était joint en version française, la version néerlandaise n’ étant pas encore disponible à l’ époque.

7 Le 30 mars 1991, le requérant a introduit, depuis Dworp, une réclamation, enregistrée le 4 avril 1991 au secrétariat général de la Commission, dans laquelle il faisait valoir, en substance, que la réglementation de couverture en vigueur depuis le 1er janvier 1991 avait pour effet, contrairement aux dispositions de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, de réduire sensiblement le remboursement applicable avant cette date aux bénéficiaires d’ une prise en charge à 100 % par le régime d’ assurance maladie commun aux institutions des Communautés européennes (ci-après « régime commun ») atteints d’ une maladie reconnue comme grave. A cet égard, le requérant relevait « une diminution de plus de 70 % pour la période durant laquelle je suis éloigné du lieu de séjour de mon épouse », ajoutant: « Lorsque je suis présent à Dworp et que je m’ occupe évidemment aussi des soins à dispenser à mon épouse, la réduction s’ élève à la moitié environ. » Il faisait, en outre, grief à la nouvelle réglementation d’ affecter, de manière unilatérale et discriminatoire, la catégorie des assurés (principalement composée de fonctionnaires retraités) pour laquelle le coût des soins ou les frais de rééducation représentent un poste de dépenses très lourd et soutenait que son application portait atteinte aux droits qu’ il avait acquis en vertu du statut.

8 Le 9 juillet 1991, le comité de gestion du régime commun (ci-après « comité de gestion ») a, en vertu de l’ article 16, paragraphe 2, de la réglementation de couverture, adopté un avis sur la réclamation du requérant, dans lequel il a émis des doutes sur la recevabilité de celle-ci au motif qu’ elle ne lui paraissait pas dirigée contre un acte faisant grief, la note litigieuse du 27 mars 1991 ne contenant qu’ une simple information du requérant sur la nouvelle réglementation applicable. Quant au fond, le comité de gestion considérait que cette réglementation ne violait aucun droit acquis du requérant.

9 Le 4 août 1991, la réclamation a fait l’ objet d’ un rejet implicite. Auparavant, par lettre du 12 juin 1991, envoyée depuis « Dworp, Hauwaertstraat 50 », le requérant l’ avait complétée en développant les raisons juridiques qui, à son avis, rendaient illégale « la décision du 27 mars 1991 ».

10 Le 29 octobre 1991, le requérant a reçu, à l’ adresse « Hauwaertstraat 52, Dworp », une note datée du 15 octobre 1991, signée par M. Richardson, directeur de la direction « droits et obligations » de la direction générale Personnel et administration et rédigée comme suit: « L’ examen de votre réclamation a montré qu’ elle était dirigée contre une information … actuellement sans influence sur votre situation juridique et qui ne vous fait pas encore grief. En effet, la lettre de l’ administration vous informe … (et) ne contient pas de décision concrète relative au remboursement … sur la base d’ une demande que vous auriez introduite à cet effet. »

11 C’ est dans ces conditions que, par requête déposée au greffe du Tribunal le 31 janvier 1992, le requérant a formé un recours en annulation contre la décision contenue, à son avis, dans la note du 27 mars 1991 et opérant, selon lui, une réduction des remboursements des frais de garde-malade pour son épouse (affaire T-6/92).

12 Entre-temps, le requérant avait introduit, le 6 mai 1991, auprès du bureau liquidateur une demande de remboursement de frais de garde-malade s’ élevant à 78 750 BFR. Le 7 juillet 1991, il a reçu un paiement de la Commission, daté du 5 juillet 1991, s’ élevant à 72 450 BFR.

13 Par lettre du 30 septembre 1991, envoyée depuis « Dworp, Beersel », le requérant a introduit une réclamation dans laquelle il faisait valoir, d’ une part, qu’ il n’ avait reçu qu’ en août 1991 « le décompte afférent (au paiement) … qui a été envoyé par routine à l’ adresse au Canada » et, d’ autre part, que, outre la première réclamation qu’ il avait introduite le 30 mars 1991 à l’ encontre des modifications de la réglementation de couverture, il souhaitait également contester, par mesure de prudence, la retenue de 6 300 BFR qui avait été opérée, en application de la nouvelle réglementation, sur sa demande de remboursement.

14 Cette réclamation a fait, tout d’ abord, l’ objet d’ un rejet implicite. Toutefois, le 12 mars 1992, la Commission a envoyé une décision explicite de rejet, à l’ adresse « Hauwaertstraat 52, Dworp », que le requérant a reçue le 16 mars 1992. Le rejet était essentiellement motivé par le fait que le remboursement litigieux avait été liquidé conformément à la réglementation applicable et qu’ il ne pouvait pas être question d’ une discrimination à l’ égard des retraités, les conditions de remboursement des frais de garde-malade étant toujours les mêmes, que l’ affilié soit ou non en service actif.

15 C’ est dans ces circonstances que le requérant a introduit, par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 juillet 1992, un second recours en annulation, dirigé, en substance, contre la décision du 5 juillet 1991 par laquelle une retenue de 6 300 BFR avait été effectuée sur sa demande de remboursement (affaire T-52/92).

16 Les procédures écrites ont suivi un cours régulier. Par ordonnance du 30 octobre 1992, le président de la quatrième chambre du Tribunal a joint les deux affaires aux fins de la procédure orale et de l’ arrêt.

17 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’ ouvrir la procédure orale sans procéder à des mesures d’ instruction préalables. Il a toutefois posé des questions à la Commission.

18 A cette occasion, la Commission a, entre autres, produit le texte de l’ avis n 3/89 émis par le comité de gestion le 23 février 1989 et relatif à la révision de la réglementation de couverture, sans toutefois y joindre le texte des différentes propositions de révision, en particulier de celles relatives aux points IV, X, paragraphe 2, et XV de l’ annexe I. Dans les considérants de cet avis, le comité de gestion relevait, entre autres, que, du fait d’ un déséquilibre croissant entre contributions et dépenses au sein du régime commun, un déficit d’ exploitation était apparu au cours des derniers exercices et que, compte tenu des prévisions, le régime risquait d’ avoir épuisé, dans une large mesure, ses excédents cumulés lors de la clôture de l’ exercice 1991. Il soulignait la nécessité de prévoir, par conséquent, le rétablissement de l’ équilibre entre contributions et dépenses et, à cette fin, proposait, entre autres mesures, d’ augmenter la contribution des affiliés et celle des institutions. En même temps, il suggérait diverses modifications de la réglementation de couverture, en particulier, dans le cadre de l’ annexe I, la modification du point X, relatif aux prestations de garde-malade, et du point XV, paragraphe 3, deuxième alinéa, relatif aux frais excessifs.

19 Suite à l’ audience du 26 mai 1993, le requérant a produit, sur la demande du Tribunal, le formulaire joint à la note du 27 mars 1991, par lequel le requérant avait introduit une demande d’ autorisation préalable et sur lequel l’ administration avait marqué son accord.

20 Par décision du 2 juillet 1993, le président a prononcé la clôture de la procédure orale.

Conclusions des parties

21 Dans l’ affaire T-6/92, le requérant conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

à titre principal

— prendre certaines mesures d’ organisation de la procédure (invitant la Commission à préciser la nouvelle réglementation de plafonnement et à en expliquer les raisons et les modalités d’ application);

— déclarer la demande recevable et fondée et, en conséquence,

1) annuler, telle qu’ elle a été communiquée dans la note du 27 mars 1991, la décision par laquelle les remboursements des frais de garde-malade exposés pour l’ épouse du requérant sont réduits de manière drastique;

2) condamner la Commission aux dépens conformément à l’ article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure;

à titre subsidiaire

au cas où il déclarerait la demande non fondée, condamner néanmoins la Commission aux dépens en application de l’ article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure;

à titre plus subsidiaire encore

en cas de rejet du recours, faire application de l’ article 88 du règlement de procédure.

La Commission conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

— déclarer le recours irrecevable;

— subsidiairement, le déclarer non fondé;

— condamner le requérant aux dépens.

22 Dans l’ affaire T-52/92, le requérant conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

à titre principal

— prendre les mêmes mesures d’ organisation de la procédure qu’ il a déjà demandées dans l’ affaire T-6/92;

— déclarer la demande recevable et fondée et, en conséquence;

1) déclarer invalide la disposition du point IV, paragraphe 1, troisième alinéa, de l’ annexe I, relative aux frais de garde-malade visés au point X, paragraphe 2, sous c) et d), et, en conséquence, annuler la décision réduisant de manière drastique les remboursements des frais de garde-malade exposés pour l’ épouse du requérant, telle qu’ elle a été communiquée dans la note du 27 mars 1991 et mise en oeuvre dans la décision du 5 juillet 1991 par laquelle une retenue de 6 300 BFR a été effectuée;

2) condamner la Commission aux dépens conformément à l’ article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure;

à titre subsidiaire

au cas où le Tribunal déclarerait la demande non fondée, condamner néanmoins la Commission aux dépens en application de l’ article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure;

à titre plus subsidiaire encore

en cas de rejet du recours, faire application de l’ article 88 du règlement de procédure.

La Commission conclut à ce qu’ il plaise au Tribunal:

— déclarer le recours irrecevable;

— subsidiairement, le déclarer non fondé;

— condamner le requérant aux dépens.

Sur la recevabilité du recours dans l’ affaire T-6/92

Arguments des parties

23 La Commission, sans soulever une exception formelle d’ irrecevabilité au sens de l’ article 114 du règlement de procédure, conteste la recevabilité du recours sous deux aspects: l’ observation des délais et l’ existence d’ un acte faisant grief.

24 Quant à l’ observation des délais, elle soutient que le recours introduit le 31 janvier 1992 contre la note du 27 mars 1991 n’ a pas été formé dans le délai de trois mois prescrit à l’ article 91, paragraphe 3, du statut, étant donné que ce délai a commencé à courir le 4 août 1991, date du rejet implicite de la réclamation du requérant. En effet, la note de M. Richardson du 15 octobre 1991 ne saurait être qualifiée de décision explicite de rejet de la réclamation du requérant, en ce qu’ elle ne ferait que répéter le point de vue de la Commission selon lequel la note antérieure du 27 mars 1991 se limitait à fournir des informations et ne comportait pas de décision. En ce qui concerne la lettre du 12 juin 1991, « introduite … pour compléter la réclamation » initiale du requérant, la Commission estime que ce complément ne peut avoir de signification autonome pour le calcul des délais.

25 Quant à la nature juridique de la note du 27 mars 1991, la Commission fait valoir qu’ il ne s’ agit pas d’ un acte faisant grief, le préjudice que le requérant a pu éventuellement subir découlant directement de la modification de la réglementation applicable, laquelle serait un acte administratif de portée générale. De toute évidence, l’ autorisation préalable accordée par cette note ne léserait pas le requérant, qui, d’ ailleurs, ne verrait, dans sa requête, un acte lui faisant grief que dans le passage de la note qui l’ informe des conséquences juridiques attachées à la nouvelle réglementation.

26 A cet égard, la Commission, renvoyant à la jurisprudence de la Cour (voir les arrêts du 17 juillet 1959, Phoenix-Rheinrohr/Haute Autorité, 20/58, Mannesmann e.a./Haute Autorité, 23/58, et Snupat/Haute Autorité, 32/58 et 33/58, Rec., respectivement, p. 163, 253 et 275, ainsi que les arrêts du 28 mai 1970, Richez-Parise e.a./ Commission, 19/69, 20/69, 25/69 et 30/69, Rec. p. 325, point 3, et du 9 juillet 1970, Fiehn/Commission, 23/69, Rec. p. 547, point 3), rappelle que les communications qui donnent une interprétation d’ actes existants ne sont pas susceptibles de recours, ce qui vaudrait, à plus forte raison, pour les communications, telles que la note litigieuse en l’ espèce, dans lesquelles l’ autorité ne fait que mentionner une réglementation modifiée.

27 La Commission souligne qu’ en réalité le requérant cherche uniquement à invoquer la prétendue illégalité des dispositions modifiées de la réglementation de couverture. Comme celle-ci n’ est pas une décision dont il est destinataire et qu’ elle ne peut non plus être considérée comme une décision le concernant directement et individuellement au sens de l’ article 173, deuxième alinéa, du traité CEE, le recours en annulation qu’ il formerait ainsi contre elle serait, de l’ avis de la Commission, en tout état de cause irrecevable, ainsi qu’ il résulterait d’ une jurisprudence constante de la Cour depuis son arrêt du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission (25/62, Rec. p. 197, 223, 224).

28 Le requérant répond, au sujet des délais, que tout indique que la note de M. Richardson du 15 octobre 1991 constitue effectivement une décision explicite de rejet de sa réclamation: d’ une part, sa réclamation aurait été soumise, en application de l’ article 16 de la réglementation de couverture, au comité de gestion pour avis et aurait fait l’ objet d’ un tel avis; la procédure choisie aurait donc été celle prévue pour la prise d’ une décision sur une réclamation; d’ autre part, le libellé de la note du 15 octobre 1991 et la qualité administrative et hiérarchique de son signataire établiraient, de toute évidence, qu’ il s’ agit là d’ une décision explicite de rejet, laquelle, conformément à l’ article 91, paragraphe 3, deuxième tiret, dernière phrase, du statut, faisait à nouveau courir le délai de recours.

29 Quant à la réclamation « complémentaire » du 12 juin 1991, le requérant confirme qu’ elle a été introduite pour compléter la première dans le délai prévu à cet effet par l’ article 90 du statut. Puisque, de l’ avis du requérant, le recours dirigé contre le rejet, par la note du 15 octobre 1991, de sa réclamation ainsi complétée a été introduit en temps utile, il ne serait pas nécessaire de s’ étendre davantage sur ce point.

30 En ce qui concerne la question de savoir si la note du 27 mars 1991 comporte une décision susceptible de recours, le requérant estime que la jurisprudence citée par la Commission n’ est pas pertinente. La note attaquée contiendrait un acte faisant grief, étant donné qu’ elle émane du responsable du bureau liquidateur, lequel, selon l’ article 20 de la réglementation de couverture, est chargé de recevoir et de liquider les demandes de remboursement de frais et d’ exécuter les paiements y afférents, ainsi que de donner suite aux demandes d’ autorisation préalable. En outre, elle serait adressée au requérant et se rapporterait spécifiquement au remboursement des frais de garde-malade pour son épouse, nommément désignée. Enfin, le requérant serait informé des modifications intervenues dans la réglementation de couverture ayant un impact direct sur le remboursement de ce type de frais, et cela dès la première période de 90 jours, afin de lui « permettre de prendre les dispositions nécessaires pour l’ avenir ».

31 Le requérant considère que la jurisprudence existante confirme le caractère d’ acte faisant grief de la note attaquée. A cet égard, il renvoie à l’ arrêt de la Cour du 1er février 1979, Deshormes/Commission (17/78, Rec. p. 189), et aux conclusions de l’ avocat général M. Capotorti dans l’ affaire Curtis/Commission et Parlement (sous l’ arrêt de la Cour du 14 juin 1981, 167/80, Rec. p. 1499, 1512, 1534, 1535). Le requérant en déduit que, si l’ on applique ces principes au cas d’ espèce, on doit constater que la note du 27 mars 1991 l’ avisait effectivement de la façon dont la nouvelle réglementation de couverture serait mise en oeuvre à son égard en ce qui concerne l’ application, sous réserve d’ autorisation préalable, du point X de l’ annexe I. Il souligne que l’ existence à son égard d’ un grief au niveau potentiel est confirmée par la précision, figurant dans la note, selon laquelle les informations qui lui sont données ont pour but de lui permettre de prendre les dispositions nécessaires pour l’ avenir.

32 A l’ audience, le requérant a souligné, quant au problème de l’ existence d’ un acte faisant grief, que la note du 27 mars 1991, malgré sa présentation sous forme de communication générale, était, en fait, un acte le concernant individuellement. En effet, pour autant qu’ elle limite à 90 jours l’ autorisation préalable accordée, cette note constituerait une première mesure d’ exécution de la nouvelle réglementation, laquelle avait introduit, dans le point X, paragraphe 2, sous c), de son annexe I, une limitation dont l’ application au requérant entraînerait une dégradation de sa situation. Cette limitation n’ ayant pas existé dans le système précédent, le fait que l’ autorisation préalable n’ a été accordée au requérant que pour 90 jours lui ferait grief.

33 Le requérant a ajouté, à l’ audience, que ses deux recours doivent être considérés comme un ensemble et que c’ est le système même de la nouvelle réglementation, pris dans sa cohérence chronologique, qu’ il attaque en tant que tel. En effet, la note du 27 mars 1991, en ce qu’ elle invitait le requérant à « prendre les dispositions nécessaires pour l’ avenir », n’ aurait pas visé la seule première période de 90 jours, mais l’ ensemble de la période pendant laquelle l’ épouse du requérant, dont l’ état de santé n’ aurait guère de chance de s’ améliorer de sitôt, serait souffrante. Renvoyant dans ce contexte au décompte du 20 mai 1992, versé au dossier en annexe 2 à la réplique dans l’ affaire T-52/92, il a fait valoir que celui-ci constitue une mesure d’ application du nouveau point X, paragraphe 2, sous d), de l’ annexe I, concernant la période postérieure aux premiers 90 jours, dont la légalité doit également être examinée dans le cadre du présent litige. En effet, l’ on ne saurait exiger de lui qu’ il attaque séparément toutes les mesures d’ application particulières de la réglementation – c’ est-à-dire tous les décomptes de remboursement -, une telle exigence allant à l’ encontre de toute idée d’ économie de procédure et ne facilitant certainement ni le travail de la Commission ni celui du Tribunal et des avocats.

34 La Commission, pour sa part, a répété à l’ audience son point de vue selon lequel la note du 27 mars 1991 était une simple lettre d’ information. Elle a ajouté que, à cette époque, elle ne pouvait pas fournir une information complète sur la nouvelle réglementation de couverture, la version néerlandaise de cette réglementation n’ étant pas encore disponible. Elle aurait néanmoins pris soin de prévenir le requérant de la teneur des nouvelles dispositions afin d’ attirer son attention sur les conséquences qui le concernaient directement. Quant à l’ autorisation préalable jointe à la note litigieuse, la Commission a relevé que la limitation à 90 jours de l’ octroi de cette autorisation n’ avait pas été attaquée au cours de la procédure écrite. Ce ne serait qu’ à l’ audience que le requérant aurait mentionné, pour la première fois, ce point.

Appréciation du Tribunal

35 Il y a lieu de rappeler que tout recours en annulation formé par un fonctionnaire contre l’ institution communautaire dont il relève n’ est recevable, selon l’ article 91, paragraphe 1, du statut, que s’ il est dirigé contre un acte faisant grief. Selon une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, seuls font grief les actes qui sont susceptibles d’ affecter directement la position juridique d’ un fonctionnaire, ce qui n’ est pas le cas de simples lettres d’ information contenant seulement des renseignements administratifs (voir, par exemple, l’ arrêt de la Cour du 10 décembre 1969, Grasselli/Commission, 32/68, Rec. p. 505, point 7, les ordonnances du Tribunal du 4 juillet 1991, Herremans/Commission, T-47/90, Rec. p. II-467, points 21 et 22, et du 11 mai 1992, Whitehead/Commission, T-34/91, Rec. p. II-1723, point 22, ainsi que l’ arrêt du Tribunal du 3 avril 1990, Pfloeschner/Commission, T-135/89, Rec. p. II-153, point 14). Il convient, par conséquent, d’ examiner les principales dispositions de la note attaquée du 27 mars 1991, afin de déterminer sa nature juridique.

36 Le premier alinéa de la note incriminée renvoie à une autorisation préalable, jointe en annexe, qui a été octroyée pour une période de 90 jours et qui concerne le remboursement de frais de garde-malade devant être exposés pour l’ épouse du requérant. A cet égard, il y a lieu de constater d’ abord que, dans la mesure où les frais de garde-malade ne sont susceptibles d’ être remboursés, aux termes du point X, paragraphe 2, sous c), de l’ annexe I, que sur autorisation préalable, l’ octroi de cette dernière constitue une mesure favorable à l’ intéressé, laquelle ne saurait faire, en tant que telle, l’ objet d’ un recours.

37 Toutefois, le requérant a soutenu, lors de l’ audience, que l’ autorisation préalable mentionnée dans la note incriminée constituait à son égard le premier acte d’ exécution individuel de la nouvelle réglementation de couverture et que cet acte lui faisait grief en raison de la limitation à 90 jours qu’ il comportait, alors que, sous l’ empire de la réglementation antérieure, la même autorisation lui avait été accordée pour une durée plus longue s’ élevant à six mois. Sous cet aspect, il convient de relever que, si l’ autorisation en cause a pu constituer, à l’ égard du requérant, la première mesure d’ application concrète de la nouvelle réglementation, cette mesure ne déterminait cependant pas encore le taux de remboursement effectif des frais de garde-malade qu’ il aurait éventuellement à exposer. En effet, ce taux n’ était pas encore connu au moment de l’ octroi de l’ autorisation préalable, mais dépendait de facteurs extérieurs à l’ administration. Dans ces circonstances, l’ autorisation en cause présente davantage les caractéristiques d’ un acte préparatoire précédant le remboursement ultérieur de frais de garde-malade non encore engagés.

38 Cependant, il ne paraît pas nécessaire de trancher cette question. Même si l’ autorisation en cause devait être considérée comme un acte faisant grief, il y a lieu de relever que les conclusions de la requête ne sont nullement dirigées contre elle et qu’ elle ne constitue donc pas l’ objet du litige au sens de l’ article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure. En effet, le requérant ne la mentionne pas, à la page 6 de sa requête dans l’ affaire T-6/92, comme faisant partie de l’ objet du litige, pas plus qu’ il ne l’ a jointe à ladite requête comme acte dont l’ annulation est demandée, ainsi que le requiert l’ article 44, paragraphe 4, du règlement de procédure. Enfin, l’ autorisation en cause n’ a pas été attaquée dans la réclamation introduite le 30 mars 1991. Il s’ ensuit que le fait, pour le requérant, de l’ avoir attaquée pour la première fois lors de l’ audience ne saurait avoir eu pour effet d’ y étendre l’ objet de son recours, cette extension étant intervenue hors de tout délai de recours, sans respect des formalités prévues à la disposition précitée du règlement de procédure et sans avoir été précédée de la procédure précontentieuse prescrite par le statut.

39 En ce qui concerne les deuxième, troisième et quatrième alinéas de la note incriminée du 27 mars 1991, l’ analyse de ces passages montre qu’ ils se limitent à informer le requérant de l’ entrée en vigueur de la nouvelle réglementation de couverture et, en particulier, des dispositions pertinentes pour sa situation. Cette information était, d’ ailleurs, particulièrement indiquée dans le cas du requérant, étant donné que, au début de 1991, la version néerlandaise de la nouvelle réglementation n’ était pas encore disponible. En fait, les renseignements fournis dans les deuxième et troisième alinéas de la note incriminée correspondent à une communication, dépourvue de tout commentaire, du texte même des dispositions pertinentes de la nouvelle réglementation. La seule mention allant au-delà d’ un résumé du contenu de ces dispositions consiste dans la précision chiffrée du plafond égal au traitement de base actuel d’ un fonctionnaire de grade C 5, échelon 1, visé au point X, paragraphe 2, sous d), de l’ annexe I. Cette précision, tirée du tableau des traitements mensuels de base établi à l’ article 66 du statut, était particulièrement intéressante pour un fonctionnaire retraité. Il s’ ensuit que les passages analysés ne contenaient que des renseignements dépourvus de tout caractère décisionnel.

40 Cette appréciation juridique est étayée par les arrêts Grasselli/Commision, précité, points 1 et 5 à 7, et Pfloeschner/Commission, précité, point 14, dans lesquels il a été jugé que des renseignements administratifs fournis, à titre indicatif, sous forme soit d’ un tableau explicatif des droits du fonctionnaire intéressé, soit d’ un décompte provisoire, ne sauraient être qualifiés d’ actes faisant grief.

41 Enfin, le dernier alinéa de la note du 27 mars 1991 ne contient pas non plus d’ élément décisionnel faisant grief au requérant. En effet, bien que ce passage s’ adresse directement et individuellement au requérant, la Commission se borne à y indiquer les motifs pour lesquels elle lui a fourni les renseignements susmentionnés, à savoir afin de lui permettre de prendre les dispositions nécessaires pour l’ avenir. Loin d’ affecter de façon positive ou négative la situation juridique du requérant, cette phrase, lue dans son contexte, s’ apparente plutôt à une formule de politesse, d’ ailleurs superflue pour un fonctionnaire prudent et averti qui, informé de l’ entrée en vigueur d’ une nouvelle réglementation applicable à sa situation personnelle, doit examiner, de sa propre initiative et dans son propre intérêt, les possibilités ou la nécessité de prendre certaines mesures pour l’ avenir.

42 Cette conclusion ne saurait être infirmée par la jurisprudence citée, dans ce contexte, par le requérant. En effet, dans l’ affaire Deshormes/Commission, précitée, la requérante était confrontée à une note de l’ administration qui avait rejeté sa demande visant à ce que certaines périodes soient prises en considération dans le calcul de ses droits à pension (point I de la partie en fait, Rec. p. 191). Cette note constituait donc un acte administratif à caractère décisionnel (point 10 de l’ arrêt), ce en quoi elle se distingue fondamentalement de la note incriminée en l’ espèce.

43 Dans la mesure où le requérant fait encore valoir que c’ est le système de la nouvelle réglementation de couverture en tant que tel qu’ il attaque par ses deux recours, qui, à son avis, doivent être considérés comme un ensemble, il suffit de constater que, dans le système des voies de recours prévu par l’ article 179 du traité CEE et par les articles 90 et 91 du statut, un acte de portée générale, tel que la réglementation de couverture arrêtée par les institutions communautaires en exécution de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, ne peut pas faire l’ objet d’ un recours en annulation.

44 Il résulte de tout ce qui précède que le recours dans l’ affaire T-6/92 doit être rejeté comme irrecevable, sans qu’ il soit nécessaire d’ examiner la question de savoir si ce recours a été formé dans le délai prévu à l’ article 91, paragraphe 3, du statut.

Sur la recevabilité du recours dans l’ affaire T-52/92

Arguments des parties

45 La Commission, sans soulever une exception formelle d’ irrecevabilité au sens de l’ article 114 du règlement de procédure, estime que le recours est irrecevable pour inobservation des délais. En effet, le requérant ayant reçu le 16 mars 1992 la décision portant explicitement rejet de sa réclamation, son recours introduit le 13 juillet 1992 aurait été formé plus de trois mois après la notification de cette décision (article 90, paragraphe 3, du statut). Si le requérant prétend que le délai normal de trois mois doit, du fait de sa résidence habituelle au Canada, être prorogé d’ un mois en raison de la distance, conformément aux dispositions combinées de l’ article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal et de l’ article 1er, dernier tiret, de l’ annexe II au règlement de procédure de la Cour, il ne démontrerait cependant pas qu’ il réside (toujours) au Canada.

46 Comme le requérant ne conteste pas avoir reçu, à Dworp, son lieu de résidence en Belgique, la décision du 12 mars 1992 rejetant sa réclamation, il ne peut, de l’ avis de la Commission, prétendre au bénéfice d’ une prorogation de délai en raison de la distance. Cette solution s’ imposerait d’ autant plus que le requérant lui-même adressait encore au président de la Commission le 30 septembre 1991 depuis Dworp/Beersel une réclamation en cette même matière. La Commission aurait donc été en droit de considérer que le requérant était d’ accord pour recevoir les décisions le concernant à son adresse en Belgique. Par conséquent, elle aurait légitimement pu s’ attendre à ce que le requérant n’ introduise plus de recours en annulation après le 16 juin 1992. Le délai pour l’ introduction d’ un recours étant d’ ordre public, la Commission estime ne pouvoir en faire abstraction en l’ espèce.

47 Le requérant rétorque qu’ il a établi sa résidence au Canada. Cela ressortirait de son passeport néerlandais ainsi que de son permis de conduire canadien, dont il a versé copie au dossier (annexe 1 à la réplique), en soulignant que ces pièces accompagnaient déjà la requête dans l’ affaire T-6/92. Or, la Commission ne contesterait pas, dans le cadre de cette première affaire, le fait qu’ il demeure hors d’ Europe.

48 En réponse à une question posée par le Tribunal après la clôture de la procédure écrite, la Commission a déclaré qu’ elle n’ était pas en mesure de fournir, au soutien de son allégation selon laquelle le requérant a sa résidence habituelle en Belgique, des éléments de fait ou de droit supplémentaires par rapport aux faits rapportés dans ses mémoires et qu’ elle s’ en remettait, à cet égard, à la sagesse du Tribunal.

Appréciation du Tribunal

49 Il y a lieu de rappeler, tout d’ abord, que le recours a été introduit le 13 juillet 1992, c’ est-à-dire plus de trois mois après la réception, intervenue le 16 mars 1992, de la décision portant rejet de la réclamation du requérant. Par conséquent, il ne saurait être recevable que si le délai de recours a été – en vertu des dispositions combinées de l’ article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal et de l’ article 1er, dernier tiret, de la décision sur les délais de distance, constituant l’ annexe II au règlement de procédure de la Cour – prorogé d’ un mois en raison du fait que le requérant avait sa résidence habituelle, comme il le prétend, au Canada.

50 Considérant qu’ une décision sur le lieu de la ou des résidences habituelles du requérant au Canada et/ou en Belgique exigerait des vérifications factuelles difficiles, alors que ce n’ est que dans l’ hypothèse où le recours s’ avérerait fondé que la question de sa recevabilité devrait être tranchée, le Tribunal estime opportun d’ examiner d’ abord le fond de l’ affaire T-52/92.

Sur le fond du recours dans l’ affaire T-52/92

Quant à l’ objet du recours

51 Compte tenu de la formulation assez large des conclusions dans la requête, il y a lieu de déterminer d’ abord l’ objet du recours. Or, ce dernier étant un recours en annulation d’ un acte faisant grief, le Tribunal ne saurait examiner que les conclusions présentées à titre principal, visant à l’ annulation du décompte du 5 juillet 1991, dans la mesure où celui-ci fait apparaître une retenue de 6 300 BFR. A cet égard, le Tribunal constate que, ainsi que les parties l’ ont reconnu à l’ audience, cette retenue ne se réfère qu’ à la première période de 90 jours au sens de la nouvelle réglementation de couverture. Par conséquent, elle a été opérée sur la seule base du point X, paragraphe 2, sous c), et non pas sous d), de l’ annexe I. Par ailleurs, la pertinence de ce seul point c) a déjà été soulignée aux pages 3 et 4 de la décision du 12 mars 1992 portant rejet de la réclamation du requérant.

52 Par conséquent, le Tribunal ne peut examiner, dans le cadre de l’ affaire T-52/92, ni « la décision réduisant de manière drastique les remboursements des frais de garde-malade pour l’ épouse du requérant, telle qu’ elle a été communiquée dans la note du 27 mars 1991 et mise en oeuvre dans la décision du 5 juillet 1991 », ni l’ affirmation du requérant, selon laquelle, sous l’ empire de la nouvelle réglementation de couverture, le remboursement des frais de garde-malade qu’ il est tenu d’ exposer « est ramené à 35,77 % pendant les 90 premiers jours et à 21,72 % après cette période » (p. 5 de la réplique). En effet, s’ il peut, le cas échéant, arriver que, par le jeu des plafonds prévus, le remboursement de frais exposés soit effectivement ramené à un taux aussi bas, cette hypothèse n’ est pas celle du remboursement attaqué en l’ espèce, qui, en dépit de la retenue litigieuse de 6 300 BFR, s’ élève à 92 % des frais exposés. Dans ce contexte, le Tribunal rappelle qu’ il a déjà jugé dans ses arrêts du 12 juillet 1991, Pincherle/Commission (T-110/89, Rec. p. II-635, points 30 et 33), et du 25 février 1992, Barassi/Commission (T-41/90, Rec. p. II-159, point 38), que le juge communautaire n’ est compétent que pour contrôler la légalité d’ un acte faisant grief au fonctionnaire requérant et ne saurait, en l’ absence d’ une mesure d’ application particulière, se prononcer dans l’ abstrait sur la légalité d’ une norme à caractère général. Il s’ ensuit que le requérant est irrecevable à attaquer la réglementation de couverture dans la mesure où celle-ci ne concerne pas la décision individuelle attaquée.

53 Il convient d’ ajouter que le Tribunal ne saurait non plus apprécier la légalité du décompte du 20 mai 1992, joint en annexe 2 à la réplique. Celui-ci fait ressortir que – en application des points IV, paragraphe 1, troisième alinéa, X, paragraphe 2, sous d), et XV, paragraphe 3, deuxième alinéa, de l’ annexe I, de l’ article 8, paragraphe 2, de la nouvelle réglementation de couverture ainsi que de la disposition d’ interprétation relative au point XV, paragraphe 3, deuxième alinéa, de ladite annexe I – une seconde demande de remboursement de frais de garde-malade s’ élevant à 132 928 BFR a été introduite et que le remboursement y afférent a été limité à un montant de 41 881 BFR. Or, ce décompte n’ a pas été attaqué dans la requête. Les dispositions sur la base desquelles il a été établi ne sont pas les mêmes que celles sur lesquelles s’ appuie le décompte du 5 juillet 1991, qui a fait l’ objet d’ une procédure précontentieuse et est expressément visé dans la requête.

Quant aux moyens soulevés par le requérant

54 A l’ appui de son recours, le requérant invoque cinq moyens tirés, respectivement, d’ une violation de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, d’ une atteinte à ses droits acquis, d’ une violation du devoir général de sollicitude, d’ une violation du principe de non-discrimination et d’ une violation du principe de proportionnalité. Dans un sixième moyen, il soulève, en outre, une exception d’ illégalité tendant à ce que le Tribunal dise pour droit que les dispositions du point IV, paragraphe 1, troisième alinéa, et du point X, paragraphe 2, sous c) et d), de l’ annexe I sont invalides pour les raisons développées dans les cinq premiers moyens et que ces dispositions ne peuvent donc pas servir de base juridique à la décision attaquée.

55 Dans ce contexte, la Commission considère que la réglementation de couverture n’ est ni une décision dont le requérant était le destinataire ni un acte qui le concerne directement et individuellement au sens de l’ article 173, deuxième alinéa, du traité. Le requérant ne pourrait pas non plus invoquer une exception d’ illégalité, sur la base de l’ article 184 du traité CEE, à l’ égard de cette réglementation. Une telle exception ne pourrait être invoquée que de manière incidente, et non de manière autonome. Au surplus, il serait manifeste que l’ argumentation du requérant concernant l’ illégalité de la réglementation de couverture ne se situe pas dans le cadre d’ une exception d’ illégalité, mais bien plutôt dans celui d’ une critique de l’ arrêt, précité, du Tribunal dans l’ affaire Barassi/Commission.

56 En ce qui concerne la recevabilité de l’ exception d’ illégalité soulevée, au titre de l’ article 184 du traité par le requérant à l’ encontre de la réglementation de couverture, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour (arrêt du 6 mars 1979, Simmenthal/Commission, 92/78, Rec. p. 777, points 39 à 41), l’ exception d’ illégalité est l’ expression d’ un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d’ obtenir l’ annulation d’ une décision qui la concerne directement et individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs, constituant la base juridique de la décision attaquée. Par conséquent, cette exception ne saurait être limitée aux actes ayant la forme d’ un règlement, seul visé à l’ article 184 du traité, mais doit recevoir une interprétation large en ce sens qu’ elle englobe tous les actes de caractère général. Or, la réglementation de couverture, qui, prise en exécution de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, régit en substance le remboursement des différents frais de maladie exposés par les affiliés du régime commun, a été arrêtée, dans sa version initiale, en 1974 par les institutions des Communautés européennes d’ un commun accord constaté le 31 octobre 1974 par le président de la Cour de justice; elle a fait l’ objet de modifications à plusieurs reprises, dont la dernière remonte à 1991, le commun accord des institutions ayant été constaté par le président de la Cour de justice le 28 novembre 1991. Cette réglementation présente un caractère général, étant donné qu’ elle s’ applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’ égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (arrêts de la Cour du 18 mars 1975, Acton e.a./Commission, 44/74, 46/74 et 49/74, Rec. p. 383, point 7, et du 14 février 1989, Lefebvre Frère et Soeur/Commission, 206/87, Rec. p. 275, point 13). Par conséquent, bien qu’ elle ne se présente pas sous la forme d’ un règlement, cette réglementation peut faire l’ objet d’ une exception d’ illégalité. La Cour l’ a d’ ailleurs elle-même qualifiée de « disposition d’ exécution du statut » et a examiné sa compatibilité avec les dispositions pertinentes du statut, notamment quant à la question de savoir si certaines règles qu’ elle énonce ne vont pas au-delà des limites que le Conseil a posées dans l’ article 72 du statut (arrêts du 20 novembre 1980, Gerin/Commission, 806/79, Rec. p. 3515, point 15, et du 8 mars 1988, Brunotti/Commission, 339/85, Rec. p. 1379, point 13).

57 Cependant, dans la mesure où le requérant n’ a pas limité son exception d’ illégalité au point X, paragraphe 2, sous c), de l’ annexe I, qui est seul à la base du décompte attaqué, mais l’ a étendue au paragraphe 2, sous d), il y a lieu de rappeler que la portée d’ une exception d’ illégalité doit être limitée à ce qui est indispensable à la solution du litige. En effet, la Cour a décidé que l’ article 184 du traité n’ a pas pour but de permettre à une partie de contester l’ applicabilité de quelque acte de caractère général que ce soit à la faveur d’ un recours quelconque. Elle a souligné que l’ acte général dont l’ illégalité est soulevée doit être applicable, directement ou indirectement, à l’ espèce qui fait l’ objet du recours et qu’ il doit exister un lien juridique direct entre la décision individuelle attaquée et l’ acte général en question (arrêts du 31 mars 1965, Macchiorlati Dalmas e Figli/ Haute Autorité, 21/64, Rec. p. 227, 245, et du 13 juillet 1966, Italie/Conseil et Commission, 32/65, Rec. p. 563, 594). Or, en l’ espèce, le décompte incriminé étant basé sur le seul paragraphe 2, sous c), de la disposition en cause, l’ exception d’ illégalité, pour autant qu’ elle vise le paragraphe 2, sous d), s’ étend à une disposition sans incidence pour la solution du litige et ne présentant aucun lien juridique direct avec ce dernier. Dès lors, elle doit, dans cette mesure, être rejetée comme irrecevable.

58 Il convient donc d’ examiner, par rapport aux cinq premiers moyens soulevés par le requérant, la légalité du seul décompte du 5 juillet 1991 et, dans la mesure où il est constant que ce décompte a été établi en application des seules dispositions du point X, paragraphe 2, sous c), de l’ annexe I, la légalité de ces dispositions.

Sur le premier moyen tiré d’ une violation de l’ article 72, paragraphe 1, du statut

Arguments des parties

59 Le requérant soutient que, en vertu de cette disposition, il a droit à bénéficier d’ un remboursement à 100 % des frais qu’ il est effectivement amené à exposer. Or, dans son cas, le remboursement des frais de garde-malade n’ atteindrait, en application de la nouvelle réglementation de couverture, qu’ un pourcentage beaucoup plus bas (respectivement 35,77 % pour les 90 premiers jours et 21,72 % après cette période). Il y aurait là une atteinte manifeste au droit, reconnu par le statut, à un remboursement à 100 % en cas de maladie grave.

60 Dans la mesure où la Commission insiste, dans sa décision rejetant la réclamation du requérant, sur le fait que le remboursement perçu par ce dernier le 7 juillet 1991 s’ élevait à 92 % des frais réellement exposés, le requérant considère cet argument comme dépourvu de pertinence. En effet, d’ une part, un remboursement à concurrence de 92 % serait toujours insuffisant par rapport au taux de 100 % prescrit par le statut et, d’ autre part, la question juridique de principe soulevée en l’ espèce ne saurait être influencée par la circonstance que, grâce aux efforts déployés par le requérant en vue de comprimer les frais à rembourser, ceux-ci auraient été pris en charge, dans un cas isolé, à un taux proche de 100 %.

61 En outre, une prise en charge à 100 % impliquerait manifestement, par rapport à la réglementation générale, un élément d’ intervention supplémentaire, qui serait justifié par la gravité de la maladie. Dans le régime antérieur, cet élément aurait consisté en ce que le plafond prévu en cas de prise en charge à 100 % était fixé au double de celui applicable dans le cas d’ une prise en charge à 80 %. Par contre, selon la nouvelle règle énoncée au point IV de l’ annexe I, le plafond prévu pour les remboursements à 80 % s’ appliquerait aussi aux remboursements à 100 %. Il n’ y aurait donc plus aucune différence entre les deux plafonds. Le fait que la nouvelle réglementation de couverture prévoit en outre une diminution de ce plafond, à concurrence de 10 % du traitement de base ou de la pension de l’ affilié, renforcerait encore la contrariété avec le principe d’ un remboursement à 100 %.

62 Le requérant ajoute que le texte français de l’ article 72, paragraphe 1, du statut se réfère à un remboursement « dans la limite de 80 % », alors que le texte néerlandais prévoit un remboursement « jusqu’ à 80 % maximum ». Ce terme « limite » signifierait que le remboursement est limité à 80 % des frais exposés. En outre, il ressortirait d’ une comparaison du texte néerlandais des dispositions d’ interprétation de la réglementation de couverture relatives au point XV de l’ annexe I avec les autres versions linguistiques que, pour l’ application de l’ article 8, paragraphe 2, de ladite réglementation, le « plafond » doit effectivement être converti sur la base 100 (annexe C 11 à la requête T-52/92), ce qui confirmerait qu’ il faut, à plus forte raison, pratiquer une conversion sur la base 100 dans le cas d’ un remboursement formellement fixé à 100 %.

63 En réponse à l’ argument tiré par la Commission des arrêts Pincherle/Commission et Barassi/Commission, précités, dans lesquels le Tribunal a posé comme principe que les taux de remboursement prévus à l’ article 72, paragraphe 1, du statut constituent des taux maximaux et a reconnu, dans l’ affaire Barassi/Commission, la légalité d’ un remboursement qui ne s’ élevait qu’ à 31 % des frais exposés, le requérant affirme qu’ il y a violation manifeste du principe de couverture sociale sous-jacent à l’ article 72 du statut lorsque, dans le cadre d’ un remboursement fixé en principe à 100 %, le remboursement effectif est ramené, comme en l’ espèce, à un taux de 35 % pendant les 90 premiers jours et de 21 % à l’ issue de cette période. L’ argument tiré par le Tribunal, dans l’ affaire Barassi/Commission, de l’ article 72, paragraphe 3, du statut, qui prévoit un remboursement spécial dans le cas où les frais non remboursés sont particulièrement élevés, est, toujours selon le requérant, inconciliable avec une interprétation systématique et téléologique de cette disposition. D’ une part, celle-ci ne s’ appliquerait qu’ à des situations exceptionnelles, ainsi qu’ il ressort de la procédure spécifique prévue et du pouvoir d’ appréciation reconnu à l’ AIPN à cet égard: l’ affirmation du Tribunal, selon laquelle cette disposition justifierait des mesures d’ exécution qui aboutissent de façon structurelle à un taux de remboursement extrêmement bas, conduirait ainsi à un renversement total de l’ économie générale de l’ article 72 (voir l’ arrêt de la Cour du 5 juillet 1984, Ooms/Commission, 115/83, Rec. p. 2613, point 14). D’ autre part, le raisonnement suivi par le Tribunal ne serait pas valable dans le système spécifique de prise en charge à 100 % en cas de maladie grave: on ne saurait, en effet, admettre que cette prise en charge soit limitée à moins d’ un quart par le biais de dispositions d’ exécution, au motif que, en pareil cas et aux conditions prévues par l’ article 72, paragraphe 3, du statut, l’ AIPN peut accorder sur demande un remboursement spécial. SUITE DES MOTIFS SOUS LE NUM.DOC : 692A0006.1

64 En outre, le requérant fait observer que le raisonnement suivi par le Tribunal au sujet de l’ article 8, paragraphe 5, de la réglementation de couverture (point 38 de l’ arrêt Barassi/Commission, précité) est sujet à caution et ne saurait, en tout état de cause, être transposé au cas d’ espèce. La constatation selon laquelle, suivant cette disposition, l’ application de l’ article 8, paragraphe 2, de la réglementation de couverture, et donc de l’ article 72, paragraphe 3, du statut, est nécessairement liée à une demande reviendrait à obliger l’ intéressé à faire lui-même l’ avance des frais pendant une longue période. En effet, selon la pratique administrative suivie en la matière (annexe 3 à la réplique), l’ assuré ne pourrait introduire une telle demande qu’ à l’ issue d’ une période de référence minimale de douze mois, tout en disposant par ailleurs d’ une nouvelle période de douze mois à cet effet. Des délais aussi longs, surtout dans le cas d’ assurés âgés, ne concorderaient guère avec les principes généraux de bonne administration, d’ autant plus que la demande ainsi introduite serait ensuite soumise aux délais prévus par l’ article 90 du statut, ce qui signifie que son examen pourrait encore traîner quatorze mois en cas de refus, compte tenu du délai de recours.

65 Le requérant soutient encore que, dans son cas spécifique, la possibilité d’ obtenir des remboursements spéciaux est limitée, aux termes de la disposition d’ interprétation relative au point XV de l’ annexe I, aux frais ne dépassant pas de 50 % au maximum les plafonds prévus à l’ annexe I pour le remboursement des frais de garde-malade. Cette limitation serait d’ autant plus frappante qu’ elle renforcerait le traitement discriminatoire réservé aux frais de garde-malade. A cet égard, le requérant renvoie de nouveau au décompte du 20 mai 1992, joint en annexe 2 à la réplique, pour souligner que cette disposition lui a effectivement été appliquée.

66 La Commission répond que l’ article 72, paragraphe 1, du statut dispose uniquement, de façon générale, que les frais de maladie sont remboursés dans la limite de certains pourcentages (80, 85 ou 100 %, selon le cas) et sur la base d’ une réglementation établie d’ un commun accord par les institutions des Communautés. Rien n’ empêcherait donc les Communautés de limiter à des pourcentages inférieurs les prestations de l’ assurance maladie. En outre, ces plafonds ne constitueraient pas le seul critère, car l’ article 72, paragraphe 1, du statut prévoit expressément l’ élaboration de règles spécifiques. Quant au libellé de l’ article 72 du statut, la Commission, qui fait observer que la version française invoquée par le requérant ne jouit d’ aucune priorité, affirme ne pas comprendre comment l’ expression « dans la limite de 80 % » s’ écarterait de son interprétation selon laquelle ce pourcentage constitue un taux maximal.

67 La Commission se réfère, ensuite, aux arrêts Pincherle/Commission et Barassi/Commission, précités, dans lesquels le Tribunal a jugé que les taux de remboursement fixés par l’ article 72 du statut à 80 ou 85 % des frais exposés fixent la limite maximale remboursable, qu’ à défaut de plafond de remboursement établi par le statut, les institutions sont habilitées à fixer des plafonds adéquats en respectant le principe de couverture sociale qui inspire l’ article 72 du statut et que les plafonds d’ application en l’ espèce n’ étaient ni illégaux ni injustes. De l’ avis de la Commission, le même raisonnement s’ applique au régime de prise en charge à 100 %.

68 La Commission ajoute, à titre subsidiaire, que la réglementation de couverture a la même force juridique que le statut lui-même. La règle générale voulant qu’ une disposition ultérieure puisse modifier une disposition antérieure trouverait donc application (lex posterior derogat lege priori).

69 Quant à ce dernier moyen de défense, invoqué à titre subsidiaire par la Commission, le requérant répond – en renvoyant aux articles 212 du traité CEE et 24 du traité instituant un Conseil unique et une Commission unique des Communautés européennes, d’ une part, et à l’ article 72 du statut, d’ autre part, ainsi qu’ aux exigences de publicité prescrites pour les règlements du Conseil – que l’ affirmation de la Commission selon laquelle la réglementation de couverture a la même force juridique que le statut est erronée.

70 A l’ audience, le requérant a indiqué qu’ il pourrait accepter une interprétation de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, selon laquelle le remboursement des frais de maladie doit s’ opérer « aux environs » d’ un pourcentage de 80, 85 ou 100 %, selon les cas.

Appréciation du Tribunal

71 Il y a lieu de relever d’ abord que l’ article 72, paragraphe 1, du statut prévoit que son contenu peut être complété par une « réglementation établie d’ un commun accord par les institutions des Communautés ». Le Conseil, en tant qu’ auteur du statut, est donc parti de l’ idée que le règlement qu’ il a lui-même arrêté – le statut – ne contient pas toutes les normes applicables dans le domaine de la sécurité sociale des fonctionnaires. Il a ouvert – à côté de la possibilité d’ une modification formelle du statut par voie de règlement – une seconde voie distincte pour légiférer en la matière, dont il a confié la responsabilité aux institutions agissant d’ un commun accord. Les institutions, y compris le Conseil lui-même, sont donc habilitées, en vertu de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, à adopter des dispositions en marge du statut lui-même.

72 Cette habilitation est conforme aux principes du traité. En effet, il ne s’ agit pas d’ un transfert de compétence législative proprement dite aux autres institutions, étant donné que l’ adoption de la réglementation présuppose le commun accord des institutions, donc également celui du Conseil qui a accordé l’ habilitation. Ce dernier garde ainsi le pouvoir de bloquer l’ adoption de toute disposition qu’ il considère comme non appropriée.

73 Il convient de rappeler ensuite que la Cour a constaté, de manière générale, que, en prévoyant que le fonctionnaire et son conjoint sont couverts contre les risques de maladie dans la limite d’ un certain pourcentage des frais exposés et sur la base d’ une réglementation commune aux institutions, l’ article 72, paragraphe 1, du statut laisse aux auteurs de cette réglementation le soin de préciser le champ d’ application de cette couverture, dans le respect des dispositions du statut et des objectifs que celui-ci poursuit (arrêt Brunotti/Commission, précité, point 10). La Cour a donc reconnu que la réglementation de couverture peut contenir des dispositions supplémentaires, à condition que celles-ci ne dépassent pas les limites posées par l’ article 72 du statut, et a ainsi réfuté l’ argument selon lequel le Conseil ne pourrait pas déléguer son pouvoir de régler la matière (points 12 et 14 de l’ arrêt précité).

74 Il y a lieu d’ ajouter que ces dispositions supplémentaires peuvent, en principe, comporter aussi des plafonds de remboursement. Ainsi que le Tribunal l’ a déjà jugé, dans son arrêt Barassi/Commission, précité, point 33, à défaut de plafonds de remboursement établis par le statut, les institutions se trouvent habilitées à fixer, dans les dispositions de la réglementation commune, de tels plafonds. Le Tribunal a cependant souligné que les institutions ne sauraient, lors de l’ adoption de dispositions d’ exécution de l’ article 72, paragraphe 1, du statut et, notamment, lors de la fixation de plafonds de remboursement, outrepasser les limites qui sont tracées à leur pouvoir par le principe de couverture sociale qui est à la base de cette disposition du statut.

75 Pour ce qui est du cas d’ espèce, qui concerne le remboursement de frais de garde-malade, il y a lieu de relever que l’ article 72 du statut ne contient aucune règle spécifique à ce domaine. Or, il s’ agit là d’ un domaine particulièrement complexe et important. D’ une part, les frais de garde-malade peuvent atteindre des montants très élevés et, d’ autre part, les prestations nécessaires, dépendant de la nature de la maladie survenue, peuvent avoir un caractère très varié. Par conséquent, il est évident que la réglementation commune doit contenir des règles spécifiques à leur sujet.

76 Le requérant estime que la réglementation de couverture ne saurait légitimement fixer un plafond de remboursement en cas de prise en charge à 100 %, cas prévu par l’ article 72, paragraphe 1, du statut pour les maladies d’ une gravité particulière. Cette affirmation du requérant méconnaît la portée de l’ article 72, paragraphe 1, du statut. En effet, il convient de rappeler que le Tribunal, dans ses arrêts Pincherle/Commission, précité, point 25, et Barassi/Commission, précité, point 32, a déjà jugé que les taux de remboursement de 80 ou de 85 %, prévus à l’ article 72, paragraphe 1, du statut, doivent, eu égard aux termes de cette disposition, être interprétés en ce sens qu’ ils constituent la limite maximale remboursable et n’ impliquent donc aucune obligation de rembourser les assurés ou les affiliés dans cette proportion dans tous les cas. Il y a lieu d’ ajouter que ce raisonnement conserve toute sa validité lorsque le taux de 100 %, prévu par cette même disposition, est d’ application.

77 Cette conclusion est dictée par le système même auquel obéit le fonctionnement du régime commun. En effet, les ressources du régime commun sont limitées aux contributions des affiliés et des institutions et son équilibre financier implique une nécessaire corrélation entre les dépenses et les cotisations. Dès lors qu’ aucun seuil minimal de remboursement n’ est prévu à l’ article 72, paragraphe 1, du statut, il appartient aux institutions communautaires, agissant d’ un commun accord, de régler le remboursement des frais de garde-malade, dans les seules limites, d’ une part, des ressources disponibles et, d’ autre part, du principe de couverture sociale susmentionné. Il s’ ensuit que, en cas de frais de garde-malade exposés pour une maladie grave, le remboursement peut être inférieur au taux de 100 % prévu en tant que limite maximale à l’ article 72, paragraphe 1, du statut.

78 Quant au décompte attaqué du 5 juillet 1991, le Tribunal a déjà constaté ci-dessus que le montant remboursé correspond à 92 % des frais de garde-malade exposés par le requérant, et ce en application du seul plafond prévu au point X, paragraphe 2, sous c), de l’ annexe I. Le Tribunal estime qu’ une différence entre le taux effectif de remboursement et le taux maximal de remboursement prévu, qui ne s’ élève qu’ à huit points, ne saurait être considérée comme une violation du principe de couverture sociale. Cette appréciation est corroborée par le fait que le requérant a lui-même déclaré qu’ il pourrait accepter un remboursement se situant « aux environs » de 100 %. Les dispositions de la nouvelle réglementation de couverture sur lesquelles le décompte litigieux a été basé ne dépassent, par conséquent, pas les limites prévues par l’ article 72, paragraphe 1, du statut et il n’ est pas nécessaire, en l’ espèce, de déterminer les taux de remboursement concrets au-dessous desquels, de manière générale et pour tous les remboursements de frais de garde-malade, ces limites devraient être considérées comme n’ étant plus respectées.

79 Enfin, il convient de rappeler que les taux de remboursement que le requérant craint de se voir appliquer à l’ avenir dans certaines circonstances, qu’ il chiffre respectivement à 35,77 et 21,72 %, ne présentent aucun lien avec le décompte du 5 juillet 1991, sur lequel porte le litige. Les circonstances de l’ espèce ne permettent donc pas d’ examiner ces taux. Il en va de même pour l’ argument que le requérant entend tirer du caractère exceptionnel du remboursement spécial prévu à l’ article 72, paragraphe 3, du statut et des difficultés administratives relatives à l’ exécution de cette disposition. En effet, le requérant n’ ayant pas demandé à bénéficier de ce remboursement spécial, cet argument est dépourvu de pertinence pour la solution du présent litige (voir l’ arrêt Pincherle/Commission, précité, point 30).

80 Il résulte des considérations qui précèdent que le moyen tiré d’ une violation de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen tiré d’ une atteinte aux droits acquis

Arguments des parties

81 Le requérant fait valoir qu’ un fonctionnaire peut se prévaloir d’ un droit acquis si le fait générateur de ce droit s’ est produit sous l’ empire d’ un statut déterminé, antérieur à une modification décidée par l’ autorité communautaire (arrêt de la Cour du 19 mars 1975, Gillet/Commission, 28/74, Rec. p. 463, 473). En l’ espèce, le fait générateur serait la survenance de la maladie de son épouse et sa reconnaissance comme maladie grave, intervenues toutes deux sous l’ empire de la réglementation de couverture précédente. Les modalités de remboursement, telles qu’ elles ont été fixées en vertu de cette ancienne réglementation, ne pourraient donc pas être modifiées au désavantage du requérant, qui, à ces occasions, aurait été amené à prendre un certain nombre de décisions concernant la façon de faire face matériellement et financièrement à cette maladie. Pour pouvoir déterminer les conséquences financières d’ une maladie dont la durée était par définition imprévisible, le requérant n’ aurait pu évidemment partir que de la situation juridique qu’ il connaissait, c’ est-à-dire du principe d’ une prise en charge à 100 % dans le cadre des modalités d’ exécution dont il avait connaissance à ce moment-là, c’ est-à-dire d’ une prise en charge à concurrence du double du montant maximal alors en vigueur. Le droit du requérant à un remboursement à 100 %, selon les modalités ainsi déterminées, serait, par conséquent, né à ce moment-là et constituerait donc un droit acquis. Cette analyse se trouverait renforcée par le fait que le principe de la prise en charge à 100 % n’ a pas été modifié, mais que, en pratique, par le seul effet de la nouvelle réglementation, ce principe a perdu toute consistance.

82 La Commission répond que la jurisprudence mentionnée par le requérant n’ est pas applicable en l’ espèce, puisque le fait générateur du droit en cause est postérieur à l’ entrée en vigueur de la nouvelle réglementation. En effet, le requérant aurait bénéficié de l’ ancienne réglementation pour les frais afférents à la maladie de son épouse exposés avant le 1er janvier 1991. En revanche, la nouvelle réglementation ne serait applicable qu’ aux frais exposés après cette même date.

83 A cet égard, la Commission renvoie aux arrêts de la Cour du 5 mai 1981, Duerbeck (112/80, Rec. p. 1095, point 48), et du 11 mars 1982, Grogan/Commission (127/80, Rec. p. 869, point 15), dont la pertinence pour les présentes affaires est toutefois contestée par le requérant. La Commission considère, enfin, que la thèse défendue par le requérant entraînerait une situation absurde. Elle aurait pour conséquence que, en cas de maladie de longue durée, les modalités de remboursement des frais de maladie devraient être considérées comme des droits acquis dès le moment où la maladie a commencé, si bien qu’ une révision de la base de remboursement après un certain temps, notamment en fonction de la durée de la maladie, deviendrait impossible.

Appréciation du Tribunal

84 A cet égard, il suffit de relever que ni l’ article 72, paragraphe 1, du statut ni la réglementation de couverture ne prévoyant, en matière de frais de garde-malade, de taux de remboursement fixes, mais seulement des taux maximaux, le simple fait que, pendant une certaine période, l’ application qui a été faite par les institutions communautaires de cet article ait été particulièrement favorable aux intéressés n’ est pas de nature à avoir créé un droit acquis dans leur chef. Le requérant, qui a bénéficié d’ un avantage consistant, durant une certaine période, en une application favorable de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, lequel permet également, selon son libellé, une application moins favorable, ne saurait donc invoquer un droit acquis au maintien de cet avantage (arrêt de la Cour du 21 mai 1987, Rau e.a., 133/85 à 136/85, Rec. p. 2289, point 18).

85 Par ailleurs, la Cour a jugé, dans ses arrêts du 16 mai 1979, Tomadini (84/78, Rec. p. 1801, point 21), et Duerbeck, précité, point 48, sous l’ aspect du principe du respect de la confiance légitime, qu’ une réglementation nouvelle ne saurait être empêchée de s’ appliquer aux effets futurs de situations nées sous l’ empire de la réglementation antérieure et qu’ il en est spécialement ainsi dans un domaine dont l’ objet comporte une constante adaptation en fonction des variations de la situation économique. L’ application au cas d’ espèce de l’ idée exprimée par cette jurisprudence implique que les effets futurs – en l’ occurrence les frais qui seront exposés à l’ avenir – d’ une maladie de longue durée survenue sous l’ empire d’ une réglementation déterminée soient, le cas échéant, réglés, à partir d’ un certain moment, par une réglementation nouvelle, éventuellement moins favorable que la réglementation antérieure, étant observé au surplus que le domaine du remboursement des frais de maladie est précisément de ceux dont l’ objet comporte une constante adaptation des règles applicables en fonction des ressources disponibles et de la nécessité de sauvegarder un équilibre financier.

86 Par conséquent, le moyen tiré d’ une atteinte aux droits acquis doit être écarté.

Sur le troisième moyen tiré d’ une violation du devoir général de sollicitude

Arguments des parties

87 Le requérant invoque l’ article 24 du statut et la jurisprudence de la Cour y relative selon laquelle la finalité de cette disposition serait de donner au personnel actif et retraité une sécurité pour le présent et l’ avenir (arrêt du 12 juin 1986, Sommerlatte/Commission, 229/84, Rec. p. 1805). Cette référence à la sécurité pour l’ avenir serait particulièrement pertinente en l’ espèce. Dans cette optique, il serait contraire au devoir de sollicitude de prendre, sans la moindre forme de concertation collective ou individuelle préalable avec les retraités concernés, des mesures qui portent gravement et unilatéralement atteinte à leurs droits.

88 En outre, le requérant, se référant à l’ arrêt de la Cour du 28 mai 1980, Kuhner/Commission (33/79 et 75/79, Rec. p. 1677), rappelle que le devoir de sollicitude reflète l’ équilibre des droits et obligations réciproques dans les relations entre l’ autorité publique et les agents du service public. Ce devoir de sollicitude serait lié à un principe fondamental du droit du travail, à savoir qu’ une relation de travail de longue durée fait naître des obligations particulières d’ assistance et de protection (voir les conclusions de l’ avocat général M. Reischl sous l’ arrêt de la Cour du 9 décembre 1982, Plug/Commission, 191/81, Rec. p. 4229, 4250, 4256). En l’ occurrence, ce devoir de sollicitude aurait été violé du fait que, lors de l’ adoption des mesures d’ économie litigieuses, il n’ aurait pas été tenu compte des intérêts des personnes particulièrement concernées, c’ est-à-dire celles pour lesquelles les frais de garde-malade constituent un poste de dépenses important (surtout les retraités, mais également les titulaires d’ une pension d’ invalidité): pendant l’ élaboration de ces mesures, il n’ aurait été envisagé à aucun moment de consulter ces catégories de personnes, alors que les mesures en question affecteraient les retraités sensiblement plus que les fonctionnaires en activité.

89 La Commission estime, par contre, que, selon une jurisprudence constante, l’ article 24 du statut ne vise pas la défense des fonctionnaires, par l’ institution communautaire, contre des actes émanant d’ elle-même; cette défense relèverait d’ autres dispositions du statut (arrêt de la Cour du 17 décembre 1981, Bellardi-Ricci e.a./Commission, 178/80, Rec. p. 3187, point 23). Le devoir général de sollicitude n’ empêcherait pas l’ administration d’ introduire certaines mesures restrictives en matière de sécurité sociale, d’ autant plus que la Commission serait tenue à cette obligation à l’ égard de l’ ensemble de son personnel et devrait, à ce titre, garantir le bon fonctionnement du système de protection sociale.

90 Enfin, la Commission soutient que, dans la mesure où le requérant prétend que le devoir de sollicitude a été violé par l’ adoption des mesures d’ économie en cause, la prétendue violation partirait de l’ hypothèse que la Commission aurait dû adopter une réglementation spéciale à l’ intention des retraités. Or, une telle prémisse serait fondée sur l’ idée que les retraités se trouvent dans une situation particulière qui exige une réglementation distincte. Dans cette mesure, elle se confondrait avec le quatrième moyen.

Appréciation du Tribunal

91 Dans la mesure où le requérant invoque, dans ce contexte, l’ article 24 du statut, en faisant valoir que la nouvelle réglementation de couverture n’ aurait dû être adoptée par les institutions communautaires qu’ après une concertation préalable avec les représentants des fonctionnaires retraités, c’ est à juste titre que la Commission a rappelé que, selon une jurisprudence constante, cet article ne vise pas la défense des fonctionnaires, par les institutions communautaires, contre des actes émanant d’ elles-mêmes, dont le contrôle relève d’ autres dispositions du statut (arrêt de la Cour du 25 mars 1982, Munk/Commission, 98/81, Rec. p. 1155, point 21; arrêts Plug/Commission, précité, point 21, et Bellardi-Ricci e.a./Commission, précité, point 23). Cette branche du troisième moyen ne saurait, dès lors, être accueillie.

92 Pour autant que le requérant se prévaut d’ une violation du devoir de sollicitude, au motif que, lors de la modification de la réglementation de couverture, il n’ a pas été tenu compte des intérêts des fonctionnaires retraités, pour lesquels les frais de garde-malade constituent un poste de dépenses plus important que pour les fonctionnaires en activité, il y a lieu de rappeler que le devoir de sollicitude de l’ administration à l’ égard de ses agents reflète l’ équilibre des droits et des obligations réciproques que le statut a créés dans les relations entre l’ autorité publique et les agents du service public. Il est vrai que ce devoir implique notamment que, lorsqu’ elle statue à propos de la situation d’ un fonctionnaire, l’ autorité prenne en considération l’ ensemble des éléments qui sont susceptibles de déterminer sa décision et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’ intérêt du service, mais aussi de l’ intérêt du fonctionnaire concerné (voir, en résumé de la jurisprudence constante, l’ arrêt du Tribunal du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T-33/89 et T-74/89, Rec. p. II-0000, point 96).

93 Toutefois, ainsi que la Commission l’ a relevé, à juste titre, le grief avancé en l’ espèce par le requérant revient, en réalité, à affirmer que, lors de l’ adoption de la nouvelle réglementation de couverture, un régime spécial à l’ intention des seuls fonctionnaires retraités aurait dû être élaboré, ce qui suppose que les fonctionnaires retraités se trouvent dans une situation particulière qui exige un régime distinct. Ainsi, cette branche du troisième moyen rejoint, en substance, le quatrième moyen tiré d’ une violation du principe de non-discrimination et sera, dès lors, examinée dans le cadre de ce moyen.

Sur le quatrième moyen tiré d’ une violation du principe de non-discrimination

Sur la recevabilité

94 La Commission demande de déclarer irrecevable ce moyen, dans la mesure où le requérant lui reproche, en substance, d’ avoir appliqué une même réduction de remboursements aux fonctionnaires en activité et aux fonctionnaires retraités, bien que ces derniers ne disposent que de ressources financières bien inférieures à celles des premiers (discrimination matérielle). En effet, ce grief n’ aurait pas été mentionné dans la réclamation du requérant.

95 Le requérant répond que sa réclamation du 30 septembre 1991 renvoie expressément aux réclamations qu’ il avait introduites antérieurement les 30 mars et 12 juin 1991. Or, cette dernière mentionnerait l’ existence d’ une discrimination matérielle. La Commission aurait donc été en mesure de connaître avec une précision suffisante ce grief du requérant, qu’ elle aurait, du reste, examiné dans sa décision du 12 mars 1992 rejetant la réclamation susvisée du 30 septembre 1991.

96 A cet égard, il y a lieu de rappeler que la concordance exigée par une jurisprudence constante entre les moyens avancés dans la réclamation et ceux soulevés dans le recours a pour objet de permettre et de favoriser un règlement amiable du différend surgi entre les fonctionnaires et l’ administration et que, pour satisfaire à cet impératif, il importe que l’ administration soit en mesure de connaître avec une précision suffisante les griefs ou desiderata de l’ intéressé (arrêts de la Cour du 7 mai 1986, Rihoux e.a./Commission, 52/85, Rec. p. 1555, point 12, et du Tribunal du 16 juillet 1992, Della Pietra/Commission, T-1/91, Rec. p. II-2145, point 24). En l’ espèce, il y a lieu de constater que la réclamation du 30 septembre 1991 ne contient aucun moyen explicite, mais qu’ elle renvoie, à deux reprises, aux réclamations des 30 mars et 12 juin 1991, à la suite desquelles a été introduit le recours dans l’ affaire T-6/92. Or, la réclamation complémentaire du 12 juin 1991 est, entre autres, basée sur un grief tiré d’ une discrimination matérielle. La Commission a pris connaissance de cette réclamation complémentaire dans le présent contexte, ainsi qu’ il résulte de sa décision du 12 mars 1992 rejetant la réclamation du 30 septembre 1991, dans laquelle elle l’ a expressément examinée et rejetée. Il s’ avère donc que la Commission a connu, avec une précision suffisante, les griefs ou desiderata du requérant en la matière. Par conséquent, dans la mesure où il concerne une prétendue discrimination matérielle, le moyen tiré d’ une violation du principe de non-discrimination est recevable.

Sur le fond

— Arguments des parties

97 Le requérant allègue que, dans la mesure où la situation des fonctionnaires retraités et celle des fonctionnaires en activité diffèrent nettement du point de vue de leurs possibilités financières, il est discriminatoire de traiter ces deux catégories de la même manière en ce qui concerne la diminution des remboursements de frais de maladie. Ce serait donc précisément parce que les réductions en cause ont été décidées de manière identique pour les actifs et pour les retraités qu’ elles constituent une violation du principe de non-discrimination, du fait qu’ elles ne tiennent pas compte de la différence de situation des intéressés.

98 Le requérant ajoute que cette discrimination est aggravée par le fait qu’ il semble, à première vue, vraisemblable que le cas spécifique des frais relatifs à des soins de longue durée prodigués par des gardes-malades en cas de maladies graves concerne davantage les personnes d’ une classe d’ âge plus élevé, et donc davantage les fonctionnaires retraités que ceux qui sont en activité, ce qui créerait une présomption de discrimination déguisée. En effet, il serait évident que le risque de maladie augmente avec l’ âge, avec pour conséquence que le recours aux gardes-malades, surtout en cas de maladies graves et de longue durée, concerne proportionnellement plus souvent les non-actifs que les actifs.

99 Ensuite, le requérant relève que la plupart des systèmes juridiques tiennent compte des revenus en ce qui concerne le montant des impôts et des cotisations sociales. D’ ailleurs, la Commission donnerait elle-même un exemple de cette attitude lorsqu’ elle affirme (p. 14 du mémoire en défense) que, lorsqu’ elle a décidé de maintenir pour le remboursement de certains frais la règle du double d’ un montant maximal, c’ est en partant du principe que certains frais représentent une lourde charge pour les fonctionnaires en général et qu’ il y a donc lieu de les rembourser plus largement que les frais qui représentent normalement une moindre charge. La Commission reconnaîtrait donc que la répartition de la charge des mesures d’ économie doit tenir compte de la charge financière qui résulte des prestations médicales concernées.

100 En ce qui concerne la présomption de discrimination déguisée qu’ il invoque, le requérant regrette de ne pas être à même d’ apporter davantage de preuves chiffrées à l’ appui de son analyse, qui repose, selon lui, sur le bon sens, alors que la Commission pourrait, avec les techniques de calcul électronique existantes, fournir facilement une réponse à cet égard. L’ affirmation de la Commission (p. 12 du mémoire en défense), selon laquelle le déficit de l’ assurance maladie ne serait pas uniquement causé par les fonctionnaires en activité mais aussi par les retraités, confirmerait que l’ administration compétente serait en mesure de fournir d’ autres données. Le requérant estime, dès lors, que, selon une application par analogie de l’ arrêt de la Cour du 17 octobre 1989, Danfoss (109/88, Rec. p. 3199), il appartient à la Commission de renverser cette présomption.

101 La Commission répond que, s’ il existe des différences importantes entre les fonctionnaires en activité et les fonctionnaires retraités, notamment du point de vue de leurs ressources économiques, il ne s’ ensuit pas qu’ un régime général applicable à certaines occasions, telles que la maladie, au regard desquelles ces catégories ne se distinguent en rien, devienne discriminatoire. La thèse défendue par le requérant signifierait du reste que tout régime général de sécurité sociale prévoyant des remboursements de frais médicaux devrait être considéré comme incompatible avec le principe de non-discrimination chaque fois qu’ il ferait abstraction des différences de revenus entre certaines catégories d’ assurés. Si l’ on poursuit ce raisonnement jusqu’ au bout, fait observer la Commission, le régime devrait également tenir compte de la différence de ressources entre catégories de fonctionnaires en raison de leur différence de rémunérations.

102 La Commission ajoute que, même si le requérant parvenait à démontrer que les personnes plus âgées, et donc les retraités, sont plus souvent concernées par les frais en cause, l’ on ne pourrait cependant pas en déduire une présomption de discrimination déguisée. Il ne faudrait pas oublier, dans ce contexte, que les retraités ne constituent pas une catégorie à part mais sont des fonctionnaires qui ont atteint un certain âge et ont cessé de travailler. En d’ autres termes, tous les fonctionnaires risqueraient d’ être confrontés, à un âge plus avancé, à des frais plus élevés causés par une maladie de longue durée.

— Appréciation du Tribunal

103 Avant d’ examiner si le décompte attaqué et les dispositions du point X, paragraphe 2, sous c), de l’ annexe I, sur la base desquelles ce décompte a été établi, comportent un caractère discriminatoire à l’ égard du requérant, en sa qualité de fonctionnaire retraité, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, le principe de non-discrimination interdit de traiter de manière identique des situations qui sont différentes ou de manière différente des situations qui sont identiques (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 4 février 1982, Buyl e.a./Commission, 817/79, Rec. p. 245, point 29, et Battaglia/ Commission, 1253/79, Rec. p. 297, point 37).

104 Quant au grief tiré de l’ existence d’ une discrimination matérielle à l’ égard des fonctionnaires retraités, il y a lieu de souligner que le point de comparaison pertinent pour l’ examen de ce grief n’ est pas la rémunération personnelle des intéressés, qui dépend de leur classement, lequel peut varier du grade D 4, échelon 1, au grade A 1, échelon 6, mais le montant prévu pour le remboursement des frais de garde-malade. Or, il est constant que les dispositions de la nouvelle réglementation de couverture ne font pas de distinction, à cet égard, entre les fonctionnaires en activité et les fonctionnaires retraités. Par ailleurs, ainsi que l’ illustre le cas du requérant, dont la pension s’ élève à environ 300 000 BFR, il ne saurait être affirmé de manière générale que les fonctionnaires retraités disposent, dans tous les cas et de manière structurelle, de possibilités financières plus réduites que les fonctionnaires en activité.

105 Quant à l’ existence d’ une discrimination déguisée qui résulterait, selon le requérant, de ce que les personnes âgées, donc les fonctionnaires retraités, sont plus souvent frappées par des maladies de longue durée et doivent, en particulier, exposer davantage de frais de garde-malade, il convient de relever que les fonctionnaires retraités ne sauraient être considérés comme une catégorie d’ assurés à part, qui, du seul fait qu’ elle est constituée d’ anciens fonctionnaires, serait particulièrement exposée au risque d’ être confrontée à des frais de garde-malade. Il s’ agit là plutôt d’ un risque général de la vie qui peut se réaliser dans le chef de tout fonctionnaire, en activité ou à la retraite, et ce à tout moment, par exemple, à la suite d’ un accident de la circulation ou de sport.

106 Dans ce contexte, c’ est à juste titre que la Commission a souligné que les fonctionnaires retraités doivent être considérés comme des fonctionnaires ayant atteint un certain âge et ayant cessé de travailler. S’ il est vrai que les fonctionnaires risquent d’ être confrontés, à un âge plus avancé, à des frais plus élevés causés par une maladie de longue durée, on peut légitimement s’ attendre à ce qu’ ils aient pris, en temps utile, c’ est-à-dire pendant leur période d’ activité, les précautions adéquates, telles, par exemple, que la constitution d’ un fonds d’ épargne ou de valeurs immobilières ou la souscription d’ une assurance maladie privée complémentaire, en vue de pouvoir faire face, le cas échéant, aux frais de maladies plus particulièrement liées à la vieillesse. Eu égard au libellé de l’ article 72, paragraphe 1, du statut, qui ne prévoit que des taux de remboursement maximaux, l’ adoption de telles mesures préventives était et demeure indiquée, une réduction du taux de remboursement étant possible à tout moment. Le fait d’ avoir omis de prendre des mesures de cette nature ne saurait, dans ces conditions, être imputé, sous le couvert d’ une discrimination, ni aux auteurs du statut ni à ceux de la réglementation de couverture.

107 Le moyen tiré d’ une violation du principe de non-discrimination, avec lequel se confond la seconde branche du moyen tiré d’ une violation du devoir général de sollicitude doit, dès lors, être rejeté comme non fondé.

Sur le cinquième moyen tiré d’ une violation du principe de proportionnalité

Arguments des parties

108 Le requérant soutient que, dans la mesure où la limitation des remboursements au titre du régime commun a été inspirée par le souci de réduire et de combler un éventuel déficit du système d’ assurance maladie, les institutions communautaires auraient dû respecter le principe de proportionnalité. Celui-ci impliquerait la nécessité de maintenir un équilibre entre les objectifs légitimes d’ une mesure, d’ une part, et les charges qui en découlent pour l’ ensemble des sujets de droit ou pour une partie d’ entre eux, d’ autre part. Dans le choix entre les différents moyens possibles, il aurait donc fallu donner la préférence aux moins contraignants, ce qui aurait imposé, à tout le moins, d’ examiner si le déficit ne pouvait pas être limité d’ une autre manière (par exemple, par l’ instauration de mesures de contrôle appropriées afin de réduire la fraude, par une augmentation des contributions des assurés ou par une contribution complémentaire des États membres) et non pas seulement par une réduction discriminatoire se rapportant à un seul groupe de prestations. En outre, le respect du principe de proportionnalité aurait imposé de tenir compte de l’ intérêt médical des frais en question, comparés, par exemple, à celui de frais de cure thermale.

109 La Commission considère que ce moyen est dépourvu de pertinence. Le requérant attaquerait, en effet, l’ ensemble de la réglementation de couverture. Ce ne serait cependant pas l’ objet du recours en annulation et ne pourrait pas l’ être, étant donné qu’ un recours fondé sur la prétendue illégalité des dispositions modifiées de la réglementation de couverture serait irrecevable.

110 A l’ audience, le requérant a demandé au Tribunal d’ ordonner à la Commission de produire le procès-verbal des réunions du comité de gestion antérieures à l’ adoption, par ce dernier, de son avis n 3/89 ou, dans le cas où – comme l’ a affirmé la Commission – ce procès-verbal n’ existerait pas, l’ inventaire des propositions faites par le comité de gestion dans ce contexte. Enfin, il a déclaré que, si l’ article 72, paragraphe 1, du statut doit être interprété en ce sens que les taux de remboursement qui y sont prévus ne sont pas des taux fixes, les fonctionnaires ne seraient pas en mesure d’ apprécier s’ il est nécessaire, et dans quelle mesure, de souscrire une assurance privée complémentaire. Il a toutefois admis avoir souscrit une telle assurance complémentaire au Canada.

Appréciation du Tribunal

111 Selon une jurisprudence constante, le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions communautaires, surtout lorsqu’ ils imposent des charges financières, ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché, étant entendu que, lorsqu’ un choix s’ offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante (voir, par exemple, les arrêts de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25, et du 11 juillet 1989, Schraeder, 265/87, Rec. p. 2237, point 21).

112 A cet égard, il convient de constater, tout d’ abord, que, en matière de fixation des taux et modalités de remboursement des frais de maladie et, en particulier, des frais de garde-malade, les institutions communautaires disposent d’ un large pouvoir d’ appréciation lors de l’ adoption, d’ un commun accord, de la réglementation prévue à l’ article 72, paragraphe 1, du statut. En effet, ce domaine, dont le caractère complexe eu égard à l’ équilibre financier nécessaire du régime commun a déjà été relevé, implique une constante adaptation en fonction des variations de la situation financière (voir, ci-dessus, point 75). Seul le caractère manifestement inapproprié de nouvelles mesures de réduction des remboursements pourrait donc en affecter la légalité. Or, il est constant que, avec l’ adoption de la nouvelle réglementation de couverture, le remboursement de certains frais de maladie, parmi lesquels les frais de garde-malade, a été réduit afin de réaliser des économies et de maîtriser ainsi le déficit du régime commun et il ne saurait être contesté que la réduction du remboursement des frais de garde-malade est, dans son principe, un moyen approprié au but recherché, à savoir la réduction de ce déficit.

113 Il y a lieu de relever, ensuite, que, ainsi qu’ il ressort du texte même de l’ article 72, paragraphe 1, du statut et, notamment, des deuxième et troisième phrases de son premier alinéa, cette disposition permet aux institutions communautaires, agissant d’ un commun accord, de distinguer, en ce qui concerne les conditions et le montant du remboursement des frais de maladie, entre les différentes catégories de maladie, ce qui peut également entraîner une distinction entre plusieurs catégories de coûts et, par voie de conséquence, des taux et plafonds de remboursement distincts. Dans la mesure où le requérant entend comparer le remboursement des frais de garde-malade avec celui d’ autres frais de maladie, son argumentation est, dès lors, dénuée de pertinence.

114 Enfin, le Tribunal estime que dans un cas de figure tel que celui qui se présente en l’ espèce, où les dispositions réglementaires pertinentes ont permis un remboursement à 92 % des frais de garde-malade exposés et où la retenue opérée à la charge du requérant ne s’ est élevée qu’ à 6 300 BFR, il ne saurait aucunement être question d’ une violation du principe de proportionnalité. En tout état de cause, les circonstances du présent litige n’ ont pas révélé d’ éléments de nature à établir une telle violation.

115 Dans la mesure où le requérant prétend encore que les auteurs de la réglementation auraient dû choisir, en vue de réduire le déficit du régime commun, d’ autres mesures, moins contraignantes, que le plafonnement du remboursement des frais de garde-malade, il y a lieu de constater qu’ un tel raisonnement implique un examen de l’ ensemble du système de remboursement des frais de toutes les maladies prévu par la nouvelle réglementation de couverture. Or, une telle appréciation dépasserait les limites du contrôle juridictionnel des dispositions pertinentes, dont l’ application a permis, en l’ espèce, un résultat particulièrement favorable au requérant.

116 Étant donné qu’ il n’ y a pas lieu de porter une appréciation d’ ensemble sur la nouvelle réglementation de couverture, la demande du requérant, visant à ordonner la production de certains documents internes du comité de gestion du régime commun relatifs aux différentes propositions de modification de ladite réglementation, doit être rejetée comme dépourvue de pertinence.

117 Par conséquent, le moyen tiré d’ une violation du principe de proportionnalité ne saurait non plus être accueilli.

118 Il y a donc lieu de constater que l’ examen des cinq moyens invoqués par le requérant n’ ayant pas révélé d’ éléments de nature à affecter la légalité des dispositions pertinentes de la nouvelle réglementation de couverture, l’ exception d’ illégalité soulevée par le requérant, en vertu de l’ article 184 du traité, doit également être rejetée comme non fondée.

119 Il résulte de tout ce qui précède que, dans l’ affaire T-52/92, le requérant n’ a pas pu établir que son droit au remboursement des frais de garde-malade allait au-delà du montant qui lui a été accordé par la décision attaquée. Par conséquent, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble comme non fondé. Pour des raisons d’ économie de procédure, il n’ est, dès lors, pas nécessaire d’ examiner sa recevabilité.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

120 Le requérant a demandé, à titre subsidiaire, qu’ il soit fait application de l’ article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure, aux motifs que, dans l’ affaire T-6/92, la Commission se serait limitée, dans la décision portant rejet de sa réclamation, à en contester la recevabilité et que, dans l’ affaire T-52/92, le contenu de la décision de rejet aurait été extrêmement sommaire. Pour ces raisons, il n’ aurait pas eu la possibilité d’ examiner en connaissance de cause une éventuelle défense sur le fond.

121 La Commission laisse au Tribunal le soin d’ apprécier si elle a, oui ou non, occasionné les frais d’ une procédure par son propre comportement. De toute façon, le requérant n’ aurait nullement démontré que ce comportement a été vexatoire.

122 Aux termes de l’ article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’ il est conclu en ce sens. Toutefois, selon l’ article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. Le Tribunal estime que, dans les circonstances de l’ espèce, il y a lieu de faire application de ces dispositions. Les dossiers administratifs et judiciaires des deux affaires jointes n’ ont révélé aucun élément de nature à établir que la Commission aurait fait exposer au requérant des frais frustratoires ou vexatoires au sens de l’ article 87, paragraphe 3, deuxième alinéa, du règlement de procédure. Par conséquent, il convient d’ ordonner que chaque partie supportera ses propres dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête:

1) Le recours dans l’ affaire T-6/92 est rejeté comme irrecevable.

2) Le recours dans l’ affaire T-52/92 est rejeté comme non fondé.

3) Chacune des parties supportera ses propres dépens.

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CJCE, n° T-6/92, Arrêt du Tribunal, Andreas Reinarz contre Commission des Communautés européennes, 26 octobre 1993