CJCE, n° T-16/96, Arrêt du Tribunal, Cityflyer Express Ltd contre Commission des Communautés européennes, 30 avril 1998

  • Griefs non soulevés au cours de la procédure administrative·
  • Recevabilité 2 aides accordées par les États·
  • Recours en annulation - moyens * moyens·
  • Prêt accordé à un taux préférentiel·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Décision en matière d'aides d'État·
  • Critère de l'investisseur privé·
  • Procédure de contrôle des aides·
  • Aides accordées par les États·
  • Obligation de motivation

Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CJUE, Tribunal de première instance, 30 avr. 1998, Cityflyer Express / Commission, T-16/96
Numéro(s) : T-16/96
Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre élargie) du 30 avril 1998. # Cityflyer Express Ltd contre Commission des Communautés européennes. # Recours en annulation - Transports aériens - Aide d'État - Prêt sans intérêt - Montant de l'aide - Principe de l'investisseur en économie de marché - Principe de proportionnalité - Erreur manifeste d'appréciation - Motivation - Nécessité d'un débat contradictoire entre la Commission et le plaignant. # Affaire T-16/96.
Date de dépôt : 1 février 1996
Précédents jurisprudentiels : arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C-278/92, C-279/92 et C-280/92
Campos e.a./Commission, T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94
Cofaz e.a./Commission ( arrêt de la Cour du 28 janvier 1986, 169/84
Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 234/84
Cour du 14 décembre 1962, San Michele e.a./Haute Autorité, 5/62
Cour du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82
Cour du 21 janvier 1987, Stroghili/Cour des comptes, 204/85
Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C-313/90
Cour du 29 février 1996, Belgique/Commission, C-56/93
Tribunal dans l' arrêt du 28 septembre 1995, Sytraval et Brink' s France/Commission ( T-95/94, Rec. p. II-2651
Tribunal du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T-380/94
Tribunal du 16 décembre 1993, Moat/Commission, T-58/92
Tribunal du 18 septembre 1995, Tiercé Ladbroke/Commission, T-471/93
Tribunal du 22 octobre 1996, Skibsværftsforeningen e.a./Commission, T-266/94, Rec. p. II-1399
Tribunal du 24 janvier 1992, La Cinq/Commission, T-44/90
Tribunal du 5 juin 1996, Kahn Scheepvaart/Commission, T-398/94
Tribunal du 5 novembre 1997, Ducros/Commission, T-149/95
Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T-459/93
Solution : Recours en annulation : rejet sur le fond
Identifiant CELEX : 61996TJ0016
Identifiant européen : ECLI:EU:T:1998:78
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Texte intégral

Avis juridique important

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61996A0016

Arrêt du Tribunal de première instance (cinquième chambre élargie) du 30 avril 1998. – Cityflyer Express Ltd contre Commission des Communautés européennes. – Recours en annulation – Transports aériens – Aide d’État – Prêt sans intérêt – Montant de l’aide – Principe de l’investisseur en économie de marché – Principe de proportionnalité – Erreur manifeste d’appréciation – Motivation – Nécessité d’un débat contradictoire entre la Commission et le plaignant. – Affaire T-16/96.


Recueil de jurisprudence 1998 page II-00757


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Dispositif

Mots clés


1 Recours en annulation – Décision en matière d’aides d’État – Griefs non soulevés au cours de la procédure administrative – Recevabilité

(Traité CE, art. 93, § 2, et 173)

2 Aides accordées par les États – Notion – Concours financiers accordés par un État membre à une entreprise – Critère d’appréciation – Situation de l’entreprise au regard des marchés privés des capitaux – Prêt accordé à un taux préférentiel – Restitution de la différence entre les intérêts payables au taux de marché et ceux effectivement versés

(Traité CE, art. 92, § 1)

3 Aides accordées par les États – Décision de la Commission constatant l’incompatibilité d’une aide non notifiée avec le marché commun – Obligation de motivation – Portée

(Traité CE, art. 92, 93, § 3, et 190)

Sommaire


4 En matière d’aides d’État, aucune disposition ne subordonne le droit pour une personne directement et individuellement concernée d’attaquer un acte adressé à un tiers à la condition d’avoir soulevé, au cours de la procédure administrative, l’ensemble des griefs qui sont formulés dans la requête. En l’absence de pareille disposition, le droit d’agir d’une telle personne ne saurait être restreint pour la simple raison que, alors qu’elle aurait pu, au cours de la procédure administrative, présenter des observations sur une appréciation communiquée lors de l’ouverture de la procédure de l’article 93, paragraphe 2, du traité et reprise dans la décision, elle s’est abstenue de le faire.

5 En vue de déterminer si des concours financiers accordés par un État membre à une entreprise présentent le caractère d’aides étatiques, il est pertinent d’appliquer le critère basé sur les possibilités pour l’entreprise bénéficiaire d’obtenir les sommes en cause sur le marché des capitaux. En particulier, il est pertinent de se demander si un investisseur privé aurait réalisé l’opération en cause aux mêmes conditions et, dans la négative, d’examiner à quelles conditions il aurait pu la réaliser.

S’agissant d’un prêt accordé à un taux préférentiel, la Commission peut à juste titre qualifier d’aide incompatible avec le marché commun la différence entre les intérêts qui auraient été payés au taux de marché et ceux effectivement versés, et non la somme prêtée.

Le critère de l’investisseur privé permet également à la Commission de déterminer les mesures à prendre en vertu de l’article 93, paragraphe 2, du traité pour supprimer les distorsions de concurrence constatées et rétablir la situation antérieure au versement de l’aide illégale, dans le respect de la règle de proportionnalité. Si une distinction de principe ne saurait être établie selon qu’une aide est accordée sous forme de prêt ou sous forme de participation au capital, l’application uniforme du critère de l’investisseur privé dans l’un et l’autre cas peut néanmoins, eu égard à la règle de proportionnalité, exiger l’adoption de mesures différentes pour supprimer les distorsions de concurrence constatées et rétablir la situation antérieure au versement de l’aide illégale.

La règle de proportionnalité exige l’adoption des mesures nécessaires pour assurer un régime de saine concurrence dans le marché intérieur qui portent le moins atteinte à la promotion d’un développement harmonieux et équilibré des activités économiques dans l’ensemble de la Communauté.

Étant donné qu’une somme apportée en capital est durablement transférée tandis que, étant remboursable, elle est seulement mise temporairement à disposition dans le cas d’un prêt, la règle de proportionnalité exige en principe l’adoption de mesures différentes dans l’un et l’autre cas. S’agissant d’une participation au capital, la Commission peut considérer que la suppression de l’avantage octroyé implique la restitution de l’apport en capital. S’agissant d’une prêt, en revanche, si l’avantage concurrentiel réside dans le taux préférentiel accordé et non dans la valeur même des capitaux mis à disposition, la Commission, au lieu d’imposer une restitution pure et simple du principal, est fondée à imposer l’application du taux qui aurait été consenti dans des conditions normales de marché et la restitution de la différence entre les intérêts qui auraient été payés dans de telles conditions et ceux qui ont été effectivement versés sur la base du taux préférentiel accordé.

6 La motivation exigée par l’article 190 du traité doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d’exercer son contrôle. Il n’est toutefois pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 190 du traité doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée.

Dans la motivation des décisions qu’elle est amenée à prendre pour assurer l’application des règles de concurrence, la Commission n’est pas obligée de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision.

Appliqué à la qualification d’une mesure d’aide, ce principe exige que soient indiquées les raisons pour lesquelles la Commission considère que la mesure d’aide en cause entre dans le champ d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

Parties


Dans l’affaire T-16/96,

Cityflyer Express Ltd, société de droit anglais, établie à Gatwick Airport (Royaume-Uni), représentée par Me Charles Price, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l’étude de Me Lucy Dupong, 14 A, rue des Bains,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. Peter Oliver et Anders Jessen, membres du service juridique, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 95/466/CE de la Commission, du 26 juillet 1995, concernant l’aide accordée par la Région flamande à la compagnie aérienne belge Vlaamse Luchttransportmaatschappij NV (JO L 267, p. 49),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

(cinquième chambre élargie),

composé de M. R. García-Valdecasas, président, Mme V. Tiili, MM. J. Azizi, R. M. Moura Ramos et M. Jaeger, juges,

greffier: M. A. Mair, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 septembre 1997,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


Cadre juridique

1 L’article 92, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne (ci-après «traité») se lit comme suit:

«Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

2 L’article 92, paragraphe 3, sous c), du traité permet à la Commission, par dérogation, de déclarer compatibles avec le marché commun:

«c) les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n’altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l’intérêt commun».

3 La Commission a fixé des règles conditionnant l’octroi d’aides d’État à des entreprises du secteur aérien dans sa communication 94/C 350/07 intitulée «Application des articles 92 et 93 du traité CE et de l’article 61 de l’accord [sur l’Espace économique européen] aux aides d’État dans le secteur de l’aviation» (JO 1994, C 350, p. 5, ci-après «lignes directrices»).

4 La section IV de ces lignes directrices, consacrée à la distinction entre le rôle de l’État en tant que propriétaire d’une entreprise et en tant que fournisseur d’une aide d’État à cette entreprise, précise à propos du financement des emprunts:

«La Commission appliquera le principe de l’investisseur en économie de marché afin d’évaluer si le prêt est accordé à des conditions commerciales normales et s’il aurait pu être accordé par une banque commerciale. En ce qui concerne les conditions de tels prêts, la Commission tiendra notamment compte à la fois du taux d’intérêt pratiqué et de la garantie exigée. La Commission examinera si la garantie accordée est suffisante pour rembourser intégralement le prêt en cas de cessation de paiement, de même que la situation financière de la compagnie au moment de l’octroi du prêt.

L’élément d’aide sera équivalent à la différence entre le taux d’intérêt que la compagnie aérienne paierait dans des conditions normales de marché et celui qu’elle paie effectivement. Dans le cas extrême où un prêt non garanti est accordé à une compagnie qui, dans des circonstances normales, n’aurait pas été en mesure d’obtenir un financement, le prêt équivaut effectivement à une subvention et la Commission le considérera comme tel.» (Point 32 des lignes directrices.)

Faits à l’origine du recours

5 Vlaamse Luchttransportmaatschappij NV (ci-après «VLM») est une compagnie aérienne privée établie à Anvers (Belgique). Elle a été constituée le 21 février 1992 avec un capital initial de 10 millions de BFR. Le capital a été augmenté ensuite à plusieurs reprises, atteignant 75 millions de BFR à la fin de 1993 pour être porté à 100 millions de BFR au cours de l’année 1994. Depuis 1993, elle propose des vols réguliers notamment entre Anvers et Londres (London City Airport) et entre Rotterdam et Londres (London City Airport).

6 La liaison Anvers-Londres (au départ et à l’arrivée de l’aéroport de Gatwick) est également desservie par Cityflyer Express Ltd (ci-après «Cityflyer» ou «requérante») et par la Sabena (au départ et à l’arrivée de l’aéroport de Heathrow).

7 A la fin de 1993, la capacité mensuelle totale sur cette liaison était approximativement de 22 000 à 24 000 passagers, alors que le nombre total de passagers transportés se situait entre 9 000 et 10 000 passagers par mois.

8 Le 17 décembre 1993, la Région flamande a accordé à VLM, sans notification préalable à la Commission, un prêt sans intérêt de 20 millions de BFR, remboursable par tranches annuelles de 4 millions de BFR à partir de la deuxième année.

9 Le contrat accordant le prêt stipule: «Artikel 1: Voorwerp

De begunstigde verbindt zich tot de verdere uitbouw en exploitatie van meerdere Europese vliegroutes.

Ter ondersteuning van deze activiteit verleent het Gewest de begunstigde een terugbetaalbaar renteloos voorschot.

[…]

Artikel 3: Voorwaarden

Voor de duur van het contract is voor de vervreemding of hypothekering van onroerend en roerend patrimonium en het handelsfonds van de zaak alsook voor de vervreemding van bepaalde activa van de begunstigde vooraf instemming nodig van het Gewest.

Bij wijziging van de aandeelhoudersstructuur is vooraf de instemming van het Gewest vereist.

Het kapitaal van de onderneming mag tijdens de duur van het contract niet worden verlaagd zonder voorafgaande toestemming van het Gewest.

Indien deze voorwaarden niet worden nageleefd, is de overeenkomst onmiddellijk opzegbaar en wordt het voorschot onmiddellijk opeisbaar.

[…]»

(«Article 1er: objet

Le bénéficiaire s’engage à poursuivre le développement et l’exploitation de plusieurs lignes aériennes européennes.

La Région flamande accorde au bénéficiaire un prêt remboursable sans intérêt en vue de soutenir cette activité.

[…]

Article 3: conditions

Pendant la durée du contrat, l’accord préalable de la Région flamande est exigé pour la cession ou la mise sous hypothèque de biens meubles et immeubles et du fonds de commerce, ainsi que pour la cession de certains actifs de la Vlaamse Luchttransportmaatschappij NV.

Toute modification de la structure de l’actionnariat est soumise à autorisation préalable de la Région.

Pendant la durée du contrat, le capital social de l’entreprise ne peut pas être abaissé sans autorisation préalable de la Région.

En cas d’inobservation de ces conditions, le contrat peut être résilié immédiatement et le prêt est immédiatement exigible.

[…]»)

10 A la suite d’une plainte de Cityflyer, la Commission a ouvert, le 16 novembre 1994, la procédure de l’article 93, paragraphe 2, du traité (JO 1994, C 359, p. 2).

11 La requérante et la compagnie aérienne British Airways ont présenté des observations. Elles ont demandé à la Commission de constater que le prêt sans intérêt constituait une aide incompatible avec le marché commun.

12 Le 23 janvier 1995, le gouvernement belge a également déposé des observations.

13 A l’issue de la procédure, la Commission a pris, le 26 juillet 1995, la décision 95/466/CE concernant l’aide accordée par la Région flamande à la compagnie belge Vlaamse Luchttransportmaatschappij NV (ci-après «décision attaquée»). Cette décision a été notifiée au gouvernement belge le 25 septembre 1995 et a été publiée au Journal officiel le 9 novembre 1995 (JO L 267 p. 49).

14 Dans cette décision, la Commission a conclu que le prêt accordé par la Région flamande à VLM comprenait des éléments d’aide d’État illégaux parce que consentis à l’entreprise en violation des dispositions de l’article 93, paragraphe 3, du traité. Elle a également considéré, dans son article 1er, que ces éléments d’aide étaient incompatibles avec le marché commun au sens de l’article 92 du traité et de l’article 61 de l’accord sur l’Espace économique européen (ci-après «accord EEE»). En conséquence, elle a enjoint à la Belgique d’ordonner l’application à ce prêt d’un taux d’intérêt de 9,3 % (article 2) et la restitution de l’aide correspondant à l’application du même taux sur le montant emprunté depuis la date de l’octroi du prêt (article 3). Ce taux de 9,3 % résulte de l’addition d’un taux de base de 7,3 % applicable aux fonds d’État en Belgique en 1994 et d’une prime de risque de 2 % (dernier alinéa du chapitre V de la décision attaquée).

15 Au sixième alinéa du chapitre V de la décision attaquée, la défenderesse a exposé que «l’existence de l’aide ne [faisait] pas de doute dans la mesure où aucun investisseur ou banque privé n’accorderait dans des conditions normales de marché un prêt sans intérêt à une société dans laquelle il ne possède aucune participation et qui connaît des difficultés financières moins de deux ans après sa création. Les bilans et comptes de résultat de VLM révèlent en effet que la compagnie a enregistré une perte d’exploitation de 13 millions de BFR en 1993, première véritable année d’exploitation. La perte nette s’élevait quant à elle à 11,52 millions de BFR au cours de la même année, ce qui correspond à 15 % du capital social».

16 Le septième alinéa du chapitre V de la décision attaquée est libellé comme suit: «En ce qui concerne le montant de l’aide, la Commission, dans l’application des articles 92 et 93 du traité CE et de l’article 61 de l’accord EEE aux aides d’État dans le secteur de l’aviation, considère que l’élément d’aide est `équivalent à la différence entre le taux d’intérêt que la compagnie aérienne paierait dans des conditions normales de marché et celui qu’elle paie effectivement. Dans le cas extrême où un prêt non garanti est accordé à une compagnie qui, dans des circonstances normales, n’aurait pas été en mesure d’obtenir un financement, le prêt équivaut effectivement à une subvention et la Commission le considérera comme tel.' En l’espèce, le fait que VLM a fait des pertes somme toute modérées en 1993, au cours de sa première année d’exploitation, est une circonstance habituelle dans le secteur du transport aérien en raison des particularités de ce secteur. En conséquence, ces pertes ne constituaient pas, au début de l’année 1994, un obstacle à l’accès au marché financier d’autant que l’année 1993 s’est révélée une année particulièrement difficile pour l’aviation civile et que 1994 laissait envisager une amélioration générale de la conjoncture. De fait, les pertes de VLM ont été ramenées à 8,6 millions de BFR en 1994 alors que son activité a continué à se développer. Par ailleurs, le prêteur dispose d’une certaine garantie de recouvrer sa créance puisque, en contrepartie de l’octroi du prêt, la Région flamande peut s’immiscer dans la gestion de l’entreprise, son accord préalable étant requis avant l’aliénation ou la mise en hypothèque de certains biens, ou avant une diminution du capital social ou un changement de la structure de l’actionnariat. Il est à noter que, à la fin de l’année 1993, VLM disposait d’immobilisations matérielles d’une valeur de 7,3 millions de BFR et possédait également des actifs financiers d’une valeur de 16 millions de BFR. En outre, il a été procédé au cours de l’année 1994 à une nouvelle augmentation, d’un montant de 25 millions de BFR du capital social de l’entreprise qui s’établit maintenant à 100 millions de BFR. Il ressort de plus des articles 6 et 7 du contrat de prêt, d’une part, que l’opération peut être immédiatement annulée au cas où VLM ne respecte pas les conditions et modalités convenues dans le contrat et, d’autre part, que VLM est soumise, pendant la durée du contrat, au contrôle des services de l’inspection du ministère des Affaires économiques de la Région flamande ainsi qu’au contrôle de la commission flamande chargée de la surveillance de la gestion des entreprises. Dans ces conditions, la Commission est d’avis que le montant de l’aide est équivalent au taux d’intérêt que la compagnie aurait payé dans des conditions normales de marché.»

17 A l’alinéa suivant, la défenderesse a conclu que, compte tenu de ces stipulations contractuelles, VLM aurait pu emprunter, dans des conditions normales de marché, la somme mise à sa disposition au taux de 9,3 %.

Procédure et conclusions

18 La requérante a déposé sa requête au greffe du Tribunal le 1er février 1996.

19 Le 15 juillet 1996, VLM a déposé une demande en intervention, qu’elle a retirée le 29 octobre 1996.

20 Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (cinquième chambre élargie) a ouvert la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal à l’audience du 25 septembre 1997.

21 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

— annuler la décision attaquée;

— condamner la défenderesse au dépens.

22 Dans sa réplique et à l’audience, la requérante a en outre demandé à ce qu’il plaise au Tribunal ordonner la production de certains documents (voir ci-dessous points 98 à 100).

23 La défenderesse conclut à ce qu’il plaise au Tribunal:

— déclarer le recours irrecevable;

— à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé;

— condamner la requérante aux dépens.

24 Dans la duplique, la défenderesse conclut également à l’irrecevabilité de certains éléments avancés par la requérante dans la réplique (voir ci-dessous points 36 à 38).

Sur la recevabilité

Sur la recevabilité du recours

Argumentation des parties

25 La défenderesse excipe, dans son mémoire en défense, d’une fin de non-recevoir tirée de l’absence d’intérêt de la requérante à obtenir l’annulation de la décision attaquée.

26 En effet, l’annulation est demandée dans la mesure où a été qualifiée d’aide incompatible avec le marché commun, au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité, la somme correspondant aux intérêts que VLM aurait payés dans des conditions normales de marché, alors que, selon la requérante, c’est le montant prêté (ci-après «principal») qui était constitutif d’une telle aide. Or, selon la défenderesse, une telle annulation, suivie d’une nouvelle décision portant injonction à VLM de rembourser l’intégralité du montant du prêt, aurait pour effet d’améliorer la situation financière de cette dernière. En effet, s’agissant de la période antérieure à la notification de la décision attaquée, VLM aurait dû payer le taux de référence applicable à la Belgique (communication de la Commission sur les régimes d’aides à finalité régionale, JO 1979, C 31, p. 9, point 14); or, ce taux (8,34 %) serait moins élevé que celui retenu dans la décision (9,3 %). En outre, en raison de la baisse des taux d’intérêt qui a eu lieu depuis, VLM pourrait emprunter à un taux plus favorable que celui imposé par la décision attaquée. Le moment à prendre en considération pour déterminer ce taux serait celui où la décision attaquée a été prise. Si, toutefois, l’on se référait au moment où la Commission prendrait une nouvelle décision à la suite d’une annulation, l’absence d’intérêt de la requérante à agir serait encore plus patente en raison d’une nouvelle baisse des taux.

27 Or, lorsqu’une annulation a pour effet d’améliorer la position du bénéficiaire d’une aide, ses concurrents n’auraient pas d’intérêt à agir, fussent-ils directement et individuellement concernés, de sorte que le recours devrait être déclaré irrecevable (arrêts de la Cour du 14 décembre 1962, San Michele e.a./Haute Autorité, 5/62 à 11/62, 13/62, 14/62 et 15/62, Rec. p. 859, du 16 décembre 1963, Forges de Clabecq/Haute Autorité, 14/63, Rec. p. 719, du 1er juillet 1976, Sergy/Commission, 58/75, Rec. p. 1139, point 5; arrêt du Tribunal du 16 décembre 1993, Moat/Commission, T-58/92, Rec. p. II-1443, point 32).

28 La requérante oppose que son intérêt est établi dès lors que la décision attaquée la concerne directement et individuellement. En l’espèce, elle se trouverait exactement dans la même situation que les requérantes dans l’affaire Cofaz e.a./Commission (arrêt de la Cour du 28 janvier 1986, 169/84, Rec. p. 391, point 25; voir aussi arrêt du Tribunal du 5 juin 1996, Kahn Scheepvaart/Commission, T-398/94, Rec. p. II-477, points 37 et 42).

29 L’argumentation de la défenderesse partirait du présupposé que VLM pourrait obtenir un financement et ignorerait la thèse de la requérante selon laquelle VLM n’aurait pas été en mesure, à l’époque où le prêt litigieux a été consenti, d’obtenir un tel financement sans sûreté.

Appréciation du Tribunal

30 La recevabilité d’un recours en annulation doit être appréciée au regard de l’intérêt à agir du requérant au moment du dépôt de la requête (voir en ce sens arrêts Forges de Clabecq/Haute Autorité, cité au point 27 ci-dessus, Rec. p. 748, et Moat/Commission, cité au point 27 ci-dessus, point 32). Cet intérêt ne saurait être évalué en fonction d’un événement futur et hypothétique (voir en ce sens l’arrêt de la Cour du 21 janvier 1987, Stroghili/Cour des comptes, 204/85, Rec. p. 389, point 11).

31 La thèse de la défenderesse part de la double hypothèse que la décision attaquée est annulée pour les raisons exposées par la requérante et que VLM obtient un nouveau financement auprès d’une institution de crédit. Elle considère que la requérante n’a, dans une telle hypothèse, pas d’intérêt à agir car la situation financière de VLM serait meilleure du fait de la baisse des taux d’intérêt intervenue depuis l’adoption de la décision attaquée.

32 En l’espèce, la requérante a un intérêt légitime, né et actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée pour les raisons qu’elle a invoquées. En effet, à supposer que la défenderesse soit tenue d’adopter une décision de la teneur souhaitée par la requérante, la possibilité pour VLM d’obtenir un financement à de meilleures conditions que celles imposées dans la décision attaquée est purement conjecturale et ne saurait, dès lors, servir de critère pour apprécier la recevabilité du recours.

33 En outre, à supposer même que VLM puisse, en raison de la baisse des taux, emprunter aujourd’hui à un taux inférieur au taux de 9,3 % retenu dans la décision attaquée, cette possibilité existe indépendamment d’une éventuelle annulation de ladite décision. En effet, il est hautement improbable que la Région flamande puisse refuser à VLM la possibilité de rembourser le prêt anticipativement alors que cette faculté permettrait à VLM d’emprunter à meilleur compte auprès d’une institution de crédit.

34 Comme la décision attaquée est susceptible d’affecter négativement la position concurrentielle de la requérante, elle a un intérêt à agir.

35 Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à l’encontre du recours.

Sur la recevabilité d’éléments avancés au stade de la réplique

Argumentation des parties

36 La défenderesse excipe également de l’irrecevabilité d’éléments avancés par la requérante dans la réplique. D’une part, ils n’auraient pas été présentés au cours de la procédure administrative (arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission, C-278/92, C-279/92 et C-280/92, Rec. p. I-4103, point 31). D’autre part, ils seraient soit tardifs, soit étrangers à la question de la légalité de la décision attaquée.

37 La fin de non-recevoir couvre les considérations avancées par la requérante en ce qui concerne, d’une part, le temps mis par les autorités belges pour produire une copie du contrat de prêt litigieux à la demande de la Commission et, d’autre part, la qualification d’investissement donnée par les autorités belges audit prêt. La première question serait étrangère aux moyens soulevés dans le cadre du présent recours. La seconde ne serait pas incompatible avec l’appréciation par la Commission de l’élément d’aide découlant de la transaction.

38 La fin de non-recevoir se rapporte également à une demande tendant à obtenir confirmation du fait que la première tranche du prêt a été remboursée comme prévu dans le contrat. Cette demande soulèverait des questions relatives à des événements postérieurs à la décision attaquée et serait étrangère à l’appréciation de la validité de celle-ci.

Appréciation du Tribunal

39 S’agissant tout d’abord de l’argument selon lequel les éléments en question seraient irrrecevables au motif qu’ils n’auraient pas été présentés au cours de la procédure administrative, il y a lieu de rappeler que, dans la matière des aides d’État, aucune disposition ne subordonne le droit pour une personne directement et individuellement concernée d’attaquer un acte adressé à un tiers à la condition d’avoir soulevé, au cours de la procédure administrative, l’ensemble des griefs qui sont formulés dans la requête. En l’absence de pareille disposition, le droit d’agir d’une telle personne ne saurait être restreint pour la simple raison que, alors qu’elle aurait pu, au cours de la procédure administrative, présenter des observations sur une appréciation communiquée lors de l’ouverture de la procédure de l’article 93, paragraphe 2, du traité et reprise dans la décision attaquée, elle s’est abstenue de le faire (arrêt du Tribunal du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T-380/94, Rec. p. II-2169, point 64).

40 Les autres arguments développés par la défenderesse sont dénués de pertinence. En effet, afin d’inciter le Tribunal à approfondir l’instruction de l’affaire, la requérante a présenté les éléments litigieux dans le cadre d’un exposé du contexte factuel du litige, sans modifier ses conclusions ni soulever de nouveau moyen.

41 Dans ces conditions, il convient de rejeter la fin de non-recevoir soulevée à l’encontre des éléments, énumérés aux points 37 et 38 ci-dessus, présentés par la requérante dans la réplique.

Sur le fond

42 La requérante soulève trois moyens à l’appui de son recours tirés:

— d’une méconnaissance de l’article 92, paragraphe 1, du traité;

— d’une violation de l’obligation de motivation prescrite par l’article 190 du traité;

— d’erreurs manifestes d’appréciation.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 92, paragraphe 1, du traité

Argumentation des parties

43 Selon la requérante, la défenderesse a violé l’article 92 du traité en ne qualifiant d’aide incompatible avec le marché commun que le seul montant correspondant aux intérêts que VLM aurait payés dans des conditions normales de marché et non la somme prêtée.

44 La Cour aurait reconnu la pertinence du principe selon lequel il convient de se référer au comportement normal d’un investisseur privé au regard de la même opération (arrêts de la Cour du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 234/84, Rec. p. 2263, point 14, et 40/85, Rec. p. 2321, point 13, du 21 mars 1990, Belgique/Commission, C-142/87, Rec. p. I-959, point 26, et du 3 octobre 1991, Italie/Commission, C-261/89, Rec. p. I-4437, point 8).

45 Ce principe s’appliquerait de manière identique qu’il s’agisse d’une participation au capital ou d’un prêt (arrêts de la Cour du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, Rec. p. 3809, point 31, et du 10 juillet 1986, Belgique/Commission, 40/85, cité au point précédent). La solution inverse conduirait les États membres à financer illégalement des entreprises par des prêts plutôt que par des apports en capital.

46 Appliqué à l’octroi d’un prêt, ce principe exigerait de se poser la question de savoir si un investisseur privé aurait octroyé le prêt au bénéficiaire aux conditions auxquelles il a été effectivement consenti. Dans la négative, le principal devrait être qualifié d’aide.

47 La défenderesse aurait mal appliqué le critère du comportement normal d’un investisseur privé au regard de la même opération pour apprécier si le prêt litigieux constituait une aide étatique. En effet, au lieu de se poser la question de savoir si un tel investisseur aurait consenti ce prêt aux conditions auxquelles il a été effectivement accordé, elle a examiné s’il l’aurait octroyé en supposant qu’il portât un intérêt de 9,3 %. Ayant conclu qu’un investisseur aurait accordé le prêt litigieux à ce dernier taux, elle en aurait erronément déduit que l’aide se limitait aux intérêts non payés.

48 L’interprétation de la défenderesse entraînerait une application divergente, et donc illégale, de l’article 92, paragraphe 1, du traité selon que l’aide a été octroyée sous la forme d’un prêt ou d’une participation au capital (voir décision 94/662/CE de la Commission, du 27 juillet 1994, concernant la souscription de CDC-Participations à des émissions d’obligations d’Air France, JO L 258, p. 26).

49 La défenderesse conclut au rejet du moyen. Elle rejette le critère proposé par la requérante, car il ignore l’importance des distorsions provoquées par la mesure d’aide.

Appréciation du Tribunal

50 L’article 92 du traité a pour objectif d’assurer que la concurrence ne soit pas faussée dans le marché intérieur [article 3, sous g), du traité]. L’interdiction de l’article 92, paragraphe 1, du traité vise les aides étatiques qui faussent ou menacent de fausser la concurrence dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres.

51 En vue de déterminer si une mesure étatique constitue une aide faussant ou menaçant de fausser la concurrence et affectant les échanges entre États membres au sens de cette disposition, il est pertinent d’appliquer le critère, indiqué dans la décision attaquée, qui est basé sur les possibilités pour l’entreprise bénéficiaire d’obtenir les sommes en cause sur le marché des capitaux (arrêt de la Cour du 21 mars 1990, Belgique/Commission, cité au point 44 ci-dessus, point 26). En particulier, il est pertinent de se demander si un investisseur privé aurait réalisé l’opération en cause aux mêmes conditions et, dans la négative, d’examiner à quelles conditions il aurait pu la réaliser.

52 En l’espèce, la défenderesse a conclu que VLM aurait pu, au moment de l’octroi du prêt litigieux, emprunter 20 millions de BFR sur le marché des capitaux au taux de 9,3 % (dernier alinéa du chapitre V de la décision attaquée). Cette conclusion revient à considérer que le prêt litigieux cesse de fausser ou de menacer de fausser la concurrence et d’affecter les échanges entre États membres dès lors qu’il porte intérêt à ce taux.

53 A supposer cette appréciation fondée, point qui sera examiné ci-dessous aux points 85 et 88 à 91 dans le cadre du troisième moyen, le prêt litigieux sort donc du champ d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité s’il porte intérêt à ce taux. Par conséquent, c’est à juste titre que la défenderesse a considéré que seule la différence entre les intérêts qui auraient été payés si ce taux avait été appliqué et ceux qui ont été effectivement versés devait être qualifiée d’aide au sens de cette disposition.

54 L’application du critère de l’investisseur privé tel que défini ci-dessus permet également à la Commission de déterminer les mesures à prendre en vertu de l’article 93, paragraphe 2, du traité pour supprimer les distorsions de concurrence constatées et rétablir la situation antérieure au versement de l’aide illégale (en ce sens, voir arrêt du Tribunal du 8 juin 1995, Siemens/Commission, T-459/93, Rec. p. II-1675, points 96 à 102), dans le respect de la règle de proportionnalité. Si une distinction de principe ne saurait être établie selon qu’une aide est accordée sous forme de prêt ou sous forme de participation au capital (arrêt Intermills/Commission, cité au point 45 ci-dessus, point 31), l’application uniforme du critère de l’investisseur privé dans l’un et l’autre cas peut néanmoins, eu égard à la règle de proportionnalité, exiger l’adoption de mesures différentes pour supprimer les distorsions de concurrence constatées et rétablir la situation antérieure au versement de l’aide illégale.

55 La règle de proportionnalité exige l’adoption des mesures nécessaires pour assurer un régime de saine concurrence dans le marché intérieur qui portent le moins atteinte à la promotion d’un développement harmonieux et équilibré des activités économiques dans l’ensemble de la Communauté (article 2 du traité). Or, la thèse de la requérante aboutirait à enfreindre cette règle.

56 Étant donné qu’une somme apportée en capital est durablement transférée tandis que, étant remboursable, elle est seulement mise temporairement à disposition dans le cas d’un prêt, la règle de proportionnalité exige en principe l’adoption de mesures différentes dans l’un et l’autre cas. S’agissant d’une participation au capital, la Commission peut considérer que la suppression de l’avantage octroyé implique la restitution de l’apport en capital. S’agissant d’un prêt, en revanche, si l’avantage concurrentiel réside dans le taux préférentiel accordé et non dans la valeur même des capitaux mis à disposition, la Commission, au lieu d’imposer une restitution pure et simple du principal, est fondée à imposer l’application du taux qui aurait été consenti dans des conditions normales de marché et la restitution de la différence entre les intérêts qui auraient été payés dans de telles conditions et ceux qui ont été effectivement versés sur la base du taux préférentiel accordé.

57 Au surplus, l’analyse de la requérante aboutit à priver de toute utilité la distinction opérée dans les lignes directrices entre les cas normaux où l’aide doit être considérée comme équivalant à cette différence d’intérêts et les cas exceptionnels où l’aide correspond au principal. Il s’ensuit que cette analyse revient en réalité à remettre en cause la légalité des lignes directrices. A cet égard, il convient de rappeler que la Commission peut s’imposer des orientations pour l’exercice de ses pouvoirs d’appréciation par des actes comme les lignes directrices en question, dans la mesure où ils contiennent des règles indicatives sur l’orientation à suivre par cette institution et qu’ils ne s’écartent pas des normes du traité (arrêt de la Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C-313/90, Rec. p. I-1125, points 34 et 36; arrêt AIUFFASS et AKT/Commission, cité au point 39 ci-dessus, point 57; voir par ailleurs arrêt du Tribunal du 5 novembre 1997, Ducros/Commission, T-149/95, non encore publié au Recueil, point 61). Or, la requérante n’a pas démontré que les lignes directrices s’écartaient du traité.

58 Il s’ensuit que le moyen doit être rejeté.

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation prescrite par l’article 190 du traité

Argumentation des parties

59 Selon la requérante, la motivation de la décision attaquée est confuse, absconse et équivoque, repose sur des erreurs et ne répond pas suffisamment aux arguments qu’elle a développés au cours de la procédure administrative.

60 En outre, la défenderesse aurait à tort omis de lui donner la possibilité de présenter son point de vue sur les explications fournies par les autorités belges afin de réfuter son argumentation. La défenderesse aurait violé son obligation d’engager un débat contradictoire avec le plaignant, de sorte que la motivation ne satisferait pas aux critères dégagés par le Tribunal dans l’arrêt du 28 septembre 1995, Sytraval et Brink’s France/Commission (T-95/94, Rec. p. II-2651).

61 Les exigences de motivation seraient accrues lorsque, comme en l’espèce, le plaignant n’est pas le destinataire des décisions prises dans le cadre de procédures en matière d’aides d’État.

62 Enfin, le juge communautaire pourrait exercer son contrôle non seulement dans l’intérêt du requérant, mais également dans celui de la Communauté. Or, celle-ci aurait intérêt à ce que la Commission ne fonde pas ses décisions en matière d’aides d’État sur des données incorrectes et ne commette pas d’erreurs d’appréciation. L’obligation de se concerter avec le plaignant dans certaines circonstances servirait précisément à réduire ce risque.

63 La défenderesse conclut au rejet du moyen. Elle estime que la décision attaquée satisfait aux exigences de l’article 190 du traité et souligne que la procédure de l’article 93, paragraphe 2, du traité n’impose nullement à la Commission d’engager avec les tiers intéressés un dialogue sur les informations fournies par les autorités nationales ni de leur fournir des copies des documents recueillis au cours de l’enquête.

Appréciation du Tribunal

64 Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 190 du traité doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’autorité communautaire, auteur de l’acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge communautaire d’exercer son contrôle (arrêts du Tribunal du 18 septembre 1995, Tiercé Ladbroke/Commission, T-471/93, Rec. p. II-2537, point 29, et la jurisprudence y citée, et du 24 avril 1996, Industrias Pesqueras Campos e.a./Commission, T-551/93, T-231/94, T-232/94, T-233/94 et T-234/94, Rec. p. II-247, point 140, et la jurisprudence y citée).

65 Il n’est toutefois pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 190 du traité doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêts de la Cour du 29 février 1996, Belgique/Commission, C-56/93, Rec. p. I-723, point 86, et du 15 mai 1997, Siemens/Commission, C-278/95 P, Rec. p. I-2507, point 17; arrêt du Tribunal du 22 octobre 1996, Skibsværftsforeningen e.a./Commission, T-266/94, Rec. p. II-1399, point 230). Dans la motivation des décisions qu’elle est amenée à prendre pour assurer l’application des règles de concurrence, la Commission n’est pas obligée de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés. Il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (arrêts du Tribunal du 24 janvier 1992, La Cinq/Commission, T-44/90, Rec. p. II-1, point 41, et la jurisprudence y citée, et Siemens/Commission, cité au point 54 ci-dessus, point 31).

66 Appliqué à la qualification d’une mesure d’aide, ce principe exige que soient indiquées les raisons pour lesquelles la Commission considère que la mesure d’aide en cause entre dans le champ d’application de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

67 En l’espèce, il convient de rechercher si la motivation de la décision attaquée fait apparaître d’une manière suffisamment claire le raisonnement de la défenderesse selon lequel seule la différence entre les intérêts que VLM aurait payés dans des conditions normales de marché et ceux qu’elle a effectivement payés constitue une mesure d’aide au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

68 A cet égard, la motivation contenue aux sixième, septième et huitième alinéas du chapitre V de la décision attaquée (voir ci-dessus points 15, 16 et 17) satisfait aux exigences de l’article 190 du traité en ce qu’elle permet à la requérante de comprendre le raisonnement de la défenderesse et au juge communautaire d’exercer son contrôle. En particulier, elle expose clairement les raisons pour lesquelles la défenderesse a considéré que la situation financière de VLM et les stipulations contractuelles réservant certains droits à la Région flamande sur les actifs de VLM auraient permis à cette dernière d’obtenir, dans des conditions normales de marché, un prêt de 20 millions de BFR au taux du marché (en l’occurrence 9,3 %). Le lien entre cette constatation et la conclusion selon laquelle seuls les intérêts non payés doivent être qualifiés d’aide au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité ressort également sans équivoque.

69 Enfin, il y a lieu de rejeter le grief de la requérante selon lequel la défenderesse aurait violé son obligation d’engager, dans certaines circonstances, un débat contradictoire avec le plaignant, comme elle le prétend en invoquant l’arrêt Sytraval et Brink’s France/Commission (cité au point 60 ci-dessus, point 78). En effet, en l’espèce, la défenderesse était en mesure, après avoir recueilli les observations des intéressés, dont celles de la requérante, de justifier à suffisance de droit son appréciation de la nature de la mesure qualifiée par le plaignant d’aide d’État.

70 Les opinions de la requérante et de l’État belge divergeaient essentiellement sur l’application du critère de l’investisseur en économie de marché et sur l’appréciation du comportement d’un tel investisseur au regard de l’opération en cause, mais non sur des questions de fait (voir les chapitres II et III de la décision attaquée). Dès lors, à supposer que l’obligation d’engager un débat contradictoire avec le plaignant implique dans certaines circonstances celle de lui communiquer les observations de l’État membre destinataire de la décision, point sur lequel il n’est pas nécessaire de se prononcer, la défenderesse était en mesure de motiver sa qualification de la mesure au regard de l’article 92, paragraphe 1, du traité sans procéder à une telle communication.

71 Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté.

Sur le troisième moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation

72 La requérante fait grief à la défenderesse d’avoir commis des erreurs manifestes d’appréciation en ne qualifiant pas le principal d’aide au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité. Ces erreurs porteraient sur quatre éléments: la situation financière de VLM, l’évaluation des garanties ou des sûretés, la gratuité du prêt et le caractère inhabituel du prêt. Compte tenu de l’existence d’un risque sérieux de non-remboursement, de l’absence de sûreté et de son caractère inhabituel et gratuit, le prêt litigieux aurait dû être qualifié de subvention pure et simple.

Situation financière de VLM

— Argumentation des parties

73 La requérante estime que la défenderesse n’a pas étayé son affirmation selon laquelle les pertes de VLM étaient somme toute modérées et ne constituaient pas un obstacle à l’accès aux marchés financiers. La défenderesse aurait pu se rendre compte, lors de l’adoption de la décision attaquée, que les pertes de VLM n’avaient pas été ramenées à 8,6 millions de BFR en 1994 (septième alinéa du chapitre V de la décision attaquée), mais étaient près de trois fois supérieures. En effet, il ressortirait des comptes annuels de VLM que celle-ci a fait un petit bénéfice de 340 541 BFR en 1992, sa première année d’exploitation, suivi d’une perte de 11 523 927 BFR en 1993 et d’une autre perte de 27 538 000 BFR en 1994, portant le total des pertes à 39 021 000 BFR, soit environ 40 % du capital. A la fin de 1993, les pertes se seraient élevées à 11 483 000 BFR, représentant environ 15 % du capital. A la fin de 1994, le rapport entre les dettes et les fonds propres de VLM aurait atteint environ 144 %. Enfin, l’absence d’endettement à long terme de VLM traduirait l’impossibilité pour celle-ci d’obtenir un financement du secteur privé.

74 La requérante fait également grief à la défenderesse de ne pas avoir tenu compte de la situation commerciale de VLM telle qu’elle se présentait au moment où elle a pris la décision attaquée. Cette situation se serait détériorée, le total des pertes s’élevant au 31 décembre 1995 à 86 192 000 BFR, soit 57 % du capital, et le chiffre d’affaires aurait baissé.

75 La défenderesse conclut au rejet de ce grief, car les pertes de VLM et les perspectives générales du secteur pour 1994 auraient été telles que VLM aurait pu, au moment de l’octroi du prêt litigieux, obtenir un prêt comparable sur les marchés financiers.

— Appréciation du Tribunal

76 Pour autant que la requérante fait valoir que les pertes de VLM ont été trois fois supérieures à 8,6 millions de BFR en 1994, chiffre mentionné au septième alinéa du chapitre V de la décision attaquée, il convient de souligner que la légalité de la décision attaquée doit être appréciée en considération de l’attitude qu’aurait eue, lors de l’octroi du prêt litigieux, un investisseur privé dans des conditions normales de marché, eu égard aux informations disponibles et aux évolutions prévisibles à ce moment. Dès lors, le fait que les pertes subies par VLM en 1994 ont été près de trois fois supérieures à l’estimation figurant dans la décision attaquée n’est susceptible d’avoir une incidence sur la légalité de celle-ci que s’il est manifeste qu’un investisseur privé aurait prévu que les pertes de VLM allaient être supérieures à cette estimation.

77 Il ressort de la décision attaquée (fin de la quatrième phrase du septième alinéa du chapitre V de la décision attaquée) que la défenderesse s’est placée dans la perspective d’un investisseur privé qui, au moment de l’octroi du prêt, aurait apprécié l’évolution probable en 1994 (voir point 16 ci-dessus).

78 La requérante n’a pas prouvé que la défenderesse avait commis une erreur manifeste dans cette appréciation.

79 La requérante n’a pas davantage démontré que la circonstance que, à la fin de 1993, les pertes de VLM représentaient environ 15 % de son capital social aurait empêché celle-ci d’obtenir, dans des conditions normales de marché, le prêt litigieux au taux de 9,3 %.

80 Enfin, la requérante n’a pas établi que le fait que VLM n’avait pas de dettes à long terme résultait de son impossibilité d’obtenir un financement sur le marché.

Absence de garantie ou de sûreté

— Argumentation des parties

81 Selon la requérante, la défenderesse commet une erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle qualifie de garantie le droit de la Région flamande de refuser que VLM modifie la structure de son actionnariat ou que VLM aliène ou hypothèque certains de ses biens meubles ou immeubles, son fonds de commerce ou des actifs (deuxième alinéa du chapitre IV de la décision attaquée). En effet, ce droit ne donnerait pas à la Région flamande la possibilité de réaliser les actifs de VLM en cas d’insolvabilité ou de mise en liquidation de celle-ci; en outre, il ne serait pas opposable aux autres créanciers. En tant que tel, il n’équivaudrait en aucune manière à une hypothèque ou à un nantissement sur fonds de commerce que toute institution de crédit aurait exigé à défaut d’une sûreté personnelle suffisante. Du reste, ce droit découlerait de la législation belge indépendamment des stipulations du prêt litigieux. Enfin, il serait erroné de considérer qu’il permet à la Région flamande de s’immiscer dans la gestion de VLM.

82 La défenderesse souligne avoir conclu que le prêteur disposait d’une «certaine garantie de recouvrer sa créance» (septième alinéa du chapitre V de la décision attaquée) en raison des obligations contractuelles de ne pas faire imposées à l’emprunteur.

— Appréciation du Tribunal

83 A supposer que, comme le soutient la requérante, la défenderesse ait considéré à tort que la Région flamande disposait d’une «certaine garantie de recouvrer sa créance», cette circonstance ne serait pas de nature à invalider la décision.

84 En effet, la défenderesse ayant considéré que, compte tenu des stipulations du contrat litigieux réservant à la Région flamande le droit de refuser d’aliéner ou de grever les actifs de VLM, cette dernière aurait, dans des circonstances normales, été en mesure d’obtenir un prêt au taux du marché (en l’occurrence 9,3 %), les lignes directrices (point 32) n’imposaient pas de traiter le principal du prêt litigieux comme une subvention.

85 Les éléments invoqués par la requérante pour contester l’appréciation de la défenderesse ne sont pas de nature à faire douter de la possibilité pour VLM d’emprunter 20 millions de BFR au taux de 9,3 % au moment où le prêt litigieux a été accordé. En effet, il est plausible que VLM aurait pu obtenir un tel prêt, en dépit de l’absence de garantie donnant au prêteur la possibilité de réaliser les actifs de VLM et du montant de ses pertes atteignant approximativement 15 % de son capital social, compte tenu, notamment, de ce qu’il est habituel qu’une compagnie aérienne subisse des pertes les premières années d’exploitation et des perspectives d’amélioration conjoncturelle du secteur à l’époque.

Gratuité du prêt

— Argumentation des parties

86 Selon la requérante, le prêt constituait une subvention car il était gratuit. La décision attaquée contrasterait avec la décision 94/662, du 27 juillet 1994, précitée au point 48, dans laquelle la Commission avait considéré certains titres subordonnés comme un apport en fonds propres et exigé le remboursement de la totalité de la somme versée.

87 La défenderesse récuse cette argumentation.

— Appréciation du Tribunal

88 Suivant les lignes directrices, ce ne serait que si VLM n’avait pas pu obtenir de financement sur le marché privé, quel que fût le taux, qu’il y aurait lieu de qualifier le principal d’aide étatique au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité (voir point 4 ci-dessus).

89 Le contrat litigieux prévoyant le remboursement du principal et la défenderesse ayant conclu que VLM aurait pu, dans des conditions normales de marché, obtenir le prêt litigieux au taux du marché (en l’occurrence 9,3 %), ce prêt ne saurait être regardé comme une subvention que s’il est établi que cette dernière conclusion est erronée.

90 Or, les éléments avancés par la requérante ne sont pas de nature à priver de plausibilité la conclusion de la défenderesse selon laquelle, dans les circonstances de l’espèce, VLM aurait pu obtenir un prêt de 20 millions de BFR au taux de 9,3 % (voir point 85 ci-dessus).

91 La référence à la décision 94/662, du 27 juillet 1994, précitée au point 48, est, par ailleurs, dénuée de pertinence. En effet, cette affaire portait non pas sur un prêt, mais sur la souscription par une entreprise d’État (CDC-Participations) de titres émis par une autre entreprise d’État (Air France). Les titres en question étaient des obligations remboursables en actions et l’opération devait donc être considérée financièrement comme un apport en capital différé. En l’espèce, en revanche, la mise à disposition de la somme prêtée n’était nullement destinée à faire partie durablement du capital de l’entreprise bénéficiaire.

Caractère inhabituel du prêt

— Argumentation des parties

92 Selon la requérante, la circonstance que le prêt a été octroyé sur une base individuelle et non dans le cadre d’un régime d’aides approuvé dénoterait le caractère exceptionnel du prêt litigieux. Elle fait grief à la défenderesse de ne pas en avoir tenu compte et de ne pas avoir cherché à vérifier sur quelle base légale de droit interne la décision d’octroyer le prêt avait été prise. La question se poserait même de savoir si, en l’espèce, la législation relative aux aides en Région flamande a été respectée.

93 La défenderesse réfute cette argumentation. D’une part, si l’octroi du prêt litigieux sur une base individuelle constitue un indice de l’existence d’une aide, il ne permettrait toutefois pas d’en déterminer le montant. D’autre part, il n’appartiendrait pas à la Commission d’avoir égard à la disposition de droit national sur la base de laquelle l’aide en cause a été accordée pour exercer les pouvoirs que le traité lui confère en matière d’aides d’État.

— Appréciation du Tribunal

94 L’argument de la requérante selon lequel la défenderesse n’aurait pas tenu compte du fait que l’aide ne s’inscrit pas dans le cadre d’un régime d’aides approuvé doit être rejeté. En effet, la défenderesse a pris cette circonstance en considération dans son appréciation, au chapitre VI de la décision attaquée, en ces termes: «L’aide, qui n’entre pas dans le champ d’application des régimes d’aide approuvés, aurait dû être notifiée à la Commission conformément à l’article 93, paragraphe 3, du traité.» Partant, le grief manque en fait. En toute hypothèse, cet élément est dénué de pertinence pour la qualification de la mesure étatique litigieuse au regard de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

95 Le grief selon lequel la défenderesse n’a pas identifié la disposition de droit interne en vertu de laquelle l’aide a été accordée ni examiné la légalité de l’aide litigieuse au regard de ce droit doit également être rejeté. En effet, il n’appartient pas à la Commission d’apprécier la légalité d’une aide au regard du droit national, mais au regard du droit communautaire.

96 Il s’ensuit que le moyen doit être rejeté.

97 Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur la demande de documents

Argumentation des parties

98 Dans la réplique, la requérante a demandé à la défenderesse de produire une série de documents cités dans le mémoire en défense mais non versés au dossier de la présente procédure. Elle invite le Tribunal à demander à la défenderesse, au titre des articles 64 et 65 du règlement de procédure, de produire ces documents dans l’hypothèse où elle refuserait de les communiquer spontanément.

99 Les documents en question, dont un grand nombre ont été cités également dans la décision attaquée, sont les lettres de la Commission aux autorités belges datées des 25 mai, 14 juillet, 15 novembre, 6 décembre 1994, 1er février, 2 mai et 13 juin 1995, les lettres des autorités belges à la Commission datées des 3 août 1994, 23 janvier 1995, 15 juin, 14 juillet et 24 juillet 1995, ainsi que les «renseignements demandés» qui accompagnaient ces trois dernières lettres, le contrat conclu le 17 décembre 1993 par la Région flamande et VLM et le recours formé par VLM devant le Tribunal le 27 novembre 1995.

100 La production de ces documents serait nécessaire pour garantir le caractère équitable de la procédure.

101 La défenderesse objecte qu’il n’y a lieu d’accéder à la demande d’un tiers intéressé d’obtenir des renseignements que lorsque cette communication est indispensable au contrôle de la légalité de la décision litigieuse (arrêt Skibsværftsforeningen e.a./Commission, cité au point 65 ci-dessus, point 199). Tel ne serait pas le cas en l’espèce, car les parties ne seraient pas divisées quant aux faits, mais quant à l’appréciation juridique de ceux-ci.

Appréciation du Tribunal

102 La question soumise à l’appréciation du Tribunal porte sur la qualification de la mesure étatique en cause au regard de l’article 92, paragraphe 1, du traité.

103 La requérante ne fournit aucun indice laissant présumer que les pièces dont la communication est demandée pourraient être utiles pour trancher cette question.

104 En outre, les circonstances de fait à prendre en considération aux fins de cette qualification ne font l’objet d’aucune contestation.

105 Enfin, la requérante a, tant au cours de la procédure administrative que lors de la présente procédure, exposé de manière circonstanciée son point de vue selon lequel le principal, et non les intérêts, aurait dû être qualifié d’aide au sens de l’article 92, paragraphe 1, du traité. Elle n’a pas indiqué en quoi la communication des documents demandés aurait été susceptible de lui permettre de présenter une argumentation plus convaincante à l’appui de son point de vue.

106 S’estimant suffisamment éclairé par les pièces du dossier et estimant que la production des documents mentionnés au point 99 ci-dessus ne servirait pas les droits de la défense de la requérante, le Tribunal considère qu’il n’y pas lieu d’ordonner la mesure d’organisation de la procédure proposée par celle-ci. Sur les dépens 107 Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses moyens et la défenderesse ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de condamner la requérante à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la défenderesse.

Dispositif


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL

(cinquième chambre élargie)

déclare et arrête:

1) Le recours est rejeté.

2) La requérante est condamnée aux dépens.

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CJCE, n° T-16/96, Arrêt du Tribunal, Cityflyer Express Ltd contre Commission des Communautés européennes, 30 avril 1998