Conseil national de l'ordre des médecins, Chambre disciplinaire nationale, 25 mars 2003, n° 8357

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Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Si le requérant n’a pas reçu NOTIFICATION de la PLAINTE, la lettre envoyée antérieurement par la plaignante au conseil départemental, exposant des griefs identiques, a bien été reçue par l’intéressé. La seconde lettre par laquelle la patiente déclarait porter plainte figurait au dossier dont le requérant a pu prendre connaissance suffisamment à l’avance avant l’audience. A également reçu notification de la délibération du CD par laquelle ce dernier reprennait les griefs de la plaignante et décidait de transmettre la plainte au conseil régional. Absence de méconnaissance des droits de la défense.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, ch. disciplinaire nationale, 25 mars 2003, n° 8357
Numéro(s) : 8357
Dispositif : Régularité de la décision

Sur les parties

Texte intégral

Dossier n° 8357
Dr Lucien M
Décision du 25 mars 2003
LA SECTION DISCIPLINAIRE DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, enregistrés au secrétariat de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins les 22 juillet et 22 novembre 2002, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Lucien M, qualifié spécialiste en psychiatrie, option enfants-adolescents, tendant à ce que la section annule une décision, en date du 1er juin 2002, par laquelle le conseil régional de l’Ile-de-France, statuant sur la plainte de Mme Nicole C…, transmise par le conseil départemental de la Ville de Paris, qui s’y est associé, lui a infligé la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois, par les motifs que la plainte de Mme C…, qui n’a été formulée que par lettre du 12 février 2001, n’a jamais été notifiée au requérant, qui n’a reçu notification que d’une lettre de Mme C… du 11 novembre 2000 qui ne constituait pas une plainte ; que la plainte est donc non avenue ; que le document incriminé n’était pas destiné à être produit en justice et a d’ailleurs été retiré de la procédure ; que ce document, établi sur papier blanc et non signé, constituait la retranscription d’une interprétation médicale et n’avait pas valeur de certificat médical et encore moins de certificat de complaisance, le requérant ayant effectué un signalement de l’affaire auprès du parquet afin de provoquer une expertise judiciaire des deux parents de l’enfant ; que le document se borne à retranscrire les propos tenus par le père de l’enfant pendant ses auditions ; que l’attestation de Mme J…, psychologue scolaire, présente dans le bureau de Mme B…, psychologue, qui suivait l’enfant, au moment où le requérant s’est entretenu par téléphone avec elle, établit qu’il s’agissait d’une demande de renseignements et non d’une tentative de pression sur Mme B… pour l’amener à modifier les conclusions de son rapport en faveur du père de l’enfant ; qu’en tout état de cause, les faits sont couverts par la loi d’amnistie ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistrées comme ci-dessus le 18 mars 2003, les observations présentées pour le conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Ville de Paris, tendant au rejet de la requête par les motifs que le Dr M a pu, en consultant le dossier, avoir connaissance avant l’audience de première instance, de l’ensemble des correspondances adressées par Mme C… au conseil départemental ; que le rapport incriminé du Dr M ne constitue pas un simple compte rendu d’un interrogatoire médical, mais qu’il a été rédigé à la demande du père de l’enfant, remis délibérément à ce dernier qui l’a transmis à son avocat ; qu’il émet de graves jugements sur la mère de l’enfant, Mme C…, que le Dr M n’avait jamais rencontrée ; qu’il s’agit bien d’un rapport médical tendancieux et d’une immixtion dans les affaires de famille en violation des articles 28 et 51 du code de déontologie médicale ; que les faits sont contraires à l’honneur et échappent à la loi d’amnistie ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu la loi du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le décret du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes et des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins ;

Vu le code de déontologie médicale ;

Après avoir entendu :

 – Le Dr COLSON en la lecture de son rapport ;

 – Me de COSNAC, avocat, en ses observations pour le Dr Lucien M qui n’était pas présent ;

 – Me PAOLETTI, avocate, en ses observations pour le conseil départemental de la Ville de Paris ;

Me de COSNAC ayant été invité à reprendre la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE,
Sur la régularité de la procédure de première instance :

Considérant qu’aux termes de l’article 7 du décret du 26 octobre 1948 : « L’action disciplinaire contre un médecin (…) est introduite par une plainte adressée au président du conseil régional par …. le conseil départemental …. agissant de leur propre initiative ou à la suite de plaintes », et qu’à ceux de l’article 11 du même texte « La plainte est notifiée au praticien incriminé, lequel est invité à produire dans les quinze jours sa défense écrite … » ;

Considérant que, par une première lettre reçue le 11 novembre 2000 adressée au conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Ville de Paris, Mme C… exposait les griefs qu’elle nourrissait à l’égard du Dr M et terminait en écrivant : « pour toutes ces raisons je vous demande d’obtenir des explications concernant la rédaction de ce document avant d’envisager de déposer plainte contre le docteur M Lucien. » ; que, par une nouvelle lettre, en date du 12 février 2001, Mme C… concluait « Après une très grande réflexion sur ces faits, j’estime nécessaire de porter plainte à l’encontre du Docteur M. » ; que, par délibération du 7 mars 2001, le conseil départemental de la Ville de Paris ré-exposait l’ensemble des faits et décidait de transmettre la plainte de Mme C… au conseil régional de l’Ile-de-France ; que, cependant, sans que le dossier permette de l’établir, le requérant affirme qu’il n’a reçu notification, de la part du conseil régional, le 13 juin 2001, que de la seule lettre de Mme C… du 11 novembre 2000 et non de celle du 12 février 2001 qui constituait la véritable plainte ; que les dispositions de l’article 7 du décret du 26 octobre 1948 sus-rappelées n’auraient ainsi pas été respectées et que le conseil régional aurait statué sur une plainte inexistante ;

Considérant, toutefois, que, à supposer établis les dires du requérant sur l’absence de notification de la lettre de Mme C… du 12 février 2001, les griefs exposés dans les deux lettres de Mme C… des 11 novembre 2000 et 12 février 2001 étaient identiques ; que la seconde lettre de Mme C… du 12 février 2001, dans laquelle celle-ci déclarait expressément porter plainte à l’encontre du Dr M, a été déposée au dossier et que le requérant et son conseil ont pu en prendre connaissance en temps suffisant avant l’audience ; qu’enfin, en même temps que de la lettre de Mme C… du 11 novembre 2000, il est établi que le requérant a reçu notification de la délibération du conseil départemental de la Ville de Paris, qui pouvait agir de sa propre initiative en vertu des dispositions de l’article 7 du décret du 28 octobre 1948, par laquelle il reprenait à son compte les griefs exposés par Mme C… et décidait de transmettre la plainte de celle-ci au conseil régional de l’Ile-de-France ; qu’il résulte de l’ensemble de ces circonstances que le Dr M a été informé de façon complète et en temps utile sur les griefs formulés à son encontre par Mme C… et qui ont donné lieu à la plainte de cette dernière et de la délibération du conseil départemental de la Ville de Paris qui l’a suivie sans qu’il puisse soutenir efficacement que les droits de la défense auraient été méconnus en l’espèce ; que le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure de première instance doit en conséquence être écarté ;


Au fond :

Considérant qu’il est tout d’abord établi par l’instruction que le Dr M a remis, le 13 septembre 2000, à M. A… « un rapport médical » suite à l’examen de son fils Arthur alors que les parents de l’enfant étaient en litige dans une procédure judiciaire concernant le droit de garde et le droit de visite de cet enfant ; que ce rapport, d’une longueur de cinq pages, porte de nombreux jugements critiques sur la mère de l’enfant et fait mention de troubles caractériels de cette dernière, alors que le Dr M ne l’avait jamais rencontrée ; que, si ce rapport a été établi sur du papier blanc sans en-tête et ne comporte pas de signature, il comporte les qualités et coordonnées du Dr M dactylographiées en tête de la première page et, en dernière page, se termine par les mentions « Dr Lucien M. Fait à Paris, le 13 septembre 2000. Ce rapport est un rapport médical confidentiel » ; que, d’ailleurs, à aucun moment, le Dr M n’a contesté en être l’auteur ; que, bien loin de constituer, selon ses dires, « le brouillon d’un interrogatoire médical » de l’enfant et de son père, que le Dr M aurait simplement remis à celui-ci pour corrections éventuelles, il s’agit bien d’un rapport médical relatant les conclusions du Dr M quant au devenir de l’enfant A…, qu’il a remis sans restriction au père de ce dernier, qui l’a lui-même remis à son avocat ; que ce rapport présente un caractère tendancieux en ce qui concerne Mme C…, mère de l’enfant, que le Dr M, ainsi qu’il vient d’être dit, n’avait jamais rencontrée, et constitue une immixtion sans raison professionnelle dans la vie familiale ;

Considérant, en second lieu, qu’il est établi par le témoignage de Mme B…, psychologue suivant l’enfant A…, que le Dr M lui a téléphoné pour faire pression sur elle et tenter d’obtenir qu’elle modifie ses conclusions dans un sens plus favorable au père de l’enfant ; que ce témoignage ne saurait être controuvé par celui, fourni par le requérant, de Mme J…, psychologue scolaire, qui, si elle affirme s’être trouvée dans le bureau de Mme B… au moment où celle-ci a eu son entretien téléphonique avec le Dr M, n’a pu entendre les propos tenus au téléphone par ce dernier, ne participant pas à la communication ;

Considérant que les agissements du Dr M sus-relatés constituent des infractions aux dispositions des articles 28 et 51 du code de déontologie médicale et, dans les circonstances de l’espèce, apparaissent contraires à l’honneur professionnel et ne sauraient en conséquence être couverts par l’amnistie édictée par la loi du 6 août 2002 ; que, compte tenu des circonstances de l’espèce, la sanction de l’interdiction d’exercer la médecine pendant une durée de trois mois prononcée par les premiers juges n’apparaît pas excessive et qu’il y a lieu de rejeter en conséquence l’appel du Dr M ;

PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :

Article  : La requête du Dr Lucien M est rejetée.

Article 2 : La peine d’interdiction d’exercer la médecine pendant une durée de trois mois infligée au Dr Lucien M prendra effet à compter du 1er octobre 2003 et cessera de porter effet le 31 décembre 2003 à minuit.

Article 3 : Les frais de la présente instance s’élevant à 169,69 euros sont mis à la charge du Dr MANUCEAU et devront être réglés dans le mois suivant la notification de la présente décision.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au Dr Lucien M, au conseil départemental de la Ville de Paris, au conseil régional de l’Ile-de-France, au directeur départemental des affaires sanitaires et sociales de la Ville de Paris, au directeur régional des affaires sanitaires et sociales de l’Ile-de-France, au préfet de la Ville de Paris, au préfet de la région de l’Ile-de-France, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, au ministre chargé de la santé, au ministre chargé de la sécurité sociale et à tous les conseils départementaux.

Article 5 : Mme Nicole C…, dont la plainte est à l’origine de la saisine du conseil régional de l’Ile-de-France, recevra copie, pour information, de la présente décision.

Ainsi fait et délibéré, à l’issue de l’audience publique du 25 mars 2003, par : M. CHERAMY, Conseiller d’Etat honoraire, président ; MM. les Drs COLSON, LEON, POUILLARD, membres titulaires, M. le Dr AHR, membre suppléant.

LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE,
PRESIDENT DE LA SECTION DISCIPLINAIRE DU
CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

B. CHERAMY
LA SECRETAIRE DE LA
SECTION DISCIPLINAIRE

I. LEVARD

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Conseil national de l'ordre des médecins, Chambre disciplinaire nationale, 25 mars 2003, n° 8357