Conseil national de l'ordre des médecins, Chambre disciplinaire nationale, 16 septembre 2010, n° 10557

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Résumé de la juridiction

Plainte d’une patiente au motif qu’en 1997 elle aurait été victime «d’un viol sans violence» de la part du praticien lors d’une consultation à son cabinet. Ce dernier soutient en revanche qu’il n’a jamais violé celle-ci ni eu de relation sexuelle, même consentante. En présence d’éléments contradictoires et en l’absence d’élément de preuve déterminant, la chambre disciplinaire nationale ne peut que s’en remettre à son intime conviction. Les récits faits à l’audience par chacun des protagonistes ainsi que leurs réponses aux questions qui leur ont été posées n’ayant pas permis à la chambre disciplinaire de se forger cette intime conviction dans un sens ou dans un autre, le doute doit profiter à l’accusé en considérant en conséquence que les faits allégués ne sont pas établis.

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Sur la décision

Référence :
CNOM, ch. disciplinaire nationale, 16 sept. 2010, n° 10557
Numéro(s) : 10557
Dispositif : Annulation - Rejet de la plainte

Sur les parties

Texte intégral

N° 10557 ______________
Dr Elie A ______________
Audience du 24 juin 2010
Décision rendue publique par affichage le 16 septembre 2010
LA CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE, Vu, enregistrée au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins le 30 juillet 2009, la requête présentée pour le Dr Elie A, qualifié en médecine générale ; le Dr A demande à la chambre disciplinaire nationale d’annuler la décision n° C-2008-1965, en date du 15 juillet 2009, par laquelle la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France, statuant sur la plainte de Mme Florence S, transmise par le conseil départemental de la Ville de Paris, lui a infligé la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois ;

Le Dr A soutient que la décision attaquée ne repose que sur la parole de Mme S ; que celle-ci l’a consulté à l’époque pour stress, angoisse et dépression et non pour travail corporel lié au chant ; qu’il n’est nullement spécialisé dans le travail corporel ; que Mme S, au moment des faits, était en proie à des difficultés personnelles sérieuses ; que, selon ses notes de consultation, elle était à l’époque très désorientée et déprimée ; qu’elle a déclaré avoir passé la nuit avec un inconnu ; que son agenda de 1997 indique que, tant le 22 que le 23 mai, il a reçu des patientes en consultation avant et après Mme S ; que, les faits étant trop anciens, il ne peut se prononcer sur le point de savoir si Mme S lui a effectivement remis un chèque de 1 200 F et pour quelles raisons il n’aurait pas finalement encaissé ce chèque, à supposer qu’il lui ait été effectivement remis ; que Mme S n’apporte aucun élément de preuve de ses allégations ; que les attestations qu’elle produit ne font que reproduire ses propos ; qu’il est médecin généraliste spécialiste des techniques de gestion du stress et des traumatismes et pratique la morathérapie ; que les attestations qu’il produit attestent de sa moralité et de sa probité ;

Vu la décision attaquée ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 7 octobre 2009, le mémoire présenté pour Mme S, tendant au rejet de la requête ;

Mme S expose que les heures mentionnées sur l’agenda de 1997 du Dr A comme étant celles de ses consultations ne correspondent pas à celles qu’il avait primitivement indiquées ni à la réalité ; qu’il n’avait pas fait état de ses notes cliniques en première instance ; que la rencontre alléguée avec un inconnu n’a pas eu lieu ; qu’elle était nullement à l’époque une personne désorientée ; qu’elle est pharmacien hospitalier ; qu’elle a eu honte des faits dont elle a été victime et souhaitait se reconstruire avant de porter plainte ; que le viol a été commis par une personnalité perverse ayant autorité sur un sujet en situation de fragilité psychique ; que le Dr A lui a proposé de l’argent pour réparer ; que le chèque de 1 200 F qu’elle lui a remis n’a jamais été encaissé ; qu’il a bien violé les articles 3 et 31 du code de déontologie (codifiés aux articles R. 4127-3 et -31 du code de la santé publique) ;

Vu, enregistrés comme ci-dessus les 8 octobre et 19 novembre 2009, les mémoires présentés pour le Dr A, tendant aux mêmes fins que sa requête selon les mêmes moyens ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 24 décembre 2009, le nouveau mémoire présenté pour Mme S, tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures selon les mêmes moyens ;

Vu, enregistré comme ci-dessus le 29 janvier 2010, le mémoire présenté pour le Dr A, tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures selon les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu l’ordonnance de non publicité de l’audience établie par le président de la chambre disciplinaire nationale le 19 avril 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code de la santé publique, notamment le code de déontologie médicale figurant aux articles R. 4127-1 à R. 4127-112 ;

Après avoir entendu au cours de l’audience non publique du 24 juin 2010 ;

- le rapport du Dr Faroudja ;

- les observations de Me Paley-Vincent pour le Dr A et celui-ci en ses explications ;

 – les observations de Me Tartour pour Mme S et celle-ci en ses explications ;

Le Dr A ayant été invité à reprendre la parole en dernier ;

APRES EN AVOIR DELIBERE, Considérant que Mme S, à l’époque chef de service de la pharmacie à usage intérieur de l’hôpital de Sallanches (Haute-Savoie), expose que, sur les conseils d’une ancienne cantatrice qui organisait des stages de chant auxquels elle participait, elle est allée consulter à Paris le Dr A, qui avait mis au point une méthode de déblocage des énergies au moyen de la morathérapie, pour améliorer son « travail corporel » ; qu’elle a bénéficié de trois consultations en 48 heures, dans la matinée et l’après-midi du 22 mai 1997 puis dans la matinée du 23 mai ; qu’elle soutient avoir été, au cours de la deuxième consultation de l’après-midi du 22 mai, victime « d’un viol sans violence » de la part du praticien ; qu’elle est cependant venue à la troisième consultation du lendemain matin pour s’expliquer avec lui sur les événements de la veille et lui a réglé ses honoraires au moyen d’un chèque que le Dr A n’a jamais encaissé ; qu’un sentiment de honte l’a empêchée d’intenter toute action que ce soit, notamment pénale, contre le Dr A jusqu’à ce qu’au début 2008 son désir de faire éclater la vérité et d’éviter à d’autres patientes de subir des événements analogues la pousse à porter plainte contre lui devant la juridiction ordinale, les faits étant prescrits sur le plan pénal ;
Considérant que le Dr A soutient en revanche qu’il n’a jamais violé Mme S ni eu de relation sexuelle, même consentante, avec celle-ci et que tout son récit n’est qu’affabulation ;
Considérant que les deux parties diffèrent sur le lieu des consultations et donc sur celui où se seraient déroulés les faits allégués, au 28 avenue Hoche selon Mme S, au 23 avenue de Wagram selon le Dr A, qui est confirmé sur ce point par les documents administratifs de l’Ordre selon lesquels il n’aurait exercé avenue Hoche qu’à compter du 26 février 1998, soit neuf mois après les faits allégués ; que l’agenda de ses consultations produit par le Dr A ne présente pas de garantie totale d’authenticité ; qu’en présence de ces éléments contradictoires et en l’absence d’élément de preuve déterminant, la chambre disciplinaire nationale ne peut que s’en remettre à son intime conviction ; que les récits faits à l’audience par chacun des protagonistes ainsi que leurs réponses aux questions qui leur ont été posées n’ont pas permis à la chambre disciplinaire de se forger cette intime conviction dans un sens ou dans un autre ; que, le doute devant profiter à l’accusé, il y a lieu, en conséquence, de considérer que les faits allégués par Mme S ne sont pas établis ; que, dès lors, le Dr A est fondé à demander sa relaxe et par suite l’annulation de la décision attaquée de la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France qui l’a condamné à la peine de l’interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois ;
PAR CES MOTIFS,
DECIDE
Article 1 : La décision, en date du 15 juillet 2009, de la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France infligeant au Dr A la sanction de l’interdiction d’exercer la médecine pendant une durée de trois mois est annulée.

Article 2 : La plainte formée par Mme S contre le Dr A devant le conseil départemental de la Ville de Paris est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au Dr Elie A, à Mme Florence S, au conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Ville de Paris, à la chambre disciplinaire de première instance d’Ile-de-France, au préfet de Paris, au directeur général de l’agence régionale de santé d’Ile-de-France, au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris, au conseil national de l’Ordre des médecins, au ministre chargé de la santé.

Ainsi fait et délibéré par : M. Chéramy, conseiller d’Etat honoraire, président ; MM. les Drs Faroudja, Fillol, Kennel, Marchi, Wolff, membres.

Le conseiller d’Etat honoraire, président de la chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des médecins

Bruno Chéramy

Le greffier en chef

Isabelle Levard

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Textes cités dans la décision

  1. Code de la santé publique
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