Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 10 mai 2011, n° 4803
Résumé
Procéde dans son cabinet à des autohémotransfusions et à des injections intraveineuses d’ozone, de vitamine C à forte dose et de divers produits dont l’EDTA (acide éthylène diamine tétra-acétique) comme chélateur de métaux lourds. Si le praticien se prévaut de publications scientifiques favorables à l’ozonothérapie, manipulation du sang qui présente un risque de contamination infectieuse important, d’autant plus que certains patients sont atteints de SIDA et d’hépatite B ou C. S’y ajoute un risque lié à la technique de transfusion, nécessitant l’emploi d’anticoagulant, et donc un risque hémorragique en cas de méconnaissance d’un traitement anticoagulant ou anti-aggrégant plaquettaire associé et un risque lié à l’administration d’un gaz, l’ozone, avec branchement concomitant du dispositif dans la veine du patient, d’où le risque d’embolie gazeuse. Répétition d’injections intraveineuses source d’infection et technique susceptible de provoquer des contaminations.
Sur la décision
Référence : | CNOM, sect. des assurances soc., 10 mai 2011, n° 4803 |
Numéro(s) : | 4803 |
Dispositif : | Rejet Interdiction temporaire d'exercer Rejet requête - 2 ans d'interdiction, dont 1 an avec sursis + publication pendant 1 an |
Sur les parties
- Avocat(s) :
Texte intégral
Dossier n° 4803 Dr Georges M Séance du 22 mars 2011 Lecture du 10 mai 2011
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, 1°), enregistrés au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins le 13 juillet 2010 et le 30 juillet 2010, la requête et le mémoire présentés par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Paris, dont l’adresse postale est 21, rue Georges Auric, 75948 PARIS CEDEX 19, tendant, d’une part, à la réformation de la décision, en date du 25 juin 2010, par laquelle la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Ile-de-France, statuant sur les plaintes formées par lui-même et par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local des Hauts-de-Seine, dont l’adresse postale est 92026 NANTERRE CEDEX, à l’encontre du Dr Georges M, qualifié en médecine générale, a infligé à celui-ci la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de deux ans dont un an avec sursis et a ordonné la publication de cette sanction pendant deux ans et, d’autre part, à l’aggravation de cette sanction, par les motifs que le Dr Georges M a mis en œuvre une thérapeutique dangereuse faisant courir un risque injustifié pour le malade ; qu’il a réalisé, en effet, des autohémotransfusions à répétition, des injections intraveineuses répétées d’ozone, des injections intraveineuses répétées de vitamine C à forte dose et des injections intraveineuses d’autres produits ; que cette activité présente un risque de contamination infectieuse, un risque lié à la technique de transfusion, nécessitant l’emploi d’anticoagulant et un risque d’embolie gazeuse ; que le Dr M a mis en œuvre une thérapeutique non conforme aux données actuelles de la science ; que six patients ont, en outre, déclaré avoir été soignés par la technique de « chélathérapie » ; que cette technique est utilisée en dehors de ses indications admises et que le praticien n’effectue aucun contrôle de la fonction rénale ; que le Dr M prend en charge, par une technique unique, des pathologies variées ; que ces thérapeutiques ne sont validées par aucun référentiel scientifique ; que, malgré les sanctions déjà prononcées contre lui, le Dr M persiste dans son comportement ; qu’il ne respecte pas la règlementation concernant la manipulation des produits sanguins en mettant en service dans son cabinet médical la technique d’auto-hémotransfusion qui ne peut être réalisée que dans un établissement de transfusion sanguine agréé ; qu’il a facturé des actes de consultation non conformes à la règlementation ; qu’il a établi des facturations sans tact ni mesure ; qu’il a coté et facturé des actes non réalisés personnellement par lui mais par un tiers ; qu’il a fait la promotion dans le public d’un remède insuffisamment éprouvé ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, 2°), enregistrés comme ci-dessus le 16 juillet 2010 et le 30 août 2010, la requête et le mémoire présentés par le médecin-conseil chef de service de l’échelon local des Hauts-de-Seine, tendant aux mêmes fins que la requête ci-dessus analysée du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Paris, par les mêmes motifs que ceux exposés dans celle-ci et, en outre, par les motifs que l’intéressé a déclaré abusivement lors d’une émission radiophonique une reconnaissance de la non-toxicité et de l’efficacité de l’ozonothérapie par l’Ordre des médecins ; que le Dr M a répété abusivement des séances de soins ; qu’il a utilisé des procédés de publicité ;
Vu, 3°), enregistrés comme ci-dessus le 26 juillet 2010 et le 14 mars 2011, la requête et le mémoire présentés pour le Dr Georges M, tendant, à titre principal, à l’annulation de la décision susanalysée de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Ile-de-France, en date du 25 juin 2010, et, à titre subsidiaire, à la diminution de la sanction qui lui a été infligée, par les motifs que la décision attaquée ne répond pas à l’expertise judiciaire réalisée par Mme Patricia MARTIN, responsable du service des prélèvements et du centre de soins à l’établissement français du sang Bourgogne-Franche-Comté, et au rapport de M. Roland SCHMITTHAUSLER ; que la décision attaquée est ainsi insuffisamment motivée et méconnaît, par suite, les stipulations de l’article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et de l’article 48 de la charte des droits fondamentaux de l’union européenne ; que la décision attaquée s’est appuyée sans discernement et motivation sur l’ensemble des pièces produites par les services médicaux ; que la plainte du service médical des Hauts-de-Seine s’est fondée sur un article du Dr M et des émissions de radio couverts par la prescription ; que des témoignages attestent de l’honorabilité, de la probité et de la compétence du Dr M ; que celui-ci utilise pour l’ozonothérapie du matériel stérile à usage unique ; que des témoignages produits établissent l’absence de dangerosité de l’ozonothérapie, le consentement des patients, les résultats positifs obtenus et l’absence d’abus de soins ; que les publications scientifiques confirment le bien-fondé de l’utilisation de l’ozone dans de nombreux cas ; que des experts confirment l’utilité de l’ozone et son absence de dangerosité de même que les colloques internationaux ; que l’ozone fait l’objet d’une utilisation courante et sans danger reconnue internationalement ; que l’ozonothérapie est enseignée en faculté en Espagne et en Italie ; qu’il est impossible juridiquement d’assimiler les autohémothérapies à des transfusions et à une collecte de sang ; que la pratique en cause est couramment mise en œuvre en Allemagne, en Autriche, en Suisse et en Italie ; que, dans une décision de sa section disciplinaire du 23 juin 2004, l’Ordre des médecins a reconnu que l’ozonothérapie ne peut être considérée comme un procédé illusoire et insuffisamment éprouvé ; que le rapport scientifico-juridique établi par M. Roland SCHMITTHAUSLER, expert de la transfusion sanguine en France, confirme le bien-fondé du point de vue du Dr M ; que le matériel utilisé par le Dr M respecte les normes CEE ; qu’il y a absence de collecte de sang ; que l’expertise judiciaire de Mme Patricia MARTIN a donné raison au Dr M ; que le grief relatif aux injections intraveineuses de vitamines, magnésium et produit chélateur n’est pas fondé comme le prouvent des avis scientifiques et une décision de la section disciplinaire de l’Ordre des médecins ; que, s’agissant des applications de champs magnétiques, le Dr M utilise un appareillage homologué et que les méthodes en cause sont couramment pratiquées et enseignées aux kinésithérapeutes qui interviennent sur prescriptions médicales ; que l’hydrothérapie du colon est largement pratiquée en Europe et a fait l’objet de publications ; qu’il n’y a pas eu de la part du Dr M d’abus d’actes, notion qui doit être appréciée compte tenu de l’état de santé du patient et non sur des bases statistiques ; que le Dr M est assisté d’une infirmière qui effectue les actes de sa compétence ; que le Dr M est en droit de faire connaître sa pensée par des ouvrages et des émissions et n’est pas responsable des indications données par ces médias ; que le Dr M a respecté les obligations déontologiques relatives au tact et mesure ; que la sanction qui a été infligée est disproportionnée ;
Vu la note en délibéré présentée pour le Dr Georges M ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de la santé publique et le code de déontologie médicale figurant aux articles R 4127-1 et suivants ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;
Vu le décret n°48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins maintenu en vigueur par les dispositions de l’article 9 du décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 ;
Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;
Après avoir entendu en séance publique :
– Le Dr AHR en la lecture de son rapport ;
– Mme le Dr FABRE, médecin-conseil, en ses observations pour les médecins-conseils chefs de service des échelons locaux de Paris et des Hauts-de-Seine ;
– Me ROBARD, avocat, en ses observations pour le Dr M et le Dr Georges M en ses explications orales ;
Le Dr Georges M ayant eu la parole en dernier ;
APRES EN AVOIR DELIBERE, Considérant que la requête du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Paris, la requête du médecin-conseil chef de service de l’échelon local des Hauts-de-Seine et la requête du Dr Georges M sont dirigées contre la même décision, en date du 25 juin 2010, de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Ile-de-France ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité de la décision attaquée :
Considérant que la circonstance que la décision attaquée ne se soit pas prononcée sur des pièces jointes au dossier et constituées par une expertise réalisée dans une instance pénale concernant un autre praticien et par des travaux d’un ingénieur-conseil au « Laboratoire français de fractionnement du sang » n’a pas été nature à entacher d’insuffisance de motivation ladite décision ;
Au fond :
Considérant que les dossiers soumis à l’examen de la section des assurances sociales se rapportent, pour trente-neuf d’entre eux, à des patients affiliés à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris (dossiers n°s 75-1 à 75-39) et pour dix-huit d’entre eux à des patients affiliés dans les Hauts-de-Seine (dossiers n°s 1 à 18) et concernent des actes accomplis par le Dr M entre le mois de janvier 2007 et le mois d’août 2007 ;
Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article R 4127-40 du code de la santé publique : « Le médecin doit s’interdire, dans les investigations et interventions qu’il pratique comme dans les thérapeutiques qu’il prescrit, de faire courir au patient un risque injustifié » ; qu’il résulte de l’étude des dossiers que le Dr M a méconnu l’obligation déontologique rappelée par ces dispositions en procédant dans son cabinet médical, isolément ou en association, à des autohémotransfusions et à des injections intraveineuses d’ozone, de vitamine C à forte dose et de divers produits dont l’EDTA (acide éthylène diamine tétra-acétique) comme chélateur de métaux lourds ; que si le Dr M se prévaut de publications scientifiques favorables à l’ozonothérapie, la technique utilisée par l’intéressé de manipulation du sang de ses patients présente un risque de contamination infectieuse important et cela d’autant plus que certains des patients en cause sont atteints de SIDA (dossier n° 75-8) et d’hépatite B ou C (dossier n° 75-3 et dossier n° 8) ; qu’il s’y ajoute un risque lié à la technique de transfusion, nécessitant l’emploi d’anticoagulant, et donc un risque hémorragique en cas de méconnaissance d’un traitement anticoagulant ou anti-aggrégant plaquettaire associé et un risque lié à l’administration d’un gaz, l’ozone, avec branchement concomitant du dispositif dans la veine du patient, d’où le risque d’embolie gazeuse ; que la répétition d’injections intraveineuses est source de possible point d’entrée d’infection et que le gaz introduit en intraveineuse a été généré par une machine qui sert également aux autotransfusions évoquées ci-dessus et est susceptible de provoquer une contamination sanguine entre patients (dossiers n°s 75-1 à 75-22, 75-24 à 75-35 et 75-37 et dossiers n°s 1, 2, 4 à 6, 8, 9, 11 à 14, 16 et 17) ;
Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article R 4127-16 du code de la santé publique : « la collecte de sang ainsi que les prélèvements d’organes, de tissus, de cellules ou d’autres produits du corps humain sur la personne vivante ou décédée ne peuvent être pratiqués que dans les cas et les conditions définies par la loi » et qu’aux termes de l’article L 1221-2 du même code : « La collecte du sang humain ou de ses composants en vue d’une utilisation thérapeutique ne peut être faite que par les établissements de transfusion sanguine agréés mentionnés au chapitre III du présent titre et dans les conditions prévues au présent chapitre » ; que le Dr M n’a pas respecté ces dispositions en mettant en œuvre dans son cabinet médical la technique d’auto-hémotransfusion alors que celle-ci correspond à une collecte de sang en vue d’une utilisation thérapeutique et ne peut donc être réalisée que dans un établissement de transfusion sanguine (dossiers n°s 75-3, 75-4, 75-6 à 75-8, 75-11 à 75-13, 75-20, 75-22, 75-24 à 75-28, 75-30, 75-31 et 75-37 et dossiers n°s 1, 2, 4, 6, 12 et 13) ;
Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article R 4127-32 du code de la santé publique : « Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents » et qu’aux termes de l’article R 4127-39 du même code : « les médecins ne peuvent proposer aux malades ou à leur entourage comme salutaire ou sans danger un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. / Toute pratique de charlatanisme est interdite » ; qu’il résulte de l’examen des dossiers que le Dr M prend en charge ses patients avec une technique associant « ozonothérapie par autohémotransfusion », « injections intraveineuses de cocktail vitaminique », « relaxation par champs magnétiques » et « hydrothérapie du colon » ; qu’il réalise pour tous ses patients plusieurs séances de soins par semaine, durant des périodes allant de quelques semaines à plusieurs années et applique sa technique de soin à des pathologies variées telle que herpès génital, dépression du post-partum, stérilité primaire, hépatite C à charge virale positive, psychose maniaco-dépressive, acouphènes, artérite des membres inférieurs, terreurs nocturnes d’un bébé de deux ans, dépression réactionnelle ou encore gastro-entérite à répétition ; qu’en mettant en œuvre pour soigner de telles pathologies des thérapeutiques qui ne sont validées par aucun référentiel scientifique, le Dr M a contrevenu à ses obligations déontologiques (dossiers n°s 75-1 à 75-35 et 75-37 et dossiers n°s 1 à 11 et 15 à 18) ; que, notamment, aucun référentiel scientifique ne confirme la validité d’un traitement de l’artérite d’une jambe par des séances d’auto-hémotransfusion et de chélathérapie (dossier n° 75-13) des « terreurs nocturnes » d’un enfant de deux ans par ozonothérapie intra-musculaire, vitamine C intra-musculaire et « relaxation par champ magnétique » (dossier n° 75-16), état anxieux et insomnie par des perfusions intraveineuses de vitamine C (dossiers n° 75-17 et 75-18), « motifs psychosomatiques » par des injections répétées de vitamines (dossiers n°s 3, 7, 8, 11, 12, 16 et 17), syndrome de fatigue chronique ou tendance dépressive par des applications répétées de champs magnétiques (dossiers n°s 3, 7, 8, 11, 12, 16 et 17),) et « gastro-entérites à répétition » par des lavements intestinaux (dossier n° 10) ;
Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article R 4127-8 du code de la santé publique, le médecin « doit (…) limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins » ; que l’étude des dossiers établit que le Dr M a procédé dans tous les dossiers des assurés de Paris, sauf le dossier n° 75-3 et dans les dossiers n°s 2, 5, 7, 8, 11 et 16 des assurés des Hauts-de-Seine à des facturations abusives de consultations ; qu’il a notamment dans les dossiers n°s 75-28, 75-29 et 75-30 correspondant à une famille de trois personnes, en état de dépression réactionnelle à un évènement traumatisant subi en 2004, facturé en 23 mois, 551 consultations pour le père, 497 consultations pour la mère et 524 consultations pour le fils, soit au total 1570 consultations entre le 2 octobre 2006 et le 11 septembre 2008 ; que, de même, dans les dossiers n°s 75-17 et 75-18, le Dr M a facturé, durant la même période, pour une femme de 49 ans et sa fille de 19 ans, 307 consultations ; qu’au total pour les 38 assurés de Paris concernés, le Dr M a facturé 4112 consultations, soit une moyenne de 108 consultations par patient ; que, dans le dossier n° 8 des assurés des Hauts-de-Seine, le Dr M a facturé, du 9 janvier 2007 au 25 août 2007, 84 consultations avec généralement quatre consultations par semaine ; que le praticien n’a pas non plus respecté son obligation de déterminer ses honoraires avec tact et mesure ; que pour l’ensemble des 38 assurés de Paris concernés, le montant des dépassements pour les consultations s’élève au total à 212 920 euros et le coût moyen par patient est de 5 600 euros ; que le Dr M a, dans le dossier n° 75-3, remis, en quatre mois, la somme de 3 700 euros à la charge d’un patient dépressif, ayant des problèmes d’addictologie à l’alcool, ne travaillant plus depuis trois ans et en instance de mise en invalidité ; que dans les cas déjà évoqués des dossiers n°s 75-17 et 75-18 d’une mère et de sa fille de 19 ans prise en charge, selon les techniques décrites ci-dessus, pour état anxio-dépressif consécutif au divorce des parents il y a 14 ans, et alors que la mère a indiqué qu’elle percevait l’allocation spécifique de solidarité, était sans emploi et avait trois enfants en charge, les soins prodigués par le Dr M ont correspondu à un coût total pour la patiente de 24 880 euros ; que, de même encore, dans le dossier n° 75-25 qui concerne une jeune femme de 32 ans qui est en inaptitude indemnisée par la COTOREP et qui bénéficie de la CMU, le Dr M l’a traitée pendant quatre mois, pour anxiété et douleurs chroniques, pour un montant de 2 310 euros ;
Considérant, en cinquième lieu, qu’il résulte aussi de l’examen des dossiers que le Dr M a facturé des actes qu’il n’a pas réalisés personnellement ; qu’il a ainsi utilisé les services d’une infirmière pour des séances de soins effectués par elle dans un local situé dans le cabinet médical ; que ces séances de soins étaient cotées en tant que consultation (dossiers n°s 75-7, 75-17, 75-18, 75-21, 75-25 et 75-36 et dossiers n°s 1, 4, 10, 15 et 18) ;
Considérant, enfin, qu’il résulte des éléments joints aux plaintes que le Dr M a, à de très nombreuses reprises, eu recours à divers médias, tels que des publications, des émissions radiophoniques et des informations sur Internet pour faire la promotion dans le public des thérapeutiques qu’il met en œuvre et qui doivent être regardées, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, comme insuffisamment éprouvées ; qu’en outre, à l’occasion de la diffusion de ces informations, le Dr M a, à plusieurs reprises, indiqué avec précision, son lieu d’exercice et les moyens de prendre contact avec lui, utilisant ainsi des procédés directs ou indirects de publicité que prohibe la déontologie médicale,(Libellé « médecines parallèles » du moteur de recherche Google) ;
Considérant que les faits ainsi retenus à l’encontre du Dr M ont constitué des « fautes, abus, fraudes » au sens de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale ; que ces faits qui sont notamment relatifs à la sécurité même des soins et au caractère illusoire des thérapeutiques mises en œuvre sont d’autant plus graves que le Dr M a déjà, à plusieurs reprises, été condamné disciplinairement pour des faits, de même nature et qu’il persiste ainsi à poursuivre une activité médicale qui, contrairement à ce qu’il soutient, est dangereuse et abusive ; que, compte tenu de l’ensemble de ces éléments, les premiers juges ont fait une juste appréciation de la gravité des faits en cause en infligeant au Dr M la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant deux ans, assortie du sursis pour une période d’un an ; qu’il a lieu, par suite, de rejeter les requêtes ;
Considérant qu’il y a lieu de déterminer les modalités d’exécution et de publication de cette sanction ;
PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :
Article 1er : La requête du médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Paris, la requête du médecin-conseil chef de service de l’échelon local des Hauts-de-Seine et la requête du Dr Georges M sont rejetées.
Article 2 : La sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant deux ans, dont un an avec sursis, qui a été infligée au Dr Georges M par la décision, en date du 25 juin 2010, de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins d’Ile-de-France, sera exécutée pour la fraction de cette sanction qui n’est pas assortie du sursis, pendant la période du 1er septembre 2011 au 31 août 2012 inclus.
Article 3 : Pendant la période du 1er septembre 2011 au 31 août 2013 inclus, cette sanction fera l’objet, dans les locaux administratifs ouverts au public des caisses primaires d’assurance maladie de Paris et des Hauts-de-Seine, de la publication prévue à l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au Dr Georges M, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local de Paris, au médecin-conseil chef de service de l’échelon local des Hauts-de-Seine, à la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de l’Ordre des médecins d’Ile-de-France, au conseil départemental de l’Ordre des médecins de la Ville-de-Paris, à l’agence régionale de santé d’Ile-de-France, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé de l’agriculture.
Délibéré dans la même composition qu’à l’audience du 22 mars 2011, où siégeaient M. de VULPILLIERES, Conseiller d’Etat honoraire, président ; M. le Dr AHR, membre titulaire, et M. le Dr TOURTELIER, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr HECQUARD, membre titulaire, et M. le Dr ANSART, membre suppléant, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.
Lu en séance publique le 10 mai 2011.
LE CONSEILLER D’ETAT HONORAIRE PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS J.F de VULPILLIERES
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER