Conseil national de l'ordre des médecins, Section des assurances sociales, 18 avril 2013, n° 4941
Résumé de la juridiction
A facturé deux cotations pour les échographies transcutanées de la glande thyroïde avec échographies des glandes parathyroïdes alors que les deux actes sont inclus dans la même cotation. A associé des radiographies du bassin et des radiographies de l’articulation coxo-fémorale. A facturé une préparation de l’abdomen en sus de l’acte radiologique. Facturation concomitante d’une radiographie du crâne et d’une radiographie de l’articulation temporo-mandibulaire et facturations de radiographies de la ceinture pelvienne du bassin associées avec des radiographies de la colonne vertébrale. Facturations de radiographie de 2 segments du membre inférieur pour une radiographie du pied. En l’absence de matériels d’ostéosynthèse ou de prothèse a appliqué la cotation de tomographie.
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Sur la décision
Référence : | CNOM, sect. des assurances soc., 18 avr. 2013, n° 4941 |
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Numéro(s) : | 4941 |
Dispositif : | Interdiction temporaire de donner soins aux assurés sociaux |
Sur les parties
- Avocat(s) :
Texte intégral
Dossier n° 4941 Dr Françoise C Séances des 22 janvier et 1er mars 2013 Lecture du 18 avril 2013
LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS, Vu, 1°, enregistrée au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins le 11 janvier 2012 la requête présentée pour le Dr Françoise C, qualifiée spécialiste en radiodiagnostic, tendant à ce que la section réforme la décision, en date du 23 décembre 2011, par laquelle la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, statuant sur la plainte du médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse et celle déposée par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône a prononcé à son encontre la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant une durée de dix huit mois dont six mois assortis du bénéfice du sursis et rejette la demande de sanction présentée par les plaignants, par les motifs que :
– les témoignages de patients selon lesquels elle n’aurait pas procédé à l’examen clinique des seins préalablement aux mammographies ne peuvent être tenus pour probants trois ans au moins après les faits et de la difficulté qu’ont les patients à prendre conscience de l’exact déroulement d’un examen ;
– s’agissant du dépistage organisé, les données sur l’examen clinique devant figurer sur la fiche d’interprétation, l’absence de cette mention aurait nécessairement fait l’objet de remarques de la structure de gestion, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ;
– la mention selon laquelle le patient n° 3 aurait fait l’objet de radiographies identiques en l’espace de trois mois est erronée, ces examens étant séparés de 8 mois ;
– à la date mentionnée par erreur, soit le 14 avril 2007, ce patient a fait l’objet d’une densitométrie osseuse rendue nécessaire par son état médical et non dangereuse en raison de la faible dose des rayons X utilisée ;
– le reproche d’avoir réalisé des examens inutiles revient à remettre en cause les prescriptions des médecins traitants ;
– les recommandations de la HAS sur la réalisation de radiographies panoramiques dento-maxillaires qui lui sont opposées prévoient elles-mêmes que le praticien est libre de ne pas les appliquer à certains patients ;
– la réalisation de ces examens a été prescrite par les médecins traitants pour les dossiers P03, P04, P11 et P21 dont l’autorité l’emporte sur la recommandation HAS ;
– elle a jugé nécessaire la réalisation de tomographies en association avec une radiographie panoramique en raison de l’état des patients en vue de rechercher la présence de petites métastases non détectables avec la radiographie panoramique ;
– pour le patient n° 6 des coupes tomographiques du maxillaire supérieur ont été réalisées en vue de mettre en évidence une éventuelle lyse osseuse ;
– l’absence de souvenir des patients n’établit pas nécessairement que les actes facturés n’ont pas été effectués ainsi qu’en témoigne le cas du patient n° 5 ;
– l’utilisation de la cotation de radiographies de genoux bilatérales étant moins élevée que la facturation des deux genoux, il ne peut lui être reproché d’avoir fait faire des économies à l’assurance maladie ;
– les comptes rendus qu’elle a établis sont conformes dès lors qu’il n’existe à l’exception de l’article 1-5 de la CCAM aucune exigence de contenu obligatoire ;
– les logiciels ne permettent pas contrairement à ce qui lui est reproché plusieurs codes à un même acte ;
– l’existence d’actes antidatés procède soit d’erreurs matérielles, soit de la circonstance que certains patients ne peuvent attendre après un examen, soit qu’ils soient obligés de revenir faute d’avoir pu réaliser les actes ;
– l’utilisation de la carte vitale ne permet pas la facturation d’actes non réalisés ;
– en l’absence de tout chiffrage détaillé il y a lieu de rejeter la demande de répétition de l’indu ;
Vu la décision attaquée ;
Vu, 2°, enregistrée comme ci-dessus le 24 janvier 2012, la requête présentée par le médecin-conseil régional du service médical Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse tendant à ce que la section réforme la décision sus-analysée, par les motifs que la décision ne se prononce pas sur la demande de récupération d’indus et que la sanction ne correspond pas à la gravité des faits ;
Vu, 3°, enregistrés comme ci-dessus, les 25 janvier et 21 février 2012, la requête et le mémoire présentés par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est 56 chemin Joseph Aiguier, 13297, MARSEILLE CEDEX 9, tendant à ce que la section aggrave la sanction infligée au Dr C en première instance, par les motifs que :
– la décision n’a pas pris suffisamment en compte le caractère répété et délibéré des irrégularités relevées et a prononcé une sanction qui n’est pas à la mesure des faits retenus ;
– la caisse primaire centrale d’assurance maladie n’entend pas demander le reversement du trop remboursé dans le cadre de cette procédure ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 1er mars 2012, le mémoire présenté par le médecin-conseil régional du service médical qui conclut à ce que la sanction infligée en première instance soit aggravée et s’agissant des cas d’abus d’honoraires, que soit prononcé le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop remboursé, par les motifs que :
– la plainte ne porte pas sur l’utilisation d’un appareil non conforme pour la réalisation des mammographies numériques ;
– aucun compte rendu ne témoigne de la réalisation d’examens cliniques préalablement aux mammographies de dépistage organisé ou non ;
– les panoramiques dentaires ne sont pas interprétés ;
– l’association quasi systématique d’échographies parathyroïdiennes aux échographies thyroïdiennes ainsi que celle d’une échographie de tissus mous à une échographie du sein témoignent de l’absence de réalisation de ces actes ;
– l’importance quantitative de ces derniers actes, très supérieure à celle de ses collègues, témoigne du grief précédent ;
– le nombre d’incidences facturées pour les radiographies du genou est lui aussi supérieur à la moyenne départementale ;
– le nombre d’incidences pour les radiographies du genou ne correspond pas à ce qui est réalisé ;
– le Dr C a falsifié et confectionné des comptes rendus a posteriori pour se mettre en conformité avec les cotations facturées ;
– la décision du conseil régional ne tient pas compte des conclusions en récupération de l’indu ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 28 juin 2012, le mémoire présenté pour le Dr C qui tend aux mêmes fins que son précédent mémoire et en outre que :
– les cas où la plainte relève l’absence de comptes rendus des mammographies sont ceux pour lesquels il n’y avait rien à signaler ;
– l’analyse statistique des actes au regard de la moyenne du secteur ne permet de retenir aucune faute à son encontre ;
– les erreurs de cotations retenues n’ont eu aucune incidence quant au coût pour l’assurance maladie ;
– le grand nombre de panoramiques dentaires réalisé s’explique par la localisation de son cabinet à proximité des lieux de travail et en centre ville où les dentistes sont plus nombreux ;
– les rhumatologues demandent systématiquement des radiographies du genou à cinq incidences ;
– le nombre important de mammographies réalisées correspond au choix de patientes de certaines confessions d’une radiologue femme ;
– les scanners qui lui sont reprochés ont été réalisés en clinique et n’ont pas été facturés par elle ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 18 juillet 2012, le mémoire présenté par le médecin-conseil régional du service médical qui relève que le mémoire du Dr C n’apporte pas d’éléments susceptibles de remettre en cause les griefs ; que la facturation des actes doit être le reflet de ce qui a été réalisé et que le SCAN NEWTON ne pouvait donner lieu à des facturations en YYYY308 correspondant à des tomographies ;
Vu, enregistré comme ci-dessus le 23 juillet 2012, le mémoire présenté par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône qui tend aux mêmes fins que son appel et confirme ne pas avoir demandé le remboursement du préjudice dans le cadre de la présente procédure ;
Vu, enregistrée comme ci-dessus le 5 février 2013, la note en délibéré par laquelle le médecin-conseil régional du service médical de Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse adresse à la juridiction des contre types (tels que visés dans sa plainte) ;
Vu les courriers du secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins en date du 8 février par lesquels les parties sont informées qu’à la suite de la production d’une note en délibéré l’instruction est rouverte, et convoquées à une audience le 1er mars 2013 ; Vu, enregistrées au secrétariat de la section des assurances sociales du Conseil national de l’Ordre des médecins les 11 et 12 février 2013, la demande de report de l’audience présentée par le conseil du Dr C et des observations tendant à ce que la note en délibéré soit déclarée irrecevable au regard des dispositions de l’article 445 du code de procédure civile ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales Vu le code de la santé publique, ses articles R 4127-1 et suivants ;
Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles L 145-1 à L 145-9 et R 145-4 à R 145-29 ;
Vu le décret n° 48-1671 du 26 octobre 1948 modifié, relatif au fonctionnement des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de la section disciplinaire du Conseil national de l’Ordre des médecins maintenu en vigueur par les dispositions de l’article 9 du décret n° 2007-434 du 25 mars 2007 ;
Vu la nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux fixée par l’arrêté du 27 mars 1972 modifié ;
Vu la classification commune des actes médicaux ;
Après avoir entendu en audience publique du 29 janvier 2013 :
– Le Dr MIRE en la lecture de son rapport ;
– Me FORNET, avocat, en ses observations pour le Dr C et le Dr Françoise C en ses explications orales ;
– Mme le Dr CHEVALLIER, médecin-conseil, en ses observations pour le médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse ;
– Me TASSEL avocat, en ses observations pour la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône ;
Le Dr Françoise C ayant eu la parole en dernier ;
Et lors de l’audience publique du 1er mars 2013 :
– Le Dr MIRE en la lecture de son rapport ;
– Mme le Dr CHEVALLIER, médecin-conseil, en ses observations pour le médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse;
– Me TASSEL avocat, en ses observations pour la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône;
Le Dr Françoise C ne s’étant ni présentée, ni fait représenter ;
APRES EN AVOIR DELIBERE, 1 – Considérant que les requêtes du Dr C, du médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse et de la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône sont dirigées contre la même décision de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire du conseil régional de l’Ordre des médecins de Provence-Alpes-Côte-D’azur Corse en date du 23 décembre 2011 ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur la régularité de la décision attaquée :
2 – Considérant qu’aux termes de l’article R 315-3 du code de la sécurité sociale « Dans chaque région, le contrôle médical est placé sous la direction d’un médecin conseil régional, assisté d’un médecin conseil régional adjoint, et éventuellement de praticiens conseils auxquels il peut confier certaines attributions ou missions d’ordre technique…. » ; que la plainte formée à l’encontre du Dr C devant la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire du conseil régional de l’ordre des médecins en tant qu’elle était présentée par le service médical, émanait du Dr S, médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse ; que la juridiction qui a statué sur cette plainte comptait parmi ses membres, à titre d’assesseur représentant les organismes d’assurance maladie, le docteur P médecin-conseil au sein du service médical près la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône, placé en cette qualité sous l’autorité hiérarchique directe de l’auteur de la plainte ; qu’ainsi cette décision a été prise par une juridiction irrégulièrement composée et doit, pour ce motif, être annulée ;
3 – Considérant qu’il y a lieu d’évoquer l’affaire et de statuer sur les plaintes formées par le médecin conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse et par la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône à l’encontre du Dr C ;
4 – Considérant qu’à l’occasion du contrôle de l’activité du Dr C, ont été relevées des anomalies dans les actes effectués par ce praticien au cours de la période du 1er mars 2006 au 17 février 2009 ; que, toutefois, la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse ayant été saisie le 26 mars 2010 par le médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur-Corse, les actes réalisés avant le 26 mars 2007 doivent être réputés prescrits en application de l’article R 145-17 du code de la sécurité sociale ; qu’il y a lieu dès lors d’écarter comme ne pouvant donner lieu à sanction dans leur intégralité les actes concernant les patients N02, P04 et P20, ainsi que les actes réalisés le 19/12/2006 pour le patient M03, le 3/01/2007 pour le patient M04, le 15/06/2006 pour le patient M08, le 12/01/2007 pour le patient M27, le 5/03/2007 pour le patient M29, le 9/02/2007 pour le patient M36, le 9/03/2007 pour le patient M37, les 14/02/2007 et 4/02/2007 pour le patient N01, le 5/12/2006 pour le patient N02, le 12/03/2007 pour le patient O3, le 7/03/2007 pour le patient O8, les 9/01/2007 et 23/03/2007 pour le patient O19, le 11/12/2006 pour le patient O23, le 30/11/2006 pour le patient O26, le 22/03/2007 pour le patient P03, les 29/11/2006, 5/12/2006,10/01/2007 et 11/01/2007 pour le patient P11, les 8/12/2006 et 12/12/2006 pour le patient P13, les 27/11/2006 et 31/01/2007 pour le patient P19, les 12/02/2007,19/02/2007 et 14/03/2007 pour le patient P21, les 28/11/2006, 29/11/2006 et 23/01/2007 pour le patient T02 ;
Sur les conclusions du Dr C dirigées contre la procédure suivie devant la juridiction d’appel :
5 – Considérant qu’à la suite d’une première audience tenue par la section des assurances sociales de l’Ordre des médecins, le service médical plaignant a produit en annexe à sa note en délibéré les contretypes de clichés réalisés par le Dr C dont ce service avait fait état dans sa plainte sans pouvoir les communiquer en raison d’une instance pénale en cours ; que conformément aux principes généraux de la procédure applicable aux juridictions administratives, le Dr C, à la suite de la réouverture de l’instance, a été invitée à prendre connaissance de ces pièces et à communiquer ses observations ; qu’une nouvelle audience s’est tenue le 1er mars 2013 ; que si le Dr C soutient que cette procédure méconnaitraît l’article 445 du code de procédure civile selon lequel une instance ne peut être rouverte, cette disposition n’est en tout état de cause pas applicable devant la juridiction du contentieux du contrôle technique ; qu’ainsi le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure suivie en appel ne peut qu’être écarté ;
Sur les griefs tirés de la dangerosité de certaines pratiques médicales du praticien :
6 – Considérant, en premier lieu, qu’il résulte des dispositions de l’annexe III-B titre-III Chapitre B, paragraphe 4 de l’arrêté du 29 septembre 2006 relatif au dépistage organisé que les mammographies réalisées dans ce cadre doivent être précédées d’un examen clinique ; qu’il ne résulte pas de l’examen des pièces du dossier que de tels examens, qui ne figurent pas dans les comptes rendus, aient été pratiqués dans le cadre des dépistages organisés pour les patientes M01, M06, M07, M09, M10, M11, M12, M18, M24, O8, O15, O16, P13 en méconnaissance des dispositions précitées ; qu’en revanche, si les plaignants soutiennent qu’aucun examen clinique n’aurait été effectué préalablement aux mammographies réalisées en dehors du dépistage organisé, il ne résulte d’aucun texte ni d’aucune recommandation médicale qu’un tel examen, aussi souhaitable soit-il médicalement, constitue une obligation pour le radiologue ; que par suite le grief invoqué pour les dossiers M02, M03, M04, M05, M06, M08, M09, M10, M18, M22, M23, M27, M28, M29, M30, M31, M33, M35, M36, M37, N01, N02, N03, O19, P11, P16, P19 et T02 doit être écarté ;
7 – Considérant, en deuxième lieu, qu’il est reproché au Dr C d’avoir, dans un nombre important de cas, réalisé des radiographies non justifiées par l’état des patients les exposant ainsi inutilement aux rayonnements ionisants ; que tel est le cas pour la patiente 03 qui a subi deux radiographies du bassin à quatre mois d’intervalle sans élément clinique nouveau ; qu’il ne résulte pas non plus de l’examen des pièces du dossier qu’ait été justifiée la multiplication de radiographies panoramiques constatée pour les patients P03 (7 actes en 18 mois), P11 (3 actes en 2008) et P 21 (5 actes en 2007 et 2008) alors que les recommandations de la HAS limitent ce type de clichés aux diagnostics implantaires ou à certaines circonstances pathologiques non constatées en l’espèce ; que la réalisation de deux radiographies panoramiques à huit jours d’intervalle pour le patient M07 n’est justifiée par aucun élément médical du dossier ; qu’alors que le guide des indications et des procédures des examens radiologiques en stomatologie réserve les tomographies aux seules hypothèses où les examens radiologiques conventionnels ne permettent pas une analyse complète des éléments pathologiques, le Dr C a réalisé et facturé de façon systématique de tels clichés dans les cas des patients P06, P11, P21, O1, P01, P13, P16 bis, P19 ; qu’il résulte enfin de l’examen des pièces du dossier que le Dr C a réalisé hors indication une ostéodensitométrie à la seule demande de la patiente M10 ; que le même examen pratiqué sur la patiente P11, âgée de 82 ans et en l’absence de facteur de risque ne se justifiait pas ;
Sur les griefs tirés de la facturation d’honoraires indus 8 – Considérant, en premier lieu, qu’il est fait grief au Dr C d’avoir facturé des actes qu’elle n’a en réalité pas effectués ; que ce grief doit, eu égard aux déclarations formelles des assurés non contredites par les pièces du dossier, être tenu pour établi s’agissant de la facturation d’une radiographie du bassin pour le patient 05, d’une échographie du pelvis féminin pour la patiente P19 qui a attesté ne pas avoir eu d’échographie pelvienne le 18 avril 2008 et des échographies musculaires et des articulations pour le patient T07 ; que le même grief appliqué au patient P17 doit être écarté au bénéfice du doute en raison des explications données par le Dr C ;
9 – Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte de l’examen des contretypes des clichés produits au dossier que, dans six cas, des radiographies facturées comme bilatérales n’ont été réalisées que sur un seul membre ; qu’il en est ainsi des radiographies de l’épaule pratiquées sur les patients M06 et O11, de la radiographie du poignet sur le patient O21, de la radiographie de la hanche sur les patients M09 et M10, de la radiographie du genou sur les patients M10 et O22 ; que le grief doit en revanche être écarté pour le patient O25 en raison d’absence d’éléments sur le compte-rendu portant sur la hanche droite et pour la patiente M08 pour laquelle n’a été présentée à la facturation qu’une mammographie unilatérale ; que les mêmes pièces du dossier font apparaître que le Dr C a dans 30 cas, non atteints par la prescription, facturé des clichés correspondant à une zone anatomique non retrouvée sur les radiographies ; que tel est le cas pour les clichés du bassin facturés comme radiographie de la hanche pour les patients O2 et O12, pour les clichés de la hanche facturés comme radiographie du bassin, pour le patient 03, pour les clichés du rachis dorso lombaire facturés comme radiographie du rachis cervical pour le patient O2, pour les clichés du rachis cervical facturés comme radiographie du segment cervical pour les patients O1 et P 19, pour les radiographies du segment lombaire vertébral présentées comme radiographie du segment thoracique pour les patients O12 et D04 ou pour les radiographies du pied facturées comme radiographies de la jambe pour le patient O5 ; qu’il résulte de l’examen des pièces du dossier que dans les dossiers M06, P11 (22/02/08), P03, O3, M10, O23, O25, M03 (3/01/08), O8 (12/11/2008), O25, P09, O16, O11, P16 bis le nombre d’incidences facturées est supérieur à celui apparaissant sur les comptes rendus ou sur les clichés ; que ce même grief doit toutefois être écarté en raison de l’incohérence des pièces dans le dossier D04, et de l’imprécision des comptes rendus dans les dossiers O16 et O22 ; que dans les dossiers M27, O6, O23 (25/06/2008), O1, O21, P09, M31, O19, T02, le Dr C a facturé plusieurs radiographies au titre de segments de membres alors qu’il résulte des comptes rendus ou des clichés produits qu’elle s’est bornée à radiographier le membre en entier ; qu’il résulte, enfin, des pièces du dossier que pour huit assurés et à douze reprises le Dr C a coté la réalisation en même temps que des échographies thyroïdiennes des échographies parathyroïdiennes, lesquelles ne doivent d’ailleurs être réalisées qu’en cas de formation anormale, sans qu’aucune pièce au dossier n’atteste de cette réalisation (dossiers O15, O19, P13, T01, T03, T07, T09, T10 ) ; qu’en tout état de cause, ainsi qu’il est dit plus loin , elle ne pouvait procéder qu’à la cotation d’un seul acte ;
10 – Considérant, en troisième lieu, qu’il résulte de l’article 3 des dispositions générales de la CCAM que ne peut être facturée au cours d’une même séance que l’association de deux actes au plus, le second acte étant tarifé à 50 % de sa valeur ; qu’il y a lieu de reconnaître comme fautive, dès lors qu’elle permet au praticien d’échapper à cette réduction, la facturation au titre de journées différentes d’actes radiographiques pour les patients O16, M11, P11 et M28, alors qu’il ressort des dates figurant sur les clichés que ceux-ci ont été effectués le même jour ;
Sur les griefs tirés de l’établissement de faux comptes rendus d’examens radiologiques :
11 – Considérant que s’il est fait grief au Dr C d’avoir volontairement établi a posteriori de faux comptes rendus d’examens radiologiques, les pièces du dossier ne permettent pas d’établir la réalité d’un tel grief ; qu’il est en revanche établi que les comptes rendus établis pour les patients P09, D3, N01, M07, M10, M30, M36, O15 retracent des actes qui, ainsi qu’il est dit ci-dessus, n’ont pas été effectivement réalisés ou dont la réalisation effective n’est pas corroborée par les clichés produits à l’instance ; qu’il y a lieu en revanche d’écarter le grief pour les dossiers N03, M02, O16, M29, M31, M33, M3 la discordance des dates ou des contenus entre le compte rendu en possession des assurés et celui remis par le praticien ne suffisant pas à établir la réalisation d’un faux par ce dernier ; qu’il y a lieu en outre d’écarter le même grief s’agissant du dossier M02 en tant qu’il s’appuie sur le témoignage du mari de la patiente ; qu’il y a lieu également de retenir les dossiers M05, M06, M08, M09, M11, M18, M22, M23, M24, M27, M28, M35, M36, M37, N01, P11 et T02 pour échographies de la peau et des tissus mous facturées en sus d’une échographie mammaire alors que les patientes ont précisé n’avoir eu qu’une échographie mammaire ; ainsi que les dossiers O19 (14/03/2008), O15, T05 et T06 pour facturation d’échographies des glandes parathyroïdes et/ou des parties molles du cou le même jour qu’une échographie thyroïdienne avec transmission de comptes-rendus par le Dr C alors que les patients concernés n’avaient qu’un compte rendu portant sur la glande thyroïdienne ;
Sur les griefs tirés du non respect de la CCAM par absence d’examen clinique ou par association de codes ne pouvant être facturés ensemble :
12 – Considérant, en premier lieu, que si en application de l’article L 145-1 du code de la sécurité sociale il incombe aux juridictions du contrôle du contentieux technique de relever les fautes commises par les médecins à l’occasion de soins dispensés à des assurés sociaux, il ne leur appartient pas de porter une appréciation sur la pratique générale suivie indépendamment de ces cas particuliers ; qu’ainsi les plaignants ne sauraient utilement soutenir que pour 708 mammographies bilatérales, 341 mammographies de dépistage et 4 mammographies unilatérales, pour lesquelles aucun dossier n’est présenté, le Dr C aurait méconnu les dispositions relatives au dépistage du cancer du sein ; qu’il en va de même du grief tiré de ce qu’à 674 reprises le Dr C n’aurait pas respecté les règles d’association d’échographies mammaires et d’échographie du creux axillaires ; qu’il en va encore ainsi pour les 343 associations d’échographies thyroïdiennes et parathyroïdiennes et pour les 159 associations de radiographies de bassin et de radiographies de l’articulation coxo-fémorale ;
13 – Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte des dispositions du chapitre 10.1. de la CCAM que la cotation KCQM001 pour l’échographie transcutanée de la glande thyroïde est identique qu’elle inclut ou non l’échographie des glandes parathyroïdes ; que le Dr C n’était ainsi autorisée qu’à facturer une seule cotation pour les deux actes ; que le grief doit ainsi être retenu pour les dossiers O15, O19, P13, T01, T02, T03, T05, T06, T07, T09, T10 ; que ce grief doit toutefois être écarté en l’absence de pièces au dossier permettant d’apprécier son bien fondé pour les dossiers M06 et T13 ; qu’en application des dispositions de l’article 14.1.1 de la CCAM la radiographie du bassin ne peut être associée à une radiographie de l’articulation coxo-fémorale ainsi qu’il a été fait pour les patients M05, M09 et O23 ;
14 – Considérant en troisième lieu que s’il est reproché au Dr CI d’avoir réalisé à des dates différentes des échographies abdominales et du pelvis féminin (M08) ou une échographie de l’abdomen et du pelvis puis une échographie du sein (N03) les pièces du dossier ne permettent pas d’établir que ces examens séparés ne seraient pas justifiés par des circonstances particulières ; que le grief doit être écarté comme insuffisamment établi au bénéfice du doute;
Sur les griefs tirés de la non qualité des actes pratiqués 15 – Considérant, en premier lieu, qu’aucun texte n’impose de faire figurer sur les clichés la nature des incidences réalisées aussi souhaitable cela soit-il ; que le grief doit être écarté pour les treize dossiers figurant dans la plainte ;
16 – Considérant, en deuxième lieu, qu’il résulte de l’examen des comptes rendus figurant aux dossiers que ceux-ci comportent de nombreuses imprécisions ou erreurs (O19, M08, P13) ; que les comptes rendus d’échographie mammaire se résument à une ligne stéréotypée dans les dossiers M09, M24, M31, M35, N01, N03, O16, P11 ;
17 – Considérant en troisième lieu que la circonstance que dans le cas de huit patients des comptes rendus d’ostéodensitométrie comporteraient un avis sur la nécessité d’un traitement alors que les recommandations médicales publiées par la HAS en juin 2006 déconseillent de faire figurer dans le compte rendu de cet examen des « conclusions sur le traitement » ne saurait en tout état de cause eu égard aux termes généraux de cette recommandation constituer un manquement fautif susceptible d’être reproché au radiologue ;
Sur les griefs tirés de la réalisation d’actes non justifiés par l’état des patients :
18 – Considérant, en premier lieu, qu’il résulte du cahier des charges du dépistage du cancer du sein que la réalisation d’échographie n’est indiquée dans ce cadre que pour mieux définir et bien situer une image anormale détectée à l’occasion de la mammographie ; qu’ainsi cet examen complémentaire n’était pas justifié dans le cas des patientes M10, M22, M23, M24, M36 dont les mammographies ne faisaient pas état de lésions, ni pour la patiente M06 pour laquelle une échographie venait d’être réalisée, et plus encore pour la patiente N01 pour laquelle l’échographie a été réalisée avant la mammographie ;
19 – Considérant, en second lieu, que les simples douleurs abdominales dont se plaignait le patient M35 ne justifiaient pas une échographie de l’étage supérieur de l’abdomen et du pelvis, ce que confirme le compte rendu qui fait état d’une simple lithiase vésiculaire ;
Sur les griefs tirés du non respect des règles de facturations de la CCAM :
20 – Considérant, en premier lieu, que selon l’article I-5 des dispositions générales de la CCAM les comptes rendus d’examens radiologiques doivent comporter les modalités techniques des appareils utilisés, l’indication médicale de l’acte et le nombre d’incidences réalisées ; que dans 47 actes de radiographie panoramique effectués pour 20 patients le compte rendu ne comporte aucune interprétation médicale et se borne à indiquer « examen à soumettre à un avis odontologique » ou orthodontique ; qu’ainsi qu’il est dit plus haut les comptes rendus radiographiques établis pour les patients O19, O6, M10 et O11 et P07 ne correspondent pas à la cotation présentée à l’assurance maladie ; que toutefois, ainsi qu’il est dit plus haut cette cotation étant erronée, il y a lieu de considérer que les comptes rendus établis correspondent à la réalité de l’acte effectué ; qu’il en est de même s’agissant des comptes rendus établis pour les échographies des patients T02, P11, P13, P19 et T05 ; qu’enfin il y a lieu de retenir le grief tiré de l’absence du nombre d’incidences pour les dossiers T02 et P01 ;
21 – Considérant, en deuxième lieu, que selon l’article I-6 des dispositions générales de la CCAM les actes techniques médicaux décrits dans ce texte comprennent l’ensemble des gestes nécessaires à leur réalisation dans le même temps d’intervention ou d’examen ; que cette disposition interdit ainsi que cela a été fait pour les patients M10, N04, O8 et P09 de facturer une préparation de l’abdomen en sus de l’acte radiologique ;
22 – Considérant, enfin qu’en application de l’article 11.1.3 de la CCAM la radiographie du crâne excluait pour le patient T09 la facturation concomitante d’une radiographie de l’articulation temporo-mandibulaire ; qu’en application de l’article 12.1.3.1 la radiographie de la ceinture pelvienne du bassin ne peut être associée avec des radiographies de la colonne vertébrale ainsi que l’a fait le Dr C pour les patients N03 et O2 ; qu’en application de l’article 14.1.1 la radiographie de 2 segments du membre inférieur ne peut être appliquée pour une radiographie du pied comme il a été fait pour les patients, O23, O6 et O26 ; qu’en l’absence de matériels d’ostéosynthèse ou de prothèse les dossiers M07, N01, O1, P01, P06, P10, P11, P13, P16 bis, P17, P18, P19 et P21 ne pouvaient en application de l’article 19.1.9 de la CCAM se voir appliquer de cotation de tomographie ;
Sur la sanction :
23 – Considérant que les faits retenus ci-dessus à l’encontre du Dr C ont un caractère fautif, susceptible de lui valoir une sanction disciplinaire en application des dispositions des articles L 145-1 et L 145-2 du code de la sécurité sociale ; qu’il sera fait une juste appréciation de leur gravité en prononçant à son encontre l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un an dont six mois assortis du bénéfice du sursis sans qu’il y ait lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’ordonner le remboursement des sommes demandées par le médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur Corse sur le fondement du 4°de l’article L 145-2 ;
PAR CES MOTIFS,
D E C I D E :
Article 1er : La décision du 23 décembre 2011 de la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse est annulée.
Article 2 : Il est infligé au Dr Françoise C la sanction de l’interdiction du droit de donner des soins aux assurés sociaux pendant un an. Il sera sursis pour une durée de six mois à l’exécution de cette sanction dans les conditions fixées à l’article L 145-2 du code de la sécurité sociale.
Article 3 : L’exécution de cette sanction, pour la partie non assortie du sursis, prononcée à l’encontre du Dr Françoise C prendra effet le 1er juillet 2013 à 0 h et cessera de porter effet le 31 décembre 2013 à minuit.
Article 4 : Les conclusions du médecin-conseil régional du service médical Provence Alpes Côte d’Azur Corse tendant au remboursement et le recours de la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches du Rhône sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée au Dr Françoise C, au médecin-conseil régional du service médical Provence-Alpes-Côte-d’Azur-Corse, à la caisse primaire d’assurance maladie des Bouches-du-Rhône, à la section des assurances sociales de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins de Provence-Alpes-Côte-d’Azur, au conseil départemental de l’Ordre des médecins de Corse du Sud, au directeur de l’agence régionale de santé de Corse, au ministre chargé de la sécurité sociale et au ministre chargé de l’agriculture.
Délibéré dans la même composition que dans les audiences du 22 janvier et 1er mars 2013, où siégeaient M. BARDOU, Conseiller d’Etat, président ; M. le Dr AHR, membre titulaire et M. le Dr MIRE, membre suppléant, nommés par le Conseil national de l’Ordre des médecins ; M. le Dr HECQUARD, membre titulaire et Mme le Dr GUERY, membre suppléant, nommés par le ministre chargé de la sécurité sociale.
Lu en séance publique le 18 avril 2013
LE CONSEILLER D’ETAT PRESIDENT DE LA SECTION DES ASSURANCES SOCIALES DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS G. BARDOU
LE SECRETAIRE DE LA
SECTION DES ASSURANCES SOCIALES
M-A. PEIFFER