Conseil de l'Ordre national des masseurs-kinésithérapeutes, Chambre Disciplinaire Nationale, 25 juillet 2017, n° 014-2016

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Sur la décision

Référence :
ONMK, ch. disciplinaire nationale, 25 juill. 2017, n° 014-2016
Numéro(s) : 014-2016
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Sur les parties

Texte intégral

ORDRE NATIONAL DES MASSEURS-KINESITHERAPEUTES
CHAMBRE DISCIPLINAIRE NATIONALE
N°014-2016 Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes c. M. S.
Rapporteur : M. François DUCROS
Audience publique du 04 juillet 2017
Décision rendue publique par affichage le 25 juillet 2017
Procédure contentieuse antérieure : Mme B. a porté plainte le 13 janvier 2015 auprès du conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de l’Eure contre M. S., masseur-kinésithérapeute, à (…).
Après échec de la conciliation tenue le 5 février 2015, le conseil départemental de l’ordre a transmis la plainte à la juridiction disciplinaire sans s’y associer.
Par une décision n° 2015/1 du 31 mars 2016, la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Haute-Normandie a infligé à M. S. la sanction de l’avertissement.
Procédure devant la chambre disciplinaire nationale :
Par une requête enregistrée le 3 mai 2016, sous le n° 014-2016, au greffe de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, représenté par sa présidente, et dont le siège est 120-122 rue Réaumur, 75002 Paris, demande à la chambre disciplinaire nationale :
1°) d’annuler la décision n° 2015/1 du 31 mars 2016 de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Haute-Normandie ;
2°) de prononcer à l’égard de M. S. une sanction en adéquation avec la gravité des faits reprochés ;
Il soutient que :
 en application de l’article L. 4122-3 du code de la santé publique rendu applicable aux masseurs-kinésithérapeutes par l’article L. 4321-19 du même code, l’appel est recevable ;
 en entretenant au sein de son cabinet professionnel une relation intime avec l’une de ses patientes, M. S. a méconnu les articles R. 4321-53, R. 4321-54, R. 4321-58, R.
4321-79 et R. 4321-96 du code de la santé publique ;
 quand bien même l’état de vulnérabilité de Mme B. ne serait pas suffisamment établi, ce professionnel qui était dans un état de confiance réciproque avec sa patiente aurait dû se garder d’aller au-delà des limites de ses missions professionnelles ;
Vu la décision attaquée.

1 Par un mémoire, enregistré le 8 novembre 2016, M. S., masseur-kinésithérapeute, domicilié (…), représenté par Me Marie-Noëlle Campergue conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
 les faits reprochés à M. S. ont été commis non dans le cadre de son activité de masseur-kinésithérapeute mais dans celle de « maître Reiki », méthode de soins non conventionnels d’origine japonaise fondée sur des soins énergétiques qu’il exerçait de façon distincte de sa pratique paramédicale ;
 elle ne disposait d’aucune prescription pour des soins ;
 M. S a pris l’initiative de rompre la relation et de refuser les soins ;
 la chambre disciplinaire de première instance a estimé que la relation pour inappropriée qu’elle fût, ne s’était pas déroulée dans le cadre de l’exercice de la profession de masseur-kinésithérapeute ;
 la vulnérabilité de Mme B. n’a pas été retenue ;
 M. S. gravement malade a dû mettre fin à son activité et il est actuellement en invalidité ;
Par un mémoire enregistré le 4 janvier 2017, le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes, représenté par sa présidente, reprend les mêmes conclusions et les mêmes moyens que sa requête.
Il fait en outre valoir que :
 la circonstance invoquée par M. S. que les relations avec Mme B. seraient intervenues à l’occasion de son activité de « maître de Reiki » est inopérante dès lors qu’il résulte de l’article R. 4321-79 du code de la santé publique que « le masseur-kinésithérapeute s’abstient même en dehors de l’exercice de sa profession de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci » ;
 en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le titre de masseurkinésithérapeute a influencé Mme B. dans le choix du professionnel et que les deux activités ne sauraient être dissociées ;
 les relations se sont bien déroulées sur le lieu de l’exercice professionnel de M. S. ;
 c’est Mme B. qui est à l’origine de la fin de la relation ;
 le masseur-kinésithérapeute, qui dispose nécessairement d’un ascendant sur ses patients, doit par principe dans le cadre de l’exercice de son activité s’interdire à leur égard toute relation intime ou si de telles relations en viennent à s’instaurer orienter son patient vers un autre professionnel ;
 il ne résulte d’aucun élément du dossier que M. S. a cessé son activité ;
Par des observations présentées le 27 mars 2017, Mme B. se déclare en accord avec les conclusions du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience, 2 Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 04 juillet 2017 :
- M. Ducros en son rapport ;
- Les explications de M. Roger-Philippe Gachet, conseiller national, pour le conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes ;
- Les observations de Me Campergue pour M. S. ;
- Mme B., dûment convoquée, n’étant ni présente, ni représentée ;
- Le conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de l’Eure, dûment convoqué, n’étant ni présent, ni représenté ;
Me Campergue ayant été invitée à reprendre la parole en dernier ;
Après en avoir délibéré 1- Considérant qu’il résulte de l’instruction que Mme B. a formé le 13 janvier 2015 une plainte à l’encontre de M. S., masseur-kinésithérapeute, qu’elle consultait pour « un blocage dans le bas du dos, avec douleurs dans une jambe, des problèmes hémorroïdaires, grosse fatigue générale, et (…) détresse affective » ; que celle-ci explique qu’après deux séances s’est nouée entre eux une relation intime et sexuelle dont elle ne nie pas le caractère consenti mais dont elle souligne qu’elle a eu sur son existence des conséquences douloureuses sur sa vie familiale ; qu’elle s’estime abusée et manipulée par les agissements de ce praticien dans le cadre thérapeutique ; que par une décision du 31 mars 2016, la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de la région Haute-Normandie a prononcé à l’encontre de M. S. la sanction de l’avertissement ; que le Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes fait appel de cette décision en raison de l’absence de proportionnalité de la sanction avec les faits imputés au professionnel poursuivi ;
2- Considérant que l’article R. 4321-54 du code de la santé publique dispose que : « Le masseur-kinésithérapeute respecte, en toutes circonstances, les principes de moralité, de probité et de responsabilité indispensables à l’exercice de la masso-kinésithérapie. » ; que selon l’article R. 4321-79 de ce code : « Le masseur-kinésithérapeute s’abstient, même en dehors de l’exercice de sa profession, de tout acte de nature à déconsidérer celle-ci » ;
3- Considérant que la pratique de relations sexuelles entre un professionnel et sa patiente au sein même d’un local exclusivement destiné aux soins constitue, ainsi que l’ont décidé les premiers juges, une méconnaissance des responsabilités qui incombent à ce professionnel et l’expose même dans l’hypothèse d’une relation librement consentie, ainsi que c’est le cas en l’espèce, à se voir reprocher un comportement incompatible avec les obligations déontologiques inhérentes à l’exercice de la masso-kinésithérapie ; que la circonstance, que l’absence de prescription médicale ne suffit pas à établir, que Mme B. n’aurait pas consulté M. S. en qualité de masseur-kinésithérapeute mais en tant que « maître de Reiki », procédé non conventionnel qu’il exerce au sein de son cabinet, ne saurait en tout état de cause l’exonérer de sa responsabilité dans la mesure où le professionnel est tenu de respecter les règles déontologiques dans le cadre de l’ensemble de ses activités paramédicales ;

3 4- Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. S. a méconnu les obligations mentionnées aux articles R. 4321-54 et R. 4321-79 du code de la santé publique ; que dans les circonstances de l’espèce il sera fait une juste appréciation de la gravité des fautes commises par ce professionnel en lui infligeant la sanction du blâme ;

DECIDE
Article 1er :
Il est prononcé à l’encontre de M. S. la sanction du blâme.
Article 2 :
La décision n° 2015/1 de la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de Haute-Normandie en date du 31 mars 2016 est réformée en ce qu’elle a de contraire à la présente décision.
Article 3 :
La présente décision sera notifiée à M. S., à Mme B., au conseil départemental de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de l’Eure, au conseil national de l’ordre des masseurskinésithérapeutes, au procureur de la République près le Tribunal de grande instance d’Evreux, au directeur général de l’Agence régionale de santé de Normandie, à la chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes de HauteNormandie et au Ministre des Solidarités et de la Santé.
Copie pour information en sera délivrée à Me Campergue.
Ainsi fait et délibéré par M. BARDOU, Conseiller d’Etat honoraire, Président et Mme TURBAN, MM. DAVID, DUCROS, DUTARTRE, POIRIER membres assesseurs de la chambre disciplinaire nationale.

Gilles BARDOU
Conseiller d’Etat honoraire
Président
Aurélie VIEIRA
Greffière
La République mande et ordonne au ministre chargé de la santé en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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Textes cités dans la décision

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