Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, rapport du rapporteur, Affaire 177 - Absence à l'audience du pharmacien convoqué, n° 420-D

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
ONPH

Sur les parties

Texte intégral

AFFAIRE M. A et Mme B
Document n° 420-R
Le RAPPORTEUR
Le 5 décembre 2005, M. JAUBERT, président du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens du
Limousin, a porté à la connaissance de M. A et Mme B2 qu’il déposait plainte à leur encontre pour infraction aux articles R 42355, R 4235-26 et R 4235-67 du code de la santé publique —
ANNEXE I et I BIS. M. A et Mme B étaient, à l’époque des faits, cotitulaires de la Pharmacie
K….
I — ORIGINE DES PLAINTES
Le président du conseil régional du Limousin ayant demandé une inspection de cette officine, celle-ci a eu lieu le 11 octobre 2005 et fut réalisée par M. D, pharmacien inspecteur régional et Mme E, pharmacien inspecteur de santé publique. C’est sur la base de leur rapport — ANNEXE II — que les plaintes furent déposées.
En fait, à la date de l’inspection, M. A n’était plus titulaire, mais pharmacien adjoint à temps partiel dans cette officine. En effet, M. A et Mme B ont exploité cette pharmacie sous forme de
SARL (dénommée Pharmacie AB) du 15 juin 2002 au 28 février 2005, M. A et Mme B possédant chacun la moitié des parts. Cette SARL a été cédée à la SNC «K » (constituée le 18 décembre 2004) et dont les parts étaient réparties à égalité entre Mme B et M. C. La SNC « K » a débuté son exploitation le ler mars 2005. Il convient également de rappeler que précédemment, du 16 février 1994 au 15 juin 2002, M. A et Mme B exerçaient déjà en SNC, leur pharmacie étant alors située…. Parallèlement, M. A a été gérant d’une société de vente par correspondance dénommée G dont le siège était … — ANNEXE III.
Selon les déclarations faites aux pharmaciens inspecteurs par M. A, l’idée de créer un site Internet remonte à 1999. Ce site dénommé G.fr sur lequel il recevait des commandes de produits commercialisés dans la pharmacie a rapidement rencontré le succès. Ce succès a conduit M. A a créer en 2001 une société de vente par correspondance à laquelle il donna le même nom que le site
Internet (comme en atteste l’extrait K bis annexé). Pas la suite, malgré un chiffre d’affaires conséquent, cette société, en raison de difficultés financières (64 954 euros de perte sur l’exercice 2002) fut cédée à M. J, dirigeant de la société «J » située …. Après cette cession, M. A a rétrocédé à la société précitée des produits commercialisés dans son officine. Les pharmaciens inspecteurs ont relevé que le montant des rétrocessions de la Pharmacie AB s’était élevé à 339 937,99 euros (HT) pour l’exercice clos au 30 juin 2003 et à 591 526,85 euros (HT) pour celui clos au 30 juin 2004. Les bénéficiaires de ces rétrocessions ont été principalement la société J et une parapharmacie sise à …. Parmi les produits rétrocédés, certains auraient figuré sur la liste de ceux dont la vente était réservée aux pharmaciens. Cependant, sur les copies de facture de rétrocession fournies par M. A et Mme B ne figurait aucun produit à taux de TVA égal à 2,10 % – ANNEXE
IV. Sur les copies de facture d’achat auprès des grossistes répartiteurs des produits devant être rétrocédés, les pharmaciens ayant noté la présence de quelques médicaments à. usage humain ou vétérinaire, de test de grossesse de plante en gélules etc … et le montant de certaine de ces factures étant exactement le même que la facture de rétrocession correspondante, les pharmaciens inspecteurs ont considéré que M. A et Mme B avaient bien rétrocédé à une société exerçant une activité de vente par correspondance des produits dont la vente étaient réservée aux pharmaciens.
Il était également reproché à M. A et Mme B d’avoir fait figurer en 2005 dans leurs déclarations de chiffres d’affaires pour l’exercice 2003-2004 un chiffre inférieur de 400 000 euros à celui qui aurait dû être déclaré.
Enfin, le contrat de recrutement par la Pharmacie AB de Mme I chargée de l’administration et du traitement des ventes par correspondance attestait bien pour les inspecteurs que l’activité VPC de la société G.fr avait été réalisée par une personne salariée de l’officine — ANNEXE V.
Les pharmaciens inspecteurs ayant consulté le 4 novembre 2005 le site Internet « …» ont versé au dossier un document leur semblant confirmer les déclarations de M. A et Mme B sur la naissance de la société G – ANNEXE VI
II — PREMIERE INSTANCE
Le conseiller rapporteur désigné a entendu M. A et Mme B le 9 février 2006. Ses rapports figurent en ANNEXE VII et VII BIS. M. A a expliqué qu’il avait toujours exercé la gérance de la société G en dehors des heures d’ouverture de la pharmacie et que les inspecteurs l’avaient du reste bien trouvé présent à l’officine lors de leur inspection. Questionnés sur l’importance de leur activité de rétrocession pouvant être assimilée à une activité de distribution en gros et d’exportation, M. A et Mme B ont répondu qu’aucun texte de loi en ce qui concernait la parapharmacie ne définissait le seuil à partir duquel ont pouvait être considéré comme exerçant une activité de grossiste. Sur le soupçon de facilitation de l’exercice illégal de la pharmacie, M. A et Mme B ont déclaré que les produits destinés aux rétrocessions faisaient l’objet d’une commande à part auprès des grossistes répartiteurs, qu’il avait pu arriver que, quelquefois, par manque de temps à l’officine, des médicaments aient été passé dans ces commandes et que par oubli, ils n’aient pas été déduits des factures de rétrocession, mais ceux-ci ayant été destinés à la pharmacie n’avaient jamais été envoyés à la société J. Concernant la mise à disposition de la société G.fr des locaux de la pharmacie, M. A et Mme B ont affirmé que l’activité de cette société s’était toujours exercée dans des locaux autres que ceux de l’officine et que c’était par erreur du comptable, que sur certains documents, l’adresse de la pharmacie avait figuré (notamment sur le bilan comptable de la société
G en date du 31 décembre 2002). Le rapporteur faisait également état du témoignage de Mme N, titulaire d’une officine située également dans le centre commercial de …, selon lequel elle aurait souvenir d’avoir vu M. A au bureau de poste de …, procédant à des expéditions. M. A avait répondu qu’il avait bien rencontré une fois à ce bureau de poste des employés de la pharmacie N alors qu’il envoyait des colis de rétrocession, mais que l’activité de vente par Internet s’était exercée jusqu’en novembre 2003 à partir d’un local situé … et que, généralement, les colis étaient directement pris à ce local par les services postaux.
Dans sa séance du 16 mars 2006, le conseil régional de l’Ordre des pharmaciens du Limousin a décidé les traductions en chambre de discipline de M. A et Mme B— ANNEXES VIII et VIII
BIS.
L’examen de ces affaires est venu à l’audience de la chambre de discipline du conseil régional de l’Ordre des pharmaciens du Limousin du 22 mars 2007. Par une seule décision, la chambre a écarté l’infraction à l’article R 4235-26 du code de la santé publique et retenu la culpabilité de M. A et Mme B concernant les infractions aux articles R 4235-4 et R 4235-67 du même code.
Considérant que certains faits ne pouvaient pas être personnellement imputés à Mme B et qu’il était ressorti des débats qu’elle était moins impliquée que son époux dans l’ensemble des activités ayant fondé les poursuites, la chambre de discipline a prononcé contre celle-ci une interdiction d’exercer la pharmacie pour une durée de 12 mois dont 6 étaient assortis du sursis. M. A a été condamné, quant à lui, à une interdiction d’exercer la pharmacie pour une durée de 18 mois (sans sursis) — ANNEXE IX.
III — APPEL
Ces décisions leur ayant été notifiées le 10 avril 2007, M. A et Mme B en ont interjeté appel.
Leur requête sommaire a été enregistrée le 25 avril 2007 au greffe du Conseil national —
ANNEXE X.
Le mémoire dans leur intérêt rédigé à l’appui de cet appel par Me MOUDOULAUD a été transmis par télécopie au greffe le 10 mai 2007 — ANNEXE XI — le courrier recommandé était, quant à lui, enregistré le 14 mai suivant.
Sur le cumul d’activité, le conseil des époux A rappelle que M. A a été gérant de la SARL … une activité de VPC de novembre 2001 au 31 décembre 2004 (date de cessation d’activité de la société) et que cette gérance ne s’était exercée qu’en dehors des heures d’ouverture de son officine. Il avait été conforté dans la régularité de cette activité par les renseignements qu’il avait pris auprès du conseil de l’Ordre à Paris. De plus, le pharmacien inspecteur qui avait constaté les opérations de VPC dans sa pharmacie de la … à l’automne 2001, lui avait simplement suggéré de séparer cette activité de celle de l’officine et de constituer une société distincte. Me
MOUDOULAUD ajoute :
« qu’en tout état de cause, la décision rendue par la chambre régionale de discipline ne justifie pas, dans son contenu, en quoi M. A aurait commis une infraction en raison de sa gérance de la
SARL G. L’importance du chiffre d’affaires relevée en page 4 de la décision ne constitue pas en soi une preuve d’infractions aux règles du non cumul dès lors qu’il n’est pas démontré que le chiffre d’affaires de G résultait de l’activité personnelle de M. A. Quant à Mme B, elle n’est pas concernée par ce grief, dès lors qu’il n’est pas indiqué dans la décision critiquée qu’elle ait eu une quelconque fonction ou une quelconque activité dans la SARL G.

Le conseil de M. A et Mme B souligne qu’au contraire, en page 3 de la décision attaquée, il est écrit : « La participation de Mme B dans le fonctionnement de la SARL G n’est pas démontrée au vu des pièces versées aux débats ».
« Enfin, il est à noter que la décision du conseil régional vise une ordonnance juge des libertés du TGI de … du 22 février 2006 ainsi que diverses pièces provenant de la procédure de perquisition intervenue dans le cadre d’une procédure d’ordre exclusivement fiscal et concernant seulement M. A (et nullement son épouse). Il convient de rappeler les dispositions de l’article 58 du code de procédure pénale qui dispose que « sous réserve des nécessités des enquêtes, toute communication ou toute divulgation sans autorisation de la personne mise en examen ou de ses ayants droit ou du signataire ou du destinataire d’un document provenant d’une perquisition à une personne non qualifiée par la loi pour en prendre connaissance est punie d’une amende de 4500 euros et d’un emprisonnement de deux ans. Le conseil régional a été ainsi mis en possession de documents confidentiels sans les autorisations légales. Ils ne sauraient être utilisés à des fins de poursuites disciplinaires. Par procédure séparée, M. A et Mme B déposent plainte contre X, avec constitution de partie civile, en raison de cette diffusion et du préjudice qui en est résulté pour eux ».

Le conseil de M. A et Mme B estime que c’est à tort également que l’on a reproché à ses clients d’avoir exercé une activité de « grossiste » puisqu’aucun texte, en ce qui concerne la rétrocession de produits parapharmaceutiques, qui sont les seuls concernés dans cette affaire, ne définit un seuil à partir duquel on deviendrait grossiste et que, de plus, le principe même des rétrocessions de manière générale était encouragé par la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France dans un courrier daté du 7 mars 2005.
« … La situation d’un «pharmacien qui reçoit les produits et les rétrocède à d’autres n’est pas interdite par la législation encadrant l’exercice de la profession de pharmacien d’officine. Cette pratique s’est même développée ces dernières années dans le but de maintenir des prix compétitifs sur les produits de parapharmacie… ;

Rappelant que l’infraction à l’article R 4235-26 du code de la santé publique n’avait pas été retenue en première instance, Me MOUDOULAUD affirme que celle concernant l’article R 4235-67 du code de la santé publique (mise à disposition des locaux de l’officine), n’est pas davantage constituée :
« Aucune activité autre que celle de la pharmacie n’a été exercée dans les locaux de l’officine. L’inspection des pharmacies faite en 2005 n’a mis en évidence ni la présence de stock de produits, ni la présence de colis, ni la présence de personnel affecté à la VPC. Une salariée a certes été embauchée en CDI le 1er septembre 2001 par la pharmacie, mais c’était dans l’attente des formalités de création de la SARL G et dès le mois de novembre 2001, cette salariée a été basculée sur le registre du personnel de G dont le siège social était à … et le lieu de stockage à …. La chambre de discipline ne pouvait fonder sa décision sur de simples « présomptions » comme elle l’indique en page 5 (le lieu de travail est présumé être l’officine ».
Faisant observer qu’il existe de nombreux cas ou des activités commerciales de VPC sont pratiqués dans les officines (celui d’un pharmacien membre de l’Ordre, M. O, exerçant en région
Midi Pyrénées, à …, est cité en exemple), le conseil de M. A et Mme B conclut à la relaxe de ses clients ou à tout le moins, la réduction des peines prononcées en première instance, tout particulièrement en ce qui concerne Mme B.
Dans un courrier enregistré le 28 juin 2007, M. F, ancien président du conseil régional du
Limousin a fait plusieurs observations sur l’argumentation en appel de M. A, notamment :
« Concernant la présence permanente de M. A à l’officine, elle s’explique tout naturellement l’activité reprochée à M. A s’exerçait à l’officine en totalité : passage de commandes, réception de commandes, expédition, facturation …. suivi sur Internet … (comme le prouve les divers éléments du dossier) ; concernant l’ordonnance des juges des libertés du
TGI de …, elle nous a été remise par une personne destinataire du document lors de la perquisition » – ANNEXE XII.
Le 25 septembre 2007, Me MOUDOULAUD versait au dossier les pièces jointes à l’appui de son mémoire d’appel — ANNEXE XIII.
Vous trouverez également en ANNEXE XIV les explications de M. O, mis en cause par M. A et Mme B dans leur requête d’appel.

Le 11 février 2008, j’ai reçu au siège du Conseil national Mme B assistée de Me
MOUDOULAUD. Sur les critiques concernant la procédure de première instance, Mme B a confirmé n’avoir jamais eu avant ce jour communication des pièces 1 à 20 annexées au rapport d’inspection ayant déclenché la procédure disciplinaire. Elle a contesté les conditions dans lesquelles l’ordonnance en date du 22 février 2006 du juge des libertés et de la détention près le
TGI de… avait été insérée puis sortie du dossier, puisqu’elle ne semblait pas y figurer. Mme B a également critiqué la présence à l’audience de première instance du pharmacien inspecteur régional qui, bien que n’ayant pas participé au délibéré final, a fortement influencé avant celuici les conseillers par ses nombreuses interventions orales. Sur le fond, Mme B a réaffirmé ne pas être responsable de l’activité créée par son mari. Elle a déclaré en conclusion :
«A ce jour, la société G n’existe plus, je ne suis plus titulaire depuis le 24 janvier 2008, condamnée à la vente par ces circonstances. J’ai perdu mon mari et j’ai la charge de mes deux enfants. Je souhaite reprendre une activité de pharmacien en tant qu’adjoint dans une pharmacie et repartir à zéro. Je ne souhaite pas, comme mon mari l’est déjà, être condamnée à travailler dans un centre Leclerc — ANNEXE XV »
Lors de son audition, Mme B a pris connaissance du coursier en date du 27 janvier 2008 que M. A m’avait adressé — ANNEXE XVI — et a déclaré qu’elle n’en contestait pas les termes. M. A refaisait l’historique du site de vente de cosmétiques sur Internet et de la société G et dénonçait les pressions qu’il avait subies de la part du conseil régional du Limousin, faisant remonter l’origine du conflit à la création par son prédécesseur de la Pharmacie K qui avait mécontenté les confrères voisins, notamment Mme N dont le témoignage avait directement influencé la décision de première instance. M. A terminait sa lettre de la manière suivante :
«J’ai donc décidé de faire appel de la décision de l’Ordre régional pour demander auprès de l’Ordre national des pharmaciens qui, lui, sera, je le souhaite, impartial dans cette affaire, sachant que le droit français ne peut condamner sans preuve. Me MOUDOULAUD, mon avocate, n’a jamais pu prendre connaissance des pièces du dossier de la partie adverse avant l’audience, ce qui est, là aussi, contraire au droit français. En conclusion, j’ai dû vendre mon officine, perdre mon emploi, déménager dans le but de retrouver un emploi autre que dans le bassin du Limousin, mon ex-épouse doit vendre ces parts, trouver un autre emploi tout ceci car nous avions réussi à augmenter le chiffre d’affaires de l’officine sise …, ce qui devait certainement gêner certains confrères et consoeurs ! Dans les faits, il n’est pas impossible que j’envisage suite à tout ceci le dépôt d’une plainte pour préjudice moral et financier ».
Vous trouverez en ANNEXE XVII, transmise tardivement par le conseil régional du Limousin, copie de la décision du 22 février 2006 du juge des libertés et de la détention prise par le TGI de … évoquée ci-dessus à plusieurs reprises et visée notamment dans les attendus de la décision de première instance attaquée.
Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, il vous appartient de dire la suite devant être réservée aux appels interjetés par M. A et Mme B.
Le Rapporteur
Signé 2 avril 2008

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