Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 6 mai 2021, n° 1709033

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Sur la décision

Référence :
TA Cergy-Pontoise, 6 mai 2021, n° 1709033
Juridiction : Tribunal administratif de Cergy-Pontoise
Numéro : 1709033

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

vr DE CERGY PONTOISE

N° 1709033 RÉPUBLIQUE FRANÇAISE ___________

SOCIETE EIFFAGE ENERGIE ILE-DE- FRANCE ET SOCIETE EDEIS AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS ___________
M. Camguilhem Rapporteur Le tribunal administratif ___________ de Cergy-Pontoise,
M. Gabarda (3ème chambre) Rapporteur public ___________

Audience du 1er avril 2021 Décision du 6 mai 2021 ___________

Code PCJA : 39-05-02 Code de publication : C

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire et des pièces complémentaires enregistrés le 29 septembre 2017, le 6 mars 2019 et le 3 mars 2021, la société Eiffage Energie Ile-de-France et la société EDEIS, représentées par Me Crapart, demandent au tribunal :

1°) de condamner l’Etat à leur verser la somme de 1 172 384,30 euros hors taxe, en principal et à parfaire, assortie des intérêts moratoires à compter du 17 janvier 2016 et de la capitalisation des intérêts à compter du 1er janvier 2017, puis à chaque échéance annuelle ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l’exécution du marché a donné lieu à de nombreuses difficultés et décalages de plannings imputables à la maîtrise d’ouvrage qui ont entrainé une désorganisation générale du chantier qui ne leur est pas imputable ;

- l’insuffisante préparation du marché, la modification de ses conditions d’exécution et l’absence de gestion du marché par la maîtrise d’ouvrage ont entraîné une prolongation substantielle des délais d’exécution, la réalisation d’études, essais et travaux supplémentaires, la


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mobilisation de moyens humains et matériels supplémentaires, des coûts directs liés à la réalisation des prestations et travaux supplémentaires et ont entrainé la non-couverture des frais généraux du titulaire ;

- la conduite des opérations était assurée par l’établissement d’infrastructure de la défense de Paris, organe interne au ministère des armées ;

- les situations 3 à 8 n’ont pas été payées et les situations n°11 à 18 et 20 à 22 ne l’ont pas été dans les délais contractuels ;

- ces difficultés imprévisibles, qui ont totalement bouleversé l’économie générale du contrat, ont engendré un préjudice à hauteur de 1 172 384,30 euros HT à titre de solde du marché ;

- les intérêts moratoires sur les situations non réglées n’ont jamais été versés.

Par des mémoires en défense enregistrés le 13 février 2019 et le 11 mars 2021, la ministre de la défense conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 600 euros soit mise à la charge des sociétés requérantes sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- sa responsabilité est engagée à la suite de la défaillance du maître d’œuvre qui devait payer les prestations effectuées par le titulaire selon les modalités et les délais prévus au marché ;

- les prolongations de délais et le report des dates de fin de travaux décidés par la conduite d’opération n’ont pas été causés par des défaillances du titulaire et relèvent donc de la responsabilité du maître d’œuvre dans son pouvoir de direction du marché ;

- elle accepte d’indemniser le titulaire du marché à hauteur de 6 272,90 euros au titre de l’immobilisation de la base vie ;

- l’immobilisation d’un responsable d’affaires du 9 août au 9 septembre 2014 pourra être indemnisée à hauteur de 1 183,80 euros et l’immobilisation d’un responsable de département sur la même période pourra être indemnisée à hauteur de 574,12 euros ;

- la base vie a été immobilisée pendant une durée de quatorze jours justifiant le versement à ce titre d’une indemnité d’un montant de 585,46 euros HT ;

- les autres sommes sollicitées ont été prises en charge dans l’exécution du contrat ou ne sont pas justifiées par les sociétés requérantes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l’arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

- le rapport de M. Camguilhem, rapporteur,

- les conclusions de M. Gabarda, rapporteur public,

- et les observations de Me Crapart représentant la société Eiffage Energie Ile-de-France et la société Edeis.

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Considérant ce qui suit :

1. Par un marché notifié le 29 avril 2011, un groupement conjoint composé de la société SNC Lavalin, aux droits de laquelle vient la société Edeis et de la société Forclum Ile-de- France, aux droits de laquelle vient la société Eiffage Energie Ile-de-France, a été chargé par l’établissement d’infrastructure de la Défense de Paris de la conception et de la réalisation du remplacement des systèmes de détection incendie et de mise en sécurité incendie de certaines structures de l’hôpital d’instruction des armées Percy à Clamart. Le marché, conclu à prix global et forfaitaire, comportait un lot unique décomposé en deux postes. Le premier, dont la société Lavalin, devenue Edeis, était titulaire, avait pour objet la conception technique de l’ensemble de l’ouvrage. Le second, dont le titulaire était la société Eiffage Energie Ile-de-France, avait pour objet l’établissement des études d’exécution et la réalisation du nouveau système de sécurité incendie. Le 17 décembre 2015, la société Eiffage Energie Ile-de-France a adressé, en sa qualité de mandataire du groupement, son projet de décompte final accompagné de deux demandes de rémunération complémentaires au titre des difficultés rencontrées au cours de l’exécution du marché. Par courrier en date du 13 février 2017 la société Eiffage Energie Ile-de-France a contesté le décompte général qui lui avait été notifié le 6 janvier 2017 par le pouvoir adjudicateur et qui n’intégrait pas les demandes de rémunération complémentaires adressées par le groupement. Les sociétés Eiffage Energie Ile-de-France et Edeis demandent au tribunal de condamner l’Etat à leur verser la somme de 1 172 384,30 euros HT, assortie des intérêts moratoires.

Sur les préjudices consécutifs aux retards de paiement :

2. Les difficultés rencontrées dans l’exécution d’un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l’entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle- ci justifie soit que ces difficultés trouvent leur origine dans des sujétions imprévues ayant eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat soit qu’elles sont imputables à une faute de la personne publique commise notamment dans l’exercice de ses pouvoirs de contrôle et de direction du marché, dans l’estimation de ses besoins, dans la conception même du marché ou dans sa mise en œuvre, en particulier dans le cas où plusieurs cocontractants participent à la réalisation de travaux publics.

3. Aux termes des stipulations de l’article 49.2.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés de travaux, rendu applicable par l’article 2.1 du cahier des clauses administratives particulières : « Au cas où deux acomptes successifs n’auraient pas été payés, le titulaire peut, trente jours après la date de remise du projet de décompte pour le paiement du deuxième de ces acomptes, prévenir, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, le représentant du pouvoir adjudicateur de son intention d’interrompre les travaux au terme d’un délai d’un mois/Si, dans ce délai, il n’a pas été notifié au titulaire, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, une décision ordonnant la poursuite des travaux, le titulaire peut les interrompre ».

4. Il résulte de l’instruction que les acomptes relatifs aux travaux réalisés entre avril et septembre 2012 n’ont pas été payés. En application des stipulations précitées les travaux ont été interrompus par le groupement à compter du 28 novembre 2012 et jusqu’au 2 mai 2013. Cette interruption des travaux étant entièrement imputable à la faute commise par le pouvoir adjudicateur, les sociétés membres du groupement sont fondées à demander l’indemnisation des préjudices qui en sont résultés pour elles.

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En ce qui concerne le poste 1 :

5. La société EDEIS, dans la demande de rémunération complémentaire du fait de la modification des conditions d’exécution des prestations objet du poste 1, adressée le 8 juin 2015, soutenait que la préparation de l’arrêt du chantier avait nécessité l’immobilisation d’un chef de projet, d’un ingénieur et d’un coordonnateur. Elle soutenait également qu’un chef de projet, un secrétariat et un directeur de département avaient dûs être mobilisés plusieurs heures par semaines pendant l’interruption des travaux et qu’un directeur, un chef de projet et un ingénieur avaient été spécialement mobilisés pour préparer la reprise des travaux. Toutefois, elle n’établit pas, par les pièces produites, la réalité de l’immobilisation de ces personnels. Par suite, la demande présentée à ce titre ne pourra qu’être rejetée.

En ce qui concerne le poste 2 :

S’agissant de l’immobilisation des personnels

Quant à la période de préparation de l’interruption des travaux

6. La société Eiffage Energie Ile-de-France soutient avoir dû procéder au repliement des installations, au rangement des équipements et outils et au nettoyage des zones avant l’interruption du chantier. En produisant deux comptes-rendus de visite d’état des lieux en date des 26 novembre et 3 décembre 2012 ainsi qu’un registre de journal de réunion émis par la société Dekra qui attestent de la propreté et du nettoyage des lieux au moment de l’interruption du chantier, la société requérante n’établit pas avoir dû mobiliser spécifiquement certains de ses personnels pour la réalisation de ces tâches. Par suite, la demande indemnitaire présentée à ce titre doit être écartée.

Quant à la période d’interruption des travaux

7. La société Eiffage Energie Ile-de-France justifie de la mobilisation de ses personnels pendant la période d’interruption des travaux par la production d’un document intitulé « ventilation des coûts de main d’œuvre par affaire ». Il en résulte que trois agents ont été mobilisés en décembre 2012 pour un total de 177,67 heures et une rémunération de 6 126,99 euros, cinq agents ont été mobilisés en janvier 2013 pour un total de 245,11 heures et une rémunération de 6 760,57 euros, trois agents ont été mobilisés en février 2013 pour un total de 41,27 heures et une rémunération de 4 624,49 euros et qu’un agent a effectué 35,01 heure en mars 2013 pour une rémunération de 1 122,12 euros. La société requérante est ainsi fondée à demander la somme de 18 634,17 euros au titre des coûts liés à l’immobilisation de ses personnels pendant la période d’interruption des travaux.

Quant à la période de reprise des travaux

8. Si la société Eiffage Energie Ile-de-France soutient, dans sa demande de rémunération complémentaire du fait de la modification des conditions d’exécution des prestations objets du poste 2, que le responsable d’affaire, le directeur de département, le responsable de chantier, le projeteur ainsi qu’une équipe de montage de quatre personnes, elle ne l’établit pas par les pièces qu’elle produit.

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S’agissant de l’immobilisation de la base vie

9. Il résulte de l’instruction que les bungalows composant la base vie ont fait l’objet d’une location mensuelle dont le coût pendant la période d’interruption des travaux représente une somme totale de 7 527,28 euros TTC, qu’il y a lieu de mettre au crédit de la société Eiffage Energie Ile-de-France.

S’agissant des coûts liés aux décalages de trésorerie

10. Il résulte du tableau produit en défense, et qui n’est pas contesté par les sociétés requérantes, que celles-ci sont fondées à demander le versement d’une somme de 9 239,39 euros au titre des intérêts moratoires du marché, non encore versés à ce jour.

S’agissant de l’absence de couverture des frais généraux et des décalages de trésorerie

11. Si la société Eiffage Energie Ile-de-France invoque un préjudice résultant de l’absence de couverture de frais généraux et résultant des bénéfices non-réalisés qu’elle évalue respectivement à 21% et à 5% du montant total du marché, elle n’apporte aucun élément probant de nature à établir l’existence de ce préjudice, ni d’ailleurs un lien de causalité directe entre ce préjudice et la faute imputable au maître d’ouvrage. Par suite, la demande présentée à ce titre sera rejetée.

S’agissant des autres demandes

12. Les surcoûts liés au renforcement du suivi administratif, à l’immobilisation du matériel d’outillage, au coût de l’extension des garanties fournisseurs et des garanties bancaires ne sont justifiés ni dans leur principe ni dans leur montant par la société requérante. Par suite, il n’y a pas lieu de condamner l’administration à verser à la société Eiffage Energie Ile-de-France les sommes réclamées à ce titre dans la demande de rémunération complémentaire.

Sur les préjudices consécutifs aux conditions d’exécution des travaux et aux décalages de planning :

En ce qui concerne le poste 1 :

13. La société Edeis soutient que ses personnels, compte tenu de la désorganisation du chantier, ont été contraints d’effectuer des prestations supplémentaires en participant à des réunions, en étant contraints de mettre à jour des plans nécessaires à l’exécution des travaux devant être assurés dans le cadre de l’exécution du poste 2 du marché, en étant contraints de reprendre des essais à la suite des dépannages de ventilateurs de désenfumage. Toutefois, elle n’établit ni la réalité de ces surcoûts ni leur imputabilité à une faute du maître d’ouvrage. Par suite, la demande présentée à ce titre ne pourra qu’être rejetée.

14. Si la société en charge du poste 1 soutient, dans la demande de rémunération complémentaire en date du 8 juin 2015, avoir été contrainte de renforcer ses personnels du 1er août au 9 septembre 2014 afin de procéder à la finalisation des travaux et aux essais du système de sécurité incendie, elle n’établit ni la réalité de cette mobilisation accrue ni son imputabilité directe à une faute du maître d’ouvrage. Par suite, la demande indemnitaire d’un montant total de 32 350 euros présentée à ce titre doit être rejetée.

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En ce qui concerne le poste 2 :

S’agissant des préjudices liés aux surcoûts des moyens humains

15. Il résulte de l’instruction que la réception des travaux a été prononcée le 22 septembre 2014 avec date d’effet au 9 septembre 2014. Par suite, et ainsi que cela est reconnu en défense, la société Eiffage Energie Ile-de-France est fondée à demander l’indemnisation de l’immobilisation de son responsable d’affaires pour une durée de 32 heures et de son responsable de département pour une durée de 14 heures pour les quatorze jours de décalage entre la date d’effet de réception et la date à laquelle celle-ci a été prononcée. En retenant un taux horaire de 33,10 euros brut pour le responsable d’affaires et la somme de 55,62 euros pour le responsable de département, il y a lieu de porter la somme de 1 837,88 euros au crédit de la société Eiffage Energie Ile-de-France.

16. La société Eiffage Energie Ile-de-France soutient avoir dû réorganiser ses effectifs et mobiliser du personnel supplémentaire afin de gérer le sureffectif lié à l’augmentation du nombre de missions à réaliser simultanément en conséquence des décalages de plannings imputables au service d’ingénierie hospitalière de l’hôpital Percy. Si elle produit un document attestant des heures travaillées au cours de la période de janvier 2014 au 9 septembre 2014 par un conducteur de travaux et trois chefs d’équipe, elle n’établit pas que la réalisation de ces heures soit la conséquence des retards imputables à l’administration. Il n’y a ainsi pas lieu de mettre la somme demandée à ce titre au crédit de la société requérante.

17. La société Eiffage Energie Ile-de-France n’est pas fondée à demander la rémunération de ses personnels pour la période correspondant à l’organisation des modalités de réception des travaux et à la levée des réserves, à la réalisation des essais et à la préparation de la commission de sécurité, dès lors, d’une part, que ces prestations sont comprises dans le prix global et forfaitaire du marché et, d’autre part, que la société requérante n’établit pas qu’un décalage de planning imputable au service d’ingénierie hospitalière soit à l’origine d’une immobilisation accrue de ces personnels.

18. La société requérante produit à l’instance un devis n° 26753 TS 09 B en date du

19 novembre 2014 pour un montant total actualisé de 346 393,65 euros HT. Si ce devis dresse la liste d’un ensemble d’interventions réalisées pour l’exécution du marché, il ne résulte pas de l’instruction que ces prestations aient été rendues nécessaires par des fautes commises par le maître d’ouvrage et qu’elles n’entrent pas dans le prix global et forfaitaire du marché.

S’agissant des préjudices liés aux surcoûts des moyens matériels

19. Les surcoûts liés au renforcement du suivi administratif, à l’immobilisation du matériel d’outillage, à la prolongation des contrats de sous-traitance ne sont justifiés ni dans leur principe ni dans leur montant par la société requérante. Par suite, il n’y a pas lieu de mettre à son crédit les sommes réclamées à ce titre dans la demande de rémunération complémentaire.

20. Il résulte des stipulations de l’article 41.2 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux que « Les opérations préalables à la décision de réception comportent, en tant que de besoin (…) la constatation du repliement des installations de chantier et de la remise en état des terrains et des lieux (…) ». Il résulte de ces stipulations que la société Eiffage Energie Ile-de-France n’est fondée à demander l’indemnisation de l’immobilisation des installations de la base vie qu’en ce qui concerne le délai de 14 jours de

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retard avec lequel la réception des travaux a été notifiée par rapport à sa date d’effet. Il y a, par suite, lieu, de mettre à son crédit la somme de 705,22 euros.

S’agissant des préjudices liés au non-respect des modalités d’exécution prévues par le programme PO 101-41

21. Il résulte des stipulations de l’article 3.1 du cahier des clauses administratives particulières que « (…) toutes les prestations non décrites, intellectuelles ou de travaux correspondant à une parfaite exécution et complète finition des ouvrages sont dues au présent marché (…) » et que les titulaires « ne pourront prétendre à indemnité ou travaux supplémentaires pour des prestations normalement prévisibles pour tout homme de l’art (puissance, raccordement, installations SSI existantes, éloignement d’installation, accès etc…) ». Le A. du même article stipule que le prix du marché comprend notamment les « (…) diverses servitudes inhérentes aux infrastructures existantes et conservées durant les travaux (…) ».

22. La société Eiffage Energie Ile-de-France soutient que les prévisions du programme PO 101-041 n’ont pas été respectées par l’hôpital interarmées de Percy qui, par son action, a causé des difficultés d’accessibilité aux locaux et entrainé des retards de plannings. Il résulte de l’instruction que la société titulaire du poste 2 a averti à plusieurs reprises l’administration de ces difficultés, notamment par un courrier en date du 10 décembre 2013, par un courriel du 14 avril 2014 et à l’occasion de la réunion du 6 mai 2014. Elle ne pouvait toutefois ignorer les contraintes inhérentes à une intervention en milieu hospitalier occupé dont le principe était prévu par les stipulations du marché. Dans ces conditions, la société Eiffage Energie Ile-de-France n’établit pas que les difficultés constatées dans l’exécution du programme soient imputables à une faute du maître d’ouvrage. Par suite, la demande de 337 466,15 euros hors taxe présentée à ce titre doit être rejetée.

Sur les travaux supplémentaires :

23. Dans le cadre d’un marché à prix global et forfaitaire, l’entrepreneur a le droit d’être indemnisé du coût des travaux supplémentaires, non prévus au contrat, s’ils ont été prescrits par ordre de service ou, si à défaut d’ordre de service, ils présentent un caractère indispensable à la réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art. La charge définitive de l’indemnisation incombe, en principe, au maître de l’ouvrage. Toutefois, le maître d’ouvrage est fondé, en cas de faute du maître d’œuvre, à engager sa responsabilité sans qu’y fasse obstacle la réception de l’ouvrage. Il en va ainsi lorsque la nécessité de procéder à ces travaux n’est apparue que postérieurement à la passation du marché, en raison d’une mauvaise évaluation initiale par le maître d’œuvre, et qu’il établit que le maître d’ouvrage aurait renoncé à son projet de construction ou modifié celui-ci s’il en avait été avisé en temps utile. Il en va de même lorsque, en raison d’une faute du maître d’œuvre dans la conception de l’ouvrage ou dans le suivi de travaux, le montant de l’ensemble des travaux qui ont été indispensables à la réalisation de l’ouvrage dans les règles de l’art est supérieur au coût qui aurait dû être celui de l’ouvrage si le maître d’œuvre n’avait commis aucune faute, à hauteur de la différence entre ces deux montants.

24. La société Eiffage Energie Ile-de-France produit un devis n° 26753TS17 du 27 février 2014 concernant la recherche d’éléments non fournis par l’hôpital pour un montant de 11 412 euros, un devis n° 26753T15 en date du 20 octobre 2014 sur la recherche d’une panne à la suite de l’arrêt des tortues le 8 septembre 2014 d’un montant de 926,90 euros et un devis n° 26753TS18 du 17 novembre 2014 relatif à l’indisposition des moteurs pendant la phase d’essais entre août et septembre 2014 pour un montant total de 13 923,41 euros TTC. Il ne résulte de l’instruction ni que ces travaux aient été commandés par ordre de service ni qu’ils

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aient revêtu un caractère indispensable. Il n’y a, par suite, pas lieu d’indemniser la société requérante du fait de la réalisation de ces opérations.

25. Si la société requérante produit cinq bordereaux de remise des dossiers des ouvrages exécutés, il n’est pas établi que cette prestation présente effectivement un caractère supplémentaire et qu’elle n’entrait pas dans le champ prévu de l’exécution du marché et de son prix global et forfaitaire. Par suite, la demande présentée à ce titre ne pourra qu’être rejetée.

26. Il résulte de l’instruction que par ordre de service n°40 des trappes supplémentaires d’accès au plafond de la zone stérile de réanimation ont été réalisées pour un montant de 1 572,36 euros HT et, que par un ordre de service n°42 en date du 4 juillet 2014, des travaux PCS ont été demandés pour un montant de 10 543,46 euros HT. En revanche, il ne résulte pas de l’instruction que les travaux relatifs aux trappes étanches supplémentaires, objet du devis n° 26753TS16 d’un montant de 535,03 euros HT, ni que les prestations objet du devis n° 26753TS19 aient fait l’objet d’un ordre de service ou revêtent un caractère indispensable. Il en résulte que la somme de 14 538,9 euros TTC doit être mise au crédit de la société Eiffage Energie Ile-de-France au titre des travaux supplémentaires.

Sur les sommes dues par l’Etat :

27. Il résulte de l’ensemble de ce qui précède qu’il y a lieu de mettre au crédit de la société Eiffage Energie Ile-de-France une somme de 52 482,84 euros TTC au titre des diverses sommes non encore réglées par le ministère de la défense. Dès lors, l’Etat doit être condamné à verser à la société Eiffage Energie Ile-de-France une somme de 52 482 ,84 euros TTC correspondant au solde du décompte en faveur de la société.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

28. Il résulte de l’instruction que la société requérante a demandé au ministère de la défense le paiement de ces sommes par une demande de rémunération complémentaire du fait de la modification des conditions d’exécution des prestations objets du poste 2 en date du 19 mars 2015. La condamnation prononcée au point 27 doit donc être assortie des intérêts au taux légal à compter de cette date. Ces intérêts seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts au 19 mars 2016 et à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.

Sur les frais liés à l’instance :

29. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Eiffage Energie Ile-de-France et de la société Edeis, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande l’Etat au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme que demandent la société Eiffage Energie Ile-de-France et la société Edeis.

Par ces motifs le tribunal décide :

Article 1er : L’Etat versera la somme de 52 482,84 euros à la société Energie Ile-de-France assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 mars 2015. Les intérêts seront capitalisés pour

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produire eux-mêmes intérêts au 19 mars 2016 et à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par l’Etat sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société Eiffage Energie Ile-de-France, à la société Edeis et à la ministre des armées.

Délibéré après l’audience du 1er avril 2021 à laquelle siégeaient : Mme Bailly, présidente, Mme Coblence, première conseillère et M. Camguilhem, premier conseiller, Assistés de Mme Ricaud, greffière.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 mai 2021.

Le rapporteur, La présidente,

Signé Signé

B. Camguilhem P. Bailly

La greffière,

Signé

V. Ricaud

La République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour ampliation, La greffière

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Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 6 mai 2021, n° 1709033