Annulation 21 juillet 2022
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Sur la décision
| Référence : | TA Châlons-en-Champagne, 3e ch., 21 juil. 2022, n° 2101871 |
|---|---|
| Juridiction : | Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne |
| Numéro : | 2101871 |
| Importance : | Inédit au recueil Lebon |
| Type de recours : | Excès de pouvoir |
| Dispositif : | Satisfaction partielle |
| Date de dernière mise à jour : | 27 mai 2025 |
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 août 2021, 26 février 2022 et 4 avril 2022, M. B A, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d’annuler la décision du 23 juin 2021 par laquelle le directeur interrégional Grand Est de la protection judiciaire de la jeunesse a rejeté sa demande tendant à l’attribution rétroactive de la nouvelle bonification indiciaire après le 1er janvier 2015 ;
2°) de condamner l’Etat à lui verser la somme correspondant à la nouvelle bonification indiciaire à laquelle il a droit depuis le 1er janvier 2015, cette somme devant être assortie des intérêts au taux légal ;
3°) d’enjoindre au Garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder à ce versement dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 40 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 800 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
— la décision attaquée est entachée d’erreur de droit dès lors que, ses fonctions le conduisant à tout le moins à intervenir dans le ressort territorial d’un contrat local de sécurité, elle doit bénéficier, en application des points 1 et 3 de l’annexe du décret du 14 novembre 2001, de la nouvelle bonification indiciaire ;
— elle méconnaît le principe d’égalité dès lors que d’autres agents travaillant comme lui en milieu ouvert bénéficient de cet avantage.
Par un mémoire en défense enregistré le 28 février 2022, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
— la demande est atteinte par la prescription en ce qui concerne la période antérieure au 1er janvier 2015 ;
— il aurait pu prendre la même décision en se fondant sur la seule circonstance que le requérant n’exerce pas dans un quartier prioritaire de la ville ;
— les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Des pièces ont été enregistrées le 31 mars 2022 par la ville de Reims.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
— le code de la sécurité intérieure ;
— la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales ;
— le décret du 14 novembre 2001 ;
— le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
— le rapport de M. Herzog, conseiller,
— et les conclusions de M. Deschamps, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. A, éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, a adressé au directeur interrégional Grand Est de la protection judiciaire de la jeunesse une demande du 5 mars 2019 reçue le 12 mars 2019 tendant au bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire au titre de ses fonctions exercées à l’unité éducative en milieu ouvert (UEMO) de Reims. Par une décision du 16 mai 2019, le directeur interrégional Grand Est de la protection judiciaire de la jeunesse a rejeté cette demande au motif que l’UEMO de Reims-Nord n’est pas située dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. Par un jugement du 28 mai 2021, ce tribunal a annulé la décision du 16 mai 2019 et a enjoint à l’administration de se prononcer à nouveau sur sa demande en recherchant si ses fonctions le font intervenir dans le ressort territorial d’un contrat local de sécurité. Par une décision du 23 juin 2021 dont le requérant demande l’annulation, le directeur interrégional Grand Est de la protection judiciaire de la jeunesse a, au terme du réexamen de la situation de l’intéressé, rejeté sa demande au motif que l’UEMO de Reims-Nord n’est pas située dans un quartier prioritaire de la politique de la ville.
Sur les conclusions à fin d’annulation :
2. L’exception de prescription quadriennale soulevée en défense en ce qui concerne la période antérieure au 1er janvier 2015 ne peut qu’être écartée dès lors que le requérant se borne à former des conclusions postérieures à cette date.
3. Aux termes du I de l’article 27 de la loi du 18 janvier 1991 portant dispositions relatives à la santé publique et aux assurances sociales : « La nouvelle bonification indiciaire des fonctionnaires et des militaires instituée à compter du 1er août 1990 est attribuée pour certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulières dans des conditions fixées par décret ». En application de l’article premier du décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice : « Une nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville, prise en compte et soumise à cotisation pour le calcul de la pension de retraite, peut être versée mensuellement, dans la limite des crédits disponibles, aux fonctionnaires titulaires du ministère de la justice exerçant, dans le cadre de la politique de la ville, une des fonctions figurant en annexe au présent décret ». L’annexe de ce décret mentionne notamment les " Fonctions de catégories A, B ou C de la protection judiciaire de la jeunesse : / 1. En centre de placement immédiat, en centre éducatif renforcé ou en foyer accueillant principalement des jeunes issus des quartiers prioritaires de la politique de la ville ; / 2. En centre d’action éducative situé dans un quartier prioritaire de la politique de la ville ; / 3. Intervenant dans le ressort territorial d’un contrat local de sécurité ".
4. Selon l’article D. 132-7 du code de la sécurité intérieure, « Le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance constitue le cadre de concertation sur les priorités de la lutte contre l’insécurité et de la prévention de la délinquance dans la commune. / () / Il assure l’animation et le suivi du contrat local de sécurité lorsque le maire et le préfet de département, après consultation du procureur de la République et avis du conseil, ont estimé que l’intensité des problèmes de délinquance sur le territoire de la commune justifiait sa conclusion. / Il est consulté sur la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des actions de prévention de la délinquance prévues dans le cadre de la contractualisation entre l’Etat et les collectivités territoriales en matière de politique de la ville définie à l’article 1er de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. () ».
5. Il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce qu’allègue le Garde des sceaux, un contrat local de sécurité a été conclu entre le maire de la ville de Reims et le préfet de la Marne le 4 mars 1999 et sa signature a été autorisée par le conseil municipal lors de sa séance du 28 janvier 1999. Ce contrat n’a fait l’objet d’aucune dénonciation ou résiliation depuis sa signature. Le ressort de ce contrat englobe notamment la commune de Reims. Cette convention précise au demeurant que la protection judiciaire de la jeunesse est l’un des acteurs pilote de l’action tendant au développement de la citoyenneté. Enfin, le conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance, chargé du suivi du contrat local de sécurité et qui assure l’animation et le suivi de ce contrat, a été créé par une délibération du 4 février 2003 reçue en préfecture le lendemain. Or, M. A, éducateur de la protection judiciaire de la jeunesse, fonctionnaire de catégorie A de la protection judiciaire de la jeunesse, en fonctions au sein de l’UEMO Reims-Nord, intervient dans le cadre d’une mission éducative en maison d’arrêt (MEMA) au quartier mineurs de la maison d’arrêt de Reims où il exerce à temps plein. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que dès lors que ses fonctions le conduisent à intervenir dans le ressort territorial d’un contrat local de sécurité, le Garde des sceaux a commis une erreur de droit au regard de l’article premier du décret du 14 novembre 2001 et de son annexe en refusant de lui accorder le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire.
6. La substitution de motifs invoquée par le Garde des sceaux ne peut qu’être écartée alors, d’une part, que le litige porte sur l’application des dispositions de l’hypothèse prévue au 3° de l’annexe au décret du 14 novembre 2001 relatif à la nouvelle bonification indiciaire au titre de la mise en œuvre de la politique de la ville dans les services du ministère de la justice et non pas sur l’hypothèse prévue au 1° ou au 2° de la même annexe et, d’autre part, que ces hypothèses sont alternatives.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A est fondé à demander l’annulation de la décision du 23 juin 2021.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
8. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. / La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure ».
9. L’exécution du présent jugement implique seulement que le Garde des sceaux procède au versement des arriérés de nouvelle bonification indiciaire depuis le 1er janvier 2015 et pour l’avenir, sous réserve de changements qui seraient intervenus dans sa situation professionnelle, dans la limite des crédits disponibles et dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.
Sur les intérêts :
10. M. A a droit aux intérêts au taux légal sur les sommes qui lui sont dues au titre des arriérés de nouvelle bonification indiciaire depuis le 1er janvier 2015 à compter de la date de réception de la demande qu’il a adressée au Garde des sceaux, qui doit être fixée au 12 mars 2019.
Sur les frais liés au litige :
11. Il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative alors qu’il n’a pas exposé de frais d’avocat.
D E C I D E :
Article 1er : La décision du 23 juin 2021 par laquelle le Garde des sceaux a refusé le bénéfice de la nouvelle bonification indiciaire à M. A est annulée en tant qu’elle concerne la période postérieure au 1er janvier 2015.
Article 2 : Il est enjoint au Garde des sceaux, ministre de la justice de procéder au versement des arriérés de nouvelle bonification indiciaire à M. A depuis le 1er janvier 2015 et pour l’avenir, sous réserve de changements qui seraient intervenus dans sa situation professionnelle, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Article 3 : Les sommes à verser au titre des arriérés de nouvelle bonification indiciaire depuis le 1er janvier 2015 porteront intérêts à compter du 12 mars 2019.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B A et au Garde des sceaux, ministre de la justice.
Copie sera adressée à la commune de Reims.
Délibéré après l’audience du 24 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Cristille, président,
M. Maleyre, premier conseiller,
M. Herzog, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 juillet 2022.
Le rapporteur,
Signé
I. HERZOGLe président,
Signé
P. CRISTILLELe greffier,
Signé
A. PICOT
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