Tribunal administratif de Guadeloupe, 11 décembre 2014, n° 1200480

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Sur la décision

Référence :
TA Guadeloupe, 11 déc. 2014, n° 1200480
Juridiction : Tribunal administratif de Guadeloupe
Numéro : 1200480

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE BASSE-TERRE

N°s 1200480, 12 01027, 1301758

___________ RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

COMMUNAUTE D’AGGLOMERATION CAP

EXCELLENCE

___________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

M. Ibo

Rapporteur

___________ Le Tribunal administratif de Basse-Terre

M. Porcher (Formation plénière)

Rapporteur public

___________

Audience du 30 octobre 2014

Lecture du 11 décembre 2014

___________

135-02-03-03-04

Vu I), sous le n° 1200480, la requête, enregistrée le 11 mai 2012, présentée pour la communauté d’agglomération Cap Excellence dont le siège est 18, boulevard Légitimus à Pointe-à-Pitre (97110), par la DS avocats, représentée par Me Y, du barreau de Paris ; la communauté d’agglomération Cap Excellence demande au Tribunal :

1°) de la décharger de l’obligation de payer la somme de 11 692 857,15 euros qui lui est réclamée par un titre de recettes émis le 23 décembre 2011 par le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement (SIAEAG) de la Guadeloupe et par une lettre de relance du 12 mars 2012, pour la vente d’eau en gros ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu le mémoire, enregistré le 23 août 2013, présenté pour le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et assainissement de la Guadeloupe ( SIAEAG), représenté par son président par la SELARL d’avocats au barreau de Paris Landot § associés qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la communauté d’agglomération Cap Excellence à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu II), sous le n° 1201027, la requête, enregistrée le 4 octobre 2012, présentée pour la communauté d’agglomération Cap Excellence dont le siège est 18, boulevard Légitimus à Pointe-à-Pitre (97110), par la DS avocats, représentée par Me Y, du barreau de Paris ; la communauté d’agglomération Cap Excellence demande au Tribunal :

1°) de la décharger de l’obligation de payer la somme de 11 692 857,15 euros qui lui est réclamée par un titre de recettes émis le 23 décembre 2011 par le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement (SIAEAG) de la Guadeloupe et par la lettre de relance du 12 mars 2012 pour la vente d’eau en gros ;

2°) condamner le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu III), sous le n° 1301758, la requête, enregistrée le 6 décembre 2013, présentée pour la communauté d’agglomération Cap Excellence dont le siège est 18, boulevard Légitimus à Pointe-à-Pitre (97110), par la DS avocats, représentée par Me Y, du barreau de Paris ; la communauté d’agglomération Cap Excellence demande au Tribunal :

1°) de la décharger de l’obligation, qui lui a été notifiée le 14 octobre 2013 par une mise en demeure du trésorier municipal de Pointe-à-Pitre, de payer au syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement (SIAEAG) de la Guadeloupe la somme de 14 383 770,17 euros pour la vente d’eau en gros ;

2°) de condamner le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des collectivités locales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 30 octobre 2014 :

— le rapport de M. Ibo, président ;

— les conclusions de M. Porcher, rapporteur public ;

— et les observations de Maîtres Y et Poisson, pour la communauté d’agglomération Cap Excellence et celles de Maître X, pour le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe ;

1. Considérant que les requêtes n° 1200480, n° 1201027 et n° 1301758 présentées pour la communauté d’agglomération Cap présentent à juger des questions semblables et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

2. Considérant que le syndicat intercommunal d’adduction d’eau de la région de Pointe-à Pitre, créé par arrêté préfectoral en 1963 pour l’amenée d’eau potable dans la région de Pointe-à-Pitre, devenu en 1977 le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) a, aux termes de ses statuts, compétence en matière de production, d’adduction, de stockage, de distribution d’eau potable et en matière d’assainissement pour la collecte et le traitement des eaux usées pour l’assainissement non collectif ; que le syndicat intercommunal des eaux de Pointe-à-Pitre (SIEPA), établissement public de coopération intercommunale chargé de l’eau et de l’assainissement sur le territoire des communes de Pointe-à-Pitre et des Abymes, a adhéré au SIAEAG dès sa création avec un statut particulier dès lors qu’il se limitait à acheter l’eau en gros au SIAEAG et, à la différence des autres membres, la distribuait lui-même à ses usagers ; que pour les achats d’eau en gros, le SIEPA payait un prix spécial, variant en fonction du volume d’eau distribué, majoré d’une surtaxe destinée à financer les investissements réalisés par le SIAEAG ; que le SIEPA a été dissous le 30 décembre 2008, date de la création de la communauté d’agglomération Cap Excellence qui a repris la totalité de ses compétences ; que la communauté d’agglomération Cap Excellence, non adhérente du SIAEAG, a néanmoins continué à s’approvisionner auprès de celui-ci dans les mêmes conditions que le SIEPA ; que la communauté d’agglomération Cap Excellence, comme précédemment le SIEPA, est en litige avec le SIAEAG sur l’application des nouveaux tarifs de vente de l’eau en Gros fixés par délibération du 28 mai 2008 modifiée par délibération du 27 juin 2009 ; que depuis l’instauration de ces nouveaux tarifs, le SIEPA, puis la communauté d’agglomération Cap Excellence ont décidé de continuer à appliquer les tarifs antérieurs à la délibération du 28 mai 2008 et ont refusé le versement du surplus ; que dans ces conditions, le SIAEAG a réclamé à la communauté d’agglomération Cap Excellence le paiement des sommes de 11 692,857,15 euros et de 14 383 770,17 euros ; que, par les requêtes susvisées, la communauté d’agglomération Cap Excellence conteste les créances dont se prévaut à son encontre le SIAEAG ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

3. Considérant, d’une part, que le SIEPA, était membre du SIAEAG jusqu’à sa dissolution ; que les relations entre le SIEPA et le SIAEAG étaient régis par les statuts de ce dernier lesquels prévoyait notamment les modalités de vente d’eau en gros et de détermination des tarifs ; que, dès lors, le SIEPA et le SIAEAG entretenaient des relations de droit public ; que le litige relatif aux ventes d’eau en gros par le SIAEAG au SIEPA relève en conséquence de la compétence de la juridiction administrative ;

4. Considérant, d’autre part, qu’un contrat conclu entre deux personnes publiques revêt en principe un caractère administratif, impliquant la compétence des juridictions administratives pour connaître des litiges portant sur les manquements aux obligations en découlant, sauf dans les cas où, eu égard à son objet, il ne fait naître entre les parties que des rapports de droit privé ; qu’en l’espèce, comme il a été dit ci-dessus, la communauté d’agglomération Cap Excellence a continué, sans être membre du SIAEAG, à s’approvisionner en eau en gros auprès de celui-ci dans les mêmes conditions que le SIEPA ; qu’ainsi, la communauté d’agglomération Cap Excellence et le SIAEAG doivent être regardés, en l’absence de contrat écrit, comme ayant conclu un contrat tacite portant sur la vente d’eau en gros ; que la communauté d’agglomération Cap Excellence qui achète de l’eau potable en gros, non pour ses propres besoins mais pour l’exécution de son propre service de distribution d’eau potable aux habitants des communes des Abymes et de Pointe-à-Pitre, auquel est amené à participer le SIAEAG, ne saurait elle-même être qualifiée d’usager du service public industriel et commercial de l’eau potable ; que, par suite, le litige entre la communauté d’agglomération Cap Excellence et le SIAEAG relatif à l’exécution du contrat tacite qui les unit ne fait naître entre eux aucun rapport de droit privé ; que, par conséquent, ledit contrat conclu entre deux personnes publiques est un contrat administratif qui relève de la compétence de la juridiction administrative ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’exception d’incompétence de la juridiction administrative invoquée par la communauté d’agglomération Cap Excellence doit être écartée ;

Sur les conclusions tendant à la décharge de l’obligation de payer les sommes de 11 692 857,15 euros et de 14 383 770,17 euros :

Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête :

6. Considérant que l’article 8 des statuts du SIAEAG, dans sa rédaction applicable en l’espèce, prévoyait que les modalités pratiques de la vente d’eau en gros au SIEPA seront fixées « d’accord des parties » ; que l’article 10 des mêmes statuts disposait que « Le syndicat est habilité à vendre de l’eau en gros à des communes ou à des établissements extérieurs. / Ces ventes d’eau seront régies par des conventions ou des délibérations particulières » ; qu’il résulte de l’instruction que, dans le cadre du contrat tacite les unissant, la commune intention du SIAEAG et de la communauté d’agglomération Cap Excellence était d’appliquer ces dispositions statutaires ; que si lesdites dispositions autorisaient ainsi, en l’absence de convention écrite entre les parties, le SIAEAG à fixer, par une délibération spéciale, les tarifs, et le cas échéant leur augmentation, de la vente d’eau en gros applicable au SIEPA puis à la communauté d’agglomération Cap Excellence, c’est néanmoins à la condition de pouvoir les justifier notamment par les charges exposées pour la fourniture de cette prestation, les amortissements des équipements nécessaires à celle-ci ou les besoins de financement d’investissements futurs précisément identifiés ;

7. Considérant qu’en l’espèce, alors que la communauté d’agglomération Cap Excellence conteste l’augmentation d’environ 300 % des tarifs de vente d’eau en gros, décidée par délibération du 28 mai 2008, alors que dans le même temps il avait baissé de 2 % le prix appliqué aux usagers, le SIAEAG ne produit aucune pièce relative aux modalités de calcul de cette augmentation ni aucune justification de l’évolution des charges spécifiques aux ventes d’eau en gros, des amortissements des biens nécessaires à ce service ou de ses besoins de financement d’investissements futurs qu’il devait faire supporter au SIEPA et à la communauté d’agglomération Cap Excellence ; qu’en outre, il résulte de l’instruction, notamment d’un rapport de la chambre régionale des comptes du 18 décembre 2012, que le SIAEAG n’a pas dissocié dans son budget et sa comptabilité, en méconnaissance de l’instruction comptable M 49, les gestions du service de l’eau et celui de l’assainissement, ôtant toute crédibilité à l’estimation du coût réel de chacun de ces services, et que les besoins de financement concernaient principalement le service de l’assainissement en déséquilibre structurel ; que, par suite, le SIAEAG ne saurait faire application d’une augmentation de ses tarifs dont il n’est pas en mesure de justifier du bien-fondé ;

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la communauté d’agglomération Cap Excellence est fondée à contester l’augmentation des tarifs de vente d’eau en gros décidée par le SIAEAG par sa délibération du 28 mai 2008, modifiée par la délibération du 27 juin 2009, et à demander la décharge de l’obligation de payer les sommes de 11 692,857,15 euros et de 14 383 770,17 euros correspondant à cette augmentation ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant qu’il résulte des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée ; il peut, même d’office, ou pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation ;

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la somme réclamée à ce titre par le SIAEAG soit mise à la charge de la communauté d’agglomération Cap Excellence ; qu’en revanche, il y a lieu dans les circonstances de l 'espèce de condamner le SIAEAG à verser à la communauté d’agglomération Cap Excellence la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La communauté d’agglomération Cap Excellence est déchargée de l’obligation de payer les sommes de 11 692 857,15 euros et de 14 383 770,17 euros qui lui sont réclamées par le SIAEAG.

Article 2 : Le syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe versera à la communauté d’agglomération Cap Excellence une somme de 1 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes susvisées est rejeté.

Article 4 : Les conclusions du syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe tendant à l’application de l’article L.761-1du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la communauté d’agglomération Cap Excellence, au syndicat intercommunal d’alimentation en eau et d’assainissement de la Guadeloupe (SIAEAG) et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques de la Guadeloupe et au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l’audience du 30 octobre 2014, à laquelle siégeaient :

M. Besle président,

M. Ibo, président,

M. Guiserix, président,

Mme Lissowsky, président,

M. Sauton, premier conseiller,

Mme Buseine, premier conseiller,

M. Amadori, conseiller

Lu en audience publique le 11 décembre 2014.

Le président Le rapporteur,

D. Besle A. Ibo

La greffière en chef,

J. Tareau

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics et au préfet de la Guadeloupe chacun en ce qui les concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

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