Tribunal administratif de Lyon, 7ème chambre, 31 décembre 2024, n° 2301296
TA Lyon
Rejet 31 décembre 2024

Arguments

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  • Rejeté
    Incompétence de l'autorité signataire

    La cour a estimé que l'arrêté avait été signé par le préfet délégué pour la défense et la sécurité, conformément à un arrêté préfectoral régulier, écartant ainsi le moyen d'incompétence.

  • Rejeté
    Insuffisance de motivation

    La cour a jugé que l'arrêté mentionnait les faits et les articles de loi pertinents, et qu'il comportait les considérations de droit et de fait nécessaires, écartant ainsi le moyen d'insuffisance de motivation.

  • Rejeté
    Non-respect du droit à l'information

    La cour a estimé que, bien que l'information n'ait pas été fournie, cela n'a pas privé le requérant d'une garantie ni influencé la décision prise, écartant ainsi ce moyen.

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Sur la décision

Référence :
TA Lyon, 7e ch., 31 déc. 2024, n° 2301296
Juridiction : Tribunal administratif de Lyon
Numéro : 2301296
Type de recours : Excès de pouvoir
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 30 mai 2025

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 février 2023 et 14 juin 2024, M. C B, représenté par Me Guillot, demande au tribunal, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d’annuler l’arrêté du 15 novembre 2022 par lequel le préfet du Rhône a ordonné le dessaisissement de ses armes dans un délai de trois mois, a prononcé à son encontre une interdiction de détenir des armes, l’a inscrit au Fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes (FINIADA) et lui a retiré son permis de chasse ;

2°) d’enjoindre à la préfète du Rhône de procéder à la suppression de son inscription au Fichier national des personnes interdites d’acquisition et de détention d’armes et à la restitution de son permis de chasse dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement, ;

3°) de mettre à la charge de l’État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

— l’arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;

— le préfet de l’Ain n’avait pas compétence pour initier la procédure ;

— l’arrêté attaqué méconnaît son droit à l’information ;

— il n’est pas justifié que l’agent qui a consulté le traitement automatisé des antécédents judiciaires disposait d’une habilitation régulière ;

— le préfet aurait dû saisir le procureur de la République aux fins de demandes d’information sur les suites judiciaires données aux procédures figurant dans le fichier du traitement des antécédents judiciaires, conformément à l’article R. 40-29 du code de procédure pénale ;

— l’arrêté attaqué ne vise pas les articles R. 114-1 et suivants du code de la sécurité intérieure ni l’article R. 40-29 du code de procédure pénale ;

— il est insuffisamment motivé en droit et en fait ;

— le préfet s’est estimé à tort en situation de compétence liée ;

— il ne constitue pas un risque pour l’ordre public et la sécurité des personnes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2024, la préfète du Rhône conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. B ne sont pas fondés.

La requête a été communiqué à la préfète de l’Ain qui n’a pas produit d’observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code de procédure pénale ;

— le code de la sécurité intérieure ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de Mme de Tonnac, conseillère ;

— les conclusions de M. Gueguen, rapporteur public ;

— et les observations de Me Guillot, représentant M. B.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fin d’annulation :

1. En premier lieu, aux termes de l’article R. 312-3 du code de la sécurité intérieure : « Les demandes d’autorisation ou de renouvellement d’autorisation d’acquisition et de détention de matériels de guerre, d’armes, de munitions et de leurs éléments, accompagnées des pièces justificatives nécessaires sont transmises pour décision au préfet du lieu de domicile () ».

2. Il ressort des pièces du dossier qu’une déclaration d’acquisition d’arme, faite le 27 novembre 2019, a été adressée à la préfecture de l’Ain, faisant état de l’acquisition, par M. B, domicilié dans la commune de Villars-les-Dombes, dans l’Ain, d’une carabine express de marque « Caesar Guerini », n° 161611. Dès lors, et compte tenu qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B aurait informé la préfecture de l’Ain d’un changement de domicile, le requérant n’est pas fondé à soutenir que la procédure initiée à son encontre le 22 octobre 2021 par la préfecture de l’Ain aurait été irrégulière, alors même qu’il avait déposé le 20 octobre 2021 une déclaration relative à la même arme, comportant une adresse de domicile à Lyon, à la préfecture du Rhône, Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure : « Les décisions administratives () d’autorisation () prévues par des dispositions législatives ou réglementaires, concernant () l’utilisation de matériels ou produits présentant un caractère dangereux, peuvent être précédées d’enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes physiques () intéressées n’est pas incompatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées ». Selon les dispositions combinées des articles R. 114-1 et R. 114-5 de ce code, peuvent donner lieu à de telles enquêtes : « les autorisations ou agréments suivants relatifs à des matériels, produits ou activités présentant un danger pour la sécurité publique : 1° () acquisition, détention () de matériels de guerre, armes et munitions ». Il résulte de l’article R. 312-67 du code de la sécurité intérieure que, lorsque le préfet diligente une enquête pour établir si le comportement du demandeur ou du déclarant est incompatible avec la détention d’une arme, « cette enquête peut donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ». Enfin, aux termes de l’article R. 114-6 du code de la sécurité intérieure : « Les personnes qui font l’objet d’une enquête administrative en application de l’article L. 114-1 sont informées de ce que cette enquête donne lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles relevant de l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification ». Une irrégularité affectant le déroulement d’une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n’est de nature à entacher d’illégalité la décision prise que s’il ressort des pièces du dossier qu’elle a été susceptible d’exercer, en l’espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu’elle a privé les intéressés d’une garantie.

4. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier, notamment du courrier du 22 octobre 2021, que si M. B a été informé de la réalisation d’une enquête et de la mise en œuvre d’une procédure de dessaisissement d’arme, il n’a pas été informé de ce que l’enquête diligentée avait donné lieu à une consultation, par les services de la préfecture, des traitements automatisés de données personnelles, en méconnaissance des dispositions précitées de l’article R. 114-6 du code de la sécurité intérieure. Toutefois, le requérant ayant été informé de la réalisation d’une enquête, et l’information relative à la consultation des traitements automatisés de données personnelles n’ayant pas pour effet de permettre à l’intéressé de s’y opposer, la méconnaissance de cette obligation d’information n’a pas été susceptible de priver M. B d’une garantie ni d’exercer une influence sur le sens de la décision prise. Par suite, le moyen doit en tout état de cause être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l’article R. 40-29 du code de procédure pénale : « I. – Dans le cadre des enquêtes prévues () aux articles L. 114-1, L. 234-1 et L. 234-2 du code de la sécurité intérieure, les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l’exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d’acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par les personnels de la police et de la gendarmerie habilités selon les modalités prévues au 1° et au 2° du I de l’article R. 40-28. / Cette consultation peut également être effectuée par () – des personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l’Etat. L’habilitation précise limitativement les motifs qui peuvent justifier pour chaque personne les consultations autorisées () Lorsque la consultation révèle que l’identité de la personne concernée a été enregistrée dans le traitement en tant que mise en cause, l’enquête administrative ne peut aboutir à un avis ou une décision défavorables sans la saisine préalable, pour complément d’information, des services de la police nationale ou des unités de la gendarmerie nationale compétents et, aux fins de demandes d’information sur les suites judiciaires, du ou des procureurs de la République compétents. () ».

6. Dès lors que les dispositions citées ci-dessus prévoient la possibilité que certains traitements automatisés de données à caractère personnel soient consultés au cours de l’enquête conduite par l’administration dans le cadre de ses pouvoirs de police, préalablement à la décision portant remise ou dessaisissement des armes, la circonstance que l’agent ayant procédé à cette consultation n’aurait pas été, en application des dispositions également citées ci-dessus du code de procédure pénale, individuellement désigné et régulièrement habilité à cette fin, si elle est susceptible de donner lieu aux procédures de contrôle de l’accès à ces traitements, n’est pas, par elle-même, de nature à entacher d’irrégularité la décision prise. De même la circonstance que le procureur de la République n’aurait pas été saisi aux fins de demandes d’informations sur les suites judiciaires est sans incidence sur la légalité de l’arrêté attaqué dès lors que celui-ci se fonde sur des données qui étaient accessibles dans le cadre de l’enquête administrative et qui pouvaient donc être utilisées. Par suite, les moyens tirés de ce que l’agent qui a consulté des traitements automatisés de données à caractère personnel n’aurait pas été habilité et de ce que le procureur de la République n’aurait pas été saisi doivent être écartés.

7. En quatrième lieu, l’arrêté attaqué a été signé par M. A D, préfet délégué pour la défense et la sécurité. En vertu de l’arrêté préfectoral du 16 septembre 2022, le préfet du Rhône a délégué sa signature à M. D pour signer tous actes et décisions relevant des pouvoirs conférés au préfet par le titre 1er du livre III du code de sécurité intérieure fixant le régime des matériels de guerre, armes et munition, leur acquisition, détention et port. Cet arrêté a été régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture du Rhône le 20 septembre 2022, accessible tant au juge qu’aux parties. Par suite, le moyen tiré de l’incompétence du signataire de l’acte attaqué doit être écarté.

8. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l’exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; / () ". La décision par laquelle le préfet ordonne à un détenteur d’armes de se dessaisir d’armes légalement acquises en sa possession en application de l’article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure constitue une mesure de police qui doit être motivée en vertu de ces dispositions.

9. En l’espèce, l’arrêté attaqué vise le code de la sécurité intérieure, notamment ses articles L. 312-11 à L. 312-13, L. 312-16 et R. 312-74 à R. 312-76. Il mentionne également les faits d’introduction de fusée ou artifices dans une enceinte sportive et de violences ayant entrainé une incapacité totale de travail de moins de huit jours reprochés au requérant en raison desquels le préfet du Rhône a estimé que le comportement de M. B justifiait le prononcé de la mesure en cause. Ainsi, il comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, alors même qu’il ne vise pas et ne se réfère pas aux articles R. 114-1 et suivants du code de la sécurité intérieure et à l’article 40-29 du code de procédure pénale, sur lesquels il ne se fonde pas directement. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation doit être écarté.

10. En sixième lieu, l’arrêté attaqué ne mentionne la condamnation pénale dont M. B a fait l’objet qu'« au surplus » des faits de violence commis en juin 2020, dont la matérialité n’a pas été contestée dans le cadre de la procédure contradictoire. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des termes de l’arrêté contesté que l’autorité préfectorale se serait exclusivement fondée sur l’existence de condamnations pénales et se serait estimée en situation de compétence liée. Par suite, le moyen tiré de l’erreur de droit doit être écarté.

11. En dernier lieu, aux termes de l’article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : « () le représentant de l’État dans le département peut, pour des raisons d’ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d’une arme, de munitions et de leurs éléments de toute catégorie de s’en dessaisir. / Le dessaisissement consiste soit à vendre l’arme les munitions et leurs éléments à une personne titulaire de l’autorisation, mentionnée à l’article L. 2332-1 du code de la défense, ou à un tiers remplissant les conditions légales d’acquisition et de détention, soit à la remettre à l’État ».

12. Il ressort de l’arrêté attaqué que, pour ordonner le dessaisissement de l’arme de M. B et prononcer à son encontre une interdiction de détenir des armes, le préfet du Rhône s’est fondé sur sa mise en cause en 2017 pour des faits d’introduction de fusée ou artifices dans une enceinte sportive lors d’une manifestation sportive et en 2020 pour des faits de violence ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de moins de huit jours, M. B ayant été condamné pour ces derniers faits, qu’il ne conteste pas, par un jugement du tribunal de police du 8 septembre 2021.

13. Si le requérant ne conteste pas les faits d’introduction de feu d’artifice dans une enceinte sportive commis en 2017, il ressort des pièces du dossier, ainsi qu’il le soutient sans être contredit, que ces faits n’étaient pas récents à la date de l’arrêté attaqué, revêtent un caractère isolé et ne présentent pas de lien direct avec la police des armes. Toutefois, la décision attaquée est également fondée sur la mise en cause de M. B pour des faits de violence ayant entraîné une incapacité temporaire de travail de moins de huit jours commis le 5 juin 2020. Or ces faits, pour lesquels il a été condamné, demeuraient récents à la date de l’arrêté contesté et sont, compte tenu de leur nature, propres à laisser craindre un comportement incompatible avec la détention d’une arme, alors même qu’ils relèvent du régime pénal de la contravention. Les deux témoignages produits par M. B, rédigés par des personnes pratiquant la chasse, ne sauraient suffire à démontrer l’absence de tout risque pour l’ordre public ou la sécurité des personnes. Or il résulte de l’instruction que le préfet du Rhône aurait pris la même décision s’il s’était fondé uniquement sur ce motif pour considérer que le comportement de M. B était incompatible avec la détention d’armes. Par suite, M. B n’est pas fondé à soutenir que l’arrêté attaqué serait entaché d’une erreur d’appréciation au regard des dispositions de l’article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure.

Sur les conclusions à fin d’injonction :

14. Le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d’annulation présentées par M. B, n’implique aucune mesure d’exécution. Par suite, les conclusions à fin d’injonction présentées par le requérant ne peuvent qu’être rejetées.

Sur les frais au litige :

15. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à la charge de l’État, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais liés au litige.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C B, à la préfète du Rhône et à la préfète de l’Ain.

Délibéré après l’audience du 13 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Vaccaro-Planchet, présidente,

Mme Leravat, première conseillère,

Mme de Tonnac, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.

La rapporteure,

A. de Tonnac

La présidente,

V. Vaccaro-Planchet

La greffière,

E. Gros

La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Un greffier,

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