Rejet 31 décembre 2024
Annulation 23 juin 2025
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Sur la décision
| Référence : | TA Marseille, reconduite à la frontière, 31 déc. 2024, n° 2413055 |
|---|---|
| Juridiction : | Tribunal administratif de Marseille |
| Numéro : | 2413055 |
| Type de recours : | Excès de pouvoir |
| Dispositif : | Rejet |
| Date de dernière mise à jour : | 30 mai 2025 |
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 et 22 décembre 2024, M. C A, représenté par Me Baatour, doit être regardé comme demandant au tribunal :
1°) d’annuler l’arrêté du 27 novembre 2024 par lequel le préfet des Hautes-Alpes a refusé sa demande de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de destination de la mesure d’éloignement et lui a fait interdiction de retour pour une durée de 5 ans ;
2°) d’annuler l’arrêté du 27 novembre 2024 par lequel le préfet des Hautes-Alpes l’a assigné à résidence ;
3°) d’enjoindre à l’administration de lui communiquer l’ensemble des pièces sur la base desquelles les décisions attaquées ont été prises ;
4°) d’enjoindre au préfet de ne pas procéder à son signalement dans le système d’information Schengen et le cas échéant dans le fichier des personnes recherchées, ou de procéder à sa suppression dans le cas où ce signalement aurait déjà été effectué dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement ;
4°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. A soutient que :
En ce qui concerne les moyens communs au refus de titre de séjour et à l’obligation de quitter le territoire français :
— les décisions attaquées sont entachées d’une insuffisance de motivation et méconnaissent les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ainsi que l’article L 613-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 relatives au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
En ce qui concerne le refus de séjour :
— la décision attaquée méconnaît les articles 3, 7 ter et 10d de l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
— la décision attaquée méconnaît l’article L 423-7 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’article 10c de l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988
En ce qui concerne l’obligation de quitter le territoire français sans délai :
— la décision méconnaît les dispositions de l’article L 613-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988
— elle méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
— elle est entachée d’erreur manifeste d’appréciation ;
En ce qui concerne le refus d’octroi d’un délai de départ volontaire :
— la décision attaqués est entachée d’une insuffisance de motivation et méconnaît les articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l’administration ainsi que l’article L 613-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 relatives au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
— elle méconnaît les dispositions des articles L 612-1 et L 612-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et l’article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen.
En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi :
— cette décision doit être annulée par voie de conséquence de l’annulation de l’obligation de quitter le territoire français
— elle méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
— elle est entachée d’une erreur de droit en ce qu’elle ne fixe pas le pays de renvoi conformément aux dispositions des articles L 612-12, L 721-3 et 4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et de la directive 2008/115 du 16 décembre 2008 ;
En ce qui concerne l’interdiction de retour :
— elle doit être annulée par voie de conséquence de l’obligation de quitter le territoire français ;
— la décision attaquée méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et l’article L 612-6 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
En ce qui concerne l’absence de décision relative à l’enregistrement dans le système d’information Schengen :
— à défaut de mention de l’enregistrement de la décision dans le système Schengen, il y a lieu d’enjoindre à l’administration de ne pas procéder à cet enregistrement ;
— si la décision devait être enregistrée, elle serait entachée d’une erreur d’appréciation dans la mesure où l’intéressé ne représente pas une menace pour l’ordre public ;
En ce qui concerne l’assignation à résidence :
— la décision doit être annulée par voie de conséquence de l’annulation de l’obligation de quitter le territoire français sans délai ;
— elle méconnaît l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
— elle est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et constitue une atteinte disproportionnée à sa liberté d’aller et venir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2024 à 8h43 et communiqué avant l’audience aux parties, le préfet des Hautes-Alpes conclut au rejet de la requête. Il fait valoir qu’aucun des moyens développés par le requérant n’est fondé.
Vu les décisions attaquées et les autres pièces du dossier.
Vu :
— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
— l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
— le code civil ;
— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
— le code de justice administrative.
Le président du tribunal a désigné Mme Diwo pour statuer sur les litiges relatifs aux décisions portant mesure d’éloignement des ressortissants étrangers en application du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
— le rapport de Mme Diwo, magistrate désignée, qui a informé les parties, en application des dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, que le jugement à intervenir était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office, tiré de l’irrecevabilité des conclusions dirigées contre le signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen
— et les observations de Me Baatour, représentant M. A.
Le préfet des Hautes-Alpes n’était ni présent, ni représenté.
La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience, en application de l’article R. 922-16 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Considérant ce qui suit :
1. M. C A, ressortissant tunisien, né le 23 février 1987 à El Amra, demande au tribunal d’annuler les arrêtés préfectoraux pris le 27 novembre 2024 par le préfet des Hautes-Alpes portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français sans délai avec une interdiction de retour pendant 5 ans et assignation à résidence.
Sur les conclusions tendant à la production par l’administration de l’entier dossier de M. A :
2. Aux termes de l’article L. 922-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) : « L’étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné le concours d’un interprète et la communication du dossier contenant les pièces sur la base desquelles la décision contestée a été prise. ». L’affaire est en état d’être jugée. Le principe du contradictoire a été respecté. Il n’apparaît donc pas nécessaire, dans les circonstances de l’espèce, d’ordonner la communication de l’entier dossier du requérant.
Sur les conclusions en annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour
3. En premier lieu, l’arrêté attaqué du 13 décembre 2024 mentionne les éléments de droit applicables à la situation de M. A, en particulier l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié, les articles L. 611-1-3°, L. 611-3, L. 612-2 et L. 612-3 et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH). Il indique par ailleurs les circonstances de fait principales relatives à la situation personnelle et familiale du requérant, alors même que le préfet n’est astreint à aucune obligation d’exhaustivité dans sa motivation. Ces considérations permettent à l’intéressé d’en comprendre le sens et la portée à leur seule lecture et ainsi de les contester utilement, comme au juge d’en contrôler les motifs. Par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation doit être écarté.
4. En second lieu, aux termes de l’article 10 de l’accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Un titre de séjour d’une durée de dix ans, ouvrant droit à l’exercice d’une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : () / c) Au ressortissant tunisien qui est père ou mère d’un enfant français résidant en France, à la condition qu’il exerce, même partiellement, l’autorité parentale à l’égard de cet enfant ou qu’il subvienne effectivement à ses besoins ; () « . Aux termes de l’article L. 412-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : » La circonstance que la présence d’un étranger en France constitue une menace pour l’ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l’autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu’à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention « résident de longue durée-UE » "
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A est père d’un enfant de nationalité française né le 6 novembre 2011 qu’il a reconnu par anticipation le 5 mai 2011. Les certificats de scolarité produits à l’appui de sa requête démontrent que cet enfant est scolarisé depuis 2017 dans des établissements français. Si M. A justifie ainsi de manière suffisante de la résidence de son fils sur le territoire national, il ne justifie toutefois pas de sa contribution à l’entretien et à l’éducation de celui-ci. Il ressort en effet des pièces du dossier que le requérant produit des captures d’écran de prise en compte de demandes de virements bancaires au profit d’une femme qu’il identifie, mais sans en justifier, comme étant la mère de son enfant, ce alors même qu’il produit un extrait d’acte de naissance de son fils. Si son frère atteste procéder lui-même aux virements, cette attestation n’est accompagnée d’aucune copie de document permettant de vérifier l’identité du signataire de l’attestation ni de l’effectivité des versements allégués. Le requérant produit par ailleurs un seul relevé bancaire à son nom dont il résulte qu’il a procédé à un virement au profit de Mme D pour B A au mois de mai 2024. Il produit enfin la copie d’un virement au profit de Mme D depuis un compte ouvert au nom de Sandra Boily. Il résulte de ce qui précède que le requérant, qui ne justifie par ailleurs aucunement de ses relations avec son fils, ne démontre pas contribuer de manière effective à l’entretien et à l’éducation de ce dernier. Il ressort enfin des pièces du dossier que le requérant est défavorablement connu des services de police pour des faits de violences conjugales en 2014 et pour des délits routiers commis en 2022 et 2023. Par suite, le préfet n’a commis aucune erreur en estimant qu’il ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d’un titre de séjour en tant que parent d’un enfant français.
En ce qui concerne l’obligation de quitter le territoire
6. Aux termes de l’article L 611-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « l’autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu’il se trouve dans les cas suivants : () 3° L’étranger s’est vu refuser la délivrance d’un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l’occasion d’une demande de titre de séjour ou de l’autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivrée ou s’est vu retirer l’un de ces documents () ». Aux termes de l’article L. 613-1, inséré au chapitre III intitulé « Procédure administrative », du titre Ier du livre VI du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle est édictée après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit. / Dans le cas prévu au 3° de l’article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n’a pas à faire l’objet d’une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Toutefois, les motifs des décisions relatives au délai de départ volontaire et à l’interdiction de retour édictées le cas échéant sont indiqués. »
7. Premièrement, il ressort des termes de la décision attaquée, qui mentionne la durée de présence en France de M. A, les conditions de son séjour, l’existence d’un enfant français ainsi que sa convocation devant la commission que le requérant n’a pas transmis, malgré relances, les pièces nécessaires au préfet pour apprécier l’ensemble de sa situation au regard de son droit au séjour et notamment de ses possibilités d’obtenir un titre de plein droit, pas plus qu’il n’a justifié de circonstances particulières de nature à autoriser l’octroi d’un tel titre à raison de circonstances humanitaires. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui n’avait pas à faire l’objet d’une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour, n’a pas été prise à l’issue d’une procédure irrégulière en méconnaissance de l’article L 613-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
8. Deuxièmement, aux termes de l’article 8 de la CEDH : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ». Pour l’application des stipulations précitées, l’étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d’apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu’il a conservés dans son pays d’origine.
9. Il ressort des pièces du dossier et ainsi que cela a été dit au point 5 que M. A ne justifie pas de sa contribution effective à l’entretien et à l’éducation de son enfant B, pas plus que de ses relations avec lui. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que malgré une longue présence en France, il ne dispose pas d’un logement propre mais est hébergé chez son frère et ne justifie que d’un emploi récent et de trois bulletins de salaire dont deux mentionnent un congé sans solde en septembre et octobre 2024. Enfin, il ressort des pièces du dossier que le requérant est marié en Tunisie, où il se rend régulièrement, depuis 2021 et y est père d’un jeune enfant, ce qu’il ne conteste pas. Dès lors, le préfet des Hautes-Alpes, qui n’a pas méconnu les stipulations de l’article 8 de la CEDH, n’a entaché la décision attaquée d’aucune erreur manifeste dans l’appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle, familiale et professionnelle du requérant.
En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire
10. Aux termes de l’article L612-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’étranger faisant l’objet d’une décision d’obligation de quitter le territoire français dispose d’un délai de départ volontaire de 30 jours à compter de la notification de cette décision () ». Aux termes de l’article L. 612-2 du CESEDA : « Par dérogation à l’article L. 612-1, l’autorité administrative peut refuser d’accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : 1° le comportement de l’étranger constitue une menace pour l’ordre public () ».
11. Il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Alpes a visé expressément les dispositions de l’article L 612-2 1° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et a motivé sa décision au regard des antécédents du requérant, défavorablement connu des services de police pour des violences conjugales commises en 2014 ainsi que pour des délits routiers commis en 2022 et 2023, le tout constituant une menace pour l’ordre public. Par suite, le préfet, qui a motivé sa décision en droit comme en fait, n’a pas méconnu les dispositions susvisées.
En ce qui concerne la fixation du pays de renvoi
12. Compte-tenu de ce qui précède, la décision portant obligation de quitter sans délai le territoire français n’est pas entachée d’illégalité. Dès lors, l’exception d’illégalité invoquée de ladite décision à l’encontre de la décision fixant le pays de destination doit être écartée
13. Aux termes de l’article L. 612-12 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « La décision portant obligation de quitter le territoire français mentionne le pays, fixé en application de l’article L. 721-3, à destination duquel l’étranger est renvoyé en cas d’exécution d’office ». L’article L. 721-3 de ce code dispose que : « L’autorité administrative, fixe, par une décision distincte de la décision d’éloignement, le pays à destination duquel l’étranger peut être renvoyé en cas d’exécution d’office d’une décision portant obligation de quitter le territoire français () ». En vertu de l’article L. 721-4 du même code : " L’autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi :/ 1° Le pays dont l’étranger a la nationalité () / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d’un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l’accord de l’étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible. / () ".
14. Il ressort d’abord des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Alpes a prévu que M. A sera éloigné dans le pays dont il a la nationalité, ou de tout pays dans lequel il est légalement admissible. Par suite, le préfet n’a pas méconnu les dispositions précitées.
15. Ensuite, en se bornant à alléguer que la mesure de fixation du pays de retour porterait atteinte à sa situation personnelle et familiale sans autre élément produit et alors même que l’arrêté préfectoral prévoit un éloignement dans le pays dont il a la nationalité et où a priori il dispose d’attaches solides en la personne de son épouse et de son second fils, le requérant ne conteste pas utilement la décision en ce qu’elle porte fixation du pays de destination.
En ce qui concerne l’interdiction de retour sur le territoire français d’une durée de 5 ans
16. En premier lieu, compte-tenu de ce qui précède, la décision portant obligation de quitter le territoire français n’est pas entachée d’illégalité. Dès lors, l’exception d’illégalité invoquée de ladite décision à l’encontre de la décision lui refusant l’octroi d’un délai de départ volontaire doit être écartée.
17. En second lieu, aux termes de l’article L. 612-6 du CESEDA : « Lorsqu’aucun délai de départ volontaire n’a été accordé à l’étranger, l’autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d’une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l’autorité administrative n’édicte pas d’interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l’expiration d’une durée, fixée par l’autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l’exécution de l’obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l’ordre public ». Aux termes de l’article L. 612-10 de ce code : « Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l’autorité administrative tient compte de la durée de présence de l’étranger sur le territoire français, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu’il a déjà fait l’objet ou non d’une mesure d’éloignement et de la menace pour l’ordre public que représente sa présence sur le territoire français. () ».
18. Il ressort tout d’abord des pièces du dossier que la décision attaquée comporte l’énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent le fondement de l’interdiction de retour d’une durée de cinq ans. Elle mentionne que le requérant, malgré l’obtention de plusieurs titres de séjour, ne justifie pas de sa contribution à l’entretien et à l’éducation de son fils de nationalité française. Le préfet mentionne que l’intéressé a été signalisé pour plusieurs délits dont des violences conjugales, et qu’il est marié depuis 2021 en Tunisie, pays où il a un fils et où il se rend régulièrement. Dans ces conditions, la motivation de la décision contestée atteste de ce que le préfet des Hautes-Alpes a pris en compte, au vu de la situation de M. A, l’ensemble des critères prévus par la loi. Le moyen tiré de l’insuffisance de motivation, qui manque en fait, doit donc être écarté.
19. Il ressort enfin des pièces du dossier que M. A ne rapporte pas la preuve de sa participation effective à l’entretien et à l’éducation de son fils né en France et de nationalité française, qu’il ne justifie pas de la stabilité de son hébergement sur le territoire national pas plus que d’une insertion réelle et durable dans la vie professionnelle. Le préfet établit par ailleurs qu’il a déjà fait l’objet d’une précédente mesure d’éloignement et fait mention d’une condamnation pénale et d’antécédents pour des fait anciens de violences conjugales et plus récemment de délits routiers. Dans ces conditions et en l’état des pièces versées à l’instance, la durée de l’interdiction fixée à cinq ans n’apparaît ni excessive ni disproportionnée au regard de la situation de l’intéressé. Les moyens tirés de l’erreur de droit et de l’erreur d’appréciation doivent donc être écartés.
En ce qui concerne le signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen
20. Aux termes de l’article L. 613-5 du CESEDA : « L’étranger auquel est notifiée une interdiction de retour sur le territoire français est informé qu’il fait l’objet d’un signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen, conformément à l’article 24 du règlement (UE) n°2018/1861 du Parlement européen et du Conseil du 28 novembre 2018 sur l’établissement, le fonctionnement et l’utilisation du système d’information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d’application de l’accord de Schengen et modifiant et abrogeant le règlement (CE) n°1987/2006. / Les modalités de suppression du signalement de l’étranger en cas d’annulation ou d’abrogation de l’interdiction de retour sont fixées par voie réglementaire. ». En vertu de l’article R. 613-7 du même code, les modalités de suppression du signalement d’un étranger effectué au titre d’une décision d’interdiction de retour prise en application de l’article L. 613-5 sont celles qui s’appliquent, en vertu de l’article 7 du décret n°2010-569 du 28 mai 2010 relatif au fichier des personnes recherchées, aux cas d’extinction du motif d’inscription au fichier des personnes recherchées.
21. Il résulte des dispositions précitées que, lorsqu’elle prend à l’égard d’un étranger une décision d’interdiction de retour sur le territoire français ou prolonge l’interdiction de retour dont cet étranger fait l’objet, l’autorité administrative se borne à informer l’intéressé de son signalement aux fins de non-admission dans le système d’information Schengen. Une telle information ne constitue pas une décision distincte de la mesure d’interdiction de retour et n’est, dès lors, pas susceptible de faire l’objet, en tant que telle, d’un recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions tendant à l’annulation de la décision de signalement aux fins de non admission dans le système d’information Schengen sont irrecevables et ne peuvent qu’être rejetées.
Sur l’assignation à résidence
22. Aux termes de l’article L. 731-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : " L’autorité administrative peut assigner à résidence l’étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l’éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : 1° L’étranger fait l’objet d’une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins de trois ans auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n’a pas été accordé ; () ".
23. En premier lieu, compte-tenu de ce qui précède, la décision portant obligation de quitter sans délai le territoire français n’est pas entachée d’illégalité. Dès lors, l’exception d’illégalité invoquée de ladite décision à l’encontre de la décision d’assignation à résidence doit être écartée.
24. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet des Hautes-Alpes a pu légalement assigner à résidence M. A, l’intéressé ayant fait l’objet d’une obligation de quitter sans délai le territoire français prise moins de trois ans auparavant. Le requérant ne peut ainsi pas utilement se prévaloir d’une erreur de droit tirée de la méconnaissance de l’article L. 731-1 du CESEDA.
25. En troisième lieu, l’éloignement de M. A demeure une perspective raisonnable. Si M. A soutient que les mesures portant obligation de pointage tous les jours à 10h au commissariat de police de Gap, interdiction de sortir du département des Hautes-Alpes sans autorisation du préfet et obligation de rester à son domicile tous les jours sur une plage de 3 heures comprises entre 14h et 17h sont disproportionnées au regard de sa vie privée et familiale, il n’en rapporte cependant pas la preuve. S’il produit un contrat de travail, ses bulletins de salaire de septembre et octobre montrent qu’il a bénéficié d’un congé sans solde au cours de ces deux mois. Le requérant ne justifie en outre pas de ses horaires ni de ses contraintes professionnelles. Par suite, la mesure d’assignation ne porte pas, par elle-même, atteinte aux droits reconnus au requérant par les stipulations de l’article 8 de la CEDH et n’est pas entachée d’erreur d’appréciation, pas plus que les mesures d’encadrement de cette décision.
26. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. A tendant à l’annulation des arrêtés du préfet des Hautes Alpes du 27 novembre 2024 portant d’une part refus de titre de séjour, obligation de quitter sans délai le territoire français sans délai, fixant le pays de destination de la mesure d’éloignement et lui faisant interdiction de retour pour une durée de cinq ans, et d’autre part assignation à résidence, ainsi que ses conclusions à fin d’injonction et celles tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.
D E C I D E:
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. C A et au préfet des Hautes-Alpes.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 décembre 2024.
La magistrate désignée
Signé
C. Diwo
Le greffier
Signé
T. Marcon
La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Alpes en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la greffière en chef,
Le greffier
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Textes cités dans la décision
- Règlement (UE) 2018/1861 du 28 novembre 2018 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen et modifiant
- Directive Retour - Directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier
- Décret n°2010-569 du 28 mai 2010
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
- Code de justice administrative
- Code des relations entre le public et l'administration
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