Tribunal administratif de Melun, 27 juillet 2015, n° 1308280

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Melun, 27 juill. 2015, n° 1308280
Juridiction : Tribunal administratif de Melun
Numéro : 1308280
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 24 septembre 2014, N° 1305005

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE MELUN

N° 1308280

___________

M. et Mme Y X

___________

Ordonnance du 27 juillet 2015

___________

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Président de la 7e chambre, Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 3 octobre 2013, M. et Mme Y X, représentés par Me Ferraiuolo demandent au tribunal :

— de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5.000 euros en réparation des préjudices qu’ils ont subis du fait de la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a rejeté leur demande tendant à l’application d’un abattement général de 15 % à la base et du taux de l’abattement pour charges de familles de 20 % de la valeur locative moyenne communale pour chacune des deux premières personnes à charge et de 25 % de cette moyenne à partir de la troisième, prévues par deux délibérations du conseil communal de Bussy-Saint-Georges du 6 octobre 2010 portant sur les taxes d’habitation 2011 et 2012 ;

— d’ordonner que la somme allouée porte intérêts au taux légal à compter de la réclamation préalable formulée le 19 février 2013, en application de l’article 1153 du code civil, intérêts eux-mêmes capitalisés à compter du 19 avril 2014 ;

— de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

Sur le fondement de la demande :

— en ce qui concerne la taxe d’habitation de 2011, ils engagent la responsabilité de l’Etat sur le terrain de la faute simple commise par les services fiscaux ;

— en ce qui concerne la taxe d’habitation de 2012, ils se placent sur le terrain du plein contentieux fiscal ;

Sur la légalité des impositions en litige :

— après l’avis rendu par la chambre régionale des comptes, le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges a adopté deux délibérations du 7 septembre 2010, rehaussant les taux d’imposition applicables à la taxe foncière sur les propriétés bâties et non bâties et à la taxe d’habitation ; il a ainsi repris les propositions de la chambre régionale des comptes ; ces délibérations, devenues exécutoires après transmission au préfet, en vertu de l’article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, et qui n’ont pas été déférées par le préfet devant le tribunal administratif, ont donc achevé la procédure prévue à l’article L. 1612-5 du code général de collectivités territoriales ; ainsi lorsque le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges a adopté les deux délibérations du 6 octobre 2010 modifiant le taux d’abattement général à la base de la valeur locative moyenne des logements et le taux de l’abattement obligatoire pour charges de famille de la valeur locative moyenne des logements, il pouvait légalement se prononcer en matière budgétaire ;

— si la direction des finances publiques de Seine-et-Marne fait valoir que les délibérations budgétaires des 16 mai 2011 et 28 mars 2012 n’ont pas tenu compte des délibérations du 6 octobre 2010, il incombait aux services fiscaux et comptables d’intégrer les abattements votés par le conseil municipal de la commune dans le calcul de la taxe d’habitation ; le service, en ne tenant pas compte de ces abattements en 2011 et 2012, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; au demeurant les abattements ont été pris en compte au titre de 2013 ;

Sur le préjudice subi :

— ils demandent la somme de 5.000 euros à titre d’indemnité, toutes causes de préjudice confondues, à savoir le montant de l’indu perçu par les services fiscaux, et les troubles dans les conditions d’existence ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2013, le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

— la requête est irrecevable en ce qui concerne la taxe d’habitation de l’année 2011, dès lors que le préjudice allégué n’est pas distinct du paiement de la taxe en litige ;

— le trouble dans les conditions d’existence allégué n’est pas établi ;

— la commune de Bussy-Saint-Georges ne pouvait délibérer en matière budgétaire lorsqu’elle a adopté les deux délibérations du 6 octobre 2010 ; en effet le préfet a saisi la chambre régionale des comptes le 14 septembre 2010 sur le fondement des articles L. 1612-4, L. 1612-5 et L. 1612-14 du code général des collectivité locales, au motif que la délibération du 7 septembre 2010 adoptée par la commune prévoyait un budget en déséquilibre ; ainsi, en application de l’article L. 1612-9 du code général des collectivité locales, la commune était dessaisie de sa compétence budgétaire ; la procédure prévue à l’article L. 1612-5 du code général des collectivité locales n’a pris fin qu’avec l’arrêté préfectoral du 3 novembre 2010 réglant le budget de la commune ;

— la commune n’a pas tenu compte des abattements prévus par les délibérations du 6 octobre 2010 dans l’élaboration des budgets 2011 et 2012 ;

— les conclusions indemnitaires des requérants sont irrecevables, à défaut de demande préalable ; visant l’indu qu’aurait perçu l’administration, elles ont le même objet qu’une réclamation fiscale, et sont donc irrecevables ;

— les troubles dans les conditions d’existence allégués ne sont pas justifiés ;

Par un mémoire, enregistré le 18 avril 2014, les requérants concluent aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu :

. la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a statué sur la réclamation préalable ;

. les autres pièces du dossier ;

. le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

. le code général des collectivités territoriales ;

. le jugement n° 1305005 du Tribunal administratif de Melun du 25 septembre 2014 ;

. le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l’article R. 222-1 du code de justice administrative : « … les présidents des formations de jugement peuvent, par ordonnance : …5° Statuer sur les requêtes qui ne présentent plus à juger de questions autres que la condamnation prévue à l’article L. 761-1 ou la charge des dépens ; 6° Statuer sur les requêtes relevant d’une série, qui présentent à juger en droit et en fait, pour la juridiction saisie, des questions identiques à celles qu’elle a déjà tranchées ensemble par une même décision passée en force de chose jugée… ».

2. Par un le jugement n° 1305005 du 25 septembre 2014 passé en force de chose jugée, le Tribunal administratif de Melun a tranché des questions identiques à celles dont il est saisi par la requête susvisée. Par suite, il y a lieu de statuer sur cette requête par voie d’ordonnance en application des dispositions précitées de l’article R. 222-1 du code de justice administrative.

Sur la taxe d’habitation de l’année 2011 :

En ce qui concerne l’exception de recours fiscal parallèle opposée par le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne :

3. Une faute commise par l’administration lors de l’exécution d’opérations se rattachant aux procédures d’établissement et de recouvrement de l’impôt est de nature à engager la responsabilité de l’Etat à l’égard du contribuable ou de toute autre personne si elle leur a directement causé un préjudice. Un tel préjudice, qui ne saurait résulter du seul paiement de l’impôt, peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l’administration et, le cas échéant, des troubles dans ses conditions d’existence dont le contribuable justifie. Le préjudice invoqué ne trouve pas sa cause directe et certaine dans la faute de l’administration si celle-ci établit soit qu’elle aurait pris la même décision d’imposition si elle avait respecté les formalités prescrites ou fait reposer son appréciation sur des éléments qu’elle avait omis de prendre en compte, soit qu’une autre base légale que celle initialement retenue justifie l’imposition. Enfin l’administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s’il n’est pas le contribuable, du demandeur d’indemnité comme cause d’atténuation ou d’exonération de sa responsabilité.

4. L’administration fiscale oppose une fin de non-recevoir aux conclusions indemnitaires des requérants au titre de la taxe d’habitation de l’année 2011 en faisant valoir, d’une part, que la créance dont les requérants auraient pu se prévaloir était prescrite à la date de leur réclamation, et, d’autre part, que les requérants, en tant qu’ils se prévalent du préjudice résultant du paiement de la taxe d’habitation acquittée au titre de l’année 2011, ne sont pas fondés à réclamer, par le biais d’une action en dommages et intérêts, ce qu’ils n’ont pas demandé au juge de l’impôt. En outre l’administration fait valoir que les troubles dans les conditions d’existence allégués par les requérants ne sont établis ni dans leur principe, ni dans leur montant.

5. La requête tend à l’obtention d’une indemnité de 5.000 euros tous préjudices confondus, correspondant notamment au montant de l’excédent de taxe d’habitation supporté par les requérants au titre de l’année 2011, et qui résulterait de la non application fautive de l’abattement général de 15 % à la base et de l’abattement pour charges de familles prévus par deux délibérations du conseil communal de Bussy-Saint-Georges du 6 octobre 2010. A ce titre les requérants n’établissent toutefois pas avoir subi un préjudice autre que le paiement de l’impôt en se bornant à demander réparation du préjudice né de la surimposition alléguée. Il en résulte que la requête est, dans cette mesure, irrecevable. Dès lors, il y a lieu d’accueillir la fin de non-recevoir opposée par l’administration.

En ce qui concerne les troubles dans les conditions d’existence allégués :

6. Si les requérants font valoir qu’ils ont subi des troubles dans leur conditions d’existence du fait de l’agissement fautif de l’administration, ils ne justifient d’aucun préjudice distinct de celui résultant du paiement de la taxe d’habitation de 2011.

Sur la taxe d’habitation de 2012 :

7. Les requérants contestent la décision par laquelle le directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne a rejeté leur demande tendant à l’application, pour le calcul de la taxe d’habitation de 2012, d’un abattement général de 15 % à la base et d’un abattement pour charges de familles de 20 % de la valeur locative moyenne communale pour chacune des deux premières personnes à charge et de 25 % de cette moyenne à partir de la troisième, prévus par deux délibérations du conseil communal de Bussy-Saint-Georges du 6 octobre 2010.

8. Aux termes de l’article L. 1612-4 du code général des collectivités territoriales : « Le budget de la collectivité territoriale est en équilibre réel lorsque la section de fonctionnement et la section d’investissement sont respectivement votées en équilibre, les recettes et les dépenses ayant été évaluées de façon sincère, et lorsque le prélèvement sur les recettes de la section de fonctionnement au profit de la section d’investissement, ajouté aux recettes propres de cette section, à l’exclusion du produit des emprunts, et éventuellement aux dotations des comptes d’amortissements et de provisions, fournit des ressources suffisantes pour couvrir le remboursement en capital des annuités d’emprunt à échoir au cours de l’exercice. ». Aux termes de l’article L. 1612-5 du même code : « Lorsque le budget d’une collectivité territoriale n’est pas voté en équilibre réel, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l’Etat dans un délai de trente jours à compter de la transmission prévue aux articles L. 2131-1, L. 3131-1 et L. 4141-1, le constate et propose à la collectivité territoriale, dans un délai de trente jours à compter de la saisine, les mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre budgétaire et demande à l’organe délibérant une nouvelle délibération. / La nouvelle délibération, rectifiant le budget initial, doit intervenir dans un délai d’un mois à partir de la communication des propositions de la chambre régionale des comptes. / Si l’organe délibérant ne s’est pas prononcé dans le délai prescrit, ou si la délibération prise ne comporte pas de mesures de redressement jugées suffisantes par la chambre régionale des comptes, qui se prononce sur ce point dans un délai de quinze jours à partir de la transmission de la nouvelle délibération, le budget est réglé et rendu exécutoire par le représentant de l’Etat dans le département. Si celui-ci s’écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d’une motivation explicite. ». Aux termes de l’article L. 1612-9 du même code : « A compter de la saisine de la chambre régionale des comptes et jusqu’au terme de la procédure prévue à l’article L. 1612-5, l’organe délibérant ne peut se prononcer en matière budgétaire, sauf pour la délibération prévue au deuxième alinéa de l’article L. 1612-5 et pour l’application de l’article L. 1612-12. ». Enfin aux termes de l’article L. 1612-14 du même code : « Lorsque l’arrêté des comptes des collectivités territoriales fait apparaître dans l’exécution du budget, après vérification de la sincérité des inscriptions de recettes et de dépenses, un déficit égal ou supérieur à 10 % des recettes de la section de fonctionnement s’il s’agit d’une commune de moins de 20 000 habitants et à 5 % dans les autres cas, la chambre régionale des comptes, saisie par le représentant de l’Etat, propose à la collectivité territoriale les mesures nécessaires au rétablissement de l’équilibre budgétaire, dans le délai d’un mois à compter de cette saisine./ Lorsque le budget d’une collectivité territoriale a fait l’objet des mesures de redressement prévues à l’alinéa précédent, le représentant de l’Etat dans le département transmet à la chambre régionale des comptes le budget primitif afférent à l’exercice suivant. / Si, lors de l’examen de ce budget primitif, la chambre régionale des comptes constate que la collectivité territoriale n’a pas pris de mesures suffisantes pour résorber ce déficit, elle propose les mesures nécessaires au représentant de l’Etat dans le département dans un délai d’un mois à partir de la transmission prévue à l’alinéa précédent. Le représentant de l’Etat règle le budget et le rend exécutoire après application éventuelle, en ce qui concerne les communes, des dispositions de l’article L. 2335-2. S’il s’écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d’une motivation explicite. / En cas de mise en œuvre des dispositions des alinéas précédents, la procédure prévue à l’article L. 1612-5 n’est pas applicable. ».

9. Le préfet de Seine-et-Marne a saisi la chambre régionale des comptes d’Ile de France, sur le fondement des articles L. 1612-5 et L. 1612-14 du code général des collectivités territoriales précité, d’une demande d’examen du compte administratif de 2009 et du budget primitif de 2010 de la commune de Bussy-Saint-Georges, enregistrée au greffe de la juridiction financière le 17 juin 2010. A compter de cette date le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges ne pouvait plus se prononcer en matière budgétaire, sauf notamment pour prendre une nouvelle délibération, rectifiant le budget initial, en application de l’article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales précité. Par une délibération n° 2010/09/4258 du 7 septembre 2010 le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges a rectifié le budget initial, suite à l’avis rendu le 13 août 2010 par la chambre régionale des comptes. Toutefois, le budget ainsi rectifié demeurant en déséquilibre, le préfet de Seine-et-Marne a, le 14 septembre 2011, de nouveau saisi la chambre régionale des comptes pour examen du budget primitif ainsi rectifié, au motif qu’il n’était pas en équilibre. Ainsi, en application des dispositions combinées du 3e alinéa de l’article L. 1612-5 et du premier alinéa de l’article L. 1612-9 du code général des collectivités territoriales, le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges demeurait dessaisi, jusqu’au terme de la procédure prévue par l’article L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales, de son pouvoir de se prononcer en matière budgétaire. Ce n’est que par l’arrêté du 3 novembre 2010, par lequel le préfet a réglé le budget de la commune, que la procédure a été close au sens de l’article L. 1612-5 code général des collectivités territoriales. Ainsi le conseil municipal de Bussy-Saint-Georges ne pouvait légalement adopter les deux délibérations du 6 octobre 2010, prises sur le fondement de l’article 1411 du code général des impôts, modifiant le taux de l’abattement général de la valeur locative moyenne communale et le taux de l’abattement pour charges de familles, applicables pour le calcul de la taxe d’habitation. En tout état de cause, si les requérants soutiennent qu’en application de l’article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, et faute pour le préfet d’avoir déféré ces délibérations du 6 octobre 2010 devant le juge administratif, celles-ci sont devenues exécutoires, le préfet, par son arrêté du 3 novembre 2010, pris sur le fondement du pouvoir de substitution qu’il détient en vertu de L. 1612-5 du code général des collectivités territoriales, a réglé le budget de 2010 de la commune de Bussy-Saint-Georges et a ainsi, implicitement mais nécessairement, substitué sa propre décision auxdites délibérations qui n’étaient pas devenues définitives.

10. La circonstance qu’à compter de 2013 l’administration fiscale ait fait application des abattements prévus par les délibérations du 6 octobre 2010 est sans incidence sur l’issue du litige ;

11. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander la condamnation de l’Etat à réparer le préjudice dont ils se prévalent. Il y a lieu de rejeter leur requête, y compris les conclusions fondées sur l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE

Article 1er : La requête de M. et Mme X est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. et Mme Y X et au directeur départemental des finances publiques de Seine-et-Marne.

Fait à Melun, le 27 juillet 2015.

Le président de la 7e chambre,

XXX

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

S. Douchet

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