Rejet 21 février 2025
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Sur la décision
| Référence : | TA Melun, 4e ch., 21 févr. 2025, n° 2208155 |
|---|---|
| Juridiction : | Tribunal administratif de Melun |
| Numéro : | 2208155 |
| Type de recours : | Excès de pouvoir |
| Dispositif : | Rejet |
| Date de dernière mise à jour : | 30 mai 2025 |
Texte intégral
Vu les procédures suivantes :
I – Par une requête n° 2208155 enregistrée le 6 août 2022, M. C A, représenté par Me Flissi, demande au tribunal :
1°) de lui accorder l’aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d’annuler la décision implicite du 28 juin 2022 par laquelle le préfet de police de Paris a refusé de lui octroyer une protection temporaire en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour portant la mention « ne permet pas à son titulaire d’occuper un emploi » valable du 28 juin 2022 au 27 juillet 2022 ;
3°) d’enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « bénéficiaire de la protection temporaire » valable six mois et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l’État une somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
— le préfet de police de Paris n’a pas examiné sa situation individuelle ;
— il est en droit de bénéficier de la protection temporaire prévue à l’article R. 581-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dès lors qu’il en remplit toutes les conditions ;
— le préfet de police de Paris a commis une erreur manifeste d’appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police de Paris qui n’a pas produit de mémoire en défense.
La clôture de l’instruction est intervenue le 30 décembre 2024.
II – Par une requête n° 2208170 enregistrée le 6 août 2022, Mme B A, représentée par Me Flissi, demande au tribunal :
1°) de lui accorder l’aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d’annuler la décision implicite du 28 juin 2022 par laquelle le préfet de police de Paris a refusé de lui octroyer une protection temporaire en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour portant la mention « ne permet pas à son titulaire d’occuper un emploi » valable du 28 juin 2022 au 27 juillet 2022 ;
3°) d’enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer un titre de séjour portant la mention « bénéficiaire de la protection temporaire » valable six mois et ce, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l’État une somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
— le préfet de police de Paris n’a pas examiné sa situation individuelle ;
— elle est en droit de bénéficier de la protection temporaire prévue à l’article R. 581-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dès lors qu’elle en remplit toutes les conditions ;
— le préfet de police de Paris a commis une erreur manifeste d’appréciation.
La requête a été communiquée au préfet de police de Paris qui n’a pas produit de mémoire en défense.
La clôture de l’instruction est intervenue le 30 décembre 2024.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
— la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 ;
— la décision d’exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 ;
— le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
— la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
— l’instruction interministérielle NOR/ INTV2208085J en date du 10 mars 2022 relative à la mise en œuvre de la décision du Conseil de l’Union Européenne du 4 mars 2022 prise en application de l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 ;
— le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l’audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Le rapport de Mme Senichault de Izaguirre a été entendu au cours de l’audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C A et Mme B A, ressortissants chinois, sont des résidents permanents en Ukraine depuis 2010. Après avoir dû quitter ce pays le 2 mars 2022 en raison de la guerre, ils sont entrés en France le 3 juin 2022 et se sont vus remettre le 28 juin 2022, par le préfet de police de Paris, deux autorisations provisoires de séjour valables jusqu’au 27 juillet 2022, ne les autorisant pas à travailler. Par les requêtes n° 2208155 et 2208170, ils demandent l’annulation de ces décisions en estimant qu’elles révélaient un refus opposé à la délivrance d’une autorisation provisoire de six mois portant la mention « bénéficiaire de la protection temporaire ».
2. Les requêtes n° 2208155 et n° 2208170 sont identiques et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement.
Sur l’admission à l’aide juridictionnelle provisoire :
3. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique : « Dans les cas d’urgence (), l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ». Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer l’admission provisoire de M. et Mme A au bénéfice de l’aide juridictionnelle.
Sur les conclusions aux fins d’annulation :
4. Aux termes de l’article 2 de la décision d’exécution (UE) 2022/382 du Conseil du 4 mars 2022 constatant l’existence d’un afflux massif de personnes déplacées en provenance d’Ukraine, au sens de l’article 5 de la directive 2001/55/CE, et ayant pour effet d’introduire une protection temporaire : " Personnes auxquelles s’applique la protection temporaire – 1. La présente décision s’applique aux catégories suivantes de personnes déplacées d’Ukraine le 24 février 2022 ou après cette date, à la suite de l’invasion militaire par les forces armées russes qui a commencé à cette date : a) les ressortissants ukrainiens résidant en Ukraine avant le 24 février 2022 ; b) les apatrides, et les ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui ont bénéficié d’une protection internationale ou d’une protection nationale équivalente en Ukraine avant le 24 février 2022 ; et, c) les membres de la famille des personnes visées aux points a) et b) – 2. Les États membres appliquent la présente décision ou une protection adéquate en vertu de leur droit national à l’égard des apatrides, et des ressortissants de pays tiers autres que l’Ukraine, qui peuvent établir qu’ils étaient en séjour régulier en Ukraine avant le 24 février 2022 sur la base d’un titre de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien, et qui ne sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou leur région d’origine dans des conditions sûres et durables () ".
5. Pour l’application de cet article, l’instruction interministérielle du 10 mars 2022, régulièrement publiée, précise que " la protection temporaire est accordée aux catégories de personnes suivantes : 1° Les ressortissants ukrainiens qui résidaient en Ukraine avant le 24 février 2022. Cette catégorie comprend : Les ressortissants ukrainiens déplacés d’Ukraine à partir du 24 février 2022 ; Les ressortissants ukrainiens présents à cette date sur le territoire d’un État membre de l’Union européenne ou d’un État associé sous couvert d’une dispense de visa ou d’un visa Schengen, et établissant que leur résidence permanente à cette date se trouvait en Ukraine. / 2° Les ressortissants de pays tiers ou apatrides qui bénéficient d’une protection internationale ou d’une protection nationale équivalente en Ukraine avant le 24 février 2022. / 3° Les ressortissants de pays tiers ou apatrides qui établissent qu’ils résidaient régulièrement en Ukraine sur la base d’un titre de séjour permanent en cours de validité délivré conformément au droit ukrainien et qui ne sont pas en mesure de rentrer dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables. Pour l’application de ces dispositions, vous convoquerez l’intéressé à un entretien au cours duquel vous procèderez à l’examen de sa situation individuelle. / 4° Les membres de famille des personnes mentionnées aux 1°,2° et 3° et eux-mêmes déplacés d’Ukraine à partir du 24 février, sans qu’y fasse obstacle la circonstance qu’ils pourraient retourner dans leur pays ou région d’origine dans des conditions sûres et durables () « . La même instruction précise dans son II (Droits attachés à la protection temporaire) : » b. Droit au séjour : Les bénéficiaires de la protection temporaire se voient remettre une autorisation provisoire de séjour d’une durée de 6 mois portant la mention « bénéficiaire de la protection temporaire » et que ces personnes bénéficient également d’un accueil et d’un hébergement, d’une allocation pour demandeur d’asile, de l’accès aux soins médicaux et aux aides personnalisées au logement, à la scolarisation, à un accompagnement social et à un accès au travail.
6. Aux termes de l’article L. 581-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « L’entrée et le séjour en France des étrangers appartenant à un groupe spécifique de personnes bénéficiaires de la protection temporaire instituée en application de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l’octroi d’une protection temporaire en cas d’afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil sont régis par les dispositions du présent chapitre ». Selon l’article L. 581-2 du même code : « Le bénéfice du régime de la protection temporaire est ouvert aux étrangers selon les modalités déterminées par la décision du Conseil de l’Union européenne mentionnée à l’article 5 de la directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, définissant les groupes spécifiques de personnes auxquelles s’applique la protection temporaire, fixant la date à laquelle la protection temporaire entrera en vigueur et contenant notamment les informations communiquées par les États membres de l’Union européenne concernant leurs capacités d’accueil ».
7. Il résulte de ces dispositions que, pour bénéficier de la protection temporaire, les ressortissants d’un pays tiers à l’Ukraine doivent répondre à deux conditions cumulatives qui sont celles de disposer d’un titre de séjour permanent sur le territoire ukrainien et d’être dans l’impossibilité de pouvoir rentrer dans leur pays d’origine dans des conditions sûres et durables. Il ressort des pièces du dossier que les requérants disposent d’un titre de séjour permanent sur le territoire ukrainien délivré, pour Mme A, le 2 décembre 2021 et valable jusqu’au 1er décembre 2031 et délivré pour M. A, le 13 août 2021 et valable jusqu’au 12 août 2031. Dans ces conditions, les requérants établissent qu’ils résidaient régulièrement Ukraine avant le 24 février 2022. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants ne seraient pas en mesure de rentrer dans leur pays d’origine, la Chine, dans des conditions sûres et durables. Par suite, les moyens tirés du défaut d’examen de leur situation individuelle, de l’erreur de droit et de l’erreur manifeste d’appréciation doivent être écartés.
8. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions tendant à l’annulation des décisions du 28 juin 2022 par lesquelles le préfet de police de Paris a refusé d’octroyer à M. et Mme A une protection temporaire en leur délivrant une autorisation provisoire de séjour portant la mention « ne permet pas à son titulaire d’occuper un emploi » valable du 28 juin 2022 au 27 juillet 2022 doivent être rejetées. Il en va de même pour les conclusions à fin d’injonction, d’astreinte ainsi que celles relatives aux frais d’instance.
D E C I D E :
Article 1er : M. et Mme A sont admis, à titre provisoire, au bénéfice de l’aide juridictionnelle.
Article 2 : Les requêtes n° 2208155 et n° 2208170 sont rejetées pour le surplus.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à M. C A, à Mme B A et au préfet de police de Paris.
Délibéré après l’audience du 31 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Mullié, présidente,
Mme Senichault de Izaguirre, conseillère,
Mme Dutour, conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2025.
La rapporteure,
J. SENICHAULT DE IZAGUIRRELa présidente,
N. MULLIE
La greffière,
V. GUILLEMARD
La République mande et ordonne au préfet de police de Paris en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière
Nos 2208155
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Textes cités dans la décision
- Directive 2001/55/CE du 20 juillet 2001 relative à des normes minimales pour l'octroi d'une protection temporaire en cas d'afflux massif de personnes déplacées et à des mesures tendant à assurer un équilibre entre les efforts consentis par les États membres pour accueillir ces personnes et supporter les conséquences de cet accueil
- Loi n° 91-647 du 10 juillet 1991
- Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
- Code de justice administrative
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