Rejet 11 octobre 2024
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Sur la décision
| Référence : | TA Montreuil, 11 oct. 2024, n° 2413857 |
|---|---|
| Juridiction : | Tribunal administratif de Montreuil |
| Numéro : | 2413857 |
| Type de recours : | Excès de pouvoir |
| Dispositif : | Satisfaction partielle |
| Date de dernière mise à jour : | 30 mai 2025 |
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 30 septembre 2024, Mme A B représentée par Me Lansard, demande au juge des référés, statuant par application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) de l’admettre à titre provisoire au bénéfice de l’aide juridictionnelle
2°) d’enjoindre au département de la Seine-Saint-Denis de la prendre en charge dans le cadre du dispositif d’hébergement d’urgence et à l’attribution de l’ensemble des prestations relevant des articles L. 222-2, L. 222-3, L. 222-5, L. 345-2-2 et L. 345-2-3 du code de l’action sociale et des familles, dans un délai de 12 heures, à compter de la notification de l’ordonnance à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l’État à verser la somme de 1 500 euros à Me Lansard au titre des frais irrépétibles engagés pour l’instance en application de l’article L.761-1 du code de justice administrative sous réserve qu’elle renonce au bénéfice de l’aide juridictionnelle en application des dispositions de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridictionnelle, et si la demande d’aide juridictionnelle devait être rejetée, de verser la somme de 1 500 euros directement à elle-même.
Elle soutient que :
— la condition d’urgence est remplie dès lors qu’elle est mère isolée de quatre enfants, que ses nombreuses relances auprès du 115 sont restées infructueuses, que ses demandes formulées auprès du SIAO sont demeurées vaines, qu’elle vit à la rue avec ses quatre enfants dont trois sont mineurs depuis le mois d’août 2024, que sa fille est atteinte de drépanocytose, pathologie chronique qui a justifié l’octroi d’autorisations provisoires de séjour pour elle ;
— la carence de l’administration une atteinte manifestement grave et illégale à son droit à l’hébergement d’urgence, à son droit à mener une vie privée et familiale normale, aux droits de ses enfants et particulièrement leur droit aux soins.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2024, le président du conseil départemental conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les deux conditions prévues par l’article L. 521-2 du code justice administrative ne sont pas remplies dès lors que l’hébergement d’urgence de la requérante relève de la compétence de l’État et non de celle du département de la Seine-Saint-Denis.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n’a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
— la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales ;
— la convention internationale de New York relative aux droits de l’enfant
— le code de l’action sociale et des familles ;
— le code de justice administrative.
La présidente du tribunal a désigné M. Tukov, vice-président, pour statuer sur les demandes de référé.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique du 2 octobre 2024 à 15h30, en présence de Mme Célia Le Ber, greffière d’audience :
— le rapport de M. Tukov, juge des référés ;
— les observations de Me Lansard, représentant Mme B ;
La clôture de l’instruction a été prononcée à l’issue de l’audience.
Considérant ce qui suit :
Sur l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle provisoire :
1. Aux termes de l’article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : « Dans les cas d’urgence, () l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d’aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ». Eu égard aux circonstances de l’espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l’admission provisoire de Mme B au bénéfice de l’aide juridictionnelle.
Sur la demande présentée sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :
2. Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures. ».
3. Il appartient au requérant, qui saisit le juge des référés sur le fondement des dispositions de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, de justifier de circonstances particulières caractérisant une situation d’urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par l’article L. 521-2 soient remplies, qu’une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures.
4. Il appartient aux autorités de l’Etat, sur le fondement des articles L. 345-2, L. 345-22, L. 345-2-3 et L. 121-7 du code de l’action sociale et des familles, de mettre en œuvre le droit à l’hébergement d’urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique ou sociale, à l’exception des femmes enceintes et des mères isolées avec leurs enfants de moins trois ans, dont la prise en charge incombe au département au titre de l’aide sociale à l’enfance en vertu de l’article L. 222-5 du même code. Ces dernières dispositions, qui ont pour objet la protection des enfants et de leurs familles, qui n’excluent pas que les aides doivent permettre la prise en charge de frais de logement, n’attribuent toutefois pas au département la charge de pourvoir au logement des familles. Une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette mission peut faire apparaître, pour l’application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée. Il incombe au juge des référés d’apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée.
4. Il résulte de l’instruction que Mme B est mère célibataire avec quatre enfants à charge dont trois mineurs, dont la benjamine est atteinte de drépanocytose, une maladie chronique qui a justifié l’octroi d’un titre de séjour à la requérante et qui nécessite un traitement médical lourd et un suivi en milieu hospitalier régulier et à long terme. En outre, depuis le mois d’août 2024, il est constant Mme B ainsi que ses quatre enfants vivent à la rue dans une situation de précarité extrême. Par suite, la condition d’urgence au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être regardée comme satisfaite.
En ce qui concerne l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale :
6. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5, l’absence de prise en charge actuelle, par l’Etat, de l’hébergement de Mme B, qui établit avoir essayé à de multiples reprises, en vain, depuis la fin du mois d’août 2024, de solliciter le 115, porte une atteinte grave et illégale à son droit à un hébergement d’urgence, et à celui de ses enfants, en application des articles précités du code de l’action sociale et des familles, eu égard à la situation de particulière vulnérabilité du foyer.
7. Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d’attribuer un hébergement d’urgence à Mme B et à ses enfants, dans les 48 heures suivant la notification de la présente ordonnance, sous astreinte de 50 (cinquante) euros par jour de retard.
Sur les conclusions présentées au titre des dispositions combinées de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Mme B étant provisoirement admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle, Me Lansard, son avocat, peut se prévaloir des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, sous réserve que Me Lansard renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l’Etat et sous réserve de l’admission définitive de son client à l’aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l’Etat le versement à Me Lansard de la somme de 1 100 euros. Dans le cas où l’aide juridictionnelle ne serait pas accordée à Mme B par le bureau d’aide juridictionnelle, la somme de 1 100 euros sera versée à Mme B.
O R D O N N E :
Article 1er : Mme B est admise à titre provisoire au bénéfice de l’aide juridictionnelle.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis d’attribuer un hébergement d’urgence à Mme B et à ses enfants, dans un délai de 48 heures à compter de la notification de la présente ordonnance sous astreinte de 50 (cinquante) euros par jour de retard.
Article 3 : L’Etat versera la somme de 1 100 euros dans les conditions mentionnées au point 8.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présente ordonnance sera notifiée à Mme B, au département de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l’intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis
Fait à Montreuil, le 11 octobre 2024.
Le juge des référés,
C. Tukov
La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
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