Tribunal administratif de Nantes, 12 avril 2017, n° 1603913, 1606338

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SW Avocats · 2 mai 2021

Deux ordonnances de référé rendues récemment par des tribunaux administratifs ont fourni une nouvelle illustration de la réticence du juge à reconnaître aux autorités municipales la possibilité de règlementer ou d'interdire l'implantation des compteurs Linky. Pour mémoire, les tribunaux administratifs ont, sur cette question, une position constante consistant à censurer, au fond comme en référé, les arrêtés ou délibérations des autorités communales interdisant l'implantation sur leur territoire ces compteurs, en se fondant dans l'essentiel des hypothèses sur l'incompétence des communes à …

 

SW Avocats · 2 octobre 2018

Deux ordonnances de référé rendues récemment par des tribunaux administratifs ont fourni une nouvelle illustration de la réticence du juge à reconnaître aux autorités municipales la possibilité de règlementer ou d'interdire l'implantation des compteurs Linky. Pour mémoire, les tribunaux administratifs ont, sur cette question, une position constante consistant à censurer, au fond comme en référé, les arrêtés ou délibérations des autorités communales interdisant l'implantation sur leur territoire ces compteurs, en se fondant dans l'essentiel des hypothèses sur l'incompétence des communes à …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Nantes, 12 avr. 2017, n° 1603913, 1606338
Juridiction : Tribunal administratif de Nantes
Numéro : 1603913, 1606338

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE NANTES

N° 1603913, 1606338

Préfet de la Loire-Atlantique

M. Dussuet Président-Rapporteur

Mme Rosemberg Rapporteur public

Audience du 29 mars 2017 Lecture du 12 avril 2017 C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Nantes,

(2e chambre),

Vu la procédure suivante :

I. Par un déféré enregistré, sous le n° 1603913, le 12 mai 2016, et un mémoire enregistré le 27 juillet 2016, le préfet de la Loire-Atlantique demande au Tribunal :

— d’annuler les délibérations des 10 février et 23 mars 2016 par lesquelles le conseil municipal de la commune de Villepôt a décidé de refuser le remplacement des compteurs électriques existants par des compteurs communicants « Linky » ;

— de mettre à la charge de la commune de Villepôt la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le préfet soutient que :

— le conseil municipal n’était pas compétent pour prendre les délibérations dès lors d’une part que seul le maire est détenteur du pouvoir de police municipale et d’autre part que la commune n’est plus l’autorité organisatrice de la distribution d’électricité et n’est pas propriétaire des compteurs ;

— la mise en œuvre de dispositifs de comptage intelligents est prévue par la loi du 17 août 2015 ; ERDF a l’obligation légale de déployer ses compteurs Linky conformément aux articles L. 341-4 du code de l’énergie ;

— les délibérations sont entachées d’une erreur d’appréciation dans la mise en œuvre du « principe de précaution » ; aucun élément n’établit un risque pour la santé publique et la vie privée ;

— la délibération du 8 juin 2016 est entachée de détournement de pouvoir dès lors que la commune a immédiatement interdit de nouveau le déploiement des compteurs Linky ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2016, présenté par la commune de Villepôt qui conclut au non lieu à statuer sur les conclusions à fin d’annulation et au rejet du surplus des conclusions ;

La commune soutient que le 8 juin 2016, le conseil municipal a pris une nouvelle délibération retirant les délibérations attaquées ;

Vu les pièces du dossier ;

II. Par un déféré enregistré, sous le n° 1606338, le 27 juillet 2016, le préfet de la Loire-Atlantique demande au Tribunal :

— d’annuler les délibérations 2016-06-04 et 2016-06-05 du 8 juin 2016 par lesquelles le conseil municipal de la commune de Villepôt a retiré sa délibération antérieure et a décidé d’interdire le déploiement des compteurs communicants « Linky » sur le territoire de la commune ;

— de mettre à la charge de la commune de Villepôt la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le préfet soutient que :

— la délibération est entachée d’un détournement de pouvoir ; l’administration ne saurait reprendre une même décision sans remédier au vice retenu par le juge des référés pour prononcer la suspension de la décision antérieure ;

— la délibération du 8 juin 2016 est par suite un acte inexistant ;

— le conseil municipal n’était pas compétent pour prendre la délibération dès lors d’une part que seul le maire est détenteur du pouvoir de police municipale et d’autre part que la commune n’est plus l’autorité organisatrice de la distribution d’électricité et n’est pas propriétaire des compteurs ;

— la mise en œuvre de dispositifs de comptage intelligents est prévue par la loi du 17 août 2015 ; ERDF a l’obligation légale de déployer ses compteurs Linky conformément aux articles L. 341-4 du code de l’énergie ;

— les délibérations sont entachées d’une erreur d’appréciation dans la mise en œuvre du « principe de précaution » ; aucun élément n’établit un risque pour la santé publique et la vie privée ;

Vu les mémoires, enregistrés les 20 janvier et 21 mars 2017, présentés par la commune de Villepôt qui conclut au non lieu à statuer sur les conclusions à fin d’annulation et au rejet du surplus des conclusions ;

La commune soutient que le 8 juin 2016, le conseil municipal a pris une nouvelle délibération retirant les délibérations attaquées ;

Vu l’intervention de la société Enedis, enregistrée le 18 octobre 2016 qui conclut aux mêmes fin que la requête et demande au tribunal de mettre à la charge de la commune de Villepôt la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Enedis soutient que :

— le conseil municipal était incompétent pour prendre la délibération attaquée ;

— la délibération est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application du principe de précaution ;

Vu :

— le code général des collectivités territoriales ;

— le code de l’environnement ;

— le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. Dussuet, président rapporteur,

— les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteur public,

— les observations de Mme X, chef du service juridique régional pour la préfecture de Loire-Atlantique et les observations de Me Paitier, avocat de la société Enedis.

1. Considérant que par délibération du 10 février 2016, le conseil municipal de la commune de Villepôt a décidé de « refuser le remplacement des compteurs électriques existants par des compteurs communicants Linky » ; que le préfet de la Loire-Atlantique ayant saisi la commune, dans le cadre du contrôle de légalité, d’une demande de retrait de cette délibération, le conseil municipal de Villepôt a décidé, par délibération du 23 mars 2016 de « maintenir sa décision de refuser le remplacement des compteurs électriques existants par des compteurs communicants Linky » ;

2. Considérant, qu’à la suite d’un déféré suspension, le juge des référés du Tribunal a prononcé, par ordonnance n° 1603910 du 1er juin 2016, la suspension des délibérations des 10 février et 23 mars 2016 en se fondant sur la circonstance que les moyens tirés de l’incompétence du conseil municipal pour délibérer sur les actes litigieux et de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application du principe de précaution étaient, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de ces actes ; que, toutefois, par deux délibérations concomitantes du 8 juin 2016, le conseil municipal de Villepôt a décidé d’une part de retirer les délibérations des 10 février et 23 mars 2016 et d’autre part « d’interdire le déploiement des compteurs communicants Linky sur la commune de Villepôt» ;

3. Considérant qu’à la suite d’un déféré suspension, le juge des référés du Tribunal a prononcé, par ordonnance n° 1606320 du 10 août 2016, la suspension de la délibération du 8 juin 2016 en se fondant sur la circonstance que les moyens tirés de l’incompétence du conseil municipal pour délibérer sur les actes litigieux, de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application du principe de précaution et de la méconnaissance de l’autorité qui s’attache à l’ordonnance précitée du 1er juin 2016 étaient, en l’état de l’instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de cet acte ; que, toutefois, par deux délibérations concomitantes du 14 septembre 2016, le conseil municipal de Villepôt a décidé d’une part de retirer la délibération du 8 juin 2016 et d’autre part « de donner instruction à SYDELA de s’opposer au remplacement des compteurs électriques déployés sur la commune de Villepôt par des compteurs communicants de type Linky » ;

4. Considérant que, par ses deux déférés le préfet de la Loire-Atlantique doit être regardé comme demandant l’annulation de la délibération du 14 septembre 2016 qui s’est substituée aux délibérations des 10 février, 23 mars et 8 juin 2016 ;

Sur la jonction :

5. Considérant que les déférés du préfet de la Loire-Atlantique n° 1603913 et n° 1606338, présentent à juger des questions semblables et ont fait l’objet d’une instruction commune ; qu’il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

Sur l’intervention de la société Enedis :

6. Considérant que la société Enedis qui est en charge du déploiement des compteurs Linky et se voit à ce titre fixer des objectifs justifie d’un intérêt suffisant pour intervenir ; qu’il y a lieu d’admettre son intervention ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

7. Considérant, en premier lieu, d’une part qu’il ressort des pièces du dossier qu’antérieurement à la délibération attaquée, la commune de Villepôt a consenti à un transfert de sa compétence d’autorité organisatrice des missions de service public afférentes au développement et à l’exploitation des réseaux publics de distribution d’électricité ainsi qu’à la fourniture d’électricité au Syndicat Départemental d’énergie de la Loire-Atlantique (SYDELA) ; d’autre part que la délibération qui se fonde sur le principe de précaution fait usage des pouvoirs de police municipale qui sont de la compétence exclusive du maire de la commune en application des dispositions de l’article L. 2212-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le préfet de la Loire-Atlantique est fondé à soutenir que la délibération attaquée du 14 septembre 2016 a été prise par une autorité incompétente pour ce faire ;

8. Considérant, en second lieu, que la délibération attaquée se fonde sur le principe de « prévention tel que prévu par les dispositions du code de l’environnement » dès lors que des pannes et incendies auraient été causés par les compteurs Linky ; que, toutefois, la commune de Villepôt ne produit aucun élément ni aucune pièce de nature à établir la réalité de ces pannes et incendies, de leur nombre et de leurs liens avec l’installation des compteurs Linky ; qu’enfin, si par un mémoire enregistré le 21 mars 2017, la commune fait valoir, pour la première fois, que les compteurs Linky exposeraient les usagers à un « véritable bains d’ondes électromagnétiques » et une intrusion dans leur vie privée, elle ne demande aucune substitution de ces motifs, au demeurant non établis, au motif ayant initialement fondé sa délibération ; que, dans ces conditions, le préfet de la Loire-Atlantique est fondé à soutenir que la délibération attaquée du 14 septembre 2016 est entachée d’une erreur manifeste d’appréciation dans la mise en œuvre du principe de précaution ;

9. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que le préfet de la Loire-Atlantique est fondé à demander l’annulation de la délibération du 14 septembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Villepôt a donné instruction à SYDELA de s’opposer au remplacement des compteurs électriques déployés sur la commune de Villepôt par des compteurs communicants de type Linky ;

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Villepôt le versement à l’Etat de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

11. Considérant, par ailleurs, que la société Enedis, intervenante volontaire, ne peut être regardée comme une partie pour l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions présentées à ce titre par la société Enedis ne peuvent qu’être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : L’intervention de la société Enedis est admise ;

Article 2 : La délibération du 14 septembre 2016 par laquelle le conseil municipal de Villepôt a donné instruction à SYDELA de s’opposer au remplacement des compteurs électriques déployés sur la commune de Villepôt par des compteurs communicants de type Linky est annulée.

Article 3 : La commune de Villepôt versera à l’Etat la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4: Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la commune de Villepôt, à la société Enedis et au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l’audience du 29 mars 2017, à laquelle siégeaient : M. Dussuet, président, M. Dias, premier conseiller, M. Frank, premier conseiller,

Lu en audience publique le 12 avril 2017

Le président-rapporteur,

J-P. DUSSUET

L’assesseur le plus ancien dans l’ordre du tableau,

R. DIAS

Le greffier,

C. NEDELEC

La République mande et ordonne au préfet de la Loire-Atlantique en ce qui concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme, Le greffier,



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Tribunal administratif de Nantes, 12 avril 2017, n° 1603913, 1606338