Tribunal administratif de Nîmes, 3ème chambre, 17 février 2023, n° 2002509

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Rivière Avocats Associés · 6 avril 2023

Dans une décision du 17 février 2023, les magistrats du tribunal administratif de Nîmes rappellent implicitement que l'existence d'un garage sur une parcelle suffit à écarter la qualification de terrain à bâtir. Pour mémoire, la doctrine fiscale fait une distinction stricte entre la livraison d'un terrain à bâtir et la livraison d'un terrain bâti. Dès qu'un terrain comporte une construction, ne serait-ce qu'un garage, celui-ci doit être considéré comme un terrain bâti, exonérant sa cession de TVA. Cette décision intervient dans le sillage d'un arrêt du Conseil d'Etat d'octobre 2022, …

 
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Sur la décision

Référence :
TA Nîmes, 3e ch., 17 févr. 2023, n° 2002509
Juridiction : Tribunal administratif de Nîmes
Numéro : 2002509
Type de recours : Plein contentieux
Dispositif : Satisfaction partielle
Date de dernière mise à jour : 24 février 2023

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 24 août 2020 sous le n°2002509, complétée le 13 janvier 2023, la SARL La Bastide, représentée par Me Orbillot, demande au tribunal :

— de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2016 et 2017,

— de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

— concernant le bien dit de « Vedène », la taxe sur la valeur ajoutée a été régularisée ultérieurement ;

— concernant le bien dit de « Montfavet », un garage ainsi qu’un mur de clôture étaient édifiés sur le terrain en question ; il ne peut donc être considéré comme un terrain à bâtir ; par suite, la vente de celui-ci devait être exonérée de taxe sur la valeur ajoutée.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2021, le directeur départemental des finances publiques du Gard conclut au rejet de la requête

Il soutient que les moyens invoqués sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

— le code général des impôts (CGI) et le livre des procédures fiscales (LPF) ;

— le code de l’urbanisme ;

— le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

— le rapport de M. D C ;

— les conclusions de Mme Wendy Lellig, rapporteure publique ;

— et les observations de Me Coelho, substituant Me Orbillot, pour la SARL La Bastide.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL La Bastide exerce l’activité de marchand de biens immobiliers. Elle a fait l’objet d’une vérification générale de comptabilité concernant l’ensemble des déclarations fiscales portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016. La SARL La Bastide a également fait l’objet d’un contrôle sur pièces concernant la taxe sur la valeur ajoutée du 2ème trimestre 2017. Elle a sollicité le dégrèvement de la totalité des sommes mises à sa charge en matière de taxe sur la valeur ajoutée suite aux contrôles dont elle a fait l’objet. Par décision du 4 mars 2020, la 1ère brigade départementale de vérification du Vaucluse a rejeté la demande de la société. La SARL La Bastide demande la décharge en droits et pénalités des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 2016 et 2017.

Sur les conclusions tendant à la décharge :

En ce qui concerne le bien dit de « Vedène »

2. Aux termes de l’article 269 du CGI, dans sa version applicable à l’espèce : " Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l’acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; () ".

3. Il résulte de l’instruction que la SARL La Bastide a acquis une maison avec terrain à bâtir attenant en date du 1er février 2013. En date du 2 juin 2017, la société a vendu une partie du terrain à bâtir pour un prix de 106 000 euros. S’agissant d’un terrain à bâtir, l’acte indique que « le montant de la marge réalisée au titre de la présente cession est de 25 000 euros. Par conséquent la taxe sur la valeur ajoutée perçue sur la marge au taux de 20 % et calculée conformément aux dispositions de l’article 268 du CGI et du rescrit fiscal N°2010/21 du 10 avril 2010 est d’un montant de 5 000 euros ». Par conséquent, en application des dispositions précitées, cette taxe sur la valeur ajoutée était exigible à la date de l’acte et aurait dû être déclarée par la société au titre du 2ème trimestre 2017. La SARL n’ayant déclarée aucune taxe sur la valeur ajoutée collectée au titre du 2ème trimestre 2017 ni au cours des 3ème et 4ème trimestre 2017, c’est à bon droit que le service vérificateur a notifié un rappel de taxe sur la valeur ajoutée au titre du 2ème trimestre 2017 d’un montant de 5 000 euros. La circonstance que la SARL La Bastide a régularisé la taxe sur la valeur ajoutée due sur le 4ème trimestre 2018, soit après que le service ait notifié le rappel par proposition de rectification du 12 avril 2018, est sans influence sur le bien-fondé du rappel de taxe sur la valeur ajoutée effectué au titre du 2ème trimestre 2017. Le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne le bien dit de « Montfavet »

4. Le I de l’article 257 du code général des impôts, prévoit que les opérations concourant à la production ou à la livraison d’immeubles, lesquelles comprennent les livraisons à titre onéreux de terrains à bâtir, sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée. En vertu du 2 du b de l’article 266 du même code, l’assiette de la taxe est en principe constituée par le prix de cession.

5. L’article 392 de la directive du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée dispose toutefois que : « Les Etats membres peuvent prévoir que, pour les livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition, la base d’imposition est constituée par la différence entre le prix de vente et le prix d’achat ».

6. En application du point 5 de l’article 261 du code général des impôts, sont exonérés de TVA : " 1°) Les livraisons de terrains qui ne sont pas des terrains à bâtir au sens du 1° du 2 du I de l’article 257 ; 2°) Les livraisons d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans () « . Aux termes de l’article 268 du code général des impôts: » s’agissant de la livraison d’un terrain à bâtir, ou d’une opération mentionnée au 2° du 5 de l’article 261 pour laquelle a été formulée l’option prévue au 5° bis de l’article 260, si l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, la base d’imposition est constituée par la différence entre : 1° D’une part, le prix exprimé et les charges qui s’y ajoutent ; 2° D’autre part, selon le cas : a) soit les sommes que le cédant a versées, à quelque titre que ce soit, pour l’acquisition du terrain ou de l’immeuble ; b) soit la valeur nominale des actions ou parts reçues en contrepartie des apports en nature qu’il a effectués. Lorsque l’opération est réalisée par un fiduciaire, les sommes mentionnées aux a et b du 2° s’apprécient, le cas échéant, chez le constituant « . Aux termes de l’article 257-1-2-1° du code général des impôts : » sont considérés comme terrains à bâtir, les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d’un plan local d’urbanisme, d’un autre document d’urbanisme en tenant lieu, d’une carte communale ou de l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme ".

7. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti.

8. Selon la doctrine administrative référencée BOI-TVA-IMM-10-10-10-20 n°110, 29-09-2014, qui ne donne pas d’interprétation différente de celle issue des dispositions précitées : « Il ressort tant de l’articulation de la directive que du texte législatif national que les notions de terrain à bâtir et d’immeuble bâti sont exclusives l’une de l’autre. Ainsi peut seul constituer un terrain à bâtir un terrain qui ne comporte pas d’ores et déjà des » bâtiments « , au sens de » construction incorporée au sol " (cf. I-A § 10), qu’il s’agisse d’immeubles neufs ou d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans. "

9. Il résulte de l’instruction que la SARL La Bastide a acquis le 15 septembre 2016 auprès de particuliers une maison d’habitation comprenant deux appartements avec un terrain attenant situés 181 chemin des sœurs, section de Montfavet sur la commune d’Avignon. Bien que la parcelle ne soit pas encore l’objet d’une division, l’acte de vente précise que la vente a été conclue pour 200 000 euros, à concurrence de 70 000 euros pour le terrain et 130 000 euros pour la construction. Le 13 octobre 2016, la société a vendu à un particulier cette parcelle de terrain à bâtir pour 100 000 euros. L’acte notarié, signé par les parties et publié, précise qu’il s’agit de la vente d’un terrain à bâtir d’une surface de 442 m². Dans l’acte notarié, il est également précisé dans le paragraphe « déclarations fiscales » que ce terrain est classé en zone constructible depuis plus de 18 ans tel qu’il résulte des documents d’urbanisme et que le vendeur est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée. Dans cet acte, il est aussi fait mention d’un permis de construire N°PC840071600092 délivré par la mairie d’Avignon le 29 juillet 2016 pour la construction d’une maison individuelle. Une maison de 105 m² a été construite sur ce terrain avec une date d’achèvement des travaux au 1er juin 2017.

8. La SARL La Bastide soutient que le terrain vendu ne peut être regardé comme un terrain à bâtir car ce terrain serait clos de murets et supporterait une construction de 20 m². Elle produit à l’appui de ses affirmations une attestation de la gérante de la SARL Performance Immobilier, intermédiaire dans la vente du terrain au profit de M. B et Mme E, qui précise dans un document établi le 27 avril 2020, que « ce terrain était bien bâti d’un garage le jour de la vente le 13 octobre 2016, et que la SARL LA BASTIDE n’avait pas détruit cette construction existante », une attestation du 30 avril 2020 de M. A, géomètre-expert foncier, mandaté par la SARL La Bastide pour le détachement du terrain, qui certifie que « la propriété était bâtie d’un garage lors du relevé de terrain du 2 avril 2016. Ce garage figure à sa place sur le plan de division (réf. 1621/1a) du 16 septembre 2016. » et un procès-verbal de Me Debes, huissier de justice qui écrit le 11 mai 2020 que : « au fond de ce chemin privé, se trouve un portail noir donnant accès au lot A, propriété de Monsieur et Madame B. Au-dessus de ce portail, on aperçoit le garage qui était sur le terrain le jour de la vente est toujours existant. ». Ce document reprend en annexe un projet de division daté du 5 avril 2016 et, le plan de division réalisé, sur lesquels le garage apparait. La requérante produit également un rapport de mission de repérage des matériaux et produits contenant de l’amiante, ce qui laisse présumer de l’ancienneté de construction du garage-abri en litige, établi le 19 février 2016, mentionnant la présence d’un abri dont une photographie est jointe. Un acte notarié de vente rectificatif du 4 novembre 2020 précise que c’est par erreur que la désignation du bien dans l’acte de vente du 13 octobre 2016, ne mentionnait pas la présence d’une dépendance à usage de garage. La requérante produit enfin un plan issu de l’application « Google Earth Pro » d’août 2006, sur lequel on constate la présence du garage à l’exacte localisation de celui-ci sur le plan de division.

9. Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, la SARL La Bastide est fondée à soutenir que le terrain, sur lequel était édifiée une construction de plus de 5 ans, ne répondait pas à la définition de terrain à bâtir et que par conséquent, la vente de celui-ci devait bien être exonérée de taxe sur la valeur ajoutée. Elle est en droit d’obtenir la décharge correspondante.

10. Dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de mettre à la charge de l’Etat une somme au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La SARL La Bastide est déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de l’année 2016 à raison du bien dit de « Montfavet ».

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL La Bastide est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la SARL La Bastide et au directeur départemental des finances publiques du Gard.

Délibéré après l’audience du 3 février 2023, à laquelle siégeaient :

M. Peretti, président,

M. Parisien, premier conseiller,

Mme Bertrand, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2023.

Le rapporteur,

P. C

Le président,

P. PERETTI

Le greffier,

D. BERTHOD

La République mande et ordonne au ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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N°2002509



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