Tribunal administratif de Paris, 27 juin 2013, n° 1101484

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PARIS

N°1101484/5-1

___________

M. Z X

___________

M. Y

Rapporteur

___________

M. Martin-Genier

Rapporteur public

___________

Audience du 13 juin 2013

Lecture du 27 juin 2013

___________

36-05-04-04

C

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Paris

(5e Section – 1re Chambre)

Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2011, présentée pour M. Z X, demeurant XXX à Champigny-sur-Marne (94500), par Me Cassel ; M. X demande au tribunal :

1°) d’annuler la décision du 26 octobre 2010 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande de congé bonifié ;

2°) d’enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de statuer à nouveau sur sa demande de congé bonifié ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 000 euros au titre de l’article L 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu la décision attaquée ;

Vu l’arrêt n° 354426 du 27 mars 2013 par lequel le Conseil d’Etat a annulé, pour insuffisance de motivation, le jugement du 20 octobre 2011 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté la requête de M. X tendant à l’annulation de la décision du 26 octobre 2010 par laquelle le préfet de police a rejeté sa demande de congé bonifié et renvoyé l’affaire devant le tribunal administratif de Paris ;

……………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’Etat ;

Vu le décret n° 78-399 du 20 mars 1978 relatif, pour les départements d’outre-mer, à la prise en charge des frais de voyage de congés bonifiés accordés aux magistrats et fonctionnaires civils de l’Etat ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 13 juin 2013 :

— le rapport de M. Y ;

— les conclusions de M. Martin-Genier, rapporteur public ;

1. Considérant que, par une décision du 26 octobre 2010, le préfet de police a refusé à M. X, gardien de la paix, le bénéfice d’un congé bonifié ; que, par la présente requête, M. X demande l’annulation de cette décision ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du décret du 20 mars 1978 susvisé : « Les dispositions du présent décret s’appliquent aux magistrats et aux fonctionnaires relevant du statut général des fonctionnaires de l’Etat qui exercent leurs fonctions : (…) / b) Sur le territoire européen de la France si leur lieu de résidence habituelle est situé dans un département d’outre-mer » ; qu’aux termes de l’article 2 du même décret : « Pour l’application du présent décret, les départements de la Guadeloupe et de la Martinique sont considérés comme formant un même département d’outre-mer » ; qu’aux termes de l’article 3 du même décret : « Le lieu de résidence habituelle est le territoire européen de la France ou le département d’outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l’intéressé » ; qu’aux termes de l’article 4 de ce décret : « Les personnels mentionnés à l’article 1er peuvent bénéficier, dans les conditions déterminées par le présent décret, de la prise en charge par l’Etat des frais d’un voyage de congé, dit Congé bonifié (…) » ;

3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que, pour apprécier la localisation du centre des intérêts moraux et matériels d’un fonctionnaire, il peut être tenu compte de son lieu de naissance, du lieu où se trouvent sa résidence et celle des membres de sa famille, du lieu où le fonctionnaire est, soit propriétaire ou locataire de biens fonciers, soit titulaire de comptes bancaires, de comptes d’épargne ou de comptes postaux, ainsi que d’autres éléments d’appréciation parmi lesquels le lieu du domicile avant l’entrée dans la fonction publique de l’agent, celui où il a réalisé sa scolarité ou ses études, la volonté manifestée par l’agent à l’occasion de ses demandes de mutation et de ses affectations ou la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de son conjoint ou partenaire au sein d’un pacte civil de solidarité ;

4. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que M. X est né en 1979 en métropole, où il a résidé jusqu’en 1998 ; qu’il a résidé en Guadeloupe de 1998 à 2005 avant de s’installer de nouveau en métropole pour intégrer l’école de police ; que le préfet de police s’est fondé, pour rejeter la demande de M. X, sur la seule circonstance que l’intéressé, né dans le département des Hauts-de-Seine en 1979, a vécu en métropole jusqu’en 1998, puis a résidé en Guadeloupe de 1998 à février 2005, date de son recrutement dans le cadre de la police nationale ; que l’intéressé, âgé de 31 ans à la date de la décision attaquée, n’a ainsi vécu que 7 ans en Guadeloupe, contre 24 ans en métropole ; que, toutefois, il est constant que les parents de M. X résident en Guadeloupe et Martinique ; qu’il ressort des pièces du dossier que la mère de M. X s’est installée en Guadeloupe, d’où elle est originaire, en 1998, et que son père, pour sa part, résidait déjà en Martinique en 2001 ; qu’il n’est pas contesté que les parents de M. X, tous deux fonctionnaires, ont conservé aux Antilles, durant leurs années de résidence en métropole, le centre de leurs intérêts moraux et matériels ; que M. X, qui justifie avoir résidé en Guadeloupe de 1998 à 2005, y avoir ouvert un livret d’épargne populaire, y avoir exercé en tant que pompier volontaire et avoir tenté à cinq reprises de s’y faire recruter en tant qu’agent de la fonction publique territoriale, doit être regardé, quand bien même sa résidence habituelle se trouvait, jusqu’en 1998, en métropole, comme ayant, durant cette période, transféré le centre de ses intérêts moraux et matériels aux Antilles ; qu’il ressort, en outre, des pièces du dossier qu’à compter de son retour en métropole, M. X a effectué chaque année, de 2007 à 2010, un séjour annuel de trois à quatre semaines aux Antilles, qu’il a formulé une demande de mutation à caractère social en Guadeloupe en 2007 et qu’il a postulé, à deux reprises, pour un emploi d’agent municipal en Guadeloupe en 2007 et 2010 ; que, dans ces conditions, M. X ne peut être regardé comme ayant transféré en métropole le centre de ses intérêts moraux et matériels à la date de la décision attaquée ; que, par suite, le préfet de police, en estimant que le centre des intérêts moraux et matériels de M. X se trouvait en métropole à la date de la décision attaquée, a entaché sa décision d’une erreur d’appréciation ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à demander l’annulation de la décision attaquée ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

6. Considérant que le présent jugement, qui prononce l’annulation de la décision attaquée, implique nécessairement que le préfet de police procède au réexamen de la demande de M. X ; qu’il y a lieu, par suite, d’enjoindre au préfet de police de procéder à ce réexamen, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat, qui a la qualité de partie perdante, le versement à M. X d’une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 26 octobre 2010 par laquelle le préfet de police a rejeté la demande de congé bonifié présentée par M. X est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la demande de M. X dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent jugement.

Article 3 : L’Etat versera à M. X une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Z X et au ministre de l’intérieur. Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l’audience du 13 juin 2013, à laquelle siégeaient :

M. Heu, président,

M. Y, conseiller,

Mme Mauclair, conseiller,

Lu en audience publique le 27 juin 2013.

Le rapporteur, Le président,

L. Y C. HEU

Le greffier,

XXX

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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