Tribunal administratif de Versailles, 10 juin 2014, n° 1306800

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TA Versailles, 10 juin 2014, n° 1306800
Juridiction : Tribunal administratif de Versailles
Numéro : 1306800

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE VERSAILLES

N°1306800

___________

M. Z Y

___________

Mme Thalabard-Guillot

Rapporteur

___________

M. Cornevaux

Rapporteur public

___________

Audience du 27 mai 2014

Lecture du 10 juin 2014

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le tribunal administratif de Versailles,

(5e chambre)

335-01-03

Vu la requête, enregistrée le 15 novembre 2013, présentée pour M. Z Y, domicilié chez Mme X, XXX à XXX par Me Christophe Courage, avocat au barreau de l’Essonne ; M. Y demande au tribunal :

1°) d’annuler l’arrêté en date du 8 octobre 2013 par lequel le préfet de l’Essonne lui refuse la délivrance d’un titre de séjour, l’oblige à quitter le territoire français dans un délai d’un mois et fixe les pays de destination ;

2°) d’enjoindre au préfet de l’Essonne de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

3°) de mettre à la charge de l’État le paiement d’une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu’il est entré en France en 2006 et y réside depuis ; qu’il est marié depuis 2012 avec une ressortissante turque qui dispose d’une carte de résident ; que le préfet de l’Essonne ne pouvait se contenter de lui opposer que sa situation relevait de la procédure de regroupement familial et se devait d’examiner sa situation ; que sa vie familiale est en

France ; que l’arrêté préfectoral pris à son encontre est entaché d’erreur manifeste d’appréciation et méconnaît les stipulations de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu l’ordonnance en date du 10 janvier 2014 fixant la clôture de l’instruction au

10 février 2014, prise en application de l’article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 février 2014, par lequel le préfet de l’Essonne conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que la décision contestée est parfaitement motivée et respecte les stipulations des articles 3 et 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ; que la demande de M. Y tendant à la délivrance d’un titre sur le fondement des dispositions du 7° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile constitue un détournement de procédure aux fins d’échapper aux règles du regroupement familial qui sont plus contraignantes ; que cependant, dès lors que le requérant a épousé une compatriote, titulaire d’une carte de résident valable jusqu’au 11 décembre 2020, il pourra solliciter l’admission au séjour dans le cadre de la procédure de regroupement familial dès qu’il aura regagné son pays d’origine ; qu’il pourra également bénéficier d’autorisations temporaires de séjourner en France pendant l’instruction de sa demande ; que sa demande d’asile a été rejetée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides le 24 novembre 2009 et qu’en tout état de cause, il ne fait état d’aucun risque en cas de retour dans son pays d’origine ;

Vu l’ordonnance en date du 11 février 2014 rouvrant l’instruction et fixant la clôture de l’instruction au 6 mars 2014, prise en application des articles R. 613-1 et R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu les pièces, enregistrées les 25 avril et 29 avril 2014, présentées pour M. Y par Me Courage ;

Vu l’ordonnance en date du 30 avril 2014 rouvrant l’instruction et fixant la clôture de l’instruction trois jours francs avant l’audience, prise en application des articles R. 613-1 et R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu l’arrêté attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 27 mai 2014 :

— le rapport de Mme Thalabard-Guillot, rapporteur,

— les conclusions de M. Cornevaux, rapporteur public,

— et les observations orales de Me Courage, représentant M. Y ;

1. Considérant que M. Z Y, ressortissant turc né le XXX à Nurdagi, est entré en France, selon ses déclarations, le 2 avril 2006 ; que suite à sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a notifié une décision de refus le 24 novembre 2009, laquelle a été confirmée par un arrêt rendu le 9 juin 2010 par la Cour nationale du droit d’asile ; que le 27 mars 2013, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement du 7° de l’article L. 313-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ; qu’il demande l’annulation de l’arrêté en date du 8 octobre 2013 par lequel le préfet de l’Essonne lui refuse la délivrance d’un titre de séjour, l’oblige à quitter le territoire français dans un délai d’un mois et fixe les pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d’annulation :

2. Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales : « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance / Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui » ;

3. Considérant que M. Y soutient que sa vie familiale est établie en France où il réside depuis son arrivée en 2006 ; qu’il ressort des pièces du dossier qu’il est marié depuis le 2 juillet 2012 avec une compatriote titulaire d’une carte de résident avec laquelle il a eu une fille née le XXX ; que le requérant justifie de sa vie commune avec son épouse ; qu’il établit, en outre, que son épouse est gérante et associée à 50 % d’un établissement de restauration rapide dont le siège social est situé à Corbeil Essonnes et au sein duquel il est employé en tant que cuisinier ; que par suite, dans les circonstances particulières de l’espèce, l’arrêté attaqué porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; qu’il méconnaît ainsi les stipulations de l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que M. Y est fondé à demander l’annulation de la décision en date du 8 octobre 2013 par laquelle le préfet de l’Essonne a rejeté sa demande de titre de séjour et, par voie de conséquence, de celle lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d’injonction :

5. Considérant qu’eu égard au motif d’annulation, le présent jugement implique nécessairement que le préfet de l’Essonne délivre à M. Y une carte de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ; que, par suite, il y a lieu d’enjoindre au préfet de l’Essonne d’y procéder dans un délai deux mois à compter de la notification du présent jugement ;

Sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. Y et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L’arrêté du préfet de l’Essonne du 8 octobre 2013 pris à l’encontre de

M. Z Y est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l’Essonne de délivrer à M. Z Y, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement, une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale ».

Article 3 : L’Etat versera à M. Z Y la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Z Y et au préfet de l’Essonne.

Délibéré après l’audience du 27 mai 2014, à laquelle siégeaient :

Mme Ledamoisel, président,

Mme Thalabard-Guillot, premier conseiller,

Mme Lehman, conseiller.

Lu en audience publique le 10 juin 2014.

Le rapporteur, Le président,

M. Thalabard-Guillot C. Ledamoisel

Le greffier,

N. Magen

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.

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